• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 2 : REVUE DE LITTÉRATURE

2.7.1 Dans le Connecticut

Je présente ici l’exemple du programme d’insertion global offert dans l’état du Connecticut : le Beginning Educator Support and Training (BEST) (Youngs, 2002, cité par Cherian et Daniel, 2008, p. 3). Il s’agit d’un programme d’insertion de deux à trois ans pour les enseignants débutants dans lequel des équipes de soutien basées dans l’école et dans le district8 fournissent un programme bien planifié de soutien et d’évaluation. Ce soutien est axé sur le curriculum, l’enseignement et l’évaluation. Les novices préparent un portfolio complet qui documente leur apprentissage et leur développement. Le rapport de Youngs (Ibid.) portant sur deux districts qui utilisent le programme BEST souligne l’importance pour les directeurs de s’y impliquer.

2.7.2 En Suisse

Dans le système scolaire suisse, les enseignants sont considérés comme des apprenants à vie et leur développement est considéré autant personnel que professionnel. Dans plusieurs cantons suisses, il y a un choix soigneusement élaboré d’expériences disponibles pour les novices, y compris des groupes de pratique, une autoévaluation personnelle et professionnelle, du counseling et des cours. Les groupes de pratique sont une forme de réseautage facilitée et structurée qui soutient les nouveaux enseignants de différentes écoles

89

alors qu’ils apprennent à devenir de meilleurs solutionneurs de problèmes pratiques. Quant au counseling, il est généralement disponible pour l’ensemble des enseignants suisses, mais un plus grand nombre de novices y prennent part. D’ailleurs, dans certains cantons, il est obligatoire pour les débutants. Le counseling peut être réalisé à l’extérieur des groupes de pratique et il peut impliquer du mentorat un-à-un axé sur la pratique en classe. Pour ce qui est des cours, certains sont obligatoires, d’autres sont facultatifs. Certains sont donnés sur une base régulière et d’autres, organisés à l’improviste, pour répondre à des besoins ponctuels. Les pratiques favorisant le développement professionnel des nouveaux enseignants incluent aussi l’observation mutuelle en classe entre les novices et les enseignants d’expérience. Toutes ces pratiques sont secondées par la formation des leadeurs des groupes de pratique, des conseillers et des mentors. Une équipe de professionnels chapeaute en plus l’ensemble des activités d’IP et les leadeurs des groupes de pratique. Quant à ces leadeurs, ce sont tous des enseignants en poste, qui sont libérés de quelques-unes de leurs tâches, ce qui leur donne du temps à consacrer à leurs responsabilités de leadeur, rôle pour lequel ils reçoivent une paie additionnelle (Wong, Britton et Ganser, 2005, p. 380).

2.7.3 En France

En arrivant dans les milieux scolaires français, les nouveaux enseignants sont considérés comme des stagiaires. Ils doivent d’abord passer un examen oral et écrit de recrutement très compétitif s’ils veulent enseigner au second degré. Un conseiller pédagogique est disponible pour tous les nouveaux « stagiaires » qui ont besoin de conseils, mais ils sont encouragés à se débrouiller seuls. Les stagiaires s’observent mutuellement. Ils sont aussi tenus d’assister régulièrement à des formations dans l’une des instituts universitaires de formation des maitres9, où ils se rencontrent en groupe et travaillent sur différents aspects de l’enseignement, tout en étant dirigés par un enseignant formateur. Les participants semblent d’ailleurs développer un sentiment d’appartenance à leur groupe, au sein duquel des

9 Les instituts universitaires de formation des maitres ont été remplacés en 2013 par les écoles supérieures

90

enseignants de mêmes matières travaillent ensemble, partagent leurs expériences, leurs pratiques et leurs outils (Wong, Britton et Ganser, 2005, p. 382).

