• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 2 : APPROCHE CONCEPTUELLE ET MÉTHODOLOGIE DE RECHERCHE

4. DIFFICULTÉS RENCONTRÉES

98 des ex-combattants, des combattants en activité et des combattants reconvertis dans le but de déterminer les causes de leur adhésion dans le maquis. Pour ce faire, nous avons séjourné dans ces milieux, côtoyé certaines personnes qui nous ont servi d’intermédiaires. Cependant, il faut signaler que pour cette première phase de terrain, nous avons eu des difficultés pour rencontrer les combattants de certaines factions. Cela est dû aux différents incidents en Casamance : braquages, mort du leader de l’aile politique (Abdou Elinkine Diatta), etc., une des causes de beaucoup de reports de rendez-vous.

En revanche, il faut le rappeler, l’exploitation que l’on fait de ces données de pré-enquête est encadrée avec réserve et distance méthodologique dans un souci d’un principe d’objectivité suffisante et de rapports mesurés avec nos futurs enquêtés. En somme, il est important de signaler que la pré-enquête n’est rien d’autre qu’un test méthodologique permettant de vérifier les outils de collecte de données. Elle joue aussi un rôle de ciblage des personnes à interviewer dans l’enquête proprement dite. Dès lors, il est important de signaler que la région de Ziguinchor constitue notre champ d’étude. Cependant, pour des raisons liées à l’exhaustivité des données de terrain et à la mobilité de nos cibles, nous étions obligé d’élargir le cadre d’étude. C’est la raison pour laquelle nous avons intégré dans le choix de cette étude certaines localités de la région de Sédhiou et des pays limitrophes du Sénégal (Gambie et Guinée-Bissau). Cette phase de l’enquête proprement dite nous a permis en tant que chercheur d’effectuer des déplacements dans les zones d’ancrage de la cible. Cette fenêtre nous a donné l’occasion d’assister aux différentes rencontres des membres de l’aile civile du MFDC tenues dans le département de Bignona. L’objet de ces différentes rencontres consiste à encourager les combattants au dépôt des armes. De plus, ces rencontres ont donné l’occasion aux initiateurs de mettre en place un collectif de l’aile civile du MFDC dont l’objectif est de réfléchir sur un projet de société. En effet, nous avons bénéficié d’une invitation d’un des membres du collectif pour participer à ces différentes rencontres. Dès lors, les ordres du jour ont souvent porté sur les processus de réconciliation, d’unification du MFDC et de paix en Casamance.

99 portant sur la question des acteurs de terrain spécifiquement aux parcours des combattants, sur leurs trajectoires de vie.

D’une manière générale, les ouvrages sur le conflit en Casamance, les causes, les conséquences et les méthodes de résolutions du conflit sont assez abondants, mais rares sont ceux qui portent sur les parcours individuels des membres du MFDC. Cet aspect constitue un angle mort de la recherche, ce qui du coup nous a amené à comprendre les motivations individuelles, c’est-à-dire les causes (culturelles, stratégiques, politiques) de leur adhésion au MFDC, mais aussi celles de leur reconversion. Á ces problèmes qui sont liés directement au sujet de recherche s’ajoutent d’autres comme le temps, l’aspect matériel et financier, l’accès à certains lieux, mais aussi le respect des dates prévues pour les entretiens. Ce dernier est en général dû à la complexité de la question, car bon nombre des combattants du MFDC ont émis le souhait de ne pas parler de leur passage dans le maquis. Très souvent, parlant des difficultés sur le terrain, le chercheur s’attarde la plupart du temps sur des aspects anodins liés à la logistique : dictaphone, fréquentation de gens inconnus, amitiés dans les bivouacs (dans les escales ou lieux de pauses) sont de bien beaux souvenirs qui souvent occultent le caractère méticuleux de la collecte. Les difficultés de logistique et les aléas climatiques annulent le poids des difficultés scientifiques : les définitions inadéquates ici ou maintenant, les refus de réponses, les biais de collectes.

En définitive, il est à préciser que le processus d’enquête est fait de difficultés. En effet, celles-ci ne sont pas seulement d’ordre logistique ou matériel. Elles sont d’ordre épistémologique en mettant l’accent sur les méthodes, les mécanismes, mais aussi les interactions avec nos interlocuteurs durant la phase de collecte proprement dite. Voilà en somme quelques difficultés qui se sont posées dès les premières étapes de cette recherche. La deuxième étape a révélé aussi plusieurs difficultés. C’est une phase pratique qui nous a donné l’occasion de rencontrer nos interlocuteurs. L’une des difficultés principale, reste celle des prises de notes et des enregistrements lors des interviews. En effet, la majeure partie de nos interviews ont souhaité que nos entretiens se fassent sans le moindre dictaphone, ni bloc-notes. Première contrainte, la mémorisation des discours des interviews, qui a constitué un blocage dans le traitement des données de terrain. Deuxième contrainte, l’organisation des discours après l’interview. Certains enquêtés ont refusé de se faire registrer lors d’une interview. Cette équation nous a permis de faire un travail de remémoration. Ce dernier permet au jeune chercheur que nous sommes, juste après l’interview, de rester dans un endroit calme pour noter tout ce qu’il a retenu durant l’entretien. Ce travail de remémoration nous a permis de répertorier les différents concepts développés par nos interlocuteurs.

100 Á cela s’ajoute le non-respect des rendez-vous. C’est une autre difficulté que nous avons rencontrée sur le terrain. La plupart de nos interviews n’ont pas su respecter les rendez-vous pour des causes justifiées de part et d’autre. Pour certains membres du MFDC, après un entretien, les chercheurs ont l’habitude de révéler leur identité à l’État du Sénégal. D’autres en revanche, ont soulevé le problème de disponibilité. Pour surmonter ces difficultés récurrentes au début de nos premiers entretiens, nous avons utilisé le canal des intermédiaires. Cette démarche consiste à chercher un intermédiaire pouvant faciliter les rencontres avec les combattants de la branche armée « attika » et de certains membres du MFDC (ex-combattants, aile politique). Aussi, pour une étude sur un conflit aussi complexe, le chercheur doit toujours faire face à plusieurs problèmes.

Pour cette étude portant sur la sociologie des acteurs du terrain, des menaces et intimidations ont été chaque fois à l’ordre du jour. Mais force est de comprendre que l’axe de recherche sur lequel porte cette étude pourrait faciliter l’État du Sénégal dans sa politique de démobilisation, de désarmement et de réintégration des combattants mais aussi de RRDD (réintégration, de réinsertion et de développement durable). En effet, ce conflit porte les germes d’une précarité jusque-là jamais recensée et a maintenu une partie des citoyens sénégalais dans une situation très vulnérable. Dès lors, sa résolution peut offrir des opportunités à la Casamance et leur redonne son statut de grenier du Sénégal. En définitive, cette étude nous a donné l’occasion de chercher des facilitateurs, des intermédiaires, mais aussi de demander conseil aux acteurs du conflit, aux professeurs dans l’orientation et la documentation.

101