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Des lacunes dans les politiques et réformes

TITRE II- DES LACUNES DANS LA LEGISLATION FONCIERE: DES REFORMES INADAPTEES ET DES MENACES POUR LA COVIABILITE SOCIO-ECOLOGIQUE INADAPTEES ET DES MENACES POUR LA COVIABILITE SOCIO-ECOLOGIQUE

Section 1 Des lacunes dans les politiques et réformes

La théorie du droit différencie les lacunes du droit des lacunes de la loi295. Pour P. Foriers, il y

a lacune du droit, lorsque manque dans un ordonnancement juridique une norme dont le juge puisse faire usage pour résoudre un cas déterminé ou, lorsque la règle figurant dans l'ordonnancement juridique pour résoudre un cas déterminé n'apparaît pas opportune,

satisfaisante ou juste296. Cependant, la lacune du droit positif béninois dépasse le cadre du

prétoire ou de l’opportunité ou non, de la règle de droit pour interpeller le fondement même du droit et de l’assiette ayant servi son édification. Dans la législation béninoise, les lacunes portent essentiellement, sur des stéréotypes et des préjugés résultant de la croyance absolue, en l’universalisme des référents juridiques coloniaux. Or, ce modèle juridique colonial a confiné le législateur béninois dans une vision unidirectionnelle du droit comportant un fort risque d’exclusion de l’endogénéité juridique et de perte de légitimité des mesures juridiques édictées.

L’option d’un régime foncier fondé sur la procédure de l’immatriculation foncière, dans un contexte où prédomine des patrimoines fonciers lignagers, est la manifestation récurrente d’un complexe juridique qui fait du modèle juridique colonial, la seule référence valable en matière foncière et environnementale. Le complexe juridique signifie ici, renoncement total du passé historique du pays, de sa culture juridique et de ses valeurs et standards au profit, des référents juridiques exogènes. Or, si ce droit de référence correspondait bien aux réalités socioculturelles des pays occidentaux, il n’en est pas de même pour le Bénin où, les sociétés reposent sur la défense des intérêts des groupes sociaux et la solidarité dans l’accès et le contrôle des terres et des ressources naturelles.

Le livre blanc de politique foncière et domaniale et le code foncier et domanial du Bénin ont été élaborés sur la base de référents exogènes qui perpétuent les complexes et les préjugés juridiques. Or, comme nous l’avions mentionné plus haut, le modèle juridique colonial a montré les limites de son efficacité et de sa pertinence à prendre en charge les problématiques foncières et environnementales lorsque l’endogénéité est exclue de la définition des mesures juridiques. La négation récurrente de l’endogénéité juridique constitue une lacune majeure du

droit (§1). A cette première lacune du droit positif, s’ajoutent les lacunes relatives à la

cohérence interne des politiques et des réformes foncières (§2).

§ 1 - L’exclusion de l’endogénéité juridique : une lacune majeure du droit positif

L’exclusion l’endogénéité juridique des politiques et réformes foncières et environnementales remonte à la colonisation française, période au cours de laquelle un nouveau régime foncier a été institué au Dahomey (Bénin) par le biais du Décret du 24 juillet 1906 organisant la propriété foncière dans les colonies et territoires relevant du Gouverneur Général de l’Afrique Occidentale Française. Pour opérationnaliser ce nouveau régime foncier, le législateur colonial avait également institué le Service de la conservation de la propriété foncière et droits fonciers en vue d’assurer à leurs titulaires, la garantie des droits réels qu’ils possèdent sur les

immeubles soumis au régime de l’immatriculation (article 1er Décret du 24.07.1906).

Au début de la colonisation, l’immatriculation était facultative mais exceptionnellement

obligatoire, en cas d’aliénation ou de concession de terres domaniales ou encore, dans le cas où un immeuble détenu jusque-là dans les formes admises par les coutumes indigènes, doit

295 H. Dinh, op. cit., p. 1.

faire, pour la première fois, l’objet d’un contrat écrit, rédigé en conformité des principes du droit français.

