pascale (incluant la confirmation et la première communion). Il s’agit
incontestablement d’un document romain qui s’adresse aux prêtres des tituli.
Michel Andrieu l’a daté de ca. 650 à Rome et un siècle plus tard en Gaule ; mais
l’étude détaillée du gélasien, avec lequel il a de nombreuses affinités, a permis de
remonter sa date aux alentours de 550-600. C’est donc l’un des plus anciens
ordines qui nous soient parvenus. On notera à propos de cet ordo que les textes
des prières sont cités en entier, alors que l’habitude veut que seuls les incipits
soient repris dans les ordines. La raison en est simple, il s’agit de pouvoir utiliser
23 Sacramentaire d’Autun, p. 68 ; 538.
Hoc expleto procedit pontifex de ecclesia cum omni ordine sacerdotum letania canentes praecedentibus ante eum duobus cereis staturam hominis habentes cum turabulis uel timiamatibus ad fontes benedicendum.
24 Sacramentaire d’Autun, p. 68-69 ; 539 Item consecratio fontes
Hic deponuntur cerei. Discendat in hanc plenitudinem fontis uirtus spiritus tui. Et insufflas in aqua ter uicibus.
25 Sacramentaire de Rheinau, p. 236 ; CCXV incipit benedictio fontis.
1178e hic mittis cereos in fontem.
26 Les ordines sont ici présentés dans l’ordre chronologique, qui ne respecte pas toujours la numérotation qui leur a été donnée par Michel Andrieu.
le document indépendamment d’un sacramentaire
28. Dans l’ordo 11 et dans l’ordo
gélasien, pendant les scrutins, le rite de l’aurium apertium, ou de la tradition des
Évangiles, commence par la procession décrite ci-dessus (p. 171)
29. Ensuite un
diacre prend le livre qui se trouve sur le coin gauche supérieur de l’autel, et,
précédé de deux chandeliers avec des encensoirs, il monte (à l’ambon ou au
pupitre) pour lire (OR 11, 47)
30. Ces rites font partie de la préparation au baptême
et n’ont pas lieu lors de la vigile pascale. Le reste des utilisations du luminaire et
de l’encens ont cours pendant le baptême proprement dit, c’est-à-dire la nuit de la
vigile pascale. Lors de cet office, après la bénédiction du cierge (OR 11, 89)
31,
dont la formule n’est pas donnée dans l’ordo 11, plusieurs prières et chants sont
exécutés. Cela fait, le pontife s’avance de l’église avec tout le clergé en ordre, et
en chantant le Kyrieleison, ils se rendent jusqu’aux fonts. Ils sont précédés par
deux notaires portant des cierges allumés de la taille d’un homme, avec des
encensoirs et de l’encens et la bénédiction des fonts commence (OR 11, 90)
32.
Après deux prières de bénédiction, l’évêque verse du chrême dans l’eau en forme
de croix, mélange l’eau avec la main, et éclabousse le peuple qui reçoit la
permission de recueillir de l’eau pour asperger leur maison et leurs champs.
L’ordo 11 se poursuit très sommairement par le baptême de quelques candidats
par l’évêque, les diacres prenant le relais pour les autres. Les nouveaux baptisés
sont alors vêtus de blanc et amenés à l’évêque pour leur confirmation. L’évêque
invoque les sept dons de l’Esprit Saint sur chaque enfant et signe leur front avec
du chrême. Ensuite la messe de la veillée continue, les enfants reçoivent pour la
première fois l’eucharistie.
28 Ce sont les exemplaires de l’ordo 11 contenus dans la collection B qui comportent ces prières en entier. Dans la collection A, on retrouve le schéma habituel de l’ordo sans prière uniquement avec les rubriques du rituel. En effet, la collection B, caractéristique d’une première adaptation aux territoires francs tend à se suffire à elle-même, telle un « petit pontifical » sans recours systématique aux livres de messe ; il ne s’agit plus d’un simple directoire.
29 Andrieu, II, p. 428 ; OR 11, 44 : Inde vero procedunt quattuor diaconi de sacrario cum quattuor libros evengeliorum, praecedentibus eis duo candelabra cum turabula et incensum, et ponunt ipsa evangelia in quattuor angulos altaris.
