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III. ANALYSE DU RAPPORT BESOIN/APPORT

III.2. Détermination des apports

Comme on l’a vu précédemment, il est possible de déterminer la valeur énergétique des aliments de façon précise. La difficulté, pour estimer les apports énergétiques en énergie nette, est de connaître les quantités d’aliments consommés par les animaux. En pratique, les éleveurs utilisent souvent des valeurs empiriques pour calculer les surfaces nécessaire au pâturage. On trouve ainsi des valeurs de 2.2 kg MS/100 kg PV avec une augmentation de 1,9 kg MS par 100 kg supplémentaire pour les adultes (2,2 + 1,9x4 = 9,8 kg MS pour un animal de 500 kg, par exemple), et de 2,16 kg MS/100 kg PV avec une augmentation de 3,5 kg par 100 kg supplémentaire pour les jeunes (3,91 kg MS pour un animal de 150 kg, par exemple) [Demarquilly, 1981].

Cependant, dans la réalité, la quantité de matière sèche volontairement ingérée (MSVI) peut être très variable car elle dépend de nombreux facteurs rattachés soit à l’animal (poids, stade physiologique, traitements antérieurs, différences individuelles), soit à la plante (teneur en matière sèche, digestibilité et stade de croissance, état sanitaire, appétibilité), soit au mode d’exploitation du pâturage (quantité d’herbe offerte, mode d’exploitation, chargement à l’hectare, distribution d’un complément) et aux caractéristiques environnementales (température, durée du jour…) [Demarquilly, 1981 ; NRC, 2000a ; Ketelaars et Tolkamp, 1992]. De plus, les facteurs environnementaux affectent la consommation de façon très variable en fonction de la rusticité de l’animal [Fox et al., 1988] et du type de fourrage. Par exemple, une augmentation de température ambiante (jusqu’à un certain seuil) tend à améliorer la digestibilité de la ration, ce qui conduit à une diminution de l’ingestion [Morand- Fehr et Doreau, 2001].

On considère généralement deux facteurs principaux pour estimer la MSVI : la capacité d’ingestion de l’animal et l’ingestibilité de l’aliment (qui est corrélée positivement à sa digestibilité et à sa valeur énergétique [Blaxter et al., 1961 ; NRC, 1984]. Comme on l’a vu précédemment, on utilise l’UE pour exprimer ces deux facteurs. Cette unité se définit comme le rapport entre une ingestibilité standard (Ingestibilité d’une herbe de pâture jeune, de digestibilité égale à 0.80 et de valeur énergétique égale à 0.92 UFv, par un bélier castré en fin de croissance, soit 75 g de MS/kg de poids vif) et l’ingestibilité du fourrage considéré. Les tables ont été réalisées pour des animaux de race Française et pour des aliments classiques, et non pour des animaux plus rustiques et pour des aliments pauvres aves des taux de matière sèche élevés. Il peut toutefois être intéressant, si l’on arrive à déterminer l’ingestibilité de

l’aliment considéré, de convertir en UE les quantités consommées (estimées par d’autres méthodes), afin de les comparer à des valeurs usuelles dans les systèmes traditionnels.

D’autres méthodes sont envisageables pour estimer les quantités consommées.

La première méthode consiste à utiliser des équations permettant d’estimer la consommation en fonction des caractéristiques de l’animal, de la pâture consommée et des conditions environnementales. Ces équations sont présentées en Annexe 18.

De manière générale, l’ingestion vise à couvrir un besoin énergétique, même si il existe des doutes sur le fait que le comportement alimentaire des animaux soit dirigé vers une utilisation optimale de leurs capacités [Sibly et Calow, 1986]. Donc, lorsque l’aliment est hautement digestible, la consommation est considérée d’un point de vue physiologique (besoin en nutriments de l’animal) et est contrôlée par la demande énergétique de l’animal [NRC, 1987 ; ARC, 1980]. Tout ce qui entraîne une augmentation du besoin (augmentation du poids vif, augmentation du niveau de production, chute de température...) va donc de pair avec une augmentation de l’ingestion. Dans ce cas, on aura plutôt tendance à utiliser des relations permettant d’exprimer la MSVI en fonction du contenu énergétique de l’aliment et du besoin énergétique de l’animal [NRC, 2000a]. En revanche, pour des aliments ayant une faible concentration énergétique, la consommation est contrôlée par des facteurs physiques (capacité de digestion de l’animal) et le facteur limitant à l’ingestion est la digestibilité de l’aliment [Ketelaars et Tolkamp, 1992]. Dans ce cas, on utilisera plutôt des relations exprimant la MSVI en fonction de la digestibilité de l’aliment. La digestibilité ainsi que la capacité de « remplissage » de l’aliment étant fortement liées à la teneur en eau du fourrage, la MSVI est souvent exprimée en fonction de cette teneur [INRA, 1978 ; Verité et Journet, 1970].

La distinction entre une situation où l’appétit est régulé par des facteurs physiques ou non est parfois difficile, notamment lorsque l’aliment a une faible valeur énergétique mais que certains facteurs induisent une augmentation de sa digestibilité (augmentation de température par exemple) ou de la capacité de remplissage de l’animal (augmentation des besoins). Ces équations restent donc très théoriques et devraient finalement être définies pour chaque élevage. Une autre possibilité consiste à utiliser ces équations et à réaliser des ajustements en fonction de différents facteurs. Le tableau présenté en Annexe 18 présente les différents facteurs à prendre en compte et leur influence respective sur l’ingestion.

Une seconde méthode consiste à utiliser le rendement d’une pâture, la valeur énergétique des plantes qui la composent et le rendement d’utilisation de cette énergie, pour estimer la consommation des animaux. Comme on l’a vu précédemment, il est possible de définir le

rendement, à l’échelle d’une pâture, en nombre de kilos de poids vif obtenu par calorie (ou unité fourragère) disponible. La méthode présentée en Annexe 18 permet d’estimer, à partir de ce rendement et du besoin énergétique de la catégorie d’animaux concernés, le niveau de consommation des animaux. Cependant, cette méthode estime grossièrement la consommation, car le rendement de conversion de l’énergie disponible en poids vif est lui- même difficile à estimer.

Enfin, il existe trois autres méthodes expérimentales visant à estimer la quantité d’herbe consommée au pâturage [Demarquilly, 1966]. La première utilise des indicateurs (oxyde de chrome et azote chromogène) permettant d’estimer la quantité de fèces et la digestibilité, d’où la quantité consommée. La seconde consiste à isoler les animaux en stabulation et à leur apporter de l’herbe fauchée. Cette méthode surestime généralement les quantités consommées au pâturage mais elle est simple à réaliser, si les animaux peuvent être isolés. Dans le cas contraire ou pour obtenir des résultats plus proches de la réalité, une troisième méthode consiste à estimer la différence entre la quantité d’herbe présente avant (disponibilité initiale) et après (disponibilité finale) le passage d’animaux sur une parcelle. Pour ne pas que les résultats soient biaisés par la croissance de l’herbe durant le temps de séjour des animaux, l’expérience doit être réalisée sur une courte période ou en employant des cages. Pour une expérience de plus longue durée, il faut tenir compte de cette croissance, dont les méthodes d’estimation ont été définies précédemment.