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Discussion sur la définition du coefficient de restitution normale

Nous avons défini jusqu’à présent deux types de coefficients de restitution normale. Le premier εmax = −VVRC ne tient compte que de la dissipation d’énergie lors de la déformation

solide (les définitions des vitesses sont rappelées sur la figure 3.19). Le second coefficient de restitution ε = −VR

VT tient compte de la dissipation d’énergie lors de la déformation solide et de la dissipation visqueuse dans le fluide interstitiel avant le rebond. Nous remarquons sur la figure 3.19 un changement rapide de la pente de la vitesse de la particule juste après le rebond. La vitesse passe alors de la valeur VR à la valeur VR2. Notons que ce

phénomène a été observé dans tous les cas où le rebond a lieu, même si son intensité change en fonction des paramètres physiques utilisés. Ceci nous amène à introduire un nouveau coefficient de restitution effectif e défini avec la vitesse VR2.

e= −VR2

VT (3.36)

où VR2 est la vitesse définie sur la figure 3.19 au temps où est détecté un changement

brusque d’accélération après le contact. Dans le cas d’un contact entre deux grains, il suffit de remplacer ces vitesses par les vitesses relatives équivalentes. En tenant compte des vitesses définies dans les figures 3.19 et 3.20 pour respectivement le rebond d’un grain sur une paroi et celui de deux grains, cela revient à remplacer VR2 par Ur12− Ur22 et VT

par Ui1− Ui2.

Ce nouveau coefficient de restitution tient compte de la dynamique avant et après le contact dans son voisinage. Dans le cas de la définition du coefficient de restitution ε, les vitesses prises après le contact VR et Uri (i = 1, 2) dépendent généralement de l’erreur

de la mesure dans le cas des expériences et du pas de temps dans le cas de simulations (voir explication dans l’article en section 3.1). Il est remarquable qu’après le rebond, une rupture de pente de vitesse existe en VR2 (resp. Ur2i pour i = 1, 2) dans le cas d’un

rebond d’un grain sur plan (resp. le rebond entre deux grains) (voir figures 3.19 et 3.20). Cela témoigne d’un fort changement de la dynamique du grain lors de l’écartement des deux objets après le contact (voir section 3.1.5). L’ensemble des forces hydrodynamiques étant incluses au sein de la force Fh calculée par la méthode de frontières immergées (et la force de lubrification), il est difficile de donner une interprétation physique à cette rupture de pente. Notons que, dans le cas d’un rebond d’un grain sur un plan, Gondret et al. (2002) ont montré, par comparaison de la trajectoire expérimentale du grain avec un modèle analytique de trajectoire de particule, que la dynamique de la particule après le contact est fortement influencée par la force d’histoire et, dans une moindre mesure, par la force de masse ajoutée. D’autre part, nous observons que ce soit dans le cas du rebond d’un grain sur un plan (voir figure 3.3d issue de Izard et al. (2014a)) ou dans celui d’une collision binaire (voir figure 3.16d), que la (ou les) particule qui s’écarte, après la collision, doit vaincre la traînée engendrée par l’écoulement généré dans son sillage à l’arrivée de l’objet initialement mouvant.

3.3. DISCUSSION SUR LA DÉFINITION DU COEFFICIENT DE RESTITUTION

NORMALE 79

Figure 3.19 – Évolution temporelle de la vitesse verticale lors d’une simulation IBM/DEM de

rebond normal d’un grain sur un plan (cas identique à la figure 3.3). Est inséré un zoom sur la vitesse pendant le rebond. Sont définies la vitesse terminale du grain VT, la vitesse de contact

VC, la vitesse de rebond VR et la vitesse VR2 correspondant au changement brusque de pente

de la vitesse après le rebond et qui est utilisée pour définir e.

Figure 3.20 –Évolution temporelle des vitesses horizontales lors du rebond normal entre deux

grains dans un fluide (cas identique à la figure 3.17). Sont définies les vitesses d’impact des grains Ui1 et Ui2, les vitesses de rebond Ur1 et Ur2 et les vitesses Ur21 et Ur22 utilisées pour

Les résultats des simulations faites dans la section 3.1 (resp. dans la section 3.2) pour le cas de rebond d’une sphère avec un plan (resp. de collision binaire) dans des fluides sont exploités ici de sorte à tracer le coefficient de restitution normalisé e

max en fonction du nombre de Stokes St sur la figure 3.21. Le rapport de densité grain-fluide a été varié dans la gamme [8, 900] (resp. [3.6, 900]) dans le cas du rebond sur un plan (resp. entre deux grains). Nous remarquons que les points ne se superposent pas, mais font l’objet d’une dépendance au rapport de densité. Plus le rapport de densité est faible (et proche de 1), plus le coefficient de restitution défini par e est faible.

