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Chapitre 2 : Matériaux et Techniques d'analyses

V. Diffusion des rayons X aux petits angles (SAXS)

La microcopie et la sonde atomique tomographique permettent d’observer de très petits objets mais dans un très petit volume. La diffusion des rayons X aux petits angles (Small Angle X-ray Scattering ou SAXS) est une technique complémentaire qui permet d’obtenir des informations sur la taille moyenne des précipités et leur densité à très petite échelle (1-100nm) sur un volume de matière plus grand ; par ailleurs cette technique peut êrte réalisée in-situ lors de traitements thermiques.

Principe du SAXS

Cette technique repose sur les intéractions rayons X – matière, notamment l’interaction élastique des photons avec les nuages électroniques. Ces photons, en traversant l’échantillon vont pouvoir donner des informations sur les fluctuations de densité électronique dans un matériau hétérogène. Par conséquent, sur les fluctuations du numéro atomique (et de la composition) entre les précipités et la matrice. Des ouvrages et

publications présentent la théorie et les applications de cette méthode

[30–33]

, notons que l’article de De Geuser et Deschamps [34] est un exposé clair de la technique.

Le faisceau de rayons X traverse l’échantillon avec un faisceau incident 𝐾⃗⃗⃗ , une partie de ce faisceau 𝑖 est transmis 𝐾⃗⃗⃗⃗ , une autre est absorbée, et une dernière est diffusée élastiquement 𝐾𝑡 ⃗⃗⃗⃗⃗ avec une longueur 𝑓 d’onde 𝜆 . Les faisceaux transmis et diffusé parviennent au détecteur qui est placé à une distance 𝐿, variable, de l’échantillon qui permet de récolter les ondes diffusées voulues. On obtient alors un angle de diffusion 2𝜃 correspondant à la déviation angulaire entre le faisceau transmis et le faisceau diffusé. Ainsi qu’un vecteur de diffusion 𝑞 = 𝐾⃗⃗⃗⃗⃗ − 𝐾𝑓 ⃗⃗⃗⃗ , de norme 𝑞 = 𝑡 4𝜋

𝜆 sin 𝜃 en m-1. Schéma du principe en Figure 2. 25.

Figure 2. 25 : Schéma d’une expérience de diffusion d'un faiscceau de rayons X aux petits angles (SAXS). Inspiré de [27]

Chaque onde de diffusion est donc émise par un diffuseur positionné en 𝑟 . Elle est définie par un terme de phase 𝑒𝑥𝑝(−𝑖𝑞⃗ 𝑟 )et une amplitude. L’onde résultante pour un angle de diffusion donné correspond à la somme des contributions de toutes les ondes. Comme les hétérogénéités observées sont à une échelle plus grande que les distances interatomiques, il est plus pratique d’utiliser un terme 𝜌(𝑟 ), qui est le nombre de diffuseurs par unité de volume (et donc la densité électronique) à la position 𝑟 , appelé facteur de densité de diffusion. On peut alors définir une amplitude de diffusion et une intensité de diffusion à un 𝑞 donné :

𝐴(𝑞 ) = ∭ 𝜌(𝑟 ) 𝑉

𝑒𝑥𝑝(−𝑖𝑞⃗ 𝑟 ) 𝑑𝑉 (2.40)

𝐼(𝑞 ) = |𝐴(𝑞 )|² (2.41)

Si l’on considère que l’échantillon diffuse de manière isotrope, et que l’on utilise 𝛾(𝑟), l’autocorrélation de 𝜌(𝑟 ) on obtient :

𝐼(𝑞) = 𝑉 ∫ 4𝜋𝑟²𝛾(𝑟)sin (𝑞𝑟) 𝑞𝑟 𝑉

𝑑𝑟 (2.42)

Si on se place dans le cas d’un alliage métallique contenant des précipités inclus dans une matrice, de facteur de densité de diffusion 𝜌𝑝 et 𝜌𝑚 respectivement. Pour un précipité de rayon 𝑅 et de volume 𝑉𝑝 l’intensité s’exprime :

𝐼1(𝑞, 𝑅) = (𝜌𝑝− 𝜌𝑚)2𝑉𝑝2(3sin(𝑞𝑅)−𝑞𝑅 cos (𝑞𝑅)(𝑞𝑅)3 )2 (2.43) Pour des formes précipitées moins simples, la détermination de l'intensité diffusée par une seule particule peut impliquer une intégration numérique sur toutes les orientations.

