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La différenciation du tractus génital

a Chez le mâle

Au moment où débute la différenciation gonadique mâle, le tractus est encore sexuellement indifférencié. On observe la présence des deux types de canaux : les canaux de Wolff et de Müller. Vers 14 jpc, les canaux de Müller commencent à dégénérer dans le sens cranio-caudal (Arango, Kobayashi et al. 2008).

Figure 4 : Les expériences de Jost (1947-1953). Un testicule greffé à la place d’un ovaire fœtal entraine une régression des canaux de Müller chez le fœtus lapin femelle de 21 jours (expérience 1). En revanche, la greffe d’un cristal de propionate de testostérone n’induit pas de régression des canaux de Müller (expérience 2). C’est donc une substance testiculaire autre que la testostérone qui induit la régression des canaux de Müller. Jost avait découvert l’hormone anti Müllérienne (AMH).

Figure 5 : Différenciation sexuelle du tractus génital. Chez le mâle, la première hormone sécrétée par le testicule

est l’AMH produite par les cellules de Sertoli. L’AMH va induire la régression des canaux de Müller. Les cellules de Leydig vont ensuite produire de la testostérone, responsable du maintien et de la masculinisation du tractus. Chez la femelle, l’absence de production hormonale va entrainer la régression des canaux de Wolff ainsi que le maintien et la différenciation des canaux de Müller (Behringer 1994).

Une fois la régression des canaux de Müller complète, la différenciation des canaux de Wolff commence. Les parties supérieures et inférieures donneront respectivement l’épididyme et le canal déférent porteur de la vésicule séminale dans sa position terminale. Les organes génitaux externes se forment à partir du tubercule génital à 16 jpc chez la souris.

Ces observations morphologiques ont été appuyées par les travaux d’Alfred Jost sur le fœtus de lapin (Jost 1953). Après avoir implanté à des fœtus lapin femelle de 20 jours un testicule du même âge à proximité de l’ovaire, il a observé une régression du canal de Müller du côté de la greffe. Il a donc émis l’hypothèse qu’une hormone produite par le testicule était responsable de cette régression. Pour compléter ses premières expériences, il a ensuite implanté un cristal de propionate de testostérone à proximité d’un ovaire de fœtus femelle de 20 jours. Le canal de Müller restait alors intact. Alfred Jost en déduisit donc que la substance responsable de la régression des canaux de Müller produite par le testicule n’était pas la testostérone. Il appellera cette substance «inhibiteur Müllerien». Cet inhibiteur sera identifié 30 ans plus tard comme l’hormone anti-Müllerienne ou « anti-Müllerian hormone » (AMH) également dénommée « Mullerian inhibiting substance » (MIS) (figure 4).

b Chez la femelle

La différenciation du tractus femelle est un événement passif. En l’absence de sécrétion d’AMH par la gonade fœtale, les canaux de Müller sont maintenus et la dégénérescence des canaux de Wolff va débuter à partir de 15 jpc chez la souris. Les canaux de Müller vont se différencier par la suite en oviductes, utérus et partie supérieure du vagin (figure 5). Les anomalies müllériennes correspondent à un ensemble de malformations utéro-vaginales congénitales résultant d’un défaut de développement, de fusion ou de résorption des dérivés müllériens. L’étiologie des anomalies müllériennes est encore inconnue pour la plupart d’entre elles. C'est le cas pour le syndrome de Mayer-Rokitansky-Küster-Hauser (MRKH) qui correspond à une pathologie dont la caractéristique clinique première est l’absence d’utérus et des 2/3 supérieurs du vagin. Il a été suggéré que l'AMH ou son récepteur pouvaient être responsables de cette pathologie mais une étude contradictoire a écarté cette hypothèse (Folch, Pigem et al. 2000 ; Resendes, Sohn et al. 2001).

Figure 6 : La détermination sexuelle chez la souris A. La détermination sexuelle est due à une cascade d’activation précise de nombreux gènes. La zone grise représente la période de détermination sexuelle. Pendant l’embryogénèse chez la souris, la gonade bi-potentielle apparaît à 10.5 jpc, les cellules somatiques XY expriment alors Sry dont l’expression atteint un pic à 11.5 jpc et diminue. Quelques heures plus tard, le gène Sox9 s’active à son tour. L’expression de

Sox9 augmente jusqu’à 12.5 jpc et se maintient ensuite à ce niveau. Ce maintien est dû à des boucles de régulation positive (incluant Fgf9,

Pgd2 et Sox9 lui-même). Cette cascade permet

la mise en place des cordons séminifères. En l’absence de Sry, des gènes tels que Wnt4,

Rspo1 ou encore Foxl2 s’activent et induisent le développement de l’ovaire. B. Profils d’expression des différents gènes impliqués dans le déterminisme du sexe au cours du développement chez la souris mâle ( ) et femelle ( ). (Kashimada and Koopman 2010)

3 Régulation génétique de la différenciation sexuelle chez les mammifères

Les études les plus détaillées de la différenciation sexuelle des mammifères ont été réalisées en utilisant la souris comme modèle. Chez la souris, la gonade primordiale, appelée également crête génitale se développe à 10 jpc. A ce stade, il n’y a pas de différences morphologiques et fonctionnelles entre les crêtes génitales mâles et femelles. Les deux structures présentent des cellules précurseurs capables de se différencier en cellules de Sertoli ou en cellules de la granulosa. Le développement des gonades dépendant du sexe est déterminé par l’expression du gène Sry dans les cellules somatiques de la crête génitale XY à 10.5 jpc (Kashimada and Koopman 2010). SRY va alors activer l’expression de Sox9 (SRY box containing gene 9) dans les cellules précurseurs des cellules de Sertoli lequel va réguler d’autres gènes tels que Fgf9 ou Ptgds (codant pour la prostaglandine PGD2) impliqués dans la différenciation des cellules de Sertoli (Barrionuevo, Burgos et al. 2012). Une fois différenciées, elles vont alors s’assembler pour former les cordons séminifères et stimuler le développement des cellules germinales mâles et des cellules de Leydig productrices d’androgènes.