Figure 3.21 – Coefficient de restitution normalisé  e

max(St) issu des simulations de collision

de grain avec un mur (resp. entre deux grains) en faisant varier le rapport de densité ρp

ρ =

[8; 32; 900] = [×;+;] (resp. ρp

ρ = [3.6; 8; 90; 900] = [;.;/;∗]).

Ceci revient à dire que, quand un rebond existe, plus le rapport de masse volumique est faible, plus l’écart entre VR et VR2 est grand. Nous proposons ici une loi empirique

du type f(ρp/ρ) = 1/(1 + rdc/(ρp/ρ)) pour le rapport de vitesse VVR2

R afin de normaliser ce nouveau coefficient de restitution. La figure 3.22 montre que cette corrélation semble pertinente pour décrire l’évolution de VR2/VR en fonction de ρp/ρ. rcd correspond à un

rapport de masse volumique critique, ici rc

d ≈ 13, autour duquel il semble y avoir une

transition ou un changement de régime. Il est alors possible de normaliser le coefficient de restitution e par ef f, défini en 3.37, qui dépend du rapport ρρp.

ef f = max 1 + rc d rd (3.37) où rd= ρρp >1 et rcd≈13 est un rapport de densité critique.

3.3. DISCUSSION SUR LA DÉFINITION DU COEFFICIENT DE RESTITUTION

NORMALE 81

Figure 3.22 – VR2/VRen fonction du rapport de densité ρρp.◦: données issues des simulations

présentées sur la figure 3.21 pour un nombre de Stokes St > 100 ;: f(ρp

ρ) = 1/(1 + rc

d

(ρp/ρ)) où rdc13 est le rapport de masse volumique critique pour lequel VR2 = VR

Sur la figure 3.23, les mesures issues des simulations pour les deux types de rebond tombent alors sur une courbe maîtresse e

ef f = f(St), courbe qui est bien représentée par le modèle analytique (3-12) de Izard et al. (2014a).

Avec cette définition du coefficient de restitution, la dissipation d’énergie lors d’un rebond dépend donc non pas seulement du nombre de Stokes mais aussi du rapport de densité grain-fluide. Il a été vérifié que, comme dans le cas de l’étude expérimentale du coefficient de restitution ε dans Gondret et al. (2002), le coefficient de restitution e proposé ici ne dépend pas du nombre de Reynolds.

A noter qu’il serait intéressant de comparer ces nouveaux éléments aux expériences de rebond de manière exhaustive et précise.

Nous pouvons ainsi distinguer plusieurs tendances vis-à-vis de ce coefficient de resti- tution normale :

- Pour ρp

ρ >> r c

d, il n’y a pas d’influence du rapport de densité et on peut identifier

deux régimes. Pour St << Stc(on obtient, en accord avec les expériences, que Stc ≈10),

la dissipation d’énergie cinétique est essentiellement visqueuse : c’est le régime visqueux. Pour St >> Stc, la dissipation ne dépend plus du nombre de Stokes mais uniquement

des propriétés du matériau : c’est le régime sec. - Pour ρp

ρ << r c

d, il y a une influence du rapport de densité rd. Pour St << Stc, une fois

encore, la dissipation est d’origine visqueuse et le régime est visqueux. Pour St >> Stc,

les propriétés du matériau max et ρρp jouent un rôle dans la dissipation. Par analogie

aux expériences d’avalanches en tambour tournant dans des fluides de Courrech du Pont (2003), il s’agirait sans doute du régime inertiel. Nous trouvons des transitions entre les régimes qui sont de l’ordre de celles estimées par Courrech du Pont (2003). A noter que

rc

d13 est dans la gamme prédite par Courrech du Pont (2003) (rdc[8.1 : 866]).

Pour modéliser un rebond dans son intégralité, c’est-à-dire en tenant compte de l’effet de la dissipation visqueuse dans le fluide avant et après contact ainsi que de la dissipation due à la déformation du matériau, nous avons proposé une nouvelle définition du coef- ficient de restitution normale e dans le cas d’un rebond d’un grain sur un plan et entre deux grains dans un fluide. Cette nouvelle définition prend en compte le contact solide ainsi que l’effet d’un fluide interstitiel sur l’ensemble du phénomène du rebond. Elle fait intervenir les différents régimes visqueux, inertiel et sec ainsi que les transitions entre ceux-ci en accord avec les expériences d’avalanche en milieu fluide de Courrech du Pont (2003). On notera en particulier que cette nouvelle définition du coefficient de restitution est une nouvelle étape vers la modélisation du rebond dans un fluide, tenant compte des effets hydrodynamiques proches contact. Cette nouvelle définition permet en particulier de lever toute incertitude sur la définition du coefficient de restitution dans les expériences et les modélisations numériques.