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Les déterminants de la motivation

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DE LA MOTIVATION INTRINSÈQUE ET EXTRINSÈQUE

2.3 Les déterminants de la motivation

Dans cette section, les déterminants (ou antécédents) de la motivation intrin-sèque, de la motivation extrinsèque et de l’amotivation seront abordés. Nous présenterons des études qui ont mesuré des déterminants motivationnels et leur impact sur la motivation aux trois niveaux de généralité.

2.3.1 Les déterminants sociaux

La motivation à un niveau de généralité donné dépend d’abord et avant tout de facteurs sociaux. Les facteurs sociaux réfèrent aux facteurs humains et non humains (par exemple, des affiches publicitaires) que les individus rencontrent dans leur environnement social. Tout comme la motivation, les facteurs sociaux se distinguent quant à