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FeO-Cr 2 O 3 -MgO-V 2 O 3

Fe 2 O 3 /TiO 2MARBRE

V- 6-1.2 Discussion des résultats

1.2-1 Les saphirs

(i) Vatomandry: La majorité des valeurs de δ18O des saphirs de Vatomandry (3,3 < δ18O < 4,7‰; δ18O moyen = 4,1 ± 0,4‰, n= 9) s'intègre dans l'intervalle de valeurs isotopiques défini par les saphirs mondiaux en environnement basaltique (3,0 < δ18O < 8,2‰, δ18O moyen = 5,8 ± 1,2‰; n = 150; Giuliani et al., 2007a, b; Yui et al., 2003; 2006).

Chapitre V: Gemmologie, minéralogie et isotopes des corindons de Madagascar

Tableau V-16: Composition isotopique de l'oxygène (en pour mille, par rapport au SMOW) des rubis et saphirs des régions basaltiques du Nord, Centre et Est de Madagascar. La précision analytique sur les δ18O des corindons est de 0,1‰.

2 3 4 5 6 7 8 9 10

δ

18

O corindon (‰, SMOW)

Ambondromifehy Nosy Bê

skarn dans des calc-silicates et marbre plumasite dans roches mafiques

Ty

pes de corindon

gneiss mafique cordiéritite

roches mafiques

schistes à biotite dans gneiss

Ambatomainty Antsabotraka Soamiakatra Mandrosohasina Kianjanakanga NORD CENTRE EST syénite

Corindons dans les

pl

acers basalt

iques

Ambodirina Ambalatakatra Ambotitavolo 1 0 Tetezapao Antanifotsy placers basaltiques 2 3 4 5 6 7 8 9 10

δ

18

O corindon (‰, SMOW)

Ambondromifehy Nosy Bê

skarn dans des calc-silicates et marbre plumasite dans roches mafiques

Ty

pes de corindon

gneiss mafique cordiéritite

roches mafiques

schistes à biotite dans gneiss

Ambatomainty Antsabotraka Soamiakatra Mandrosohasina Kianjanakanga NORD CENTRE EST syénite syénite

Corindons dans les

pl

acers basalt

iques

Ambodirina Ambalatakatra Ambotitavolo 1 0 Tetezapao Antanifotsy placers basaltiques

Figure V-35: Composition isotopique de l'oxygène des saphirs et rubis des placers et gisements primaires des régions basaltiques du Nord, Centre et Est de Madagascar.

L'origine de ces xénocristaux est discutée à partir des intervalles de valeurs isotopiques définis pour les différents types de saphirs associés aux gisements primaires dans les environnements magmatique et métamorphique, la nature de leurs inclusions solides et de leur composition chimique (Giuliani et al., 2005, 2007a, b). L'intervalle des valeurs de δ18O des saphirs de Vatomandry se superpose en partie à l'intervalle défini pour les saphirs associés aux syénites (4,4 < δ18O < 8,3‰, avec un δ18O moyen = 6,8 ± 1,4‰, n = 25; Giuliani et al.,

2007), à celui des saphirs métasomatiques associés aux plumasites (4,2 < δ18O < 7,5‰, avec un δ18O moyen = 5,7 ± 0,95‰; n= 16) et à celui des saphirs contenus dans des schistes à biotite formés par la métasomatose de gneiss en domaine granulitique (4,6 < δ18O < 9,0‰; n= 11, Figure V-35, Chapitre V).

Chapitre V: Gemmologie, minéralogie et isotopes des corindons de Madagascar

Dans le diagramme chimique Fe2O3/TiO2 en fonction de Cr2O3/Ga2O3 (Figure V-31), les saphirs de Vatomandry se situent dans le domaine magmatique défini par Sutherland et al.

