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Description des contextes d'intervention : le temps libre et les

4.1. Animateurs et ateliers pédagogiques : les contextes à l'étude

4.1.2. Description des contextes d'intervention : le temps libre et les

Suite aux questions relatives aux ateliers pédagogiques et à leurs approches pédagogiques (Bloc 1 de la grille d'entrevue), les animateurs et les animatrices ont pris le temps de décrire leurs contextes d'intervention et les enfants avec lesquels ils travaillent. La description des données, qui est faite dans cette partie, est intéressante pour notre étude car, par rapport à notre volonté de comprendre le dialogue « sciences en/et société », il semble primordial de pouvoir saisir la saveur du climat dans lequel se déroulent les ateliers ainsi que les interlocuteurs des animateurs, qui sont dans notre cas, les jeunes avec qui ils sont amenés à dialoguer.

a. Le contexte du temps libre des jeunes

Comme mentionné auparavant, le contexte d'intervention choisi pour cette étude correspond à ce que nous avons appelé le contexte du temps libre des jeunes, défini comme un temps à côté du temps scolaire. Nous allons donc voir comment les animateurs interrogés l'ont défini.

« Parce que là, ce n'est pas passer du temps, c'est les occuper. Ils sont confinés là à faire des bulles avec du savon, à faire des gâteaux et à faire toute sorte de bricolage à caractère plus ou moins scientifique, de telle heure à telle heure et après ça, il rentre à la maison. La vraie raison de ça, c'est de les occuper pendant un certain laps de temps jusqu'à temps qu'un adulte responsable les reprenne par le collet et leur donne quelque chose à faire : va prendre ton bain, fais tes devoirs, va te coucher.

[Plus tard]

J'apporte une nuance. Il y avait à une certaine époque comme c'était la mienne, il y avait des clubs que l'on nommait des clubs de jeunes naturalistes. Là, ça pouvait se passer en temps libre. Puis là, il y avait quelque chose. Ce n'était pas le confinement comme je viens de le décrire que l'on voit dans les écoles. La classe est finie et les parents ne viendront pas les chercher avant 5 heures, 5 h 30, fais qu'on les occupe. On fait n'importe quoi. » (Hubert)

Pour lui, le temps a changé et les activités scientifiques proposées aux jeunes sur le temps libre ne consistent en rien de plus qu'à un moment où il faut les occuper avant que leurs parents ne les récupèrent. L'animateur et l'atelier sont perçus comme des moyens d'occuper les jeunes, « avant qu'un adulte responsable » vienne les récupérer. Il déplore le temps des clubs naturalistes où selon lui, la pratique des sciences sur le temps libre pouvait se faire et les jeunes n'étaient pas « confinés » dans des temps et des espaces cloisonnés par des adultes. En revanche, nous constatons qu'il nuance ces propos lorsqu'il définit le camp d'été :

« C'est un camp de vacances. Ils ont été déposés là le dimanche soir et ils vont rester là jusqu'au vendredi après-midi. Mais s'il y a l'aspect volontaire, c'est que les parents les ont inscrits librement dans cette activité-là, compte tenu du fait qu’eux-mêmes avaient manifesté le désir de participer. » (Hubert)

Pour décrire le camp d'été, Hubert revient sur l'idée que le temps libre des enfants est conditionné par la volonté des parents. Toutefois, il ajoute un aspect intéressant à prendre en compte : les enfants eux-mêmes ont sûrement « manifesté le désir de participer ». Pour Hanan, bien que les ateliers puissent se retrouver cloisonnés dans un emploi du temps imposé aux jeunes, c'est cette motivation à participer qu'il faut saisir en permettant aux jeunes de bénéficier d'une « liberté personnelle ». Elle décrit dès lors le contexte du projet Journal de la façon suivante :

semaine : c'est un vendredi. Donc, déjà après une journée de travail, on ne peut pas demander à un jeune d'être correct à l'école, de suivre des ordres de d'autres personnes et après de rentrer à la maison et d'être aussi euh – c'est-à-dire qu'il n'y a pas de temps pour une liberté personnelle pour les jeunes. » (Hanan)

