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D ' ACTIVITES COLLECTIVES EXEMPLES DE SITUATION

COOPERATION

Remplissage d'une cuve d'un réseau d'assainissement d'eau avec du chlorure ferrique

Le conducteur de camion sous-traitant, chargé de livrer le produit, réalise le raccordement avec le camion, tandis qu'un opérateur d'assainissement interne ouvre l'accès à la cuve et surveille son remplissage

COLLABORATION

Réalisation d'une tranchée pour le branchement d'un particulier au réseau d'eau potable

Un pelleteur sous-traitant et un manœuvre de l'entreprise utilisatrice contribuent tous deux à creuser la tranchée (ils ont la même mission)

AIDE

Opération de chargement de tourets sur le plateau d'un camion Un salarié de l'entreprise utilisatrice aide le conducteur routier sous-traitant à effectuer ce chargement : tandis que ce dernier charge les tourets à l'aide d'une grue auxiliaire, le premier l'aide à effectuer ce chargement, en utilisant son chariot élévateur

Tableau 12. Exemples d'activités collectives mises en œuvre par les personnels internes et sous-traitants

Ces activités collectives se trouvent fragilisées, parce que réalisées dans des situations dangereuses, ce qui occasionne l'accident ; par exemple :

▪ erreur de cuve par un conducteur de camion sous-traitant, liée à l'organisation du transport par l'entreprise extérieure (transport sur le même camion de différents produits chimiques dont

l'association est dangereuse, absence d'étiquetage des cuves), et contribuant à une blessure de l'opérateur d'assainissement interne, avec lequel il coopère lors du remplissage de la cuve, du fait de l'organisation des interactions entre les deux entreprises (manque de préparation et d'organisation de la prestation, combinaison dangereuse des produits transportés par l'entreprise extérieure et de ceux de l'entreprise utilisatrice ; cf. exemple 27 et annexe 12) ;

▪ absence de signalements sur le chantier, d'information des salariés, de marque de peinture et de trace d'implantation de supports de balisage, contribuant à fragiliser les activités collaboratives de réalisation d'une tranchée d'un pelleteur sous-traitant et d'un manœuvre interne : un grillage avertisseur signalant une canalisation électrique, sera considéré par les deux opérateurs comme indicatif d'une canalisation d'eau, parce que situé à proximité de cette dernière ; d'où la brûlure du manœuvre interne lors du dégagement de la canalisation électrique ;

▪ mauvaise synchronisation des actions d'un personnel interne et d'un conducteur routier extérieur, lors d'une opération de chargement de tourets, pour laquelle le premier aide le second : cette opération, ainsi que la répartition des tâches lors de cette dernière ne sont pas définies, les modes de stockage et les matériels à leur disposition ne sont pas adaptés, les opérateurs ne se voient pas mutuellement, autant d'éléments qui contribueront à la blessure du sous-traitant.

Exemple 27 : "Le travail consistait à dépoter 800 litres de chlorure ferrique dans chacune des quatre cuves enterrées dans des postes de relèvement, ce produit étant injecté dans le réseau d'assainissement pour éviter la formation de sulfure d'hydrogène liée au long temps de séjour de l'effluent dans le réseau. Le chauffeur, chargé de livrer ce produit, téléphone quand il arrive dans le secteur pour être pris en charge par un salarié qui le pilote vers les points de livraison. Arrivée sur le poste de relèvement, la victime (…), opérateur d'assainissement, (…) - ouvre la trappe d'accès à la cuve de chlorure ferrique et le chauffeur réalise le raccordement d'un récipient sur le camion pour un remplissage gravitaire. Malheureusement, sur le camion sont disposées des cuves plastiques de 800 litres contenant du chlorure ferrique mais aussi d'autres produits dont une cuve d'eau de javel. Le chauffeur s'est trompé de cuves et a dépoté de l'eau de javel dans le restant de chlorure ferrique (estimé à 50 litres) : il y a eu production immédiate de chlore gazeux que la victime a respiré avant de se reculer. Le chauffeur manœuvrant les vannes sur le camion, étant plus éloigné, n'a pas respiré d'émanations. Il a prévenu les pompiers qui ont évacué la victime vers l'hôpital où elle est restée en observation trois jours. Un périmètre de sécurité a été mis en place. Ce n'est que vers 17 h 30 que les pompiers ont pu arrêter la réaction en lançant de la chaux dans la cuve sur les conseils de la société qui exploite le réseau d'eau."

