Partie 1 : De l’homéostasie glucidique à l’insulino‐résistance
II. Résistance à l’insuline
1. Diagnostic de l’insulino‐résistance
Étant donné que l’insulino‐résistance est la composante centrale du DT2, son diagnostic est nécessaire, mais peut être difficile à réaliser. Plusieurs méthodes ont été mises au point pour évaluer une résistance à l’insuline avec des méthodes simples comme la mesure de la glycémie et de l’insulinémie, qui est la mesure de l’hémoglobine glyquée. Des tests métaboliques comme l’hyperglycémie provoquée par voie orale, le test de tolérance à l’insuline et le clamp hyperinsulinémique‐euglycémique sont également utilisés. Par ailleurs, il existe des indices de résistance à l’insuline, comme l’HOMA‐IR ou encore l’indice de QUICKI.
a. Méthodes simples
Mesure de la glycémie : C’est la méthode la plus simple et la plus rapide pour évaluer la présence d’un diabète. Selon l’OMS, une glycémie à jeun (après un jeûne de 8h) est signe d’un métabolisme glucidique normal lorsqu’elle est < 110 mg/dL, est signe d’un prédiabète quand elle est comprise entre 110‐125 mg/dL, et caractérise un état diabétique lorsqu’elle est > 126 mg/dL. Cependant, le problème majeur de ce test concerne la mise à jeun, qui selon
l’adhérence et le temps de jeûne va directement modifier la glycémie et peut conduire au mauvais diagnostic. De plus, d’autres facteurs peuvent influencer la mesure de la glycémie comme l’utilisation de sang complet ou de plasma ou encore l’âge (la glycémie augmente avec l’âge).
Mesure de l’insulinémie : La mesure de l’insulinémie se fait à jeun sur du plasma et se situe
aux alentours de 5 mU/L. Cette mesure, combinée avec celle de la glycémie, donne une première indication de l’état du métabolisme glucidique du patient.
Mesure de l’hémoglobine glyquée : La glycation est une modification post‐transcriptionnelle
des protéines en présence de sucre. Cette réaction ne nécessite pas d’enzyme et le pourcentage de protéines glyquées est fonction de la quantité de sucres présents.
L’hémoglobine est une des protéines pouvant être glyquée et sa forme principale est l’hémoglobine A1c (HbA1c) dont la concentration varie entre 4 et 6%. La demi‐vie de l’hémoglobine glyquée est de 120 jours, et est donc un reflet de la glycémie sur une période de 3 mois. Selon l’OMS, une HbA1c est normale si < 6% et est signe de diabète si > 6.5%
(DeFronzo et al., 2015). Cependant, certaines études nuancent l’utilisation de l’HbA1c comme méthodes de dépistage pour des personnes à risques et montrent une meilleure sensibilité de dépistage pour l’HGPO ou la glycémie à jeun (Cederberg et al., 2010; Lorenzo et al., 2010).
b. Tests métaboliques
Hyperglycémie provoquée par voie orale (HGPO) : Ce test consiste en l’ingestion d’un bolus
de glucose par voie orale (généralement 75g dans 300 mL d’eau chez l’humain) après un jeûne et de suivre la glycémie au cours du temps. Suite à ce test, les patients pourront être répartis en trois catégories : normotolérants (si la glycémie à 2h est <140 mg/dL), intolérants au glucose (si la glycémie à 2h est entre 140‐199 mg/dL) ou diabétiques (glycémie à 2h >
200 mg/dL) (DeFronzo et al., 2015).
Test de tolérance à l’insuline : Ce test consiste en l’injection d’un bolus d’insuline et d’un suivi
de glycémie au cours du temps. Ce test est peu utilisé en raison du risque d’hypoglycémie associée au bolus d’insuline. Pour éviter le risque d’hypoglycémie chez l’humain, le test se fait sur les 15 premières minutes après injection.
Clamp hyperinsulinémique‐euglycémique : Ce test est considéré comme la méthode de référence pour évaluer la sensibilité à l’insuline. Il consiste en la perfusion veineuse d’insuline à débit constant afin de provoquer une hyperinsulinémie stable, et en une perfusion veineuse
de glucose à débit variable afin de maintenir la glycémie constante. En effet, suite à l’action de l’insuline, le glucose entre dans les cellules et la production hépatique de glucose chute, conduisant à une diminution de la glycémie. Ainsi, plus le débit de glucose est élevé, et plus la sensibilité à l’insuline est bonne. Cependant, cette méthode est lourde à mettre en place en clinique et n’est pas réalisable pour des études populationnelles.
c. Indice de résistance à l’insuline
HOMA‐IR (Homeostasis Model Assessment : Insulin Resistance) : Cette méthode de calcul a
été mise au point par Mattews et al., en 1985 et consiste à multiplier la glycémie par l’insulinémie et de diviser le tout par une constante de 22,5 (qui représente le produit de l’insulinémie (5 mU/L) et de la glycémie (4,5 mM) chez un patient sain à jeun). Cette méthode a un bon taux de recouvrement avec le clamp hyperinsulinémique euglycémique (Matthews et al., 1985) et est très facile à mettre en place. Plus la valeur de l’HOMA‐IR est importante et plus le patient sera résistant à l’insuline et l’on considère qu’un HOMA‐IR >2 est signe d’insulino‐résistance.
QUICKI (Quantitative Insulin sensitivity Check Index) : Cette méthode a été mise au point par Katz et al., 2000 et est définie par la formule suivante :
1
log insulinémie à jeun log glycémie à jeun
Le principe de cette formule est le même que celui de l’HOMA, mais intègre un logarithme dans la formule, ce qui rend le QUICKI plus reproductible entre deux visites que l’HOMA (Sarafidis et al., 2007). Néanmoins, ces deux indices sont utilisés en routine pour le diagnostic des patients.
d. Adaptation de ces tests chez l’animal
L’ensemble de ces tests ont été adaptés chez l’animal afin d’étudier le métabolisme glucidique.
Test de tolérance au glucose : comme chez l’humain, les animaux reçoivent un bolus de glucose généralement à une dose de 3g/kg et la glycémie est mesurée au cours du temps. Ce test peut également se faire par injection intrapéritonéale pour s’affranchir de l’effet incrétine (GLP‐1 et GIP1, qui sont sécrétées par l’intestin suite à l’absorption intestinale de glucose) et
ainsi mieux caractériser la réponse. L’injection de glucose peut également se faire par voie veineuse, mais cette technique est peu utilisée.
Test de tolérance à l’insuline : le principe est le même que chez l’humain mais le test se fait
sur une période plus longue, en général 120 minutes, afin d’évaluer la remontée de la glycémie.
Clamp hyperinsulinémique‐euglycémique : cette méthode est couplée avec l’utilisation de glucose radiomarqué (comme le 2‐déoxyglucose marqué au H3 ou au C13) pour mesurer l’incorporation du glucose dans les différents tissus (qui sont prélevés après sacrifice) ou avec du H3glucose afin d’évaluer la production hépatique de glucose.