30 Andrieu, II, p. 429 ; OR 11, 47 : Et tunc accipiens unus diaconus de super angulo primo altaris sinistro librum evangelii, praecedentibus ante eum duo candelabra cum turabulis, ascendit ad legendum.
31 Andrieu, II, p. 444 ; OR 11, 89 : Postea impletur <cerei> benedictio. Inde sequuntur lectione per ordinem cum canticis ad ipsum diem pertinentes.
32 Andrieu, II, p. 444 ; OR 11, 90 : Hoc expleto, procedit pontifex de ecclesia cum omni ordine sacerdotum, laetania cantantes, hoc est Kyrieleison, usquedum veniunt ad fontes, praecedentibus ante eum notariis cum duobus cereis ardentibus, statura hominis habentes in altum, cum turabulis et timiamateribus, et incipiunt laetania quae subsequitur : Christe audi nos, et reliqua.
Au Latran, le jeudi saint, on célèbre une messe unique au cours de laquelle
le pape bénit le chrême
33. Cette messe est décrite dans un ordo qui a échappé à
Michel Andrieu mais qui est étudié et édité par A. Chavasse
34. Cet ordo fait le lien
entre le rituel décrit le jeudi saint au Latran dans les sacramentaires et les ordines
plus récents. Il semble qu’il appartient au VII
esiècle, il signale que neuf
luminaires sont placés devant l’autel
35. Cette messe commence par une procession
classique où un encensoir et sept luminaires encadrent l’évêque.
L’ordo 23 (700-750)
36décrit de façon courte et précise le rituel des trois
derniers jours de la semaine sainte (le Triduum) au Latran. L’auteur serait un
Germain, à tout le moins un Franc, qui a assisté aux cérémonies du Latran et
décrit ce qu’il a vu. Le jeudi saint, à l’heure de la messe, c’est-à-dire la septième
heure, le pape (« l’apôtre du Latran ») se rend avec les diacres et les sous-diacres à
la sacristie (secretarium). Ensuite, ils en sortent pour la messe de bénédiction du
chrême : le pape est précédé de sept acolytes portant chacun un chandelier
(candelabris)
37, viennent ensuite les diacres vêtus de leurs dalmatiques et en
dernier lieu, les sous-diacres vêtus de blanc (OR 23, 3)
38. La description du jeudi
saint ne contient pas d’autre occurrence sur le luminaire ou l’encens.
33 Le jeudi saint est le jour de la consécration des trois huiles saintes (le chrême, l’huile des catéchumènes et l’huile des infirmes). La base de ces trois huiles est l’huile d’olive, le chrême intègre un autre composant qui lui donne son parfum, le baume. Le baume est composé de divers ingrédients aromatiques, très souvent il contient de l’oliban. C’est à ce parfum que se rattache toute la symbolique du chrême. Le choix du jeudi saint comme jour de consécration de ces huiles s’explique par le fait que c’est ce jour-là que les Évangiles de Marc et de Matthieu placent le geste de Marie-Madeleine, qui lava et oignit les pieds du Christ. La thématique du chrême a largement été abordée dans Jean-Pierre ALBERT, Odeurs de sainteté. La mythologie chrétienne des aromates, Paris, 1990.
34 Antoine CHAVASSE, « A Rome le jeudi saint au VIIe siècle d’après un vieil ordo », dans Revue d’histoire ecclésiastique, 20, 1955, pp. 21-35.
35 Antoine CHAVASSE, « A Rome le jeudi saint », op. cit., p. 24 : Omnibus rite in altare compositis, oblata et libamenta, paucaque per ecclesiam luminaria accensa, diaconi dalmaticis vestiti, cereostata VIIII ante altare posita.
36 Andrieu, III, pp. 263-266 (introduction) ; 267-273 (texte).
37 Le vocabulaire utilisé pour décrire ce rite par ailleurs purement romain, est un indice pour attribuer la rédaction de l’ordo à un pèlerin franc venu célébrer Pâques à Rome. Ainsi, le terme
candelabra au lieu de cereostata.
38 Andrieu, III, p. 269 ; OR 23, 3 : Postea quam de secretario exeunt, subdiaconi cum albis vestibus procedunt et diaconi cum dalmaticis et ante dom[num] apostolicum VII acoliti cum VII candelabris.