Inspirée du Torrens Act Australien, la procédure de l’immatriculation a pour but de purger définitivement les droits fonciers endogènes qui, par leur nature patrimoniale, ne satisfont guère aux critères du droit de propriété foncière tels que définis par le droit français. Suivant

l’article 544 du code civil français en effet, « la propriété est le droit de jouir et disposer des

choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements ». Il s’agit d’un droit à valeur constitutionnelle en France que le constituant béninois a également pris à son compte dans la loi fondamentale et le code foncier et domanial297. Le droit de propriété est acquis par l’immatriculation au livre foncier de l’immeuble au profit de son titulaire. Le législateur de 1906 a rendu définitive l’immatriculation pour qu’aucun immeuble immatriculé ne puisse plus être soustrait au régime de l’immatriculation, pour être placé à nouveau sous l’empire de celui auquel il était soumis antérieurement (article 3 du décret du 24.07.1906). L’entreprise de transformation des droits

fonciers traditionnels a été une tâche ardue et peu efficiente malgré, la mise au point d’une

multitude de constructions juridiques à effet d’infléchir les attitudes des ‘’indigènes’’ à l’égard

de la procédure de l’immatriculation foncière (A). A l’indépendance du pays en 1960, et plus

d’une vingtaine d’années après le renouveau démocratique de 1990, le régime de l’immatriculation foncière est maintenu avec les mêmes concepts et théories juridiques coloniaux. La volonté de l’Etat de s’octroyer des pouvoirs exorbitants sur les terres rurales et les ressources naturelles apparaît clairement affichée dans les documents de politique et de réforme avec la théorie de la purge comme instrument privilégié pour parvenir à cette

mainmise (B).

A - Des constructions juridiques défavorables à l’endogénéité juridique

Les législations foncières coloniales ont abordé la question de la purge des droits fonciers africains originels sur la base d’un certain nombre de concepts et théories juridiques tendant

à justifier les fondements juridiques de l’imposition du régime de l’immatriculation foncière (1).

Les tentatives du législateur colonial pour infléchir la logique de penser et d’agir des

autochtones, aux fins de les soumettre à la procédure de l’immatriculation foncière, ont été vaines, tant le fossé entre le droit colonial et les systèmes juridiques endogènes était trop

grand pour être aussi facilement comblé (2).

1 - Des théories juridiques pour perpétuer un droit d’origine coloniale

Le législateur colonial avait mis au point plusieurs constructions juridiques dans le but de rendre opérationnel le régime de l’immatriculation foncière. La théorie de la succession d’Etat

(a) fut le premier concept juridique appliqué aux colonies pour justifier l’intervention du

colonisateur dans la régulation juridique. Sous l’effet des critiques à la fois de la jurisprudence de l’époque et de la doctrine, cette théorie juridique a vite été abandonnée au profit d’autres

constructions juridiques telles que, les théories de terres vacantes et sans maîtres (b), de la

mise en valeur des terres (c) et de l’expropriation pour cause d’utilité publique (d).

a) Une théorie de succession d'État pour se substituer aux anciens royaumes

La théorie de la succession d’Etat a été instituée dès le début de la colonisation. Elle permettait à la France d’accaparer des terres et des ressources naturelles de ses nouvelles colonies dans la ‘’légalité’’ (Sic). L’objectif poursuivi par le colonisateur français, à travers cette théorie,

était d’octroyer de grandes concessions de terres aux industries et entreprises coloniales dans des conditions juridiques optimales. L’argument juridique à l’appui de cette prétention, a été la substitution de l’Etat français aux territoires conquis. Mais, cette théorie de substitution a été fortement critiquée par la doctrine et par la jurisprudence particulièrement, dans les décisions de la Cour d’Appel de l’AOF. Ainsi, dans un arrêt de principe en date du 10 mars 1933, la Cour d’Appel a décidé que, ‘’les souverains locaux même s'ils avaient des droits exorbitants sur les terres étaient des détenteurs sans titre qui ne pouvaient légitimement transmettre leurs droits abusifs à un État civilisé’’298. La jurisprudence a été on ne peut plus claire sur cette question : les souverains n’étaient pas les propriétaires des terres de leur royaume mais des détenteurs. La succession d’Etat ne se comprend qu’entre deux Etats dont l’un renonce volontairement ou

