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Description des modèles utilisés

4.1 Simulations avec GEANT4

4.1.1 Description des modèles utilisés

Les résultats de simulations présentés au cours de ce chapitre ont été obtenus avec la version 4.10.00-p02 de Geant4. Dans ce logiciel, toutes les interactions physiques sont gérées par une « physics list » qui est une liste de modèles et de données telles des sections efficaces que Geant4 va utiliser pour définir les probabilités de collision. Dans notre cas, nous avons utilisé une physics list personnalisée, inspirée de celle de l’exemple « hadrontherapy », fourni avec l’installation de Geant4. Cette physics list utilise le modèle « electromagnetic standard package 3 »pour simuler les interactions électroma-gnétiques. Les sections efficaces totales de réaction utilisées sont celles des modèles de Tripathi [104, 105] et Shen [106], composées de valeurs expérimentales lorsqu’elles sont disponibles, ainsi que de formules empiriques paramétrisées pour calculer des sections efficaces pour toutes les énergies.

Geant4 gère une collision nucléaire en deux étapes. La première est appelée voie d’entrée de la collision et décrit la partie dynamique de la collision jusqu’à la formation de différents noyaux dans un état excité. La deuxième est la voie de sortie, qui gère la désexcitation statistique des fragments générés par la voie d’entrée. Geant4 propose différents modèles pour la voie d’entrée et la voie de sortie qui seront décrits dans les prochains paragraphes.

4.1.1.1 Modèles de voie d’entrée

Le premier modèle de voie d’entrée étudié est un modèle de dynamique moléculaire quantique (QMD, pour Quantum Molecular Dynamics). Ce modèle est implémenté dans Geant4 par la classe G4QMDReaction [79, 107] et est basé sur le code JAERI-QMD (JQMD) [77, 108]. C’est un code de transport qui suit l’évolution de la fonction densité à un corps donnée par l’équation de Landau-Vlasov. Cette fonction est approximée par une somme de gaussiennes, représentant chacune un des nucléons du noyau. Le potentiel nucléaire est ensuite créé dynamiquement à partir de cette fonction densité. Il dépend ainsi du temps et évolue au cours de la réaction. L’évolution du système est calculée par pas de temps de 1 fm/c et tous les nucléons sont propagés dans ce potentiel. L’évolution est stoppée au bout d’un temps de 100 fm/c, pour lequel l’équilibre thermique est supposé atteint. La gestion des fragments générés est ensuite assurée par le modèle de voie de sortie.

Le modèle est applicable dès lors que l’énergie du projectile est supérieure à la bar-rière coulombienne. Cependant, il est annoncé valide à partir de quelques dizaines de

MeV/n jusqu’à 3 GeV/n [109]

Le deuxième modèle étudié est un modèle de cascade intranucléaire binaire (BIC). Ce modèle est accessible dans Geant4 via la classe G4BinaryLightIonReaction [79, 110]. Dans ce modèle, un noyau est décrit par un modèle tri-dimensionnel dans lequel les nucléons sont disposés aléatoirement selon la densité de la matière nucléaire à une masse donnée, tout en respectant le principe d’exclusion de Pauli. Lors d’une collision, les nucléons participants et les nucléons spectateurs de la réaction sont déterminés de manière géométrique, en considérant une zone de recouvrement du projectile et de la cible. Pour cela, un paramètre d’impact est tiré aléatoirement et est ensuite comparé à la distance minimale d’interaction (dépendante de la section efficace). S’il lui est supérieur, la collision n’aura pas lieu. S’il lui est inférieur, les nucléons du projectile participants à la réaction peuvent être déterminés. Le reste des nucléons du projectile forme alors le quasi-projectile qui sera désexcité directement par les modèles statistiques de la voie de sortie. Les nucléons participants sont ensuite propagés sous l’effet d’un Hamiltonien construit à partir d’un potentiel optique indépendant du temps. Les interactions sont gérées de manière séquentielle entre chaque nucléon participant provenant du projectile et tous les nucléons de la cible. La cascade se termine lorsque l’énergie moyenne des nucléons propagés descend sous un certain seuil ou s’ils sortent de la cible. La quasi-cible sera alors traitée par un modèle intermédiaire, dit modèle de pré-équilibre, avant l’étape de désexcitation par la voie de sortie.

Ce modèle est donné valide de 80 MeV à 10 GeV/n. Cependant, une limite en énergie est fixée à 50 MeV/n, en deçà de laquelle la cascade n’a pas lieu. Si l’énergie du projec-tile est inférieure ou égale à cette limite, le modèle fusionne alors projecprojec-tile et cible et le noyau fusionné est ensuite géré par le modèle de pré-équilibre. L’effet de cette limite sur nos simulations sera discuté plus tard.

Enfin, le dernier modèle étudié est un autre modèle de cascade nucléaire, appelé Cascade Intra-Nucléaire de Liège (INCL) [111–113], retranscrit pour le C++ sous la forme de INCL++ [114]. Il est accessible dans les nouvelles versions de Geant4 (v4.10 et ultérieures) par son interface G4INCLXXInterface [79]. Ce modèle représente les nucléons comme un gaz de Fermi confiné dans un puits de potentiel statique, formant les noyaux de la réaction. Comme pour le modèle BIC, la détermination des nucléons participants est faite de manière géométrique. Les nucléons participants n’ayant pas subi de collision durant la traversée du noyau cible sont rassemblés avec les nucléons spectateurs du projectile, et forment ainsi un quasi-projectile excité qui sera traité par le modèle de voie de sortie. Les nucléons participants ainsi que tous les nucléons de la cible subiront ensuite la cascade : les interactions seront séquentiellement évaluées entre un nucléon et tous les autres. Au bout d’une certaine valeur de temps dépendant de la masse de la cible, la cascade est stoppée et les fragments sont laissés (comme pour la cascade binaire) dans un état hors équilibre thermique qui doit être géré par le modèle de pré-équilibre avant l’appel du modèle de voie de sortie.