Au quotidien, les débutants participent à différentes activités formatives comme de la préparation de cours, de la correction de devoirs d’élèves, du tutorat, de l’observation d’autres enseignants à l’école et dans d’autres écoles, de l’analyse de leçon. Les novices ont aussi à rédiger individuellement ou à deux un mémoire professionnel, qui consiste en un rapport de recherche détaillé des travaux exploratoires menés sur un des aspects de la pratique enseignante ou de la pédagogie. La variété des possibilités d’apprentissage, qui se déroule dans des paramètres et dans des établissements divers, nécessite un certain degré de flexibilité de la part des nouveaux enseignants (Ibid.).

2.7.4 En Écosse

En Écosse, une fois que les étudiants ont terminé leur formation, ils sont soumis à une période de probation d’un an, pendant laquelle ils sont évalués, puis au bout de laquelle ils peuvent obtenir leur brevet d’enseignement (Nault, 2003, p. 23). Durant cette année, qui est rémunérée, les novices bénéficient d’une tâche réduite ne dépassant pas 70 % d’une tâche complète. Ils ont donc du temps pour réaliser des activités de développement professionnel. Pendant cette période, ils sont aussi accompagnés d’un enseignant jouant le rôle d’agent de probation. Les nouveaux enseignants ont également un contrat garanti pour toute la durée de leur première année en IP, grâce au système de placement dans les écoles effectué par le General Teaching Council. Ce placement, qui, en plus, tient compte des préférences des nouveaux diplômés, leur garantit une certaine stabilité (Ibid.).

2.7.5 En Chine (Shanghai)

La culture de l’enseignement à Shanghai en est une de collaboration, où tous les enseignants apprennent à s’impliquer dans l’IP des novices, en soutenant leur enseignement, leur apprentissage personnel et celui de leurs élèves. Tout le processus d’IP est donc conçu pour aider les nouveaux enseignants à s’insérer dans cette culture collaborative. Le processus

91

comprend entre autres des groupes de recherche et de la planification collective de cours, qui amènent les nouveaux comme les vétérans à discuter et à analyser leur propre enseignement. Pour les novices, un éventail impressionnant d’occasions d’apprendre est offert, autant dans leur école que dans leur district. Ils peuvent observer leurs pairs, dans l’école ou à l’extérieur de celle-ci. Des leçons sont même ouvertes à tous, après lesquelles les enseignants peuvent en faire un compte-rendu et en discuter. Les novices peuvent aussi être assujettis à se faire observer lors de leurs cours. Ils reçoivent ensuite les commentaires, les critiques et les suggestions des observateurs. Puis, plusieurs fois par année, des formations d’une demi- journée sont offertes aux nouveaux enseignants, dans leur école ou dans un collège d’éducation. Les novices ont aussi l’occasion de mener des projets d’enquête ou de recherche-action, avec le support du personnel de recherche de l’école ou du district (Wong, Britton et Ganser, 2005, p. 380).

Au niveau du district, des ateliers et des cours sont offerts, du mentorat est fourni et une ligne d’assistance permettant aux novices de communiquer avec des spécialistes est disponible. Ajoutons que des récompenses sont données aux mentors-mentorés qui font un travail qui se démarque. Comme autre marque de reconnaissance envers les enseignants, les écoles offrent des cérémonies de bienvenue et des célébrations du travail d’équipe en fin d’année. Et, fait nouveau : des compétitions entre les enseignants sont organisées par le district. Ces concours ont pour but de motiver les nouveaux enseignants et d’encourager l’étude sérieuse et la préparation à l’enseignement. Dans le cadre de ces compétitions, les cours des enseignants sont enregistrés sur vidéo, et l’enseignement devient alors une propriété collective, que tous se partagent (Wong, Britton et Ganser, 2005, p. 381).

