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PLUSIEURS DESCRIPTIONS COEXISTENT ET SE RENCONTRENT Les termes historiquement employés pour décrire ces manifestations comportementales

Dans le document S'envelopper d'Agir (Page 33-37)

2.4 « ​ HYPERACTIVITÉ NORMALE ​ » ​(Catherine POTEL)

3. LE TROUBLE AU CENTRE DE L’ATTENTION

3.1. PLUSIEURS DESCRIPTIONS COEXISTENT ET SE RENCONTRENT Les termes historiquement employés pour décrire ces manifestations comportementales

donnent des indices sur les associations d’idées qui concernent les causes de l’agitation psychomotrice.

Edouard SEGUIN, auteur et pédagogue français, publie en 1846 son ​traitement moral,

hygiène et éducation des idiots

. Il fait le lien dans ce livre entre excès d’activité des enfants et

symptôme physiologique : une prédominance des systèmes sanguins et musculaires. L’enfant ferait prédominer ces deux systèmes par son activité.

Cette observation, évocatrice du lien entre les fonctions du tonus musculaire et l’activité accrue des enfants, est rapportée par B. WELNIARZ, pédopsychiatre français, dans son article ​de l’instabilité mentale au TDAH

​ .

D’après ce même article, la promulgation des lois FERRY en 1881 et 1882 qui rendent l’instruction primaire obligatoire pour les jeunes garçons et les jeunes filles de 6 à 13 ans, fondent le début du courant médico-pédagogique. L’activité motrice de ces enfants pose problème car, à l’école, le contrôle moteur et l’attention continue sont des pré-requis nécessaires aux apprentissages.[38]

Un tableau clinique stable est fixé en France par le médecin D.M. BOURNEVILLE en 1905 dans ​Les enfants anormaux au point de vue intellectuel et moral.

[38] Il répond aux premières

concomitante d’une instabilité mentale.[18] La symptomatologie hyperactive apparaît alors sous la désignation d’instabilité psychomotrice.

L’instabilité psychomotrice se manifeste dans les différents lieux de vie de l’enfant et particulièrement dans le milieu scolaire. Dans ces cas là, l’attention demandée à l’adulte augmente et peut le mettre en défaut de gestion du groupe.

Certaines recherches s'intéressent alors au devenir de ces enfants agités.

G. HEUYER, en 1914, associe, dans sa thèse de médecine ​Enfants anormaux et délinquants juvéniles

​ , les comportements pervers au tableau clinique en raison d’évolutions fréquentes vers

la délinquance. Certaines recherches scientifiques actuelles tendent d’ailleurs toujours à démontrer des corrélations avec les addictions, conduites à risques et la délinquance.

Le rapport à la norme de comportement attendu par la société est interrogé, comme le rapport de l’enfant à la norme attendue par l’école. L’agitation psychomotrice, en plus d’attirer l’attention sur elle même, s’associe parfois à un rapport transgressif au cadre.

Charles BOULANGER, un élève de D.M. BOURNEVILLE, décrit ces enfants comme poussés par une force inconnue « à des écarts de conduite dont ils ne peuvent donner la raison quand on les interroge ».

La transgression, comme l’agitation, n’a pas de motif apparent d’emblée.

Dans ce cas, peut-on plutôt parler « d’attaque du cadre » ou « d’appel au cadre » ? Est-ce une tentative de vérification de l'intégrité du cadre et de l’existence de réelles limites ? Par analogie corporelle, nous pourrions nous demander si cela correspond donc à une vérification de l’intégrité de ce qui contient le corps, de la limite corporelle ?

Le point de vue de D.M. BOURNEVILLE, qui expose une instabilité tant motrice que psychique, est renforcé dans ​L’Enfant turbulent

​ (1925) d’Henri WALLON et dans ​L’enfant et

l’adolescent instables

​ (1940) de J. ABRAMSON, psychologue travaillant dans la clinique de

Georges HEUYER à la Salpêtrière. Ces auteurs illustrent la position de l’école française qui insiste sur le double versant psychique et moteur de l’instabilité.[15]

Dans le travail d’Henri WALLON, on retrouve une description et une classification des formes

d’instabilité motrice.​[1] La description de ce syndrome comprend un point de vue

psychologique et pathogénique nourrit des études neurologiques sur l’encéphalite épidémique qui avait frappé l’Europe en 1919. Les enfants qui avaient survécu à la maladie présentaient des comportements hyperkinétiques. Cet événement, ainsi que les études anglaises et américaines, ont fondé le point de vue anglo-saxon où la cause neurologique des troubles paraît acquise. La dénomination « lésions cérébrales ​a minima

​ » apparaît.