Hanan est consciente que les jeunes sont souvent coincés dans des horaires et des obligations d'apprentissage, alors elle essaie de s'en accommoder pour permettre aux jeunes de bénéficier d'un moment agréable. De plus, dans le même sens qu'Hubert, elle mentionne le désir de participer des jeunes et mentionne que si les filles participent, c'est aussi qu'elles prennent plaisir à venir et que de ce fait, elles doivent trouver que ce temps est agréable :

« Bah si elles sont ici, c'est qu'elles aiment. Il n'y a aucune chose qui les oblige et le fait d'être présentes, même s'il fait froid, même s'il y a de la neige, même si c'est la fin de semaine, même s'il y a des devoirs, ça veut dire qu'elles aiment venir. L'ambiance est bonne. » (Hanan)

La présence des filles est pour Hanan un gage du fait qu'elle permet aux filles de disposer d'un temps agréable. Dans le même sens, Julie indique le besoin de créer une structure souple et intéressante pour que les jeunes prennent du plaisir à venir :

« On aime bien rigoler avec elles pour qu'elles aient envie de venir encore car c'est quand même volontaire de leur part, de venir. Donc, si c'est trop strict et bien elles ne voudront plus venir, mais en même temps, c'est ça, c'est de contrôler la dissipation. » (Julie)

Le climat de l'atelier est donc important pour favoriser la participation des jeunes. L'instauration de ce climat est d'autant plus importante que, comme l'indiquent également Hubert et Hanan, la participation des enfants, même si elle peut être alimentée par le désir de participer, est aussi conditionnée par des facteurs extérieurs (comme la volonté des parents et le cloisonnement des emplois du temps). D'ailleurs, Achour abonde dans le même sens qu’Hubert en indiquant l'influence des parents dans le choix des jeunes à participer aux ateliers pédagogiques scientifiques :

« Il y a des jeunes qui n'aiment pas la science et où c'est les parents qui les obligent en fait à venir. Ça arrive, c'est très fréquent. » (Achour)

Pour Julie, la participation des jeunes dépasse la seule volonté de participer à des activités scientifiques. Par rapport aux activités quotidiennes que proposent l'organisme

Plaisir et Sciences, il s'agit pour les jeunes de bénéficier d'un temps pour les accompagner dans leurs devoirs ainsi que des occasions de se retrouver entre filles :

« Puis l'aide aux devoirs, je pense que c'est important. Pour beaucoup elles viennent pour ça, pour se faire aider et pour se retrouver entre elles. » (Julie)

Le contexte d'intervention des ateliers scientifiques pédagogiques sur le temps libre des jeunes constitue donc un temps particulier qui doit mêler souplesse et apprentissage pour que les enfants qui y participent s'y retrouvent. Le climat agréable et l'amusement deviennent alors des supports pour les enfants qui ne sont pas toujours volontaires à participer :

« Bah, c'est sûr que s'ils n'aiment pas, on ne peut pas faire grand-chose, mais ce qu'on peut faire justement, c'est s'appuyer sur le côté amusant pour qu'ils passent quand même une bonne semaine. C'est toujours difficile, c'est toujours des cas difficiles. Souvent ce sont les parents qui sont ingénieurs et qui veulent envoyer leurs enfants au camp de jour, mais ils ne sont pas intéressés. Bah on essaie de… On ne va pas l'isoler, mais il ne faut pas qu'il empêche les autres de profiter de leur semaine. » (Achour)

L'amusement est présenté par Hanan, Achour et Julie comme une clé pour motiver les jeunes. Il est toutefois intéressant de constater que celui-ci doit être aussi cadré afin que la conduite de l'atelier puisse être possible. Achour indique alors que les jeunes qui sont moins motivés ne doivent pas « empêcher les autres de profiter de leur semaine » et Julie indique qu'en tant qu'animatrice, elle doit aussi « contrôler la dissipation ».

