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3. Théories et réalités du management des ONG

3.2 De la professionnalisation à la certification

Il convient alors de définir cette notion de professionnalisation. À notre avis, cette dernière regroupe trois principales dimensions :

a) La spécialisation : C’est développer ses capacités et connaissances afin d’acquérir plus de compétences permettant d’augmenter le niveau de qualification et passer à une action plus efficace. L’augmentation des compétences passe soit par la formation des bénévoles soit par l’engagement de professionnels (qui sous-entend le paiement d’un salaire). Dans les 2 cas, cela implique un investissement financier.

b) L’autonomie : C’est se rendre indépendant des bailleurs de fonds afin de pouvoir prendre ses propres décisions et ne pas devoir se limiter dans son action. Il est donc important de diversifier ses ressources afin de diminuer le pouvoir ainsi que le contrôle de l’externe. Une plus grande autonomie facilite la création d’une stratégie à plus long terme. C’est donc un élément important pour garantir la croissance de l’organisation.

c) L’efficacité : C’est avoir à disposition des outils adéquats permettant de gagner en productivité. C’est avoir une structure, des processus permettant d’atteindre les objectifs fixés de manière efficace.

Selon Erwan Quéinnec, les stratégies de développement d’une ONG peuvent être (Quéinnec, Igalens, et al., 2004 : 32-33) :

• La création d’un département de Marketing pour assurer le fundraising.

• La professionnalisation des opérations : capitalisation des expériences, formation de niveau universitaire, formalisation de certains savoirs, coopération entre équipe, changement de structure.

• La dotation de départements fonctionnels (direction des RH, des finances, etc.) pour conduire l’organisation.

La professionnalisation est souvent considérée, même par les ONG, comme une tendance inévitable qui doit permettre de gérer sa croissance et de conforter les donateurs dans l’utilisation efficace des fonds. L’étape supérieure est la reconnaissance de cette professionnalisation par une certification.

3.2.1 La certification

La certification est considérée comme un document, qui représente une assurance, donnée par un établissement neutre et agrégé en faveur d’une institution pour garantir que cette dernière respecte les normes et standards de l’industrie.

Plusieurs pays du Nord ont déjà mis en place des certifications pour les ONG. On retrouve en Suisse, la fondation ZEWO qui propose « une certification pour les organisations d’utilité publique qui récoltent des fonds »4. Elle représente donc un label de qualité pour tout donateur. Son objectif est d’assurer une transparence et garantir la bonne gestion des fonds dans le marché du don en Suisse. Dans ce but, elle réalise des audits chez ses membres et attribue une certification à ceux qui remplissent ses exigences : « Le label de qualité ZEWO certifie l’utilisation efficace et économique, pour un but précis, des dons récoltés. Il atteste d’une organisation transparente, avec des structures de contrôle internes et externes efficaces qui garantissent la loyauté de la collecte de fonds et de la communication. » (Fondation ZEWO, 2006 : 2).

Au plan international, la société SGS5 a développé des normes appelées « NGO Benchmarking » (Annexe 1) pour garantir que les actions ainsi que la gestion de l’ONG sont conduites de manière efficace et durable.

4 Définition tirée du site Internet de la fondation.

5 Entreprise mondiale dans le domaine de la certification et la gestion des risques.

Elle évalue plus de 100 critères en se basant sur les 4 axes suivants :

• Best practice : Stratégie, Communication et opinion publique, ressources humaines, capacité à lever des fonds, allocation des ressources, opérations.

• Attentes des contributeurs : transparence, efficience.

• Composante du management : Système, RH, etc.

• Gestion en 4 étapes : « Plan, Do, Check, Act »

Sur la base de ces normes, SGS établit une évaluation et délivre selon le résultat une certification. Le coût de ce service est d’approximativement EUR 7'500 et est valable 18 mois.

Plus connues, les certifications ISO 9000 proposent également une certification de système de management et de qualité. Cependant, elle n’est pas adaptée, dans sa forme actuelle à la particularité du management des ONG.

En observant les critères établis pour ces certifications, on peut constater qu’elles ne s’intéressent souvent qu’à l’organisation des ONG (gestion administrative, structure, financement, etc.) et non à la conduite ou la gestion qualité des projets. Elles ne permettent donc pas de rendre véritablement compte de la qualité des actions et de l’impact de l’organisation.

Cette tendance à la certification présente de nombreux points positifs : elle pousse à l’amélioration de la gestion de l’organisation et augmente la crédibilité des ONG face à ses donateurs. Cependant, elle présente aussi de nombreux désavantages et risques :

a) Les critères sont souvent imposés par les bailleurs de fonds. Il y a donc inévitablement des conséquences sur le financement des projets.

b) La certification peut être réalisée par des tiers qui n'ont éventuellement pas les compétences pour évaluer des actions de terrain spécifique dans un environnement particulier.

c) Elle engendre une augmentation des frais de fonctionnement de l’organisation et comme déjà mentionné, les donateurs ne sont pas forcément prêts à payer pour ces dépenses qui ne concernent pas directement les projets.

d) Elle risque de freiner l’émergence des ONG du Sud qui ne sont pas toujours capables de répondre aux critères élevés imposés par de nombreux certificateurs.

Finalement, pour atteindre un niveau de certification, les organisations doivent utiliser des concepts et outils de management qu’il n’est parfois pas facile d’appliquer dans une culture qui place l’homme avant tout autre considération de performance.

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