• Aucun résultat trouvé

Chapitre 4 : Interprétation des récits ethnographiques

4.1 Discours des AVSEC sur la vie spirituelle

Les AVSEC sont porteurs d’un discours « conscientisé » et explicite sur leur propre mise en action de la vie spirituelle.

Pour les animatrices et l’animateur observés et interviewés, la vie spirituelle est un

apprentissage à vivre en communauté. L’AVSEC 1 dit que la vie spirituelle, ce sont les

« qualités qui font qu’on est ouvert aux autres » et que les jeunes qui développent leur vie spirituelle sont plus « sensibles à ce qui s’passe autour d’eux », qu’ils ne « sont pas centrés sur eux ». De son côté, l’AVSEC 2 précise avec passion que c’est : « permettre à l’élève de participer activement à sa croissance et à celle des autres ». Elle nous a aussi mentionné que cet apprentissage est conscient et qu’il nécessite la présence des autres, car on ne vit pas seuls sur une île, raison pour laquelle le rapprochement avec l’engagement communautaire est essentiel. Pour l’AVSEC 3, apprendre à vivre en communauté, c’est amener les jeunes à sortir du « règne de l’indifférence » pour s’ouvrir aux autres, car toute personne a sa dignité. Il suscite à la fois une réflexion individuelle et sociale.

D’ailleurs, le Cadre ministériel stipule sur le sujet :

Cette démarche est dite ‘individuelle’ parce que tout individu doit prendre en charge lui-même sa route. En cela il n’est toutefois pas isolé, ni laissé à lui-même, car son cheminement s’effectue dans une collectivité [c’est nous qui soulignons]. Il est nourri et façonné par les autres qui fréquentent la même route existentielle (parents, amis) ou par la société (culture, religion, etc.). […] Il ne peut d’ailleurs en être autrement, puisque l’être humain est essentiellement un être social. (MELS 2005, p. 32)

Grâce à la vie spirituelle, les élèves deviennent de meilleures personnes. Ainsi, ils vont se soucier de chacun des membres de leur communauté. Ces adultes de demain ne seront pas centrés sur leur seule petite personne, ils seront moins égoïstes, moins égocentriques, c’est du moins ce que nous espérons. En prenant conscience des difficultés des autres, ils trouveront du temps pour leur venir en aide. La vie spirituelle est le développement des qualités sociales d’une personne.

Dans un autre ordre d’idée, les AVSEC parlent de l’importance de la vie spirituelle pour

répondre à des questions existentielles. Pour l’AVSEC 3, la plus grande partie de sa définition

de la vie spirituelle porte sur la quête de sens. C’est d’amener les jeunes dans une « démarche qui questionne », par exemple : « Qu’est-ce que tu fais? […] Qu’est-ce qui t’a motivé? Qu’est- ce que tu perçois? Est-ce quelque chose qui est important? Est-ce que tu t’en vas quelqu’part? Quel sens tu y as donné? Pourquoi t’as fait ça? » Pour lui, répondre à ces questions existentielles favorise un développement équilibré des élèves. Cela nous fait dire que ces mêmes questions

favorisent une réflexion intérieure chez les jeunes. Pour l’AVSEC 2, son activité est branchée sur le spirituel parce qu’il y a une démarche intérieure : en prenant leur parchemin, les jeunes vont prendre le temps de répondre à des questions sur leur passé, leur présent et leur futur pour bien leur faire voir leur parcours de vie qui devient un trésor. La réflexion intérieure participe à la vie spirituelle.

Enfin, l’animation de la vie spirituelle pourrait aider certains jeunes à développer des

valeurs. Pour l’AVSEC 1, certains jeunes ne mettent pas en pratique la valeur du respect, même

s’ils connaissent le mot ‘respect’4. À la maison, ils manquent de respect à leurs parents et, à

l’école, c’est à leurs enseignants et tous les membres du personnel qui ne demandent qu’à leur venir en aide. Ils ne respectent pas leurs camarades et, le plus choquant, ils ne se respectent pas eux-mêmes. Ainsi, comment peuvent-ils respecter l’autorité dans la société? Le discours de l’AVSEC 1 rejoint ainsi la quête de sens.

L’AVSEC 3 utilise aussi le mot ‘valeur’ afin d’éviter l’expression ‘vie spirituelle’ qu’il trouve « trop intense ». Selon lui, s’il commence à parler de vie spirituelle, il suscitera des craintes, alors qu’il manque de temps pour expliquer ce qu’est la vie spirituelle. S’il parle de valeurs auprès des jeunes, ils comprennent facilement. Cette affirmation ne signifie pas pour autant que l’AVSEC 3 pense que la vie spirituelle se réduit aux valeurs, mais il choisit de changer un mot pour l’autre afin de faciliter la communication.

En conclusion, le discours des AVSEC sur la vie spirituelle dans la communauté, la quête de sens et les valeurs confirme que le développement du jeune est au cœur de sa spiritualité.

4 Dans son livre Une spiritualité au quotidien, Grand’Maison donne la parole aux jeunes. Un s’exprime en ces mots : « Moi, […] je pense qu’il y a une crise des valeurs car elles n’ont pas de profondeur. Une vraie valeur pour être elle-même, doit avoir des racines. J’ai entendu dire que des sondages soulignent que c’est la valeur ‘respect’ qui arrive en tête de liste. Mais pratiquement personne ne semble rien savoir de la source du problème. Peut-être qu’elle est spirituelle? » (Grand’Maison citant un jeune, 2015, p.53)

Tout de suite après, un autre mentionne : « […] je dirais la même chose au sujet de l’autorité qui n’est plus une valeur aujourd’hui. Là encore, c’est peut-être une question spirituelle, elle ne peut être vécue vraiment si elle ne fait pas autorité sur moi. » (Grand’Maison citant un jeune, 2015, p.53).

4.2 Mise en action de la vie spirituelle : valorisation et axes