2.7.6 En Nouvelle-Zélande

Les nouveaux enseignants néozélandais ont à compléter deux années d’enseignement pour obtenir leur brevet, années au cours desquelles ils sont inscrits à un PIP nommé Advice and

Guidance (AG) program (qui peut littéralement être traduit par Programme conseil et orientation) (Nault, 2003, p. 24; Wong, Britton et Ganser, 2005, p. 381). Ce programme est

92

Pour y participer, les novices sont libérés de 20 % de leur tâche (Wong, Britton et Ganser,

op. cit., p. 381). On leur confie également les tâches les moins exigeantes ou problématiques,

particulièrement en première année (Nault, op. cit., p. 24). Le programme comprend entre autres des activités diverses d’observation de l’enseignement, des cours, des formations, des rencontres et du soutien par les pairs (Nault, loc. cit.; Wong, Britton et Ganser, loc. cit.). Les novices sont accompagnés et soutenus par tous les membres du personnel et, plus particulièrement, par leur mentor, qui consacre cinq heures par semaine à les soutenir (Nault,

loc. cit.). Généralement, il y a un membre de la direction ou du corps professoral qui agit à

titre de coordonnateur du programme, mais plusieurs acteurs sont impliqués. Le ministère de l’éducation néozélandais fournit des ressources régionales au service du développement professionnel des nouveaux enseignants, dont des ressources financières « pour couvrir une partie des frais liés à la formation et à la libération du mentor et de l’enseignant débutant » (Nault, loc. cit.). Il organise aussi des rencontres régionales, qui attirent les enseignants de différentes écoles, et qui sont mises en place pour leur permettre d’échanger librement au sujet de leur IP (Wong, Britton et Ganser, loc. cit.).

Comme le programme est obligatoire dans les écoles, les directions et les enseignants n’ont d’autres choix que de s’y investir. D’ailleurs, les enseignants doivent documenter le support qu’ils reçoivent pendant leurs deux premières années d’enseignement, car ils devront en rendre compte lorsqu’ils postuleront pour leur permanence (Ibid.). Malgré le caractère obligatoire de la démarche, plusieurs de ceux qui soutiennent les novices considèrent leur aide comme un engagement envers la profession. C’est d’ailleurs, comme le soulignent Wong, Britton et Ganser (Ibid.), l’une des choses qui différencie le système scolaire néozélandais des autres : il y a là un engagement universel à soutenir les nouveaux enseignants. Enfin, bien qu’il y ait un guide ministériel décrivant les objectifs du programme AG, l’ampleur, la nature et la qualité des programmes locaux varient grandement (Ibid.).

2.7.7 Au Japon

Au Japon, l’enseignement est perçu comme une profession digne, de haut statut social. On accorde aussi beaucoup d’importance à l’IP des nouveaux enseignants, une période axée sur

93

la consolidation des compétences professionnelles (Nault, loc. cit.). Une école n’accueille généralement qu’un seul novice ou deux au cours d’une même année scolaire (Ibid.). À leur arrivée, les nouveaux enseignants voient leur tâche d’enseignement réduite (Wong, Britton et Ganser, loc. cit.; Nault, loc. cit) et on porte attention aux groupes d’élèves qu’on leur confie : dans la mesure du possible, on leur offre les classes les moins problématiques (Nault,

loc. cit.). De plus, les nouveaux se trouvent assignés à un enseignant-guide, qui serait

