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Dichroïsme magnétique : XMCD et XMLD

2.3 Caractérisations magnétiques

2.3.2 Caractérisations microscopiques : techniques basées sur l’absorption des

2.3.2.1 Dichroïsme magnétique : XMCD et XMLD

Le dichroïsme traduit, de manière générale, la dépendance de l’absorption à la polarisation de la lumière. A cet effet, il n’existe dans un matériau que si la symétrie sphérique des orbitales électroniques de l’atome est brisée. Les principaux effets dichroïques étudiés concernent une brisure de symétrie :

– soit par un champ magnétique (matériaux ferromagnétique, antiferromagnétique ou ferri- magnétique), et on parle de dichroïsme magnétique circulaire ou linéaire.

– soit par un champ cristallin et dans ce cas on parle de dichroïsme linéaire naturel (XNLD). Notons qu’un champ magnétique peut induire un dichroïsme circulaire et un dichroïsme linéaire alors que le champ cristallin ne peut induire qu’un dichroïsme linéaire.

- Du calcul à l’observation :

Le premier spectre de dichroïsme magnétique circulaire dans le domaine des rayons X a été calculé par Erskine et Stern [48]. Dix ans plus tard, Thole et al. [49] suggérèrent l’existence d’un effet de dichroïsme linéaire (c’est à dire dépendant de l’orientation relative du champ électrique et de l’aimantation) aux seuils M4,5 des métaux de terre rare. Peu après, et grâce aux développements

des sources de rayonnement synchrotron, van der Laan et al. [50] confirmaient expérimentalement l’effet dichroïque prédit par Thole aux seuils M4,5du terbium. Schütz et al. mesurèrent le premier signal de dichroïsme circulaire au seuil K du fer et du nickel [51]. Plus tardivement, il a été mesuré aux seuils L2,3 du fer et du cobalt par C.T. Chen et al. dans le domaine des rayons X mous [52].

Si le dichroïsme magnétique circulaire (XMCD pour X-ray Magnetic Circular Dichroism) et linéaire (XMLD pour X-ray Magnetic Linear Dichroism) dans le domaine des rayons X sont toutes les deux des techniques qui permettent de sonder le magnétisme à l’échelle microscopique, le dichroïsme magnétique linéaire est moins utilisé parce qu’il ne donne qu’une information sur la valeur moyenne du carré de l’aimantation hM i2 (sur un site chimique et une orbitale spécifique)

et surtout parce qu’il ne permet pas de séparer les effets magnétiques des effets cristallins. A partir d’un signal de dichroïsme magnétique circulaire, qui est proportionnel à hM i, il est au contraire possible de déterminer à la fois les valeurs des moments magnétiques orbital et de spin en utilisant les règles de somme [53–55]. Dans la suite, on ne développera que cette dernière

2.3 Caractérisations magnétiques

- Principe et modèle :

Dans un matériau magnétique, le dichroïsme magnétique circulaire correspond, par définition, à la différence d’absorption pour la lumière polarisée circulairement droite (notée C+dans la suite)

et gauche (C). On observera un signal de dichroïsme magnétique circulaire suivant l’orientation

relative de l’aimantation et du moment cinétique des photons.

Un modèle à deux étapes a été proposé pour comprendre l’origine du dichroïsme magnétique circulaire [56]. Considérons par exemple l’absorption aux seuils L2,3 des métaux de transitions

3d. Dans la première étape, des photons polarisés circulairement droite ou gauche excitent des photoélectrons des niveaux de coeur 2p. Le rapport des nombres de photoélectrons spin-up et spin-down n’est pas le même aux seuils L2 et L3, en raison du couplage spin-orbite sur les niveaux 2p. Dans la seconde étape, la bande de valence agit comme un détecteur de spin. Les photoélectrons sondent sélectivement les états spin-up ou spin-down des bandes 3d. Si le matériau ne possède pas d’aimantation, il n’y a pas de différence entre les densités d’états spin-up ou spin- down, donc pas de signal XMCD.

Fig. 2.20: Modèle phénoménologique à deux étapes expliquant l’origine du dichroisme circulaire [56].

Le signal XMCD aux seuils L2,3 fournit un certain nombre d’informations. A partir de me- sures de spectres XAS et XMCD, il est possible de déterminer le moment orbital et le moment de spin de l’atome sondé par application des règles de sommes (cf. Annexe 2) [53–55]. De plus, l’intensité du signal XMCD est proportionnelle à la projection du moment magnétique de l’atome sondé par rapport à la direction de propagation des photons incidents. Il est alors possible de suivre l’évolution de l’aimantation au cours d’un cycle d’hysteresis de façon selective dans un matériau contenant par exemple plusieurs éléments magnétiques [57].

2.3 Caractérisations magnétiques

- Le dispositif expérimental :

Les mesures de dichroïsme ont été réalisées sur plusieurs synchrotrons sur des lignes fonctionnant dans le domaine des rayons X mous : à l’ESRF sur la ligne ID08 [58], à SLS sur la ligne SIM [59] et à BESSY sur les lignes UE 46 et UE 56 [60]. Hormis la première expérience à l’ESRF, nous avons toujours utilisé la station expérimentale développée par J.-P. Kappler, Ph. Sainctavit et gérée par trois instituts : l’IPCMS (J.-P. Kappler), l’IMPMC (Ph. Sainctavit) et SOLEIL (Ph. Ohresser).

Cette station expérimentale, que l’on dénommera par l’acronyme TBT pour Très Basses Tem-

pératures, est composée de deux chambres : une chambre de préparation et une chambre expé-

rimentale comprenant le cryostat et l’aimant supraconducteur (figure 2.21). Avec ce dispositif expérimental, il est possible d’atteindre des champs magnétiques très intenses (jusqu’à 7 T) et de très basses températures avec l’insert mK (jusqu’à 300 mK). Les spectres d’absorption sont me- surés en rendement total d’électrons (TEY) par la méthode du courant échantillon et normalisés à l’intensité du faisceau incident.

Fig. 2.21: Montage TBT

- Notations :

Le schéma expérimental des mesures basées sur l’absorption de rayons X (XAS, XMLD et XMCD) est présenté sur la figure 2.22. L’angle θ y est définit comme l’angle entre la normale à l’échan-

2.3 Caractérisations magnétiques

Fig. 2.22: schéma expérimental pour les mesures d’absorptions de rayons X (XAS). Les polarisations

linéaires horizontale (HLP) et verticale (VLP) sont définies sur (b).

Dans cette configuration expérimentale, le signal dichroïque XMLD est obtenu à partir des spectres d’absorption XAS enregistrés en incidence rasante avec le champ électrique dans le plan ou perpendiculaire au plan selon la polarisation linéaire de la lumière. Les conventions de nota- tions diffèrent selon le lieu où l’expérience a été réalisée. J’adopterai la convention suivante : la polarisation horizontale (qui sera notée par la suite HLP pour Horizontal Linear Polarization) correspondra à la situation où le champ électrique−→E est perpendiculaire au plan, et la polarisa-

tion verticale (dont l’abréviation sera VLP pour Vertical Linear Polarization) à la situation où

E est contenu dans le plan (0001) de l’échantillon (figure2.22) dans la configuration incidence rasante.

Le traitement des données est détaillé dans l’annexe 2.

2.3.2.2 Spectromicroscopie : X-PEEM