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CHAPITRE  2-­‐   LE CADRE CONCEPTUEL 17

2.3 L’évaluation à l’éducation préscolaire 23

2.3.3   La différenciation pédagogique 30

Une classe régulière est composée d’élèves ayant des caractéristiques globales semblables au groupe (par exemple, l’âge), et de multiples caractéristiques individuelles (Durand et Chouinard, 2012). Perrenoud (2008) suggère qu’une pédagogie sensible aux compétences et aux différences devrait être mise en place et il conseille de chercher des dispositifs de différenciation qui favorisent les élèves ayant des caractéristiques particulières.

Avant de définir les différents dispositifs, une définition de la différenciation qui répond à la visée de notre recherche semble nécessaire. La différenciation pédagogique, selon Perrenoud (1995), « c’est [l’organisation] [d]es interactions et [d]es activités, de sorte que chaque élève soit constamment ou du moins très souvent confronté aux situations didactiques les plus fécondes pour lui » (p. 29). Pour Legault et Guay (2007) c’est l’harmonisation des différentes composantes d’une situation pédagogique et leurs relations pour favoriser l’apprentissage alors que pour Tomlinson (2004) c’est une réponse de l’enseignant aux besoins des élèves afin qu’ils progressent. Nous retenons de ces trois définitions que les besoins des élèves nécessitent une intervention de la part de l’enseignant et que celle-ci devrait être organisée et planifiée pour que chaque élève bénéficie de façon optimum des situations d’apprentissage et progresse selon ses capacités.

Durand et Chouinard (2012) ajoutent que pour être efficace, la différenciation nécessite une planification des situations d’apprentissage et d’évaluation incluant trois aspects importants : 1) différents dispositifs de différenciation, 2) une régulation durant la démarche de l’élève afin de réussir les tâches complexes qui respectent ses capacités, 3) des interactions sociales avec les pairs pour faciliter le travail de l’enseignant et pour rester dans le socioconstructivisme. Pour ce faire, quatre dispositifs sont repris par Leroux et Paré (2016, p. 76) pour clarifier la différenciation dans tous les ordres d’enseignement incluant l’éducation préscolaire. Ils sont illustrés au tableau II :

Tableau  II  Les  axes  de  différenciation  au  préscolaire  selon  Leroux  et  Paré  (2016).

Cette différenciation se fait selon trois niveaux qui ont des incidences ou non sur le jugement porté lors de l’évaluation. Le MELS identifie ainsi : la flexibilité, l’adaptation et la modification. D’abord, la flexibilité dans les stratégies d’enseignement s’adresse à tous les élèves en leur offrant des choix dans les activités à mener, et notamment, dans la façon de communiquer leur production. Ensuite, l’adaptation des conditions d’apprentissage se base sur la même situation d’apprentissage en apportant des aménagements mineurs dans l’organisation de la tâche, le contenu ou les ressources. Enfin, la modification dans la tâche concerne les élèves ayant des difficultés plus prononcées. Dans ce contexte, l’enseignant apporte des changements majeurs à la tâche pour qu’elle devienne conforme avec la zone proximale de développement de ces élèves. Cet aménagement a des incidences sur le jugement porté lors de l’évaluation et concrétise le rôle planificateur de l’enseignante de l’éducation préscolaire selon le socioconstructivisme.

Comme dans la pratique de la régulation, la différenciation à l’éducation préscolaire applique les grandes lignes décrites ci-dessus mais adopte aussi certaines particularités.

Différencier les structures Différencier les contenus L’organisation de la classe :

Les types de regroupement des élèves ;

Les modalités de travail (atelier, centres d’apprentissage, travail autonome) ;

Les outils de gestion du temps (plan de travail, tableau de programmation) ;

Les ressources matérielles disponibles ; L’aménagement physique de la classe.

les apprentissages à faire :

Les sujets de textes et des leçons ; Les savoirs et les compétences ; Les degrés de complexité ;

Le matériel didactique exploité qui aborde des sujets divers.

Différencier les processus Différencier les productions Les éléments sur lesquels est basée la stratégie

pédagogique :

Les champs d’intérêt ;

Les connaissances antérieures des élèves et leur niveau de compétence ;

L’étayage et la rétroaction par l’enseignant, entre les pairs, par la technologie, etc.