d’ailleurs la clé de la réussite du système nippon (Wong, Britton et Ganser, loc. cit.). Au cours de l’année, les enseignants participent à des activités de formation variées dans l’école (équivalant à soixante jours) et à l’extérieur (équivalent à trente jours), qui touchent tous les aspects de la profession et qui incluent des visites dans d’autres écoles ou un engagement dans la communauté (Nault, loc. cit.). Pendant toute sa formation, le nouvel enseignant peut compter sur la collaboration de tous ses collègues, plus particulièrement celle de son enseignant-guide et de la direction (Nault, loc. cit.). Généralement, tous les novices doivent enseigner deux fois ou plus devant des administrateurs du préfet, leur enseignant-guide, la direction ou la direction adjointe et devant d’autres enseignants de l’école. Ces leçons, longuement préparées, pratiquées et améliorées par le novice, sont observées, analysées puis critiquées par les observateurs. Notons que ce sont les leçons, et non les enseignants, qui sont critiquées. Comme c’est le cas à Shanghai, l’enseignement au Japon est vu comme une activité publique, ouverte à être examinée par tous (Wong, Britton et Ganser, loc. cit.). Le processus d’IP invite donc les novices à s’insérer dans cette pratique ouverte, et leur offre régulièrement des occasions d’observer leurs pairs, leur enseignant-guide et des enseignants d’autres écoles. Cette méthode est tellement répandue que tous les enseignants l’ont expérimentée, et ils croient en son efficacité. En plus des activités déjà nommées, les novices sont tenus de présenter un projet de recherche-action, basé sur une leçon qu’ils aimeraient étudier. Ces projets se retrouvent au bureau du préfet et sont disponibles pour les autres enseignants qui souhaitent l’utiliser (Wong, Britton et Ganser, loc. cit.).

Comme c’est souvent le cas dans les écoles québécoises, les enseignants japonais n’ont pas de bureaux individuels. Ils partagent plutôt une grande salle avec leurs collègues, où chacun a son bureau. Cette façon de faire s’inscrit dans la culture de collaboration des écoles japonaises. Enfin, l’IP n’est chez eux que le début du développement professionnel des enseignants. En effet, tous les enseignants japonais doivent participer à des programmes

94

parrainés au cours de leur carrière, et ce, même cinq, dix ou vingt ans après leur entrée dans la profession (Wong, Britton et Ganser, op. cit., p. 382).

2.7.8 En Alberta

Les enseignants albertains fraichement diplômés obtiennent un certificat d’enseignement, mais doivent enseigner l’équivalent de deux ans et recevoir une évaluation positive pour être éligible au brevet d’enseignement (Nault, loc. cit.). Pendant ces deux années, les novices participent à un programme de mentorat, mis en place dans les écoles et les CS avec l’aide de l’Association des enseignants de l’Alberta, dans lequel on les accompagne dès leur entrée dans la profession. Dans le cadre du programme, les novices sont appelés à participer à diverses activités : rencontres, miniconférences, ateliers de formation, observation, discussions, rencontres avec d’autres paires de mentors et débutants, sessions de planification communes, partage de lectures, team-teaching, etc. (Ibid.). En plus de participer à ces activités, pour lesquelles le novice et le mentor sont libérés environ trois demi-journées dans l’année, chaque enseignant doit rédiger un plan de développement professionnel annuel, puis le faire approuver par sa direction. La participation au programme de mentorat – pour les enseignants comme pour les mentors – est « considérée comme un moyen de remplir les exigences d’un plan de développement professionnel annuel » (Ibid.). Ainsi, les participants peuvent avoir de la reconnaissance pour leur implication dans le programme (Ibid.).

2.7.9 Points communs

Malgré que les approches en matière d’IP soient différentes d’un endroit à l’autre, je leur reconnais certaines caractéristiques communes : des approches d’IP structurées, complètes, rigoureuses et contrôlées, ainsi que des rôles bien définis pour les administrateurs, les formateurs et les mentors. Je remarque aussi que la plupart des programmes se concentrent sur le développement professionnel en employant une variété de méthodes et qu’ils ne sont considérés que comme une première phase ou une seule partie d’un processus de développement qui durera toute une carrière. Enfin, je souligne que la collaboration est au cœur des programmes d’insertion de ces huit régions, et même, au cœur de leur culture

95

scolaire. Le travail en groupe y est compris et encouragé, et les expériences et les outils y sont partagés entre les enseignants.

2.8 Le rôle de la direction

2.8.1 La responsabilité collective de l’insertion et l’importance du rôle de la