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Le but principal de cette étude était d’évaluer l’influence des préférences circadiennes sur les performances inhibitrices des enfants et des jeunes adultes. Ainsi, notre question centrale était de savoir si l’effet du « Time-of-Day » était également présent chez les jeunes enfants. Ceux-ci étaient supposés montrer de faibles capacités inhibitrices se traduisant par une sensibilité plus grande à l’interférence proactive, par rapport aux jeunes adultes. Dans le cadre de cette recherche, nous nous sommes appuyées sur l’étude de May et coll. (1999).

Nous avons donc modifié la tâche du Reading Span en ce basant sur l’hypothèse que le fait de réduire l’interférence proactive dans une des conditions (descendante) augmenterait les performances des individus ayant de faibles capacités inhibitrices. Ainsi, l’influence des préférences circadiennes sur les capacités inhibitrices a été mesurée au moyen de la tâche du Reading Span comprenant deux conditions, une favorisant l’accumulation d’interférence proactive (condition ascendante) et l’autre réduisant cette interférence (condition descendante).

En effet, May et coll. (1999) ont mit en évidence cet effet en évaluant des jeunes adultes et des adultes âgés. Dans le cadre de notre recherche nous avons donc implémenté cette manipulation à des enfants. Ces derniers devaient donc montrer des performances généralement plus faibles que les jeunes adultes à la tâche du Reading Span, en rappelant un nombre moins important de mots corrects et un nombre plus important d’intrusions totales et précédentes. Les intrusions précédentes étant particulièrement intéressantes du fait qu’elles reflètent l’interférence proactive au sein de la tâche. De plus, les enfants devaient montrer un effet plus important du « Time-of-Day » par rapport aux adultes avec une amélioration plus importante de leurs performances lorsqu’ils sont évalués dans leur moment optimal de la journée (effet de synchronie). Nous avons donc comparé l’efficience des mécanismes inhibiteurs des enfants et des jeunes adultes à divers moments de la journée.

Le deuxième objectif de cette étude était de valider la version parallèle du CMEP à savoir le CMEPP (construit par Christelle Robert, ce questionnaire permettant également d’évaluer, tout comme le CMEP, les préférences circadiennes chez les enfants). Ce questionnaire comprend le même nombre d’items que le CMEP (10 items), et a été construit par une reformulation de chaque item du CMEP. Ainsi, chaque item du CMEP retrouve sa forme parallèle dans le CMEPP. Nous avons évalué la fidélité de ce questionnaire par la méthode du test-retest afin de voir si réellement ces deux questionnaires mesuraient la même dimension mais également si les scores étaient constants dans le temps.

Dans le cadre de cette recherche, nous nous attendions, en ce qui concerne les préférences circadiennes, à répliquer les distributions observées dans la littérature. C'est-à-dire qu’environ 40% des jeunes adultes devraient être du soir et que seulement 10% devraient préférer le matin, alors que la majorité tendrait à être neutre (Yoon & coll., 2000). Alors que 59% des enfants devraient être du matin, 33% neutres et 8% du soir (Wickersham, 2006 ; Carskadon et coll., 1993). Dans le but de répliquer ces distributions et de s’assurer des réelles préférences des individus, nous avons utilisé le questionnaire de Horne et Ostberg (1976) appelé le MEQ afin d’évaluer les préférences des jeunes adultes et le questionnaire de Carskadon et coll. (1993) adapté du MEQ, le CMEP pour les préférences des enfants. Nous avons également administré la forme parallèle du CMEP, à savoir le CMEPP, aux enfants afin d’évaluer la fidélité test-retest de ces deux questionnaire et dans le but de vérifier s’ils mesuraient les mêmes dimensions.

Cependant, les résultats ont mit en évidence que seuls 14 des 87 jeunes adultes testés étaient réellement du soir (soit environ 16%) et que seuls 36 des 80 enfants étaient réellement du matin (soit 44%). Ces pourcentages sont relativement faibles par rapport à ceux observés généralement dans la littérature. En effet, la majorité des adultes que nous avons testés se sont avérés neutres et moins du quart avait réellement des préférences pour le soir. En ce qui concerne notre échantillon d’enfants, la moitié tend à être du matin et l’autre neutre. Même si ces résultats sont différents de ceux postulés dans la littérature, il est à noter qu’aucun enfants ne c’est avérés du soir, ce qui est tout de même conforme à la littérature. Nous pouvons éventuellement expliquer cela par le fait que ce questionnaire est un questionnaire auto-reporté et que celui-ci peut être biaisé suite à des problèmes de désirabilité sociale. En effet, il est possible qu’un certain nombre d’enfants n’aient pas répondu honnêtement aux réponses dans le but de ne pas passer pour des « petits » ou pour « faire mieux » que leurs camarades.