A l’inverse, en l’absence de SRY dans les gonades XX, des gènes tels que Wnt4 (wingless-type MMTV integration site family member 4), Rspo1 (R-spondin homolog (xenopus laevis)) et Foxl2 (forkhead box L2) commencent à s’exprimer à 11.5-12.5 jpc. En l’absence de Rspo1 et Wnt4 les gonades XX présentent à la naissance des caractéristiques testiculaires (Chassot, Gregoire et al. 2008 ; Tomizuka, Horikoshi et al. 2008). Par ailleurs,

Foxl2 est essentiel à la maturation folliculaire (Schmidt, Ovitt et al. 2004). Ces voies

indépendantes convergent pour réprimer l’expression de Sox9. Une cascade se met en place pour activer l’expression d’autres gènes comme la follistatine qui va permettre par la suite la différenciation des cellules de la granulosa et de la thèque ainsi que la formation des follicules ovariens (Kashimada and Koopman 2010).

Il a récemment été montré que la voie des Wnt/β-caténine inhibait l’expression de Sox9 et de l’Amh dans la gonade femelle (Bernard, Ryan et al. 2012). L’activation de cette voie dans des gonades mâles indifférenciées de souris (11.5 jpc) induit une réversion sexuelle. En effet, la β-caténine empêcherait la fixation de Sf1 sur la région enhancer de Sox9 et donc la différenciation sertolienne (figure 6).

II La folliculogenèse

1 Introduction

L’ovaire adulte est constitué essentiellement de structures particulières, les follicules. Ils sont à différents degrés de maturation et de développement et sont tous constitués d’une cellule germinale, l’ovocyte, entourée de cellules somatiques, les cellules de la granulosa et les cellules de la thèque. L’ovaire présente deux fonctions majeures. La première est la stéroïdogenèse. Il s’agit de la fonction endocrine de l’ovaire, c’est à dire la production d’hormones stéroïdes femelles, essentiellement l’oestradiol et la progestérone. Cette fonction résulte de l’étroite collaboration entre les cellules de la granulosa et les cellules de la thèque. La seconde fonction de l’ovaire est l’ovogenèse. Il s’agit de la fonction exocrine de l’ovaire qui consiste à produire un (ou plusieurs chez les rongeurs) ovocyte mature capable d’être fécondé et d’assurer les premières étapes du développement embryonnaire.

Chez la femelle, les cellules germinales, appelées ovogonies, prolifèrent dans les cordons ovigères, jusqu’à leur entrée en prophase méiotique. Une fois entrées en méiose, les cellules germinales cesseront de se multiplier. A la fin du processus de formation des follicules primordiaux, à la naissance chez l’homme ou à 3 jours post-nataux chez la souris, le stock de follicules est formé et il n’y aura pas de renouvellement possible. A partir de ce stade, Le nombre de cellules germinales dans l’ovaire ne fera que diminuer. La fin de la fonction reproductrice est due à l’épuisement de la réserve ovarienne. Chez la femme, il s’agit du phénomène de ménopause. Il s’agit là d’un dogme bien connu en biologie de la reproduction. Cependant, certaines études ont remis en question l’aspect non renouvelable du pool de follicules primordiaux en supposant la présence de cellules souches germinales en périphérie de l’ovaire et dans la moelle osseuse (Johnson, Canning et al. 2004 ; Johnson, Bagley et al. 2005).

L’entrée en méiose s’effectue dès le stade fœtal à 13-14 jpc chez la souris (tableau 1). Cette méiose évolue jusqu’au stade diplotène de la première division de méiose. Tous les ovocytes restent bloqués et pour certains, à partir de la puberté, la méiose reprendra juste avant l’ovulation. Cette reprise de la méiose aboutira à l’expulsion du premier globule polaire. Puis cet ovocyte se bloquera en métaphase de deuxième division de méiose. La méiose ne se terminera que si la fécondation a lieu.

La formation des follicules primordiaux se déroule pendant la vie fœtale ou la période péri-natale en fonction des espèces de mammifères (tableau 1). Chez la souris, la

fragmentation des cordons ovigères ainsi que la formation des follicules primordiaux a lieu dans les 3 jours qui suivent la naissance (Pepling and Spradling 2001). Les cellules somatiques aplaties (pré-granulosa) s’insinuent entre les ovocytes : le follicule primordial est formé.

La majeure partie des cellules germinales va dégénérer que ce soit lors de la multiplication, lors de l’entrée en méiose ou pendant les étapes plus tardives de la folliculogenèse. On parle d’atrésie folliculaire. Ce phénomène a lieu pendant la vie fœtale aussi bien que pendant la vie reproductive. Dans le fœtus femelle, à 2 mois de grossesse, on compte environ 500 000 cellules germinales et à 5 mois de 5 à 7 millions. A partir de ce stade, on ne fera que perdre des cellules germinales. Au cours d’une vie reproductive seulement 300 à 400 ovocytes seront expulsés. 99% des follicules dégénèrent dans l’espèce humaine. Chez la souris, on compte environ 6000 cellules germinales à 13.5 jpc. Il n’en restera qu’environ 2000 à la naissance (Pepling and Spradling 2001).

2 Evolution morphologique et moléculaire des follicules

Un système de classification a été bien établi pour différencier les stades folliculaires (Edson, Nagaraja et al. 2009).