Act. Nullepart onne puts'en
tenir
à cetteattitude
négative qui, manifestement,allait
àl'encontre
d'unetendance naturelle, et à certains égards bien¬
faisante, de l'évolution économique. L'entente
entre chefs d'entreprises est la conséquence
de la
concentration, qui, elle-même, est la
résultante de
la concurrence. Quand elle intervient, comme il
arrive souvent, sur un marché crue les excès de la
26 LE CORPORATISME
lutte concurrentielleoules progrès troprapides de l'outillage mécanique ont déséquilibré en y créant
la surproduction et en y avilissant les prix, l'en¬
tente fait œuvre utile si elle rétablit un minimum de discipline, si elle réadapte la production aux
besoins, si elle relèveles coursà un niveauqui per¬
mette une rémunération honorable pourles agents de la production. Il y a donc en fait parfois de
bonnes ententes. Quand ils l'eurent compris
les pouvoirs publics en arrivèrent non seulement à desserrer leurs prohibitions primitives, mais même
à favoriser la constitution de tels accords, voire
à les empêcherde se disloquer enles transformant de formations facultatives et libres en institutions
obligatoires. Déjà en 1910, l'Allemagne avait ainsi
sauvé le cartel de lapotasse. Pendant la guerre, un peu partout, des consortiums ont été constitués à
l'instigation de l'Etat là où ils ne se formaient pas
spontanément. Et les économistes libéraux avaient tort de croire qu'il ne s'agissait là que d'institu¬
tions exceptionnelles nées de circonstances anor¬
males et dont rien ne survivrait quand la paix
serait revenue. Dans un certain nombre de législa¬
tions récentes, en particulier depuis le début de la crise, on retrouve de la part de l'Etat cette même tendanceà setournervers les ententesindustrielles
et commerciales pour leur confier le soin de disci¬
pliner la production \
1 Cf. 1° le décret italien du 16 juin 1932 sur les
consor-LES ENTENTES À L'ÉTRANGER 27 Toutefois des difficultés graves subsistent que l'on n'a pasréussi encore à
résoudre, qui peut-être,
tiums obligatoires (qui a été du restetrèspeu appliqué). Voir
sur ce point les articles précités de F. Perroux et de
G. Bassani dans la R.E.P., 1933 et 1934 ;
2° Les AgriculturalMarketing Acts anglais de1931-1932-1933
qui prévoient la création de comités de marchés lorsque les
2/3 des producteurs représentant les 2/3 de la capacité de
production le demandent, avec pouvoirs très étendus de con¬
trainte sur la minorité. Des comités ont été effectivement
constitués au nombre de 5 (lait, pommes de terre, houblons,
porcs et lards) sur le fonctionnement desquels M. L. Robbins
apporte d'intéressants renseignements dans un article récent
de la R.E.P. (n° spécial sur l'Economie Dirigée,
septembre-octobre 1934);
3° La loi allemande du 15 juillet 1933, qui ouvre à l'Etat la
faculté d'établir des cartels obligatoires dans les branches de
production, agricole ou industrielle, où la libre concurrence
donnedes résultatscontraires à l'intérêtpublic. M. W. Darré,
qui est Ministre de l'Alimentation depuis l'avènement du
National-Socialisme, a poursuivi systématiquement la poli¬
tique de cartellisation dans l'agriculture et créé quatre grou¬
pements (lait-œufs-animaux de boucherie-céréales) à l'inté¬
rieur desquels règne une rigoureuse discipline. [Cf. les arti¬
cles de MM. von ©ietze (pour l'agriculture) et von Beckerath
(pour l'industrie) dans le numéro spécial de la R. E. P. sur
l'Economie dirigée];
4° La constitution de cartels obligatoires en Pologne dans
les houillères, les sucreries, les exploitations pétrolifères et
métallurgiques. Cf. à cet égard l'article de M. H. Devillez,
L'expérience polonaised'économiedirigée, (RevuePolitique et
Parlementaire, 1®mai 1934).
Surl'ensemble du problème desrapportsentre les cartels et
l'Etat voir, les études réunies dans le deuxième Cahier de
Droit Etranger sous le titre : Les Ententes industrielles et
commerciales en France, U. S. A., Pologne, Allemagne, avec
une abondantebibliographie, Sirey, 1932. Voir aussi la discus¬
sion du projet de loi sur les ententes économiques devant la
Société d'Etudes Législatives dans le Bulletin de cette Société,
1933.
28 LE CORPORATISME
en l'état actuel, sont insolubles. Elles proviennent
du fait que ce mouvement d'organisation collective
s'est déroulé dans une ambiance économique qui,
par ailleurs, demeure individualiste et libre. Ces cartels et ces trusts, évoluant dans un monde de
concurrence et de lutte, cherchent tout naturel¬
lement à dominer le marché plus encore qu'à le régulariser. Mus par la poursuite du maximum de
profit, ils ont tendance à abuser de leur puissance
pour rançonner le consommateur ou exploiter la
main-d'œuvre. Si favorable qu'il soit à la formule del'entente, l'Etat nepeut naturellement sanction¬
ner ces abus quand ils se produisent, d'où un flot¬
tement, des hésitations, des contradictions dont les Etats-Unis nous ont apporté, depuis le début du
xxe siècle, des exemples typiques, oscillant entre la lutte contre les trusts quand l'opinion publique est révoltée de leurs excès et la bienveillance à leur
égard quand ils apparaissentcomme un instrument d'organisation ou d'expansion du marché. Dans le dernier état des choses, la politique Roosevelt a mis en sommeil la législation anti-trust et elle a, par le système des « codes », rendu en quelque
sorte obligatoire et officiel l'accord des entreprises
par grandes catégories professionnelles, mais on sait que cette politique a donné des résultats très contestés. Ne faut-il pas voir, dans ce bilan un
peu trouble de 1' « expérience Roosevelt » 1 la
1 Sur l'expérience Roosevelt, cf. les livres récents de
ENTENTES ET LIBÉRALISME 29 preuveà
la fois de la place
qued'ores et déjà, dans
notre économie actuelle, tient l'action