Dans le but de tester les performances des individus, nous les avons testés au travers de la tâche du Reading Span. Nous nous attendions à un effet de l’âge sur les performances des individus, avec de moins bonnes performances pour les enfants par rapport aux jeunes adultes. En effet, comme postulé par divers auteurs tels que Wickersham (2006), Diamond (1990) ainsi que Harnishfeger (1995) il y aurait de grandes variations des processus inhibiteurs au cours du développement avec des capacités inhibitrices limitées chez les jeunes enfants et des capacités optimales chez les jeunes adultes. Nous nous attendions donc à ce que les enfants rappellent moins de mots corrects et plus d’intrusions totales et précédentes que les jeunes adultes. Les résultats révèlent un effet significatif de l’âge uniquement sur le rappel du

nombre de mots corrects. Les enfants tendent effectivement à rappeler moins de mots corrects que les jeunes adultes et ce quelque soit le moment de la journée et quelque soit le format de la tâche. Toutefois, aucune différence dans la production d’intrusions totales et précédentes n’est relevée. Ce manque d’effet sur les intrusions peut être dû à certaines raisons méthodologiques, comme une grande variance dans les données des enfants et par le N très petit de l’échantillon des jeunes adultes. Toutefois, une explication possible est le fait que la tâche du Reading Span n’évalue, en réalité, que faiblement les capacités inhibitrices des individus. Ainsi, il serait intéressant dans une étude future de regarder si les performances des individus sont identiques dans d’autres tâches inhibitrices. De plus, les intrusions et plus particulièrement les intrusions précédentes sont supposées refléter l’effet d’interférence proactive dans la tâche. Cependant, les résultats ne mettent pas en évidence une sensibilité plus accrue à l’interférence proactive chez les enfants. Ce manque d’effet peut être également dû aux raisons méthodologiques citées ci-dessus. Il serait intéressant de répliquer cette expérience avec un échantillon plus grand comportant le même nombre d’individus dans les deux populations. De plus, au vu du fait que les individus (quelque soit l’âge) produisent un faible nombre d’intrusions, il serait également intéressant de refaire l’expérience en administrant la tâche classique d’interférence proactive afin de voir si la production d’intrusions augmente chez les individus.

Par ailleurs, nous nous attendions à un effet du format de la tâche. Dans le cadre de notre recherche, nous avions modifié la tâche du Reading Span en créant une condition ascendante et une condition descendante, comme proposé par May et coll. (1999). Selon ces auteurs, un effet d’interférence proactive, affectant les performances des individus, est présent dans la tâche du Reading Span. Ceux-ci ont donc postulé que dans la condition ascendante, il y aurait accumulation d’interférence proactive, alors que dans la condition descendante il y aurait une réduction de celle-ci. De ce fait, la condition descendante devrait améliorer les performances des individus en augmentant leur rappel de mots corrects et en diminuant le nombre d’intrusions (totales et précédentes) produites. Ainsi, nous avons avancé que les performances devraient être généralement plus élevées dans le format descendant par rapport au format ascendant. Cependant, les résultats ne mettent en évidence qu’un effet tendanciellement significatif pour le nombre de mots correctement rappelés. Les analyses a priori mettant en évidence que cet effet tendanciel n’est dû qu’aux enfants, la différence entre descendant et ascendant chez les adultes n’étant pas significative. Cet effet tendanciel du format peut s’expliquer par le fait que selon May et coll. (1999) il devrait y avoir un effet plus

marqué chez les individus qui présentent des capacités inhibitrices inefficientes, les jeunes adultes n’étant donc pas supposés montrer un effet du format significatif. Ainsi, si tel est réellement le cas, les jeunes adultes de notre échantillon ne devraient pas être influencés par le format de la tâche. Lorsque nous avons analysé l’effet principal du format de la tâche, nous avons considéré tous les individus, de ce fait, il est possible que les moyennes des adultes aient masqué les moyennes des enfants en entrainant un effet seulement tendanciel du format de la tâche.