involontairement à sa souveraineté. Or, le cas du Dahomey (Bénin), l’Etat dans sa

configuration actuelle n’existait pas. La succession s’assimilait plutôt à une annexion de royaumes qui ne formaient pas un Etat encore moins une nation. La méthode utilisée pour assujettir ces colonies était d’ailleurs condamnée par une décision de la Cour d’Appel de l’AOF

qui indiquait que “L'État français ne saurait prétendre avoir légitimement acquis par voie de

conquête ce qui...”.

Dans la doctrine, la théorie de la succession d’Etat a été farouchement combattue. G. A.

Kouassigan estimait que, ‘’le souverain n’a que des pouvoirs d'administration générale’’299. A

ce titre, le souverain ne pouvait transmettre une chose qui ne leur appartenait pas. Les souverains avaient pouvoir sur les hommes et ce pouvoir ne s’étendait pas aux terres des collectivités lignagères. Le souverain, détenteur du pouvoir politique se distinguait du chef de terre qui est un descendant direct du premier occupant et qui est la seule autorité habilitée par les systèmes juridiques endogènes, à officier les cérémonies religieuses relatives aux terres et aux ressources naturelles. Tout comme les souverains étaient des détenteurs de la terre, les chefs de lignages possédaient également, la terre pour le compte des membres des groupes lignagers auxquels ils appartiennent. C’est le groupe social qui possède la terre et non l’individu. La légalité de la théorie de la succession d’Etat ayant été combattue, celle-ci a été abandonnée au profit de la théorie des terres vacantes et sans maître pour justifier la mainmise du colonisateur sur les patrimoines fonciers lignagers.

b) Une théorie de terres vacantes et sans maître pour accaparer des patrimoines fonciers lignagers

L’application de la théorie des terres vacantes et sans maître fait suite à celle de la succession d’Etat qui n’a pas prospéré dans les colonies françaises. Le code civil français de 1804, décrété le 14 ventôse an XI a servi de source d’inspiration au législateur colonial pour la construction de la théorie des terres vacantes et sans maître. Le Décret colonial du 15 novembre 1935 portant règlementation des terres domaniales en AOF, s’inspirant sans doute des dispositions de ce code, prescrit que : ‘’les terres vacantes et sans maitre appartiennent à l’Etat’’. La prescription est alors élargie aux terres inexploitées ou inoccupées depuis plus de dix ans et à celles qui ne font pas l’objet d’un titre régulier de propriété ou de jouissance par application des dispositions du code civil ou des décrets du 8 octobre 1925 et du 26 juillet 1932 (article 1). En vertu de la loi française, « terre vacante et sans maitre », regroupe selon C. Coquery-Vidrovitch, ‘’toute terre ni immatriculée, ni possédée suivant les règles du code civil français par les autochtones : c'est-à-dire la quasi-totalité du domaine colonial’’300. Pour

298 Cour d'Appel de l'AOF, 10.3.1954, Penant 1933, I.

299 G.A. Kouassigan (1966). Op. cit.87.

l’auteure, l’application de cette théorie comporte beaucoup d’inconvénients pour les autochtones. Peu terres rurales disposaient en effet, de titre régulier. La disponibilité foncière favorisait des jachères de longues durées et les besoins socioéconomiques des communautés n’exigeaient pas l’exploitation à grande échelle des terres. Il devenait alors de plus en plus difficile pour les indigènes de prouver leurs droits fonciers sur leurs propres terres.