La particularité de ce modèle par rapport à BIC est qu’il prend en compte la création de fragments contenant jusqu’à 8 nucléons pendant la cascade. Si un nucléon subissant la cascade atteint la surface et se trouve sur le point de sortir du système, un algorithme de coalescence cherche d’autres nucléons suffisamment « proches » dans l’espace des phases. S’il en trouve, un fragment est formé. Si plusieurs fragments sont possibles, le

4.1. Simulations avec GEANT4 moins excité sera sélectionné. Si ce fragment peut traverser la barrière coulombienne, il

sera alors éjecté du système. Sinon, le nucléon seul sera éjecté.

La gamme de validité en énergie de ce modèle s’étend de 1 MeV/n à 3 GeV/n.

4.1.1.2 Modèles de voie de sortie

Précédemment, nous avons vu que les différents modèles de voie d’entrée ne laissaient pas les fragments créés dans le même état. En effet, le modèle QMD laisse les fragments à la voie de sortie dans un état d’équilibre thermique, alors que les modèles de cascade se contentent de gérer la collision et laissent les fragments dans un état hors équilibre. Pour ces deux modèles, une étape intermédiaire (dite étape de pré-équilibre) est nécessaire pour atteindre l’équilibre thermique avant de commencer la désexcitation statistique. Dans Geant4, une classe appelée G4PreCompound [79] est alors chargée d’amener les fragments dans l’état recherché. Cette classe se base sur le nombre de nucléons du frag-ment, sa charge ainsi que le nombre d’excitons (nombre de nucléons perdus par la cible ajouté au nombre de trous créés dans la distribution des nucléons restants) présents dans le fragment. Pour atteindre un état de pré-équilibre, ce modèle utilise une émission radiative et/ou de particules légères.

Après passage par ce modèle intermédiaire, les fragments issus des modèles de cascade se trouvent dans le même état que ceux issus du modèle QMD. Ces noyaux ne sont pas dans un état stable, mais leur énergie d’excitation est partagée par l’ensemble de leurs nucléons. L’étape de désexcitation, gérée par la classe G4ExcitationHandler [79] peut maintenant commencer. Par défaut, cette classe utilise une combinaison de deux modèles pour générer des fragments dans leur état fondamental. Cette classe utilise un modèle de Fermi Break-Up (FBU) [115] couplé à un modèle d’évaporation [79].

Le premier modèle est un modèle de fragmentation statistique. Tous les canaux de désexcitation à n corps sont pris en compte (n variant de 2 au nombre de masse A du noyau), et seuls ceux pour lesquels l’énergie cinétique de chaque fragment est positive seront considérés par l’algorithme. Cette énergie cinétique est calculée de la manière suivante : EC = E+ Mc2− ECoulombn X i=1 (mic2+ E i), (4.1)

où E et M sont l’énergie d’excitation et la masse du noyau à désexciter, ECoulomb la barrière coulombienne et mi et E

i la masse et l’énergie d’excitation de chacun des n fragments. Des poids statistiques sont ensuite calculés pour chaque canal, qui pourra ainsi être sélectionné aléatoirement. Le FBU de Geant4 est utilisé pour tout fragment de masse A < 17 et de charge Z < 9. Pour les noyaux plus lourds, un modèle de multi-fragmentation statistique (comparable au FBU, mais utilisant seulement un échantillon de canaux de désintégration) est utilisé. Après application de ce premier modèle, un noyau excité aura fragmenté en n fragments stables, produits dans leur état fondamental ou sur un des états discrets d’excitation de basse énergie.

Le modèle d’évaporation est ensuite utilisé pour amener les fragments excités produits vers leur état fondamental. Un modèle d’évaporation considère toute voie de désexcita-tion à deux corps. La classe G4Evaporadésexcita-tion propose un modèle d’évaporadésexcita-tion classique, permettant la désexcitation par radiation ou par émission de particules légères (jus-qu’aux particules α). Cette classe permet également d’utiliser le modèle d’évaporation

généralisée GEM [27, 79] qui permet quant à lui d’évaporer des fragments plus lourds, allant jusqu’au28Mg.

Tous les modèles menant à la production de fragments dans Geant4 ont maintenant été présentés. Pour tous les modèles de voie d’entrée présentés, la voie de sortie par défaut est donc un couplage entre le modèle FBU et un modèle d’évaporation. Pour le modèle QMD, le modèle d’évaporation par défaut est le modèle GEM, tandis que pour les modèles passant par la classe G4PreCompound le modèle d’évaporation classique de Geant4 est utilisé par défaut. Cependant, Geant4 permet d’utiliser GEM pour ces modèles aussi, moyennant une modification du G4ExcitationHandler. Cette classe permet également de désactiver le modèle FBU. Les trois modèles d’entrée ont donc été testés avec la combinaison FBU+GEM ou en utilisant seulement GEM. La prochaine section est dédiée à la comparaison de ces modèles aux résultats expérimentaux.