Nous nous attendions également à un effet du moment de la journée sur les performances des individus. En effet, comme postulé par Schmidt et coll. (2007) tout comme par Yoon et coll. (2000), les capacités cognitives et particulièrement les capacités inhibitrices seraient soumises à un effet du « Time-of-Day », avec de meilleures performances au moment optimal de la journée. Nous avons donc supposé que les enfants et les adultes devraient présenter de meilleures performances, reflétées par un plus grand rappel de mots corrects et par une diminution du nombre d’intrusions produites, au moment On Peak (matin pour les enfants et soir pour les jeunes adultes). Les résultats ont mis en évidence un effet significatif du moment pour les intrusions précédentes, un effet tendanciel pour les intrusions totales, mais aucun effet sur le nombre de mots corrects. Les individus semblent donc produire le même nombre de mots aux deux moments de la journée. De plus, les analyses a priori ont révélé des effets relativement inattendus. En effet, nous avions postulé que les enfants devaient être plus influencés, par le moment de la journée, que les jeunes adultes. Cependant, les analyses ont montré que l’effet tendanciel pour les intrusions totales et l’effet significatif pour les intrusions précédentes était dû aux jeunes adultes. De plus, les analyses ont mis en évidence que l’effet du moment sur les intrusions précédentes était dû aux jeunes adultes, en condition Off Peak dans le format descendant. Ces résultats étant particulièrement étonnants au vu du fait que l’on avait postulé que le format descendant devait favoriser les performances des individus et principalement celles des enfants. Ces résultats suggèrent que la fonction de suppression varie bien en fonction du moment de la journée, avec de meilleures performances dans le moment On Peak. Cependant cet effet se retrouve uniquement chez les adultes, ceci étant tout de même contradictoire avec nos hypothèses. Ces résultats laissent également supposer que l’effet du « Time-of-Day » affecte davantage les processus inhibiteurs que la mémoire de travail, puisque l’effet semble plus marqué pour les intrusions que pour le nombre de mots correctement rappelés, toutefois, cela ne reste qu’une supposition au vu du fait que nous n’avons pas comparé ces deux scores. Il serait intéressant dans une étude future

d’analyser ces deux processus avec une épreuve mesurant spécifiquement la mémoire de travail et une épreuve mesurant spécifiquement les capacités inhibitrices.

De plus, nous nous attendions à une interaction entre l’âge des individus et le format de la tâche. Nous avions donc postulé que le format descendant serait plus favorable par rapport au format ascendant et plus spécifiquement pour les individus présentant des capacités inhibitrices faibles. En effet, selon May et coll. (1999) les individus ayant des capacités inhibitrices déficitaires devraient se monter plus sensibles à l’interférence proactive et devraient être plus gênés par la condition ascendante en rappelant un nombre moins important de mots corrects et en augmentant leur production d’intrusions. Selon ces auteurs la condition descendante devrait réduire la quantité d’informations non pertinentes en concurrence avec les items à rappeler actuellement et de ce fait les individus à faibles capacités inhibitrices devraient rappeler plus de mots corrects et moins d’intrusions. Nous nous attendions donc à ce que les performances des enfants se rapprochent de celles des adultes dans la condition descendante, mais les résultats de l’interaction générale Age * Format n’ont montré aucune significativité tant pour le nombre de mots rappelés que pour le nombre d’intrusions produites, qu’elles soient totales ou précédentes. Cependant, la décomposition de cette interaction sur chacune des versions a montré certains effets. En effet, les enfants rappellent moins de mots que les jeunes adultes tant dans le format ascendant que descendant. De plus, les enfants rappellent plus de mots dans le format descendant que ascendant. Les enfants tendant également à rappelé moins de mots en format ascendant dans leur moment On Peak par rapport aux adultes testés dans toutes les conditions. Toutefois, aucun effet significatif n’a été relevé pour les intrusions. Le format de la tâche semble donc faciliter les performances des enfants dans le rappel de mots corrects mais ne semble pas diminuer leur production d’intrusions. Cet effet peut également être expliqué par les divers problèmes méthodologiques, mais cela remet également en question le fait que la tâche du Reading Span mesure directement les capacités inhibitrices.

En considérant l’interaction Moment* Age, nous nous attendions à ce qu’un effet du

« Time-of-Day », c'est-à-dire que les individus soient plus performants en On Peak par rapport au moment Off Peak. Selon Kim et coll. (2002) ainsi que Wickersham (2006) les enfants âgés de 2 à environ 12 ans auraient des préférences pour le matin mais celles-ci seraient modifiées pour le soir aux alentours de 12-13 ans. Par contre, selon Yoon et coll.

(2000) et Hasher et coll. (2005) les préférences des adultes tendraient plutôt à être du soir. De

plus, de nombreux auteurs tels que Schmidt et coll. (2007), Yoon et coll. (2000) ainsi que Hasher et coll. (2005 ; 2007) ont mis en évidence un effet du moment de la journée. En effet, les individus devraient présenter de meilleures performances dans leur moment optimal de la journée, ce qui est généralement qualifié d’effet de synchronie. Nous nous attendions donc à ce que les enfants présentent de meilleures performances quand ils étaient évalués le matin et que les jeunes adultes présentent de meilleures performances le soir. Nous avons également postulé que les enfants devaient tendre à produire moins d’intrusions dans leur moment préféré Toutefois, cette interaction ne s’est révélée significative sur aucune des variables dépendantes utilisées. Les enfants et les jeunes adultes tendent à rappeler le même nombre de mots et le même nombre d’intrusions aux deux moments d’évaluation. Par ailleurs, les résultats peuvent être altérés par la grande variation des résultats chez les enfants, mais également par la petite taille de l’échantillon des jeunes adultes pouvant faire ressortir des effets qui ne seraient pas les mêmes avec un échantillon plus grand.