Cette dénomination inclut cependant trop de tableaux cliniques différents (désordres moteurs, maladresse congénitale, etc.) et sera rejetée par le groupe d’études internationales d’Oxford en 1962 en faveur du « dysfonctionnement cérébral ​a minima

​ ».

J. ABRAMSON apporte une étude plus générale de la psychologie de l’enfant instable en montrant notamment la tendance de l’instable psychomoteur à agir « plutôt d’une manière intuitive et confuse » c’est-à-dire en court circuit des processus d'enchaînement, d’opposition et de confrontation. Il insiste ici sur la dysharmonie cognitive. Il met aussi en perspective une mémoire immédiate préservée avec une tendance forte à être « happé par tous les stimuli extérieurs et (à être) incapable d’inhiber son besoin d’éparpillement », ce qui montre une discontinuité cognitive.[1]

Ce que Jean BERGÈS, ancien chef de clinique et praticien hospitalier, complète plus tard, en présentant l’instabilité de manière encore plus globale, apparaissant dans d’autres modalités comme la voix parfois « changeante, contrefaite, imitant un bruit, une explosion » ou encore l’enveloppe cutanée « siège des heurts avec les objets, des contacts violents avec les personnes ». [8] Il décrit deux sortes d’instabilité :

- les états tensionnels : définis par rapport à un contexte de contention insupportable.

- les états de déhiscence : définis comme une « quête incessante des limites, des frontières, la place du corps agissant étant très problématique ou impossible à intégrer comme telle ».

Julian De AJURIAGUERRA, en 1971, tente d’isoler ce qu’il appelle deux formes extrêmes n’ayant pas la même signification étiologique, sa distinction est cependant différente :

- une forme avec troubles moteurs prévalents, ​forme sub-choréïque

​ , où les troubles de

l’activité paraissent moins importants. Elle serait un mode d’être moteur acquit très tôt dans le développement avec une hyperactivité qui disparaît avec l’âge.

- une ​forme caractérielle avec arriération affective et modification de la motricité

expressionnelle, davantage en relation avec le milieu des enfants, avec plus d’intentionnalité dans leur agressivité et leur impulsivité, ainsi qu’une difficulté à établir des relations d’objets valables.​[1]

Il formulera aussi un important reproche aux études nord-américaines qui méconnaissent les travaux français donnant un contre poids au syndrome hyperkinétique. ​C’est ensuite que les deux bibliographies commencent à s’entrecroiser et que la notion d’instabilité s’efface progressivement.

Selon Léon KREISLER (1986), les manifestations d’une hyperactivité peuvent apparaître très tôt, dès le second semestre de vie, plus tard lors de l’acquisition de la marche ou lors de la troisième année de vie par exemple. L’étiologie de ces troubles varie et selon lui, c’est l’analyse précise de l’expression comportementale qui donne les indices nécessaires pour la déceler.[24]

Il existerait donc des comportements suggestifs de la psychopathologie ou de la particularité structurale qui cause l’agitation. Jean BERGÈS établit d’ailleurs une distinction entre les troubles psychomoteurs du premier âge et les signes neurologiques (particularité structurale) qui semble illustrer ce propos.

En effet, il marque une différence entre les retards d’évolution qui se traduisent par une clinique qui évoque un enfant plus jeune, et entre le trouble psychomoteur qui, quant à lui, intéresse plusieurs fonctions et se manifeste de manière globale par un style de fonctionnement. Plus que de signes cliniques, dans le cas du trouble psychomoteur, il parle d’ensemble.[8]

Il existe donc beaucoup de subdivisions possibles et de cas particuliers pour la description de ce trouble, mais à partir du DSM-IV, les représentations plus contemporaines insistent désormais sur « la gêne fonctionnelle et l’altération significative du fonctionnement social, scolaire ou professionnel ».​[15]

Ce qui est mis en avant est la caractéristique handicapante du trouble, conjointe à la caractéristique attentionnelle qui prend de l’ampleur au gré des recherches scientifiques et à la multiplication des travaux sur les psychostimulants.

Dans le document S'envelopper d'Agir (Page 33-37)