• Aucun résultat trouvé

HMIM V : Hôpital Militaire d’Instruction Mohammed V

E- Diagnostic différentiel du SIADH :

Syndrome de perte de sel (cerebral salt wasting syndrome) [5-26]

L’hyponatrémie dilutionnelle envolémique du SIADH doit impérativement être distinguée de l’hyponatrémie de désalination du syndrome de perte de sel. Si ces deux syndromes partagent des étiologies communes (affections cérébrales et neurochirurgie) et des similitudes biochimiques, leur physiopathologie et donc leur prise en charge, sont radicalement différentes.

Au cours du syndrome de perte de sel, la sécrétion, de facteur natriurétique, serait responsable du bilan sodé négatif, de l’hémocentration et de l’hypovolémie.

Il existe un trouble de la dilution de l’urine consécutive à une hypersécrétion d’AVP induite par l’hypovolémie.

L’apport de cristalloïde est donc la pierre angulaire du traitement du syndrome de perte de sel. La correction du déficit sodé rétablit la volémie, inhibe la sécrétion d’AVP et restaure le pouvoir de délutions des urines.

Si le schéma global du diagnostic différentiel est ainsi simplifié, une entité nosologique associant hyponatrémie, natriurèse élevée et hypovolémie par pertes rénales de sodium, décrite en milieu neurochirurgical sous le terme de cerebral salt wasting syndrome (CSW), mérite d'être développée [28-29].

L'hyponatrémie est le désordre électrolytique le plus fréquent chez les patients de neurochirurgie, sa prévalence pouvant atteindre 33%. L'hémorragie méningée en est la principale pourvoyeuse. Si la responsabilité du SIADH a été exclusivement retenue pendant de nombreuses années, il semble que d'autres causes d'hyponatrémie soient à prendre en compte [5-17].

Le Cerebral Salt Wasting syndrome, ou syndrome de perte de sel, est une hyponatrémie par fuite rénale de sodium avec balance sodée négative et hypovolémie, Il a été décrit pour la première fois en 1950 chez trois patients neurochirurgicaux. L'intérêt pour cette hyponatrémie neurogène, pour reprendre sciemment la terminologie francophone de l'époque, a été littéralement éclipsé par la première description en 1957 du syndrome de sécrétion inappropriée d'ADH. Successivement, la découverte en 1981 du facteur atrial natriurétique (FAN), la mise en évidence de concentrations plasmatiques élevées de FAN, après rupture anévrysmale et l'isolement de neurones contenant un peptide analogue dans l'hypothalamus et dans la lamina terminalis des mammifères, ont remis le CSW sur le devant de la scène. Le FAN est responsable de l'augmentation de la diurèse ainsi que de la natriurèse, de la suppression de la sécrétion de rénine comme d'aldostérone et produit une vasodilatation. Sa libération physiologique est liée à la distension auriculaire et elle est modulée par le système nerveux central. Au niveau cérébral, la concentration de ce peptide est 10000 fois inférieure à celle du muscle cardiaque et insuffisante à elle seule pour rendre compte du CSW. On considère donc qu'une lésion intracrânienne peut perturber la régulation centrale de la libération de FAN, dont l'excès est responsable du CSW [30].

Actuellement, on attribue à ce syndrome un rôle prépondérant dans l'apparition de l'hyponatrémie des patients victimes d'une hémorragie méningée anévrysmale, d'autant que l'hypovolémie y est fréquente et qu'une balance sodée négative précède l'apparition de l'hyponatrémie [27-31-32]. Cependant, seule une étude a mis en évidence une relation linéaire entre concentration plasmatique de FAN et natriurèse [33]. En revanche, il existe une corrélation

entre le score de gravité de l’hémorragie sous arachnoïdienne (HSA) et l’élévation des concentrations sériques de FAN [34]. Le CSW a également été observé au cours de traumatismes craniocérébraux, de méningites carcinomateuses, en cas de tumeurs cérébrales primitives ou secondaires, ainsi qu’au décours de la chirurgie hypophysaire [31].

La distinction, entre le SIADH et le CSW, n’est pas toujours aisée, car de nombreuses formes cliniques intermédiaires peuvent être observées depuis un SIADH pur jusqu’à un tableau complet de CSW [5-35-36].

La mesure de la natrémie, de la natriurèse, des osmolalités plasmatiques et urinaires, ainsi que des concentrations sériques d’ADH et de FAN, ne permet pas toujours de faire la différence.

L’élément clé est l’appréciation de la volémie.

Les techniques isotopiques de mesure de la volémie, réalisables au lit du patient, représentent donc une aide de premier choix, mais ne peuvent être répétées indéfiniment.

