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3.2 A la solution technique

3.2.3 Discussion sur les challenges de la MOAO

Les challenges de la MOAO sont nombreux. Certains sont communs avec d’autres types d’optique adaptative : l’analyse du front d’onde avec étoiles laser (LTAO et MCAO), prise en compte de l’effet fratricide entre étoiles laser (LTAO et MCAO), la prédiction tomogra- phique de la turbulence optimisée dans une direction donnée (LTAO)... D’autres difficultés proviennent de l’interaction avec le télescope ou de son environnement : utilisation des miroirs de correction M4 et de stabilisation du champ M5 dans la boucle d’OA (boucle semi-fermée), prise en compte des vibrations (très importantes) du télescope, prise en compte des mesures externes du profil de turbulence C2

n(h)...

Enfin, certains challenges sont plus spécifiques à la MOAO et sont provoqués par l’aspect multiplex de l’instrument : extraction de la lumière vers les éléments concernés (ASO et miroirs déformables), analyse du front d’onde en boucle ouverte (impliquant un problème de non linéarité de l’ASO)...

Cette thèse s’attache à analyser deux points particuliers, critiques et spécifiques de la MOAO, à savoir :

– le contrôle du miroir déformable en boucle ouverte.

– la prédiction tomographique du volume de turbulence à corriger et la projection dans une direction d’intérêt.

3.2 A la solution technique... 75 3.2.3.1 La correction mono-directionnelle en boucle ouverte

Un des principaux points difficiles de la MOAO est la correction de type boucle ouverte. Le principe est illustré en figure 3.4. L’aspect multiplex d’un instrument de MOAO impose que chacun des éléments, analyseurs de surface d’onde et miroirs déformables, fonctionnent individuellement et soient découplés optiquement les uns les autres. En boucle ouverte, la lumière parvenant à la voie d’analyse ne passe jamais par le miroir déformable. Contrai- rement au cas de la boucle fermée, les ASO vont mesurer la contribution entière de la turbulence. Ils doivent donc être extrêmement linéaires sur toute la gamme mesurée. De plus, après envoi de la correction au miroir déformable, l’ASO ne bénéficie pas, comme en boucle fermée, d’un retour sur la forme réelle du miroir à l’itération suivante. Il n’y a, a priori, pas de moyen de savoir si le miroir déformable est réellement dans la position de- mandée ou non. Ce dernier point constitue une nouveauté en optique adaptative car seule une OA de type MOAO nécessite de fonctionner en boucle ouverte. Le pilotage du miroir déformable en boucle ouverte s’effectue alors en aveugle. C’est pourquoi, il est extrême- ment important de caractériser et surtout, de modéliser correctement le miroir déformable utilisé dans un tel schéma. Des tests sur différents types de miroirs déformables ont donc été menés afin de conclure sur la faisabilité du contrôle de miroirs déformables en boucle ouverte dans le cadre de l’instrument EAGLE. Les résultats de ces tests font l’objet de la partie 3 de cette thèse.

3.2.3.2 La connaissance du volume de turbulence : la tomographie

Le deuxième principal défi de la MOAO, partagé avec la LTAO, est la reconstruction tomographique du volume de turbulence et la projection dans les directions d’intérêt. Le procédé tomographique a pour but de prédire le front d’onde que le miroir déformable doit corriger dans une direction donnée (vers une galaxie en l’occurrence) à partir des mesures de la turbulence effectuées hors de ce même axe de correction. Ré-expliqué plus simplement, la tomographie consiste à regarder autour de la direction que l’on veut corriger en essayant de deviner ce que l’on verrait si on était capable de regarder au centre. Le problème est compliqué car la mesure effectuée par un ASO est l’intégrale des perturbations des différentes couches atmosphériques le long de chaque direction d’analyse. Chaque ASO observe donc la somme des perturbations produites au niveau de chaque couche turbulente et non la contribution individuelle de ces dernières.

Contrairement à la MCAO qui assure un compromis de manière à maximiser la correc- tion sur l’ensemble du champ, la LTAO et la MOAO appliquent une correction optimisée dans une seule direction. Cette optimisation dans une direction particulière nécessite alors d’effectuer l’opération de tomographie à proprement parler, à savoir de reconstruire le vo- lume de turbulence au dessus du télescope et de projeter dans la direction d’intérêt. Le principe de la tomographie peut être résumé en 2 étapes (Gavel 2004 [29], Gavel et al. 2005 [30], Neichel et al. 2008 [55]).

1. C’est l’étape de reconstruction des mesures hors-axe dans le volume au dessus du télescope. Cette étape illustrée en figure 3.5 est essentielle car elle constitue en quelque sorte « le démêlage de pinceaux » des mesures. Elle s’effectue grâce à un fort a priori sur le profil de C2

n(h)de la turbulence et il est donc nécessaire d’avoir un instrument de

mesure du profil turbulent proche du télescope. Cette étape a pour but de reconstituer les contributions des couches turbulentes en altitude.

2. C’est l’étape de projection dans la direction de correction (i.e. la direction scienti- fique). Elle s’effectue à partir de la connaissance des couches turbulentes reconstruites par l’étape 1. Il s’agit alors de projeter la contribution de chaque couche turbulente du volume, dans la direction d’intérêt. Il reste alors à intégrer toutes les couches turbulentes dans la direction d’intérêt afin de reconstruire la perturbation (intégrée dans tout le volume) que doit corriger le miroir déformable.

A ce jour, plusieurs systèmes d’analyse multi-directionnelle ont été placés derrière un télescope. Il s’agit du démonstrateur de MCAO appelé MAD de l’ESO (Marchetti et al. 2003 [51], Marchetti et al. 2008 [52]) du système GLAO au MMT (Milton et al. 2008 [50]) et de l’instrument Gems, actuellement en cours d’intégration, du télescope GEMINI sud (Ellerbroek et al. 2003 [18], Boccas et al. 2008 [9]). Ces systèmes ont le point commun d’être des systèmes de type GLAO ou MCAO et dont la loi de commande n’a pas pour but de projeter la turbulence dans une direction précise. Aucun instrument effectuant une prédiction tomographique dans une direction particulière, indispensable en MOAO et LTAO, n’a encore été testé sur le ciel.

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Fig. 3.5 – Étape 1 de la tomographie : reconstruction des mesures dans le volume de turbulence (flèches bleues) à partir des mesures intégrées dans chaque direction d’analyse. Cette étape s’effectue à l’aide d’un a priori sur le profil de turbulence C2

Fig.3.6 – Étape 2 de la tomographie : projection des données dans la direction de correction (flèches jaune) et intégration du front d’onde le long de cette direction (flèches rouges).