(1998; 2003). Le domaine chimique de ces saphirs se superpose également au domaine des

plumasites du Transvaal en Afrique du Sud. Par ailleurs, la présence d'inclusions solides de minéraux appartenant au groupe de la ferrocolombite, de la bétafite, du pyrochlore et du rutile à niobium dans les saphirs de Vatomandry sont différents arguments qui indiquent une origine magmatique (de type syénitique) c'est-à-dire des environnements riches en éléments incompatibles et volatiles rencontrés dans les magmas alcalins (Upton et al., 1999).

La présence de minéraux à niobium est fréquemment signalée dans les syénites et les syénites à néphéline (Simonet, 2000; Monchoux et al., 2006), mais ces paragenèses sont absentes dans les suites métamorphiques et les plumasites (Graham et al., 2009). Ainsi, une origine magmatique (probablement syénitique) est préférée à une origine métasomatique pour les saphirs de Vatomandry.

La valeur de δ18O à 9,5‰ du saphir incolore d'Ambodirina indique une source métamorphique de type skarn formé par la métasomatose développée sur des roches calco-silicatées ou des marbres (Figure V-35). Une origine métamorphique a déjà été proposée pour des saphirs provenant de placers basaltiques du Massif Central Français (Giuliani et al.,

2009b), notamment ceux de Chomelix (δ18O= 8,6 ± 0.3‰, n= 3), du Mont Coupet (δ18O= 8,7 and 10,25‰), et le Bras (δ18O = 13,9‰), et ainsi que certains saphirs incolores ou de couleur pastel provenant des gisements basaltiques australiens de Barrington (Giuliani et al., 2005;

Zhaw et al., 2006).

(ii) Antsirabe: Les saphirs de la région de Antsirabe présentent deux intervalles de valeurs de δ18O: (a) 6,5 < δ18O < 6,9‰ pour les saphirs du gisement d'Antanafotsy; (b) 2,7 < δ18O < 4,5‰ pour les saphirs d'Ambatomainty, de Mandrosohasina et de Kianjanakanga.

(a) Les valeurs de δ18O comprises entre 6,5 et 6,9‰ s'intègrent dans les domaines isotopiques définis pour les saphirs associés aux syénites, plumasites et schistes à biotite. Le domaine de la composition chimique des saphirs de la région de Antsirabe se superpose au domaine magmatique défini dans le diagramme Fe2O3/TiO2 en fonction de Cr2O3/Ga2O3

(Figure V-31) par Sutherland et al. (1998; 2003). Ainsi, l'origine des schistes à biotite d'origine métamorphique peut-être écartée pour ces saphirs.

(b) Les valeurs de δ18O des saphirs des gisements de Mandrosohasina et de Kianjanakanga (2,7 < δ18O < 3,9‰, n=5) se superposent parfaitement à l'intervalle de valeurs de δ18O des saphirs de la région de Vatomandry (3,3 < δ18O < 4,7‰, n= 9). Les origines possibles de ces saphirs sont identiques à celles proposées précédemment pour les saphirs de Vatomandry.

Le domaine de la composition chimique des saphirs de la région de Antsirabe se superpose au domaine magmatique (Figure V-31) défini par Sutherland et al. (1998; 2003). Il s'insère dans les domaines de composition chimique représentatifs des saphirs des syénites des Pyrénées et des plumasites d'Afrique du Sud. Par contre, la présence de micro-xénolithes d'anorthoclasite à saphir et d'inclusions de minéraux à niobium dans les saphirs de Kianjanakanga (Figure V-28), indiquent qu'une partie de ces saphirs ont cristallisé à partir d'un magma felsique riche en

éléments incompatibles et volatiles. Des enclaves d'anorthoclasites à saphir ont également été décrites dans le trachyte de Menet au Puy de Menoyre dans le Massif Central Français (Brousse et Varet, 1966). Les xénolithes d'anorthoclase ont un diamètre qui varie de quelques centimètres à 30 centimètres et les saphirs bleus (quelques millimètres à 1cm de long) sont disséminés dans une matrice feldspathique avec de la biotite et de la maghémite. Les valeurs de δ18O des saphirs de Menet sont comprises entre 4,4 et 4,5‰ (Giuliani et al., 2009b) et elles sont comparables à celles mesurées pour les saphirs de Kianjanakanaga (Tableau V-16). Par ailleurs, elles s'insèrent dans l'intervalle de valeurs défini pour les saphirs des syénites (4,4 < δ18O < 8,3‰, Figure V-35). Il apparaît qu'une source syénitique est identifiée pour les saphirs de Mandrosohasina mais une origine métasomatique de type plumasite ne peut être totalement écartée.