Le niveau de développement des élèves (moteur, cognitif, social, affectif, langagier) ;

La motivation et les engagements dans les activités; Le cadre de vie des élèves (origine socio-culturelle, stratégies parentales, etc.).

La réalisation et les modes de communication :

Les modes d’expression ; Les destinataires ;

Les projets et les créations ;

Les modalités d’évaluation des apprentissages ; Les critères ou niveaux de production exigés (qualitatifs ou quantitatifs).

2.3.3.1 La différenciation pédagogique à l’éducation préscolaire

Au préscolaire, lors de la différenciation, il est important de prendre en compte les champs d’intérêt des élèves, leurs interactions, leurs habiletés sociales et leurs besoins d’accompagnement. De plus, dans l’utilisation des différents outils et stratégies de différenciation, qui touchent les dispositifs (les processus, les structures, les contenus et les productions), l’enseignante mettra en place, par exemple, des ateliers, des centres d’apprentissage, favorisera le travail d’équipe, l’apprentissage coopératif, l’enseignement des stratégies, etc. Il est aussi conseillé que l’enseignante profite de l’aménagement de la classe du préscolaire et de la structure flexible du temps et des activités pour différencier son enseignement en regard du principe de flexibilité (Leroux et Paré, 2016).

Au préscolaire, la démarche de différenciation devrait être conforme avec le profil de la classe. Pour ce faire, Legault et Guay (2007) ont proposé une démarche en 5 étapes à l’éducation préscolaire : 1) la définition de la situation actuelle et de la problématique, 2) la définition de la situation désirée, 3) la planification de l’action, 4) l’action et 5) l’évaluation de l’action, tandis que Leroux et Paré (2016) ont développé une démarche plus englobante qui renferme ces 5 étapes mais qui en proposent d’autres. Voici les 7 étapes de la démarche illustrées à la figure 6 :

Figure  6  Démarche  de  la  différenciation  à  l’éducation  préscolaire     (Leroux  et  Paré,  2016,  p.  167).  

1) l’évaluation initiale des besoins et des caractéristiques de tous les élèves (variables d’hétérogénéité et besoins),

2) l’élaboration des objectifs de différenciation prioritaires.

Ces deux premières étapes sont à la base de cette démarche puisque l’enseignante devrait, en tout le temps, se rappeler des besoins de ses élèves et les objectifs de la différenciation. En ce qui concerne les objectifs, il est pertinent d’en déterminer des réalistes pour une durée précise et suffisante pour s’approprier les changements. Les autres étapes sont :

3) La précision du cadre de la démarche : l’enseignante doit déterminer le domaine, la compétence développementale, la durée et le moment de la démarche.

4) La détermination des outils de différenciation et des moyens pour adapter et modifier l’enseignement : l’enseignante doit construire les outils nécessaires avant le début de la démarche.

5) Le choix et l’aménagement des structures appropriées et des ressources : elle doit préparer l’environnement approprié.

6) L’anticipation des limites de la démarche et des obstacles à sa mise en œuvre, 7) la planification et réalisation de l’évaluation bilan.

Cette démarche nécessite du temps et de la réflexion mais aussi de la préparation. Cependant, en faisant cette démarche en éducation préscolaire, Leroux et Paré (2016) considèrent que l’impact sur les enfants et l’enseignante est positif car le préscolaire est un environnement propice pour intégrer la différenciation graduellement à cause de sa nature ouverte centrée sur le développement global de l’enfant.

De ce qui précède, nous constatons que la différenciation est en complémentarité avec la régulation qui, à son tour, fait le lien entre la didactique et l’évaluation (Schneuwly et Bain, 1993 cité dans Laurier et coll., 2005). L’évaluation devient ainsi une partie intégrante dans le processus d’apprentissage en mettant en pratique la régulation mais aussi la différenciation. Cela est confirmé par Durand et Chouinard (2012, p.125) lorsqu’ils soulignent que « la différenciation se trouve à toutes les étapes de la démarche

évaluative ». Dans la section suivante, nous décrirons les différentes étapes de la démarche évaluative.