La Circulaire en date du 7 décembre 1935 du gouverneur général de l’AOF a eu pour effet d’aggraver l’insécurité foncière des indigènes. Le gouverneur général instruisait en effet, les lieutenants généraux du Groupe et l’administrateur de la Circonscription de Dakar, de s’opposer aux prétentions de certains spéculateurs qui tendent à faire immatriculer sans aucun droit ou de revendiquer des terrains depuis longtemps vacants et sans maitre, en déclarant que leurs ancêtres les ont cultivés autrefois. Or, la première occupation constitue la base même des patrimoines fonciers communs et leur fondement juridique dans les systèmes endogènes de gestion des terres et des ressources naturelles. Plus d’un demi-siècle après l’accession du pays à la souveraineté internationale, le Livre blanc de politique foncière et

domaniale préconise la revalorisation de la théorie des ‘’biens vacants et sans maître’’ pour

doter l’Etat des moyens de s’approprier de nouvelles terres301. Le législateur béninois s’est

inscrit dans la logique de cette théorie coloniale en disposant que, les terres qui n’ont jamais fait l’objet d’une appropriation première relèvent du domaine privé immobilier des collectivités

territoriales (article 286 code foncier et domanial). La théorie des terres vacantes et sans

maitre, sans être totalement abandonnée par le législateur béninois, a été renforcée par celle de la mise en valeur obligatoire des terres rurales qui a elle aussi, une origine coloniale.

c) La mise en valeur obligatoire de toutes terres rurales privées

La mise en valeur des terres est une construction juridique sous-tendue par la volonté du législateur coloniale d’assurer la rentabilité purement économique des terres conquises au profit de la Métropole. Cette théorie assujettit toute concession accordée aux entreprises coloniales à l’obligation de mettre en valeur les terres concédées. Sur la base de cette théorie, des concessions ne peuvent être accordées qu’aux personnes ou aux sociétés notamment françaises justifiant de ressources financières capables d’assurer la mise en valeur des terres. La justification des moyens financiers concerne les concessions de plus de deux (200) hectares (article 4 du décret du 15 novembre 1935). La théorie de mise en valeur obligatoire

des terres rurales302 a été reprise par le législateur béninois pour faciliter l'accès à un foncier

sécurisé aux porteurs de projets d'investissement. Aux critères d’éligibilité des concessions coloniales qui visaient exclusivement les opérations de développement rural, le législateur indépendant a adjoint les projets d’investissement destinés à préserver l’environnement. Les actions de développement rural qui peuvent être assimilées à une mise en valeur concerne la mise en place et l’exploitation des cultures pérennes, annuelles ou saisonnières, l’élevage des animaux domestiques ou sauvages, le maintien, l’enrichissement ou la constitution de forêts, la pêche, l’aquaculture, les infrastructures et les aménagements de cultures irriguées, la création de jardins botaniques et de parcs zoologiques et la construction et l’exploitation des établissements de stockage, de transformation et de commercialisation des produits agricoles, de l’élevage, de la foresterie, de la pêche et de toute autre activité à caractère rural.

301 MUHRFLEC, op. cit., p.118.

302 Le législateur béninois a consacré une quinzaine de mesures pour la théorie de mise en valeur des terres rurales (cf. : articles 5, 7, 308, 309, 360, 364, 365, 368, 369, 370, 371, 373 et 510 du code foncier et domanial).

L'obligation de mettre en valeur les terres rurales acquises en pleine propriété ou détenues dans les formes admises par la coutume est un principe prévu à l'article 367 du code foncier

et domanial. En vertu de ce principe, toute terre rurale, dont la mise en valeur n’est pas

assurée, peut faire l’objet d’une mise en valeur par toute autre personne physique ou morale (article 365). Les propriétaires de terres rurales autres que l’Etat et les collectivités territoriales, ont l’obligation de mettre en valeur leurs terres y comprises celles dont la durée de la jachère est supérieure à cinq (05) ans. L’obligation de mise en valeur peut être assortie d'une amende fixée par le conseil communal ou municipal lorsque la mise en repos momentané de la terre rurale dépasse deux (02) ans et qu'à la cinquième année de repos momentané, le propriétaire ou l'usager n'y introduit pas des plantes fertilisantes ou tout autre moyen de fertilisation capable de régénérer la qualité de ces terres.