(iii) Ambondromifehy et Nosy Be: Les saphirs de ces deux districts à saphirs dans le Nord de Madagascar ont des valeurs des δ18O comprises entre 3,75 et 5,9‰ (n= 11, TableauV-16; Figure V-35). Le δ18O moyen de 4,5 ± 0,5‰ (n= 11) des saphirs est similaire à ceux des saphirs des régions de Vatomandry et de Antsirabe avec respectivement des valeurs moyennes à 4,1 ± 0,4‰ (n= 9), 4,5 ± 1,5‰ (n= 8).

Les inclusions solides identifiées dans les saphirs d'Ambondromifehy notamment le zircon, la baddéleyite, le pyroxène, la ferrocolombite, l'uraninite et l'uranpyrochlore (Schwarz

et al., 2000; ce travail) sont typiques des inclusions inventoriées dans les saphirs d'origine

magmatique c'est-à-dire de type syénitique (Schwarz et al., 2000; Monchoux et al., 2006). Ces associations minérales ne se rencontrent pas dans les plumasites où les inclusions sont

Chapitre V: Gemmologie, minéralogie et isotopes des corindons de Madagascar

limitées au zircon, au rutile et à l'hématite (Seifert et Hyrsl, 1999) et dans les schistes à biotite (à inclusions de cordiérite, zircon, sillimanite, feldspath potassique, plagioclase, monazite, phlogopite et barytine; Offant, 2005; Ralantoarison et al., 2006). Dans le diagramme de composition chimique de Sutherland et al. (1998, 2003) les saphirs de la région d'Antsiranana et de Nosy Be se situent dans le domaine magmatique. Ainsi une origine magmatique (syénitique) peut-être proposée pour ces saphirs.

La moitié des valeurs de δ18O des saphirs des trois zones étudiées (2,7 < δ18O < 3,9‰) sont anormalement basses en composition isotopique de l'oxygène pour des saphirs issus d'un environnement basaltique (3,0 < δ18O < 8,2‰, δ18O moyen = 5,8 ± 1,2‰; n = 150; Giuliani et

al., 2007a, b). De telles compositions isotopiques impliquent pour le magma originel issu du

manteau ou de la croûte inférieure des compositions isotopiques inférieures à 5,5‰.

Suivant l'hypothèse d'une origine magmatique des saphirs, le magma alcalin capable de former du saphir doit être riche en aluminium. Sutherland et al. (1998) a proposé que la fusion partielle du manteau lithosphérique riche en amphibole permettait la formation de corindon dans les liquides résiduels. Cependant, un tel processus ne pourrait pas expliquer des valeurs de δ18O inférieures à 5,5‰. Les travaux expérimentaux de Hirschmann et al. (2003) ont démontré qu'à des pressions de 20 à 25 kbars, la fusion partielle de pyroxénites à grenat pouvait produire des magmas alcalins enrichis en alumine. La formation de tels magmas par un processus de fractionnement permettrait la formation du corindon dans le manteau supérieur ou la croûte inférieure. Yui et al. (2006) fait remarquer que ces magmas pourraient résulter de la fusion de pyroxénites à grenat avec les péridotites du manteau suivant un modèle d'hybridation. Ces pyroxénites à grenats dériveraient de cumulats océaniques de nature gabbroïque qui auraient réagi avec l'eau de mer avant d'être subductés et ensuite infiltrés par des fluides ou des magmas mantelliques provoquant une fusion partielle et la production d'un magma alumineux. Les compositions isotopiques de l'oxygène inférieures à 5,5‰ peuvent s'expliquer par l'interaction précoce des cumulats océaniques avec l'eau de mer.