On conçoit donc toute l’importance du diagnostic différentiel entre le SIADH et le CSW. Le facteur de confusion, étant dans les deux cas l’existence d’une hyponatrémie associée à une natriurèse élevée, la prise en charge thérapeutique, sera fondée sur la restriction hydrique pour l’un et sur des apports hydrosodés très larges pour l’autre.

Ce tableau, présente les éléments permettant de distinguer le (SIADH), du syndrome de perte de sel.

Tableau 8 : Comparaison entre le SIADH et le syndrome de perte de sel [5] Paramètre Syndrome de perte de sel SIADH

Volémie extracellulaire Diminué Augmenté Diurèse Augmentée Diminuée Hématocrite Augmenté Normal Albuminémie Augmentée Normale Rapport urémie/

créatininémie

Augmenté Diminué Uricémie Normal ou augmentée Diminuée Kaliémie Normal ou augmentée Normale

Tableau 9 : Syndrome (CSW) et syndrome de sécrétion inappropriée (SIADH) d’après Harrigan [27]

CSW SIADH

Volémie

Balance sodée Négative Variable

Déshydratation Présente Absente

Poids ↑ Ou N PAPO ↑ Ou N PVC ↑ Ou N Hématocrite ↓ Ou N Osmolalité ↑ Ou N Urée/ créatinine N Protidémie N Natriurèse ↑↑ Kaliémie ↑ Ou N ↓ Ou N Uricémie N

F- Traitement :

Le traitement du syndrome de SIADH comporte deux volets [5-37-38-39]: ¨ L’identification et le traitement de la cause ;

¨ La correction de l’hyponatrémie elle-même.

Pour le traitement étiologique du SIADH, la correction de sa cause est impérative (suppression d’un traitement par carbamazépine, traitement d’une méningite, d’une tuberculose..), dans certains situations (après chirurgie sur micro adénome hypophysaire), le phénomène une fois traité ne se renouvelle pas. Dans tous les cas, la surveillance prolongée de la natrémie reste nécessaire. Pour le traitement de l’hyponatrémie :

1- La restriction hydrique : pour la plupart des auteurs, la restriction hydrique demeure le seul traitement du SIADH asymptomatique ou pancisymptomatique, dont l’efficacité sur la natrémie constitue l’un des critères du diagnostic [40].

La restriction hydrique limite les apports à 750 ou 1000 ml par jour, la diurèse est alors toujours supérieure aux entrées et le bilan hydrique est ainsi régulièrement négatif compte tenu des pertes insensibles.

Le calcul de la restriction hydrique nécessaire pour maintenir une natrémie donnée se fait de la façon suivante : le volume urinaire maximal (et donc l’apport hydrique autorisé quotidien) est égal à la charge osmolaire quotidienne divisée par l’osmolalité urinaire minimale (qui dépend de la sévérité de l’anomalie de dilution).

Pendant cette période, il est à noter que les patients n’éprouvent pas le besoin de boire et supportent très bien la diète hydrique. Le poids s’abaisse régulièrement, et la natrémie s’élève lentement, le risque de Myélinolyse centropontine (MCP) étant ainsi exclu.

En cas de SIADH chronique, dont la cause ne peut être éradiquée, la restriction hydrique peut devenir difficile à respecter et les patients sont exposés au risque d’intoxication hydrique.

C’est dans cette situation que la déméclocycline ou l’urée peuvent apporter une aide précieuse.

2- L’administration de sel : il ne remplace pas la restriction hydrique, il est nécessaire au cours de l’hyponatrémie sévère symptomatique ou résistance inférieure à 120mmol/l, aigue avec ou sans signe d’œdème cérébral et chronique accompagnée de signes cliniques [39].

L’objectif du traitement incisif est de ramener la natrémie à 120mmol/l, chiffre à partir duquel le traitement sera poursuivi par la seule restriction hydrique.

On perfuse alors 200 à 300 ml de sérum salé à 5% en quatre heures. Dans le but d’éviter une hypervolémie brutale, compte tenu du fort pouvoir osmotique du soluté hypertonique, on administrera au préalable 20 à 40 mg de furosémide intraveineux (c’est un produit de choix car il augmente fortement la diurèse, et diminue le pouvoir de concentration du rein) [40].

Un diurétique de l’anse (furosémide 20mg une à deux fois par jour, lasilix®) est relativement efficace dans ce contexte (ces médicaments interférent

directement avec le mécanisme de concentration des urines en diminuant la réabsorption de Nacl dans la zone médullaire de l’anse de Henlé) [41].

3- La déméclocycline (ledermycine®), antibiotique de la famille des tétracyclines, est efficace dans tous les types de SIADH (600-1200mg/j).

Elle peut être utilisée chez les rares patients qui ont une hyponatrémie marquée persistante ou qui ne peuvent tolérer une restriction hydrique, un apport sodé élevé et un diurétique de l’anse.