Mesures de prévention : "Se mettre à jour pour les protocoles de livraison et d'une façon plus générale pour les plans de prévention. Étiqueter tous les stockages avec fiche de sécurité."

Cinq accidents de ce type, 3 mortels et 2 graves, relèvent de cette catégorie (soit 6,3% des accidents examinés). Les victimes (conducteur d'appareils de levage et de manutention, conducteurs de véhicules, opérateurs du bâtiment, opérateurs de production) sont dans 4 cas, des personnels de l'entreprise utilisatrice et, dans 1 cas, un personnel de l'entreprise extérieure. Les blessures occasionnées par ces accidents sont diverses et font suite à des inhalations de produits, contacts avec la partie travaillante d'une machine ou écrasements par des objets en cours de manipulation ou des appareils de levage. On soulignera, en référence aux travaux de Leplat (1993), qu'il est quelquefois difficile, à partir des dossiers d'accident de la base, d'identifier si les activités collectives développées par les opérateurs correspondent à une tâche collective prescrite.

3.4. Cas particuliers

Deux accidents, présentant des particularités relatives à leur lieu et circonstances de survenue, ont été classés dans cette catégorie :

▪ l'un concerne une situation de coactivité entre sous-traitants externes sur le site de l'entreprise extérieure ;

▪ l'autre survient lors de la préparation d'une prestation de sous-traitance interne sur le site de l'entreprise extérieure.

3.4.1. Coactivité entre sous-traitants externes sur le site de l'entreprise extérieure

Le premier cas concerne un accident, relatif à une situation de sous-traitance externe, survenu sur le site de l'entreprise extérieure, dont la victime est un agent de maîtrise sous-traitant. Dans cette situation, la coactivité entre sous-traitants externes sur leur propre site contribue à la survenue de l'accident. La victime est en effet amenée à se déplacer, pour mener une activité non précisée, à proximité de la pelleteuse-chargeuse d'une entreprise utilisatrice, dont la flèche est en cours de maintenance par des collègues sous-traitants. Cette dernière s'est désarticulée et a blessé l'agent de maîtrise.

Contrairement aux accidents examinés précédemment, aucun des éléments du dossier ne permet strictement de mettre en relation la survenue de cet accident avec l'entreprise utilisatrice : la prestation n'est pas effectuée sur le site de cette dernière et aucun personnel de cette entreprise n'est présent. Néanmoins, c'est l'équipement de l'entreprise utilisatrice (la flèche de la chargeuse pelleteuse) qui est à l'origine de la blessure du sous-traitant. Aussi, et bien que le dossier ne permette de l'affirmer, il est possible que l'état de l'équipement maintenu (qui résulte de son utilisation par l'entreprise utilisatrice), l'information sur ce dernier par l'entreprise donneuse d'ordre, ou encore les conditions plus générales dans lesquelles cette intervention est menée (contraintes temporelles, analyse des risques liés à la prestation et définition des mesures de prévention, par exemple) aient également participé à la survenue de cet accident.

3.4.2. Préparation d'une intervention de sous-traitance interne sur le site de l'entreprise extérieure Le deuxième accident est très proche de certaines des situations accidentelles classées dans la première catégorie (cf. § III.3.1) : la victime, personnel sous-traitant, est blessé alors qu'il réalise une activité inhabituelle, à laquelle il n'a pas été formé, dans des conditions dangereuses et dans le cadre d'une sous-traitance interne.

Ce qui rend cette situation particulière est le lieu de l'accident. En effet, bien qu'il s'agisse d'une situation de sous-traitance interne, l'accident se produit sur le site de l'entreprise extérieure, à l'occasion de la préparation de la prestation. La victime, grutier, doit charger un engin afin de le transporter sur un chantier. C'est lors de ce chargement, qu'il est accidenté.

Différents éléments, sans relation apparemment directe avec l'entreprise utilisatrice, participent à la survenue de l'accident, tels que le réglage manuel et difficile de l'écartement des deux rampes d'accès à la plate-forme du porte-char, ou encore la hauteur de ce dernier. Néanmoins, l'organisation de la prestation et de sa sécurité, par l'entreprise extérieure, mais aussi par l'entreprise utilisatrice, est susceptible d'avoir fragilisé le système. En effet :

▪ la prestation concerne un engin rarement manipulé ; - il s'agit d'une "activité inhabituelle" selon le dossier ;

- l'entreprise extérieure est spécialisée dans la location de grues mobiles de chantier, mais la prestation concerne un chariot automoteur à conducteur porté, prestations que cette entreprise réalise de façon plus occasionnelle ("Parfois, d'autres engins tels des chariots automoteurs à conducteur porté sont amenés sur chantier afin de réaliser des manutentions particulières") ; ceci pose la question du choix de l'entreprise sous-traitante ;

▪ le caractère occasionnel de cette prestation participe à la survenue de l'accident ; le transport de ces engins est alors réalisé avec un porte-char, il nécessite de modifier l'écartement des rampes d'accès et laisse une faible marge d'erreur entre ce dernier et celui des roues avant du chariot, d'où l'accident (le chariot quittera la rampe) ;

▪ en outre, les conditions dans lesquelles cette activité est réalisée, semblent également contraintes : pression temporelle probable, le chargement ayant lieu à 19h ; voire, choix du "mieux-disant" susceptible d'expliquer l'absence de moyens adaptés ou de formation du sous-traitant.

Les résultats issus de la typologie proposée montrent que :

▪ la plupart des accidents liés à la sous-traitance (cf. § III.3.1) posent la question des conditions de travail dans lesquelles les sous-traitants internes sont amenés à mener leurs activités, du fait de l'organisation de la prestation et de sa sécurité par les entreprises extérieures et utilisatrices ; ▪ les situations de coactivité des personnels internes et sous-traitants peuvent effectivement être

accidentogènes, si la concomitance de leurs activités n'est pas organisée par les entreprises, aux différents niveaux du système (cf. § III.3.3.1).

Ils confortent ainsi la criticité des interventions sur site menées par des opérateurs extérieurs et celle des situations de coactivité induites par la sous-traitance, soulignées dans la littérature.

Mais les analyses montrent également que les risques liés à la sous-traitance ne se limitent pas à ces seuls lieux et temps : site de l'entreprise utilisatrice, simple présence sur ce site de personnels internes et extérieurs en un même temps. En effet :

▪ des risques peuvent également être liés aux relations d'interdépendance des activités successives de ces personnels (i.e. en dehors des phases de coprésence), si ces relations ne sont pas organisées (cf. § III.3.2) ; ces risques ne concernent plus seulement les personnels des entreprises extérieures, mais aussi ceux des entreprises utilisatrices, et plus uniquement la sous-traitance interne, mais aussi la sous-traitance externe ;

▪ la coprésence de ces opérateurs ne se limite pas aux situations de coactivité de ces derniers (cf. § III.3.3.2) ; ils peuvent également coopérer, collaborer, s'entraider, c'est-à-dire développer de

réelles activités collectives de travail, qui peuvent être fragilisées, si elles ne sont pas prévues ou organisées.

Le contexte de survenue des accidents considérés comme des "cas particuliers", tend d'ailleurs à conforter le fait que les risques liés à la sous-traitance dépassent ces lieux et temps. L'accident lors de la préparation d'une intervention de sous-traitance interne sur le site de l'entreprise extérieure montre que les problèmes de sécurité liés à ce type de sous-traitance ne se limitent pas au seul site de l'entreprise utilisatrice. Pour sa part, l'accident lié à la coactivité de sous-traitants externes sur le site de l'entreprise extérieure, conduit à s'interroger sur les conséquences d'une sous-traitance externe de certaines activités de l'entreprise utilisatrice, sur l'organisation du travail de l'entreprise extérieure et la sécurité des personnels concernés.