L'idée d'être à l'écoute des jeunes ressort également des propos des animateurs. D'ailleurs, pour Pierre, c'est une caractéristique particulière des ateliers pédagogiques scientifiques qui se déroulent sur le temps libre des jeunes :

« Autrement dit les activités que je fais, qui ne sont pas strictement dans un cadre scolaire, la caractéristique c'est que tu as plus le temps d'apprendre à un élève, à un jeune et de faire du un à un, c'est-à-dire que tu as plus le temps d'être un à un avec le jeune et de faire du un-un, ou du un, deux trois, c'est-à-dire tu es toi seul avec un, deux ou trois jeunes. Donc, on s'entend que l'interaction est loin d'être la même qu'avec, quand tu en as 25 ou quand tu en as 15 et même 10, puis 3, c'est complètement différent. Alors là, tu as le temps de bien cibler, tu as le temps de vérifier à qui j'ai affaire : est-ce que j'ai à faire à quelqu'un qui connaît beaucoup de choses ou peu de chose. Est-ce qu'elle n'a pas de passion pour la nature ? Est-ce qu'elle a du dédain pour certaines choses ?

[PLUS TARD]

Quand ça fait deux semaines que tu passes avec le même jeune et que tu peux voir un cheminement ou en tout cas… que tu vois que tu as modifié sa mentalité, en tout cas, ça, c'est gratifiant, c'est génial. » (Pierre)

Le contact avec les jeunes semble donc privilégié dans le contexte des ateliers pédagogiques scientifiques sur le temps libre des jeunes, où une place importante est accordée aux jeunes pour qu'ils se sentent à l’aise et aient envie de revenir. Les propos des animateurs ont d'ailleurs laissé une grande place à la présentation des jeunes avec lesquels ils travaillent, que nous allons maintenant exposer.

b. Les jeunes participants aux ateliers pédagogiques scientifiques

Zahia, Julie, Hanan, Pierre, Hubert et Achour indiquent travailler majoritairement avec des enfants âgés entre 6 et 12 ans. Dans leurs propos, ils abordent des aspects géographique, socio-économique et culturel pour décrire la diversité des enfants avec qui ils travaillent. Les différences entre les enfants conduisent à diversifier la menée des ateliers puisque, selon les animateurs, les enfants ne disposent pas des mêmes connaissances. Par exemple, pour Pierre l'origine géographique des enfants fait une différence dans la menée des ateliers autour de l'environnement qu'il conduit. Les enfants issus de milieux ruraux seraient plus proches de la nature que ceux issus de milieux urbains. Conséquemment, il indique pouvoir aller plus loin avec les jeunes issus du milieu rural. Mais au-delà de l'aspect géographique, c'est la question de la défavorisation de certains enfants qui le touchent davantage. Il nomme alors le partenariat qui existe entre la Protection de la Jeunesse et son organisme durant le camp d'été :

« Pendant les camps de jours, on a des jeunes qui viennent de la DPJ. Ce n’est pas important, mais la DPJ nous envoie des jeunes grâce à des bourses. […] Alors, bah moi, c'est simple, ces jeunes-là, je leur donnais tout ce que je pouvais, chaque seconde d'attention. Je leur prêtais des livres le soir pour amener à la maison. Ça ne veut pas dire que je me foutais des autres, mais je m'investissais encore plus avec eux. J'essayais d'être plus intense, de focusser. » (Pierre)

défavorisés, de susciter leur intérêt envers les sciences et de leur donner une chance de s’amuser avec les sciences.

Dans la même perspective, mais un peu différemment, ce sont les contextes où ils interviennent qui font que les animateurs côtoient des publics moins favorisés. Par exemple, Hubert intervient dans les Centres Jeunesses. Pour Hanan, Zahia et Julie, c'est la situation géographique de l'organisme dans lequel elles travaillent qui les amènent à travailler avec des enfants issus de milieux conjuguant défavorisation et pluriethnicité (un quartier qui a une longue histoire de « défavorisation » et d’immigration, due notamment aux problématiques d'urbanisation et de logements sociaux). Zahia, une des animatrices décrit les filles de la manière suivante :

« Alors ce sont des filles qui n'ont jamais été au cinéma par exemple. On peut être un ordi à la maison ou peut-être pas. À la bibliothèque, elles y vont un petit peu, mais pas beaucoup. Ce n'est pas quelque chose qui est encouragé à la maison. Donc les outils… ou elles ne sont pas abonnées à des revues ou… Donc l'information n'est pas autour d'elle, donc je pense que l'Exposciences leur permet d'aller encourager leur curiosité. » (Zahia)

Comme à travers les propos de Pierre, on retrouve l'idée de donner et de partager avec des enfants qui n'ont pas forcément les ressources présentes autour d'eux. Les sciences peuvent constituer un moyen d'outiller les enfants dans le futur et leur apprentissage ne constitue pas seulement une fin en soi.