Elle induit, après 6 à 7 jours de traitement, un diabète insipide néphrogénique réversible en inhibant la formation et l’action de l’AMP cyclique au niveau du tube rénal (donc en diminuant sa réponse à l’ADH et en augmentant l’excrétion d’eau).

La dose est de 300 à 600 mg 2/j, et l’efficacité commerce 3 à 6 jours après le début du traitement, le médicament doit être administré 1 à 2 heures après les repas et les antiacides à base de calcium, magnésium et aluminium doivent être évités.

Ses effets secondaires sont surtout rénaux (insuffisance rénale réversible, particulièrement en présence d’une insuffisance hépatique) mais aussi digestifs (nausées), cutanés (photosensibilisation) et infectieux (sélection des bactéries mutantes résistantes).

4- Le lithium (sous forme de carbonate) : a une action similaire, mais moins constante (actif dans 20%).

Lorsqu’il est utilisé sur une longue période, il comporte un plus grand risque d’effets secondaires (insuffisance rénale réversible, dégénérescence myofibrillaire cardiaque, hypothyroïdie, tremblements).

Chez les patients non répondeurs, l’association lithium diphényl-hydantoine pourrait être efficace.

5- L’augmentation de l’excrétion de solutés urinaires sous forme d’osmoles permet de négativer la balance hydrique. Ceci peut être obtenu par un régime riche en sel et en protéines.

Cependant, la plupart des patients, avec un SIADH chronique, ont une maladie sous-jacente qui ne permet pas ces apports alimentaires enrichis.

6- L’administration d’urée (30g/jour) est un autre moyen d’augmenter l’excrétion d’eau libre [41].

Ce traitement est généralement bien toléré mais doit être utilisé uniquement chez les patients avec une hyponatrémie marquée qui ne répondent pas au traitement antérieur.

L’urée et les diurétiques de l’anse sont également efficaces dans tous les types de SIADH. Contrairement à la déméclocycline, ils ont une action immédiate.

L’utilisation d’urée, a été décrite par Décaux et al, à la posologie de 15g deux fois /j, elle accroit la diurèse et inhibe la natriurèse tant que la natrémie reste inférieure à 130 mmol/l.

Ses effets secondaires sont rares, même avec un traitement de plusieurs années.

Elle semble particulièrement intéressante chez les patients pour lesquels une volémie normale est impérative (HSA, traumatisme craniocérébral), elle peut également être utilisée pour traiter l’hyponatrémie, de l’insuffisance cardiaque ou de la cirrhose hépatique.

L’administration de diurétiques de l’anse vise à maintenir un bilan hydrique nul par augmentation de la diurèse. Il faudra conserver des apports sodés suffisants (de l’ordre de 3g/j) afin de compenser les pertes urinaires et prévenir l’hypokaliémie.

Associés à une restriction hydrique, déméclocycline, urée et diurétiques de l’anse comportent tous un risque d’hypernatrémie si le patient ne peut boire (coma) ou si coexiste un trouble de la soif.

7- D’autres produits ont été utilisés : l’éthanol possède une certaine action, mais elle est inconstante, de courte durée et nécessite l’emploi de doses toxiques.

La diphényl hydantoïne peut être essayée dans les SIADH de type C et les SIADH d’origine neurologique [42].

La fludrocortisone (0,1 à 0,3 mg deux fois/j) permet d’élever la natrémie de 6 à 8 mmol/l dans tous les cas de SIADH chronique, ce qui permet de rester en zone saine (natrémie > 120mmol/l). Elle semble plus efficace chez les patients atteints des SIADH de type C, ses principaux effets secondaires sont représentés par l’hypokaliémie, l’hypertension artérielle et l’insuffisance cardiaque congestive.

8- Les antagonistes des récepteurs V2 de la vasopressine (inhibiteur centraux de la libération d’ADH : agonistes opioïdes kappa) : ces molécules ont donné des résultats prometteurs chez l’animal mais leur place chez l’homme reste à définir [43-44-45].

Ces récepteurs spécifiques pour l’anti-diurèse sont en cours d’expérimentation chez l’homme mais pas disponibles comme médicament.

Ces médicaments sont sélectivement aquarétiques n’affectant ni l’excrétion de sodium ni celle de potassium.

La liaison compétitive de ces aquarétiques au récepteur V2 entraîne une diminution du taux de transcrits codant pour AQP2 avec apparition d’une diurèse aqueuse sans déplétion électrolytique.

Ils ont sporadiquement été utilisés avec succès au cours du SIADH.

Le conivaptan, un antagoniste non sélectif des récepteurs V1/V2 de l’AVP, vient d’être approuvé par le FDA dans le traitement de l’hyponatrémie isovolémique [43-44-45].

Les découvertes scientifiques de ces dernières années dans le domaine du métabolisme de l’eau permettent aujourd’hui de mieux comprendre la physiopathologie du SIADH et d’envisager de nouvelles pistes thérapeutiques.