Si la distance inter-précipitée est grande par rapport à leur taille, l'intensité totale est alors la somme de l'intensité diffusée par chaque précipité individuel. Si l’on considère une fonction de dispersion de taille 𝑓(𝑅) correspondant à la densité de précipités de taille 𝑅, l’intensité totale est donnée par :

𝐼(𝑞) = ∫ 𝑓(𝑅)𝐼1(𝑞, 𝑅)𝑑𝑅

0

(2.44)

Corrections des données brutes

La correction des données brutes d’une expérience SAXS nécessite la mesure du bruit de fond (mesure sans échantillon) ainsi que la connaissance de l’intensité incidente et de la transmission de l’échantillon. On peut alors soustraire du signal le bruit de fond atténué par la transmission de l’échantillon. Le signal corrigé de bruit de fond doit ensuite être normalisé par l’angle solide, l’intensité incidente, la transmission de l’échantillon et l’épaisseur de l’échantillon. Le détecteur utilisé permet en outre de filtrer le signal de fluorescence dû aux atomes de Fe présents dans l’alliage. Figure 2. 26(b).

Figure 2. 26 : (a) Courbe brute d'un cliché d'expérimentation de SAXS d'un alliage Al-Li-Mg (la contribution de Laue est visible. (b) Graphique représentant 𝐼𝑟𝑎𝑤𝑞4= 𝑓(𝑞4), la pente étant égale à 𝐼𝐿𝑎𝑢𝑒 . (c) Courbe corrigée de la diffusion de

Laue. [34]

Exploitation des résultats

Il est maintenant possible d’exploiter l’équation (2.43) afin d’interpréter la Figure 2. 26(c). Une des méthodes est d’utiliser un modèle qui va pouvoir s’ajuster à la courbe expérimentale grâce à une fonction de forme connue et un modèle de dispersion de taille qui est ici une dispersion en log-normal [34]:

𝑓(𝑅) = 1 √2𝜋𝜎𝑅 𝑒𝑥𝑝 (− 1 2( ln (𝑅𝑚/𝑅) 𝜎 ) 2 ) (2.45)

Il comporte deux paramètres ajustables : 𝑅𝑚 la taille médiane des précipités (proche de la taille moyenne pour une dispersion large) et 𝜎 qui est la largeur de la distribution de taille. Il a été montré que ce modèle s’ajuste bien sur les données expérimentales, tracé rouge Figure 2. 26(c), excepté pour les intensités élevées. Cependant, cette déviation a été interprétée comme étant due aux interférences entre précipités lorsque la fraction volumique est forte et démontrée par le modèle Percus-Yevick [36], tracé en blanc pointillé sur Figure 2. 26(c).

Le modèle utilisé pour ajuster la courbe théorique aux courbes expérimentales dans cette étude utilise une fonction qui comprend plusieurs contributions. Tout d’abord les contributions de correction des données brutes (normalisation V.B), et également des éléments plus gros que le seuil de détectabilité ainsi que de la solution solide. Les contributions de deux populations de précipités sont ensuite ajoutées et sont fonction de plusieurs paramètres comme la fraction volumique, le rayon moyen et la composition. Il est alors possible de fixer des valeurs, ici la composition des deux types de précipités, et de limiter les autres à des valeurs connues de la littérature (en donnant des fourchettes de fraction volumique et de distribution de taille).

Ce modèle va ensuite se servir des paramètres variables pour s’ajuster à la courbe expérimentale et ainsi estimer les rayons moyens des précipités, leur dispersion de taille et leurs fractions volumiques. Il est alors possible de représenter l’évolution de ces deux paramètres en fonction du temps ou de la température. Plus de détails sur ce modèle sont présentés dans les travaux de Deschamps et De Geuser [37].

Dans le cas de la fraction volumique, il y a cependant une hypothèse importante à évoquer. En effet, l’intensité du signal est fonction de la fraction volumique (par classe de taille) multiplié par le contraste électronique qui dépend lui-même de la composition, ici en Zn, des précipités (équation 2.46). Donc si l’on veut comparer les fractions volumiques des différentes classes de taille de précipités, on considère que pour chaque classe de taille les précipités ont la même composition en Zn (la composition en Mg et Cu est négligée ici notamment à cause du faible contraste électronique de ces éléments par rapport à celui du Zn).

Δ𝜌2= 𝐶𝑍𝑛2 (𝑓𝑍𝑛− 𝑓𝐴𝑙

Ω )

2

(2.46)

Avec 𝜌 la densité électronique, 𝑓𝑍𝑛 et 𝑓𝐴𝑙 les facteurs de dispersion, Ω le volume atomique 𝐶𝑍𝑛 la concentration atomique de Zn dans les précipités.

Ce type de modèle permet donc d’avoir des informations sur la distribution de taille (et la taille moyenne) et la fraction volumique d’une ou plusieurs familles de précipités. Plusieurs études ont montré que cette technique, parfois couplée à de la microscopie ou de la sonde atomique tomographique permet d’observer l’évolution des précipités à une échelle nanométrique notamment lors de traitements en fatigue ou traitements thermiques (in-situ)

[38–44]

; un exemple est exposé dans la Figure 2. 27.

Figure 2. 27 : Analyse des précipités d'un alliage Al-Zn-Mg-Cu par SAXS et MET après différentes vitesses de trempe par Zhang et ces collaborateurs [40].