Finalement en considérant l’hypothèse principale de notre recherche quant à la double interaction entre Age* Format* Moment, et en considérant les différentes études et auteurs cités ultérieurement, nous nous attendions à ce que les enfants aient de meilleures performances le matin à la tâche du Reading Span et principalement dans le format descendant. Nos analyses n’ont révélé aucun effet de cette double interaction, les performances des enfants ne semblent pas influencées par le moment de la journée et par le format de la tâche. Ce phénomène peut également expliquer la grande variabilité obtenue chez les enfants. Un autre élément qui pourrait expliquer ce manque de résultats est le fait que nous ayons évalué les individus à 8h le matin et à 14h l’après-midi. On peut se demander si 14h reflète bien les préférences du soir et si le fait de ne pas avoir évalué les individus plus tardivement dans la journée n’a pas biaisé nos résultats.

Suite à ces divers résultats nous pouvons nous questionner sur les différences entre les données issues de la littérature et celles issues de notre travail. En effet. Hasher et coll. (2005 ; 2007) ainsi que May et coll.(1999) ont suggéré que la tâche du Reading Span évaluait les processus inhibiteurs des individus et particulièrement la capacité à résister à l’interférence proactive. Toutefois, dans le cadre de notre recherche, aucun effet concernant la production d’intrusions n’est ressorti et au contraire de manière générale tous les individus ont produit un nombre relativement faible d’intrusions. Les enfants ayant des capacités inhibitrices plus faibles auraient dû produire un nombre significativement plus grand d’intrusions par rapport

aux jeunes adultes. Cependant, au vu de certains problèmes méthodologiques de notre recherche, il est probable que certains effets aient été biaisés. Il serait également très intéressant d’effectuer une étude comparant des scores en mémoire de travail et ceux en lien avec les processus inhibiteurs à l’aide d’épreuves plus sensibles, afin de vérifier si cette tâche n’évalue pas principalement les capacités en mémoire de travail et de manière moins importante les capacités inhibitrices. Il serait également intéressant de répliquer cette étude avec une tâche d’interférence proactive afin d’observer si les résultats restent similaires ou non. Dans le même sens nous pouvons nous questionner sur nos résultats obtenus quant au format de la tâche. En effet, May et coll. (1999) ont postulé une diminution de l’interférence proactive dans le format descendant, toutefois, cet effet ne s’est révélé que tendanciel dans notre étude. Il serait également intéressant de répliquer notre étude en contrôlant la taille de notre échantillon. En effet, avec un échantillon plus grand, avec un nombre égal d’individu au sein des deux groupes, la variabilité des données serait peut être limitée et l’on pourrait vérifier si l’effet trouvé dans l’étude de May et coll. (1999) est également présent chez les jeunes enfants.

Comme explicité précédemment, le deuxième objectif de cette recherche était de valider la forme parallèle du CMEP, à savoir le CMEPP. L’analyse corrélationnelle met en évidence une corrélation significative (r = .753, p <.01) entre les scores globaux des deux questionnaires, ce qui signifie que touts deux mesurent les mêmes dimensions, à savoir les préférences circadiennes chez les enfants. Le CMEPP à été construit par une reformulation de chaque item du CMEP. L’analyse inter-items montre qu’effectivement chaque item du CMEP corrèle plus fortement avec un item du CMEPP, ce qui signifie donc que chaque item du CMEP retrouve sa forme parallèle dans un item du CMEPP. Toutefois, il est important de relever que même si les corrélations sont significatives, aucune d’elles ne dépasse les .75. De plus, il réside un problème sur l’item 9 du CMEPP, qui corrèle négativement (r =-0.2) avec son item parallèle. Ainsi, il serait peut-être judicieux de reformuler de nouveaux items afin d’améliorer les corrélations entre ces deux questionnaires.

Il est également intéressant de mentionner certains avantages et inconvénients d’avoir deux versions d’un même questionnaire. En effet, la méthode du test-retest permet de vérifier si les réponses sont similaires d’une passation à une autre, et ainsi permet de vérifier la constance des réponses dans le temps. De plus, si les individus répondent de la même manière aux deux questionnaires, cela permet de mettre en évidence que tout deux mesurent la même

Il est également intéressant de mentionner certains avantages et inconvénients d’avoir deux versions d’un même questionnaire. En effet, la méthode du test-retest permet de vérifier si les réponses sont similaires d’une passation à une autre, et ainsi permet de vérifier la constance des réponses dans le temps. De plus, si les individus répondent de la même manière aux deux questionnaires, cela permet de mettre en évidence que tout deux mesurent la même

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