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Chapitre III: Étude de l’incorporation du tantale dans la zircone

1.1 Description des empilements étudiés

Différents échantillons contenant de l’oxyde de zirconium et de l’oxyde de tantale ont été réalisés par PEALD. L’objectif est l’obtention d’une couche mince composée de tantale en solution solide dans l’oxyde de zirconium. Une première méthode possible pour déposer la solution solide consiste à mélanger les précurseurs de tantale et de zirconium dans une même ampoule. Cette méthode a l’avantage de répartir le tantale de manière homogène dans la couche d’oxyde. Elle a cependant plusieurs inconvénients. D’abord les deux précurseurs ne doivent pas interagir entre eux, ni en phase liquide ni en phase vapeur. Dans le cas contraire des particules peuvent se former en phase homogène dans les lignes d’acheminement des précurseurs ou dans la chambre de réaction ce qui conduirait à de la défectivité. Ensuite, il faut que les conditions optimales de dépôts soient semblables pour les deux précurseurs puisqu’ils sont déposés lors de cycles ALD communs. Enfin pour faire varier la composition du film il faut modifier les concentrations relatives des précurseurs dans l’ampoule, ce qui est difficile à mettre en œuvre dans le bâti utilisé pour cette étude.

La méthode que nous avons utilisée consiste à déposer les films sous la forme d’un multicouche, en alternant les cycles de dépôts individuels de ZrO2 et de Ta2O5. Les contraintes techniques sont réduites, chaque matériau, selon le précurseur, ayant ses propres conditions de dépôt. Il est possible de contrôler la composition des couches en faisant varier le nombre de cycles relatifs à chaque élément. Cependant la concentration du tantale dans la couche n’est pas constante en fonction de l’épaisseur puisque l’oxyde de tantale est déposé de manière discrète et non de manière continue tout au long du dépôt. Cette hypothèse sera discutée dans la section 3.1 de ce chapitre.

Tableau 1 : Conditions de dépôt des oxydes de zirconium et de tantale.

Matériau Oxyde de zirconium Oxyde de tantale

Précurseur ZyALD TBTDET

Durée de pulse 1100 ms 1000 ms

Puissance du plasma 75 W 75 W

Durée du plasma 1000 ms 200 ms

Température du substrat 250 °C 250 °C

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Les empilements sont divisés en six couches d’oxyde de zirconium et cinq couches d’oxyde de tantale. Comme le montre la Figure III.1, les couches d’oxyde de tantale sont intercalées entre les couches d’oxyde de zirconium. La première couche déposée sur le substrat de silicium est une couche d’oxyde de zirconium. Les couches d’oxyde de zirconium sont fabriquées avec quinze cycles de ZrO2 PEALD chacune, pour un total de 90 cycles de ZrO2 par empilement.

L’épaisseur des couches de tantale est variable pour modifier la concentration du tantale présent dans la zircone puisque l’objectif de cette étude est de mesurer l’impact du tantale en solution solide dans la zircone. Le diagramme de phase donné Figure III.2 nous indique que les quantités de tantale visées doivent être faibles pour rester dans le domaine de stabilité de la solution solide quadratique. En effet, nous pouvons noter que la limite de solubilité du tantale dans la zircone quadratique est atteinte pour un rapport 𝑍𝑟+𝑇𝑎𝑇𝑎 proche de 5 % à la température de 1500 °C. Selon d’autres

1 S. Shian et al. Acta Materialia69 (2014).

Figure III.1 : Schéma de l’empilement des cycles PEALD utilisé de manière classique pour le dépôt de ZrO2 dopée Ta.

Figure III.2 : Partie riche en ZrO2 du diagramme de phase Y2O3-ZrO2-Ta2O5 à 1500 °C, concentration atomique, d’après S. Shian et al.1 F=fluorite, t=quadratique et

Préparation des échantillons

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publications, la phase orthorhombique se forme pour des rapports 𝑍𝑟+𝑇𝑎𝑇𝑎 de 4 %(2,3). De plus, la limite de solubilité des solutions solides se réduit généralement lorsque la température diminue. La solubilité du tantale en solution solide dans la zircone à température ambiante est donc faible (inférieure à 4 %).

