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Développement et fonctions des cellules de Sertoli postnatales

Chapitre 1 : Introduction

A. Le testicule et la glande surrénale : développement et fonctions

3. Développement et fonction des cellules somatiques du testicule

3.1. Développement et fonction des cellules de Sertoli

3.1.2. Développement et fonctions des cellules de Sertoli postnatales

Après la naissance, les cellules de Sertoli sont immatures et subissent des changements afin de devenir matures et fonctionnelles. Chez les rongeurs, les cellules de Sertoli ont une activité proliférative importante à partir de la différenciation testiculaire jusqu’à 15 jours après la naissance (Wang, Wreford, and De Kretser 1989). La prolifération des cellules de Sertoli postnatales est favorisée par l’augmentation des niveaux de FSH (Follicle-stimulating hormone) et de son récepteur (FSHR) à la surface des cellules de Sertoli (Rannikki, Zhang, and Huhtaniemi 1995). L’arrêt de la prolifération des cellules de Sertoli est contrôlé entre autres par l’hormone triiodothyronine (T3), l’acide rétinoïque et la testostérone qui permettent l’expression de gènes associés avec la différenciation des cellules (Holsberger et al. 2003; Buzzard, Wreford, and Morrison 2003). Dans les cellules de Sertoli matures, l’expression de l’Amh est diminuée tandis l’expression des gènes codant pour GATA1, P27kip1 (impliqué dans le contrôle du cycle cellulaire) et le récepteur nucléaire aux androgènes (AR) augmente (Sharpe et al. 2003). Les cellules matures expriment également des protéines impliquées dans les jonctions cellulaires (connexine 43, claudine 11) afin de constituer la barrière hématotesticulaire (BHT) (Sridharan et al. 2007; Mazaud-Guittot et al. 2010). La formation de la BHT chez les rongeurs se fait entre 15 et 19 jours après la naissance et est stimulée par la T3, l’acide rétinoïque et la testostérone (Chapin et al. 2001; Zhang et al. 2005).

Cette barrière se compose de nombreuses jonctions de différentes natures (jonctions serrées, adhérentes et communicantes) et permet de séparer les tubules séminifères en un compartiment basal et apical (Mruk and Cheng 2004). La BHT assure un rôle de défense immunitaire afin d’éviter le passage d’antigènes présents sur les cellules germinales post- méiotiques qui pourrait entrainer des réactions auto-immunes provoquant une stérilité (Francavilla et al. 2007). La BHT assure également un rôle structurel afin de compartimenter les tubules séminifères et permettre l’accès d’éléments nutritifs nécessaires à la spermatogenèse (Mruk and Cheng 2004). De cette façon, la sécrétion des différents facteurs (composantes de la matrice extracellulaire, substrats énergétiques, facteurs de croissance, hormones, etc.) produits par les cellules de Sertoli est polarisée. Une partie des sécrétions est libérée dans le compartiment basal où se trouvent les spermatogonies et l’autre partie est

Figure 1.2. Traçage cellulaire des cellules de Leydig et de Sertoli.

Représentation schématique du traçage cellulaire menant à la formation des cellules de Leydig et de Sertoli chez la souris. Au jour E10.5, les cellules progénitrices provenant du primordium gonadique et/ou du mésonéphros expriment toutes WT1 et forment trois populations différentes : les cellules pré-Sertoli HES1-, et les précurseurs des cellules de Leydig (HES1- et HES1+). Entre le jour E10.5 et E12.5, les cellules de Sertoli, présentes dans les cordons testiculaires, expriment SOX9 ainsi que DHH qui induit la différenciation des précurseurs cellules de Leydig dans l’interstitium. Les cellules dans l’interstitium cesseront d’exprimer WT1 et une sous-population de cellules va répondre au signal DHH provenant des Sertoli et se mettre à exprimer GLI1. Ces cellules progénitrices GLI1+ peuvent donner deux lignées : une population CYP17A1+ qui forme la population de cellules de Leydig fœtales et une population CYP17A1- ne produisant pas d’hormones stéroïdiennes qui contribuera éventuellement à la formation des cellules de Leydig adultes. La population de l’interstitium GLI1- peut également se différencier en population CYP17A1+ et contribuer à la population de cellules de Leydig fœtales. Extrait de (Liu, Rodriguez, and Yao 2016)

déversée dans le compartiment apical dans le fluide séminifère (Rato et al. 2010). Le micro- environnement créé par la BHT et le maintien de son intégrité sont indispensables pour la fertilité des individus.