Dans un autre ordre d’idées, le plaisir de travailler avec des enfants a été associé au fait que c'est un plaisir de se rendre compte de leurs connaissances et de l'aisance qu'ils peuvent avoir à la communiquer, des attitudes qui ne se retrouvent pas forcément chez les adultes :

« Je suis étonné de voir tout ce que savent ces enfants-là. Puis l'énorme aisance qu'ils ont à en parler, à questionner et à réfléchir aussi. Souvent des choses que l'on ne retrouve même pas chez les adultes, donc l'âge n'est pas un facteur crucial. » (Hubert)

D'ailleurs, dans les camps d'été qui touchent tout de même beaucoup d'enfants « favorisés », le niveau incroyable de connaissance et mis en avant. Achour indique que ces jeunes ont même parfois une culture scientifique supérieure à celle des moniteurs :

« Il y a des jeunes qui arrivent et qui ont une culture scientifique incroyable. C'est-à-dire qu'ils vont lire plein d'informations dans les journaux, que même ils vont poser des questions aux moniteurs et que les moniteurs ne sont mêmes pas capables de répondre. Vraiment, ils sont vraiment dedans. »

(Achour)

La soif d'apprendre de ces enfants et l'intérêt qu'il porte à la thématique du camp d'été font que, pour Pierre, ce sont des enfants qui sont toujours prêts à vouloir participer aux activités proposées :

« […] parce que ceux qui ont beaucoup, beaucoup, de capacité d'écoute et de bagages de connaissances, eux, ils sont capables d'être plus laisser à eux-mêmes pour toute sorte de raisons, en général… En tout cas, je l'ai vérifié avec certains jeunes. Je peux ne pas les avoir vus pendant 1 an et demi et ils se souviennent de choses que j'ai dites comme si je l'avais dit la veille. [Ce sont] des jeunes qui viennent de milieu favorisé et de parents qui les stimulent beaucoup. Pour ces jeunes-là, on n'a pas besoin de… ça rentre tout seul, si on veut. On fait une activité : « oui ». As-tu le goût de participer à ça ? : « oui ». Déjà, tout est facile avec eux. » (Pierre)

Parmi les participants, Pierre indique qu'il y a des enfants déjà sensibilisés par les activités qu'il anime, qui sont motivés à participer et ont le goût d'apprendre. D'ailleurs, Pierre et Achour indiquent que certains enfants leur en apprennent beaucoup.

Toutefois, la diversité d'enfants présente au sein du camp implique aussi le fait qu'il y a des enfants qui ont moins de connaissances et pour qui la participation est davantage liée au fait de s'amuser :

« Mais, il y en a d'autres qui viennent pour s'amuser et… En fait, il y a vraiment différents types de jeune. Il y en a qui viennent pour approfondir leurs connaissances et d'autres qui vont venir juste pour s'amuser et voir de nouveaux concepts. » (Achour)

Alors que certains enfants profitent des ateliers pour approfondir « leurs connaissances », d'autres participent « pour s'amuser et voir de nouveaux concepts ». La diversité des enfants jumelée à l'aspect plus ou moins volontaire amène donc les animateurs à développer différentes stratégies pour stimuler la motivation des enfants. La volonté de créer un climat agréable et l'amusement semblent constituer ces stratégies. Les relations qui se construisent avec les jeunes sont présentées comme des temps agréables et de proximité. Pour Pierre, le nombre restreint d'enfants au sein des

interactions pédagogiques ainsi que le rapport au temps les facilitent.

En quoi consistent dès lors les ateliers pédagogiques scientifiques que mènent les animateurs scientifiques pour favoriser cet engouement vis-à-vis des sciences chez les jeunes ? La prochaine partie étaye plus particulièrement les deux types ateliers identifiés dans les propos des animateurs que sont les projets parascolaires et les camps d'été.