1.2-2 Les rubis

Les valeurs de δ18O des rubis de Vatomandry (2,7 < δ18O < 6,7‰; δ18O moyen = 5,1 ± 1,4‰, n= 8) se superposent à l'intervalle de valeurs isotopiques défini mondialement pour les rubis associés aux roches mafiques et ultramafiques (0,25 < δ18O < 6,8‰, n= 19; Giuliani et

al 2007a, b). Par ailleurs, il se superpose également à l'intervalle de valeurs isotopiques défini

Les valeurs de δ18O se distribuent en deux groupes (Figure V-35): un premier dans l'intervalle 2,7 à 4,3‰ (n =4), et un second entre 5,9 et 6,7‰ (n=4). Ces deux groupes de valeurs signifient deux sources différentes pour le rubis:

- Les valeurs de δ18O du premier groupe s'intègrent parfaitement dans l'intervalle de valeurs isotopiques défini pour les rubis de Soamiakatra et d'Antsabotraka (1,25 < δ18O < 5,0‰, n=6) de la région d'Antsirabe (Figure V-35). A Soamiakatra, la source du rubis est connue car il se trouve inclus dans des enclaves de métagabbros et de pyroxénites contenues dans les basaltes alcalins (Rakotosamizanany, 2003). Des rubis avec des valeurs de δ18O similaires (1,3 < δ18O < 4,2‰; Yui et al., 2006) et qui contiennent des inclusions solides de grenat et de clinopyroxène ont été décrits à Chanthaburi-Trat en Thaïlande (Sutthirat et al.,

2001). Ces derniers auteurs considèrent que le rubis s'est formé dans des roches mafiques de

type pyroxénite à grenat dans le manteau infra-continental. De même, des rubis associés à des pyroxénites à grenat ont été décrits dans les complexes orogéniques de péridotites de Beni Bousera au Maroc (Kornprobst et al., 1990) et dans la vallée de Malenco en Italie (Muntener

et Hermann, 1996). Yui et al. (2006) reportent également des rubis associés à des éclogites.

Les valeurs de δ18O de certains rubis comprises entre 1,25 et 3,5‰ (cas des gisements de Soamiakatra, Antsabotraka, Ambotitavolo et Tetezapao) sont trop légères pour refléter une formation dans les conditions du manteau supérieur. De même, la plupart des rubis provenant des placers de Chanthaburi-Trat en Thaïlande présentent une gamme de valeurs des δ18O comprise entre 1,3 et 4,2‰ (Yui et al., 2006). L'hypothèse avancée pour expliquer ces valeurs particulières de δ18O des rubis thaïlandais par Yui et al. (2006) serait une interaction préalable avec l'eau de mer des roches parentales des métagabbros et des pyroxénites. Cette hypothèse avait déjà été proposée par Pearson et al. (1993) pour expliquer les valeurs de δ18O des clinopyroxènes des pyroxénites à rubis du complexe péridotitique de Beni Bousera au Maroc. Aussi, comme le suggère Yui et al. (2006), dans certains cas les pyroxénites à grenats pourraient constituer une source commune pour les saphirs et les rubis.

- Les valeurs du second groupe s'intègrent dans l'intervalle des "plumasites" situées au contact de roches mafiques-ultramfiques (4,2 < δ18O < 7,5‰, avec un δ18O moyen = 5,7 ± 0,95‰; n= 16). Ces données isotopiques confirment les données chimiques définies pour les rubis où le type rubis métasomatique développé sur des roches mafiques et ultramafiques est identifié.

Université d'Antananarivo Département des Sciences de la Terre Université Henri Poincaré, Nancy

Ecole Doctorale RP2E

IRD DSF / DME

THESE