Constitue un défaut de mise en valeur, l’absence de tout entretien ou de toute production d’une terre rurale durant une période continue de cinq (05) ans, décomptée à partir de la date du constat de l’absence d’entretien ou de production. L’insuffisance de mise en valeur résulte également, d’un mauvais état d’entretien ou d’abandon d’une installation industrielle sur des terres rurales pendant le même délai. L’insuffisance de mise en valeur est aussi assimilable au défaut de mise en culture. Sont également considérées non mises en valeur, les concessions devenues définitives, lorsque les conditions imposées par le cahier des charges annexé à l’arrêté d’octroi ne sont pas remplies, les parcelles isolées demeurées en friche pendant cinq (05) années consécutives sans introduction de plantes fertilisantes ou de tout autre moyen de fertilisation, les parcelles mises en jachère pendant plus de cinq (05) ans. Le mauvais état de production constitue un défaut de mise en valeur. L’état de non mise en valeur concerne les entreprises agricoles ou les parcelles isolées portant des cultures pérennes dont les rendements sont largement inférieurs à ceux habituellement obtenus dans la localité. Le défaut de mise en valeur d'une terre rurale donne droit, à toute personne physique ou morale de demander au maire, l’autorisation d’exploiter cette terre notamment pour y mener des activités agricoles ou pastorales. Dans ce cas, une demande de mise en valeur est adressée au maire de la commune qui saisit d'abord la commission de gestion foncière de la commune. Celle-ci se prononce, après une enquête contradictoire, sur l’état de non mise en valeur ou d’insuffisance de mise en valeur du fonds de terre concerné, ainsi que sur les possibilités de mise en valeur rurale de cette terre. Un arrêté communal constatant le défaut de mise en valeur est pris et notifié au propriétaire ou au présumé propriétaire.

Pendant le délai d’affichage de deux mois, celui-ci fait connaître par écrit au maire qu’il s’engage à mettre en valeur le fonds inexploité ou sous-exploité, dans un délai d’un (01) an, ou qu’il y renonce. L’absence de réaction du propriétaire ou du détenteur vaut renonciation. Dans ce cas, le droit d’exploitation peut être attribué à toute personne qui en fait la demande, avec obligation d’engager la mise en valeur selon les conditions du bail dans le délai d’un (01) an. L’autorisation d’exploiter est accordée par le maire, après avis de la commission de gestion foncière de la commune.

En cas de pluralité de demandes, la priorité est accordée au demandeur rural en situation de

première installation. Le bénéficiaire de l’autorisation d’exploiter conclut avec le propriétaire

ou le présumé propriétaire, un bail qui détermine les conditions de jouissance et le montant du bail. Le bail peut être renouvelé dans les conditions prévues par le contrat, lequel détermine également les conditions de reprise du fonds par le bailleur en cas de non-renouvellement.

2 - L’échec des théories juridiques coloniales

Le régime de l’immatriculation foncière vise à transformer les droits fonciers traditionnels

détenus par les autochtones en droits de propriété individuelle à travers une procédure aboutissant à la délivrance de titres fonciers. L’objectif est de permettre aux investisseurs coloniaux de disposer d’un foncier sécurisé pour leurs projets économiques. C’est

principalement dans cette optique qu’il convient de situer les tentatives d’instaurer dans les

colonies, un régime de propriété débarrassé des attributs des droits fonciers traditionnels pour les conformer aux normes et standards du droit français.

L’entreprise de conformation des droits fonciers traditionnels aux normes juridiques occidentales soulevait une difficulté majeure : les autochtones ne sont pas prêts à se défaire de leurs habitus, de leurs pratiques et de leurs coutumes séculaires en matière d’accès et de contrôle des terres et des ressources naturelles. L’échec des différentes législations coloniales s’explique alors, par le refus des communautés rurales d’une acculturation juridique, violente dans ses théories et dans son imposition et contraires aux réalités socioculturelles. Le rapport, en date du 8 octobre 1925, du ministre des colonies André HESSE au Président de la République française illustre l’aveu d’échec de la législation foncière coloniale. Dans ce rapport, le ministre des colonies écrivait : ‘’le décret du 24 juillet 1906 qui a organisé en Afrique