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Discussion des deux articles

Le cil primaire a pendant longtemps été considéré comme une organelle vestigiale. Depuis la découverte de son implication dans différentes voies de signalisations, son étude a suscité un regain d’intérêt de la communauté scientifique. Les différents modèles d’animaux, ou de cellules, ont pu mettre en lumière son implication dans le développement de l’obésité chez les patients atteint de ciliopathie, dont l’origine semble être à la foi dû à une composante comportementale, et à une perturbation de la régulation des progéniteurs adipeux.

Notre première étude a pu montrer de façon claire que le cil primaire des progéniteurs adipeux humains sains subissait différentes modification au cours de la différenciation adipocytaire. Il est présent dans les progéniteurs indifférenciés, puis il est perdu dans les adipocytes chargés en lipides. Entre ces deux états le cil primaire subit une forte élongation, puis se rétracte pour disparaitre tardivement.

Les rôles du cil primaire au cours de la différenciation adipocytaire sont aujourd’hui encore discutés. Les travaux portant sur l’étude des protéines BBS tendent à montrer que la perturbations du cil primaire favorisent la différenciation adipocytaire, alors que d’autres travaux portant sur l’étude du gène Alms1 ou IFT88 dans les 3T3-L1 indiquent qu’elles engendrent une diminution de la capacité de différenciation (Ansley et al., 2003; Huang-Doran and Semple, 2010). Ces résultats peuvent s’expliquer par l’implication du cil dans une multitude de fonctions régulées différemment au cours de l’adipogenèse. Après trois jours de différenciation, lorsque le cil est plus long, nous avons observé l’apparition d’une résistance au ligand Sonic Hedgehog. Cependant, nous n’avons jamais observé de variation de la localisation de Smo ces mêmes trois jours. Smo ne semble donc pas être impliqué dans l’apparition de cette résistance indiquant qu’un autre mécanisme doit en être responsable. Cependant, nous ne pouvons pas exclure que l’élongation du cil soit directement responsable de cette perte de sensibilité à Hedgehog. En effet le cil apparait comme étant un espace de concentration des différents acteurs de la voie. Ainsi on peut émettre l’hypothèse qu’une forte élongation du cil provoque une dilution des acteurs de la voie Hedgehog, ce qui aboutirait à une diminution de la réponse engendrée par la présence du ligand. Néanmoins, il reste difficile d’après nos travaux

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de généraliser cette observation aux autres voies contrôlées par le cil primaire qu’elles soient antiadipogéniques (Wnt, TGF) ou proadipogéniques (IGF-1) (Zhu et al., 2009).

Par la suite, nous avons cherché à comprendre les raisons de la perte du cil lors de la différenciation adipocytaire. L’étude du rôle d’HDAC6 nous est apparue indiquée puisque son expression est plus importante dans les cellules différenciées qu’au stade de progéniteurs. Nous avons pu observer que l’inhibition d’HDAC6 au cours de la différenciation conduit à une inhibition de la différenciation adipocytaire indépendamment de l’activité de la voie des glucocorticoïdes. Cette observation suggère que l’activité d’HDAC6 est nécessaire au cours de la différenciation. De plus son activité ne semble pas être régulée d’une façon particulière. En effet, les traitements à la tubacine sur différentes périodes conduisent toujours à une inhibition de la différenciation indiquant que l’activité de cette protéine est requise tout au long de la différenciation. Néanmoins, au vu de la diversité des processus dans lesquelles HDAC6 est engagée nous ne pouvons pas conclure que le rôle de cette enzyme soit uniquement dédié à la résorption du cil au cours de la différenciation adipocytaire. Enfin, bien que la tubacine soit fortement spécifique contre HDAC6, elle dispose tout de même d’une spécificité pour HDAC1 et HDAC4 quatre fois inférieure (Mai et al., 2005), or ces deux protéines ont été reconnues pour interférer avec la différenciation adipocytaire (Kuzmochka et al., 2014; Weems et al., 2012).

La surexpression d’HDAC6 au cours de la différenciation engendre une réduction de l’élongation du cil primaire, ainsi qu’une importante inhibition de la différenciation. Dans les cellules surexprimant HDAC6, le cil primaire est maintenu après 14 jours de différenciation. Cette observation n’est pas due à une perte des caractéristiques souches de notre modèle, puisque l’on n’observe aucun changement entre les lignées hASC-Ctrl et hASC-HDAC6 au niveau de leur prolifération et de leur capacité à proliférer à l’état clonal. De plus nous avons constaté que la capacité de différenciation ostéoblastique des cellules hASC-HDAC6 est conservée. L’incapacité des cellules à se différencier en adipocyte est donc bien engendrée par la surexpression d’HDAC6 de façon indépendante de la voie des glucocorticoïdes. Finalement, si l’élongation du cil primaire est un événement précoce et nécessaire pendant la différenciation adipocytaire, la perturbation de cette élongation par la surexpression ou l’inhibition d’HDAC6 engendrerait une inhibition de l’adipogenèse.

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Les informations apportées par les modèles de souris invalidées pour HDAC6 ne nous permettent de confirmer le rôle de cette protéines au cours du développement du tissu adipeux puisqu’il n’a pas était étudié dans ces modèles (Zhang et al., 2008). Enfin, l’invalidation d’αTAT1 ne permet pas non plus de confirmer l’importance du niveau de tubuline acétylée dans le développement du tissu adipeux puisque ces souris présentent une perte importante du niveau de tubuline acétylée dans une grande majorité de tissu excepté le tissu adipeux blanc, les poumons et la rate (Kim et al., 2013). La conservation de l’acétylation de la tubuline dans certains des tissus de ces mutants peut être due à d’autres acétyltransférases de l’α-tubuline. Ainsi, on peut envisager que des protéines comme Ard1-Nat1, ELP3 et GCN5, qui sont connues pour être capable d’acétyler l’α-tubuline in vitro (Conacci-Sorrell et al., 2010; Creppe et al., 2009; Ohkawa et al., 2008)

IV. Les raisons de l’allongement du cil au cours de la différenciation adipocytaire