Les couches individuelles d’oxyde de tantale varient de 1 à 3 cycles PEALD ce qui correspond à 5, 10 et 15 cycles d’oxyde de tantale au total dans les différents empilements pour viser des rapports 𝑍𝑟+𝑇𝑎𝑇𝑎 proches de 5, 10 et 15 %. Pour la suite de l’étude, les échantillons dopés au tantale seront nommés ZT suivi par le nombre de cycles de Ta2O5. L’échantillon de zircone pure sera nommé Z0. Le Tableau 2 resume la composition des échantillons utilisés.

Tableau 2 : Composition des échantillons de zircone dopée avec du tantale.

Echantillon Composition Rapport 𝒁𝒓+𝑻𝒂𝑻𝒂

Z0 100 cycles de ZrO2 0

ZT5 90 cycles de ZrO2 et 5 cycles de Ta2O5 5,3

ZT10 90 cycles de ZrO2 et 10 cycles de Ta2O5 10

ZT15 90 cycles de ZrO2 et 15 cycles de Ta2O5 14,3

Il est utile de préciser que le terme « couche de tantale » est un abus de langage. S’il est courant de dire qu’une monocouche atomique est déposée lors de chaque cycle ALD, dans les faits plusieurs cycles sont nécessaires pour déposer un film qui recouvre toute la surface de l’échantillon. L’origine du phénomène est diverse. En premier lieu, les précurseurs ont des ligands volumineux, tout particulièrement dans le cas de précurseurs moléculaires comme le ZyALD ou le TBTDET. Leur encombrement stérique limite la quantité de molécules de précurseur adsorbées en surface du substrat comme le montre la Figure III.3. Une partie des sites actifs restent inoccupés à chaque cycle ALD et il est impossible de déposer une monocouche lors d’un cycle.

Plusieurs modèles existent pour connaitre le taux de croissance par cycle en fonction des sites actifs occupés et des précurseurs4,5. En plus du phénomène d’encombrement stérique, les modes de croissance ne sont pas toujours bidimensionnels. La croissance peut être tridimensionnelle lorsque les interactions chimiques entre les atomes du substrat et ceux du film mince sont faibles par rapport aux interactions entre atomes du film mince. On parle alors de croissance « par îlots » ou encre croissance Volmer-Weber. Dans ce type de croissance, le nombre de cycles avant d’atteindre une couche couvrant entièrement la surface du substrat est augmenté. Par exemple, dans le cas d’un dépôt de zircone par ALD sur un substrat de silicium avec son oxyde natif, Vieluf6 a montré que les premiers cycles adoptent le

2 D.-J. Kim and T.-Y. Tien Journal of the American Ceramic Society74, 12 (1991).

3 C. Zheng and A.R. West Journal of Materials Chemistry1, 2 (1991).

4 R. l. Puurunen Chemical Vapor Deposition9, 6 (2003).

5 M. Ylilammi Thin Solid Films279, 1–2 (1996).

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mode de croissance par ilots. Pour que la surface soit entièrement recouverte, c’est-à-dire après coalescence des ilots, il faut 15 cycles de ZrO2 dans les conditions de leur étude.

Figure III.3 : Schéma d’une surface où des molécules de précurseur sont chimisorbées. Tous les sites actifs (rouge) ne sont pas occupés par des molécules de précurseur.

Lors de la fabrication d’une puce microélectronique, de nombreuses étapes suivent le dépôt d’oxyde de zirconium, à commencer par le dépôt de l’électrode supérieure en nitrure de titane, le dépôt d’oxyde de silicium ou la gravure des vias et des lignes. Les températures de ces étapes dépassent celle du dépôt de la zircone et atteignent des températures supérieures à 300 °C comme le montre la Figure III.4. De plus, la dernière étape subie par les puces est un recuit dit « final » à 400 °C pendant 20 min. Ces traitements thermiques sont très importants puisqu’ils conditionnent toutes les propriétés de la couche de zircone7, notamment sa cristallisation.

Pour reproduire ces conditions thermiques, les couches ont été recuites dans un four tubulaire de laboratoire après leur dépôt. Une rampe de température de 20 °C/min a été appliquée jusqu’à la température de 400 °C. Les échantillons sont alors recuits pendant 30 minutes à 400 °C. La Figure III.4 illustre des différences entre le recuit dans le four tubulaire de laboratoire et le recuit des capacités MIM intégrées. Cette approximation sera discutée lors des caractérisations électriques.

Figure III.4 : Évolution de la température en fonction du temps lors des étapes d’intégration successives au dépôt de ZrO2 (rouge) et simulation du recuit des échantillons dans le four

tubulaire (noir).

Préparation des échantillons

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