Chez notre patiente, le traitement a consisté en une restriction hydrique associée à un diurétique (furosémide : 40 mg/24 heures), la perfusion de 2 litres de sérum salé isotonique sur 48 heures, ainsi qu’une recharge potassique. La natrémie s’est corrigée en 48 heures.

Tableau 10 : Traitement du SIADH selon la sévérité de l'hyponatrémie [38-39]

Traitement Mécanisme d'action Dose SIADH aigue

1. Restriction liquidienne ↑ osmolalité ↓ volume d'eau libre 750-1 250 ml/ jour 2. NaC1 + Furosemide (± K+) ↑ osmolalité ↑ élimination d'eau Remplacement Na+ Solution NaC1 3% : 200·-300 mL IV en 3-4 heures

Furosemide : 1 mg/kg, à ajuster selon la fonction rénale

SIADH chronique

1. Restriction liquidienne ↑ osmolalité ↓ volume d'eau libre 1000-1500 ml/jour 2. Déméclocycline

↓production AMPc inhibant la réponse rénale à l'ADH

450·-1 200 mg/jour ad réponse puis ↓ à 300-900 mg/jour 3. NaC1 + Furosemide (± K+) ↑ osmolalité ↑ élimination d'eau Remplacement Na+ NaCl : 1 000 mg P.O. Furosemide: 1 00 mg P.O. G- Pronostic :

Le pronostic du SIADH dépend de la cause. Les SIADH iatrogènes sont rapidement et complètement corrigés par la suppression de l’agent causal.

De manière parallèle, le traitement efficace des pathologies responsables du SIADH peut éventuellement améliorer ou guérir le SIADH.

Bref, la pathologie sous-jacente détermine le pronostic du SIADH [38]. En concluant, la diversité des causes, tant médicales que chirurgicales, ne doit pas occulter le fait que l’hyponatrémie est l’élément de gravité central au cours de SIADH.

Elle doit être, par conséquent, reconnue et traitée, la correction de la cause et la restriction hydrique représente les grands axes du traitement.

Dans les cas les plus graves, une recharge sodée est nécessaire en visant une natrémie de 120mmol/l. Enfin, en milieu neurochirurgical, il est essentiel de faire la différence entre le syndrome de sécrétion inappropriée d’hormone antidiurétique et Cérébral Salt Wasting Syndrome. La restriction hydrique pratiquée à tort au cours de ce dernier étant un facteur d’aggravation du risque d’ischémie cérébrale

3- HYPONATREMIE

A- Définition :

La natrémie est le principal déterminant de l’osmolalité extracellulaire et par conséquent, de l’hydratation et du volume cellulaire, elle est située entre 136 et 142 mmol/l à l’état physiologique [10-37-46-47].

L’hyponatrémie est généralement définie par une baisse de la concentration plasmatique du sodium au dessous de 135 mmol/l, elle est considérée modérée jusqu’à 130 mmol et profonde au dessous de 120 mmol/l [48-49-50].

Même si l’hyponatrémie est un désordre hydro-électrolytique extrêmement fréquent en pratique médicale [1-51-52-53], son incidence et sa prévalence dans la population générale restent mal connues [54-55-56].

Elle peut être asymptomatique, de découverte fortuite, ou symptomatique et dont les signes cliniques sont diversifiés et non spécifiques, et souvent intriqués avec ceux de la pathologie en cause [16-37-57].

Le diagnostic étiologique de l’hyponatrémie repose sur :

1) L’appréciation de la tonicité plasmatique: ainsi on peut faire la distinction entre les vraies, les pseudos et les fausses hyponatrémies [58-59].

2) L’évaluation du volume extracellulaire: de ce fait, les hyponatrémies vraies peuvent être classées en hyponatrémie hypovolémiques, normovolémiques et hypervolémiques [60-61],

Le syndrome de SIADH est une affection fréquente et présente la cause principale d’hyponatrémie normovolémique [5-38-39].

L’appréciation de la tolérance clinique et la connaissance du caractère aigu ou chronique de l’hyponatrémie sont déterminantes dans la stratégie thérapeutique [39].

Le risque majeur d’une correction trop rapide d’une hyponatrémie chronique est la survenue de complications neurologiques graves à type de myélinolyse centropontine (MCP) [62-63].

La mortalité et la morbidité liées à l’hyponatrémie, sont souvent corrélées à sa sévérité [32-46] et à sa rapidité d’installation qui conditionnement la tolérance cérébrale en raison des capacités d’adaptation cellulaires [16-38-62].

Traitée à temps et correctement, ses conséquences sont réversibles, si non, elle peut avoir des séquelles ou des complications mortelles et indépendantes de la maladie causale [49-63-64].

Documents relatifs