Les cellules de Sertoli ont une activité étroitement liée à la FSH. Des souris injectées avec de la FSH après la naissance ont un nombre de cellules de Sertoli doublé par rapport aux animaux non traités (Meachem et al. 1996). Et à l’inverse, des animaux déficients en FSH ou son récepteur présentent une diminution de 40% du nombre de cellules de Sertoli entrainant une diminution du nombre de cellules germinales (Johnston et al. 2004; Abel et al. 2000). La FSH participe à l’établissement du nombre de cellules de Sertoli dans le testicule adulte et par conséquent au nombre de cellules germinales que les tubules pourront comporter. La FSH augmente la transcription du gène codant pour le récepteur aux androgènes ce qui permet aux cellules de Sertoli de répondre à la testostérone (Verhoeven and Cailleau 1988; Blok et al. 1992). L’expression d’AR commence vers le 4ème jour après la naissance chez la souris puis les niveaux d’expression d’AR augmentent au cours du développement prépubère jusqu’à l’âge adulte (Willems et al. 2010). Des modèles de souris invalidés pour AR dans les cellules de Sertoli (AR-KO (knock-out)) ne présentent pas de diminution du nombre total de cellules de Sertoli (Tan et al. 2005). Chez ces souris AR-KO, bien que le nombre de spermatogonies ne soit pas affecté, les spermatides sont très peu nombreux ou absents et la quantité de spermatocytes est légèrement diminuée. Ce déclin post-méiotique entraine une infertilité chez ces animaux (Wang et al. 2009; Chang et al. 2004; De Gendt et al. 2004). Les résultats obtenus dans ces modèles de souris montrent l’importance de la signalisation régulée par les androgènes afin de maintenir la spermatogenèse en contrôlant les fonctions des cellules de Sertoli (intégrité de la BHT, fonctions sécrétrices, etc.) (Tan et al. 2005).

Même après la détermination du sexe durant l’embryogenèse, les cellules de Sertoli matures ont également un rôle important à jouer dans le maintien de leur identité sexuelle. De nombreux modèles de souris ayant une perte d’expression de gènes impliqués dans la différenciation mâle ou une augmentation de l’expression de gènes du déterminisme femelle présentent un phénotype plus ou moins prononcé de transdifférenciation (revue dans (Gardiner and Swain 2015)). L’inactivation de Dmrt1 (Doublesex and mab-3 related transcription factor 1) par délétion inductible chez des souris mâles adultes (génétiquement XY) entraine une

féminisation des cellules somatiques et des cellules germinales dans les testicules. L’expression de Sox9 est perdue chez ces animaux qui se mettent à exprimer Foxl2 ainsi que des gènes impliqués dans la fonction ovarienne tels que Rspo1, Wnt4, Follistatine, et les récepteurs aux œstrogènes (ESR1 et ESR2) (Matson et al. 2011; Chaboissier et al. 2004). DMRT1 agit comme un répresseur en se liant à proximité des séquences codantes pour ces gènes impliqués dans la différenciation femelle (Matson et al. 2011). Dans ce nouvel environnement, des cellules de la thèque apparaissent et sont capables de produire des œstrogènes qui vont contribuer à inhiber l’expression de Sox9 (Georges et al. 2014). Ce phénotype est similaire à celui observé avec la perte de Sox9 dans les cellules de Sertoli au jour E14.0 où les animaux XY surexpriment des gènes spécifiques de l’ovaire conduisant à une stérilité à 5 mois après la naissance (Vidal et al. 2001; Wagner et al. 1994). DMRT1, de la même manière que SOX9 durant l’embryogenèse, permet de maintenir l’expression de gènes impliqués dans le destin mâle des cellules et réprimer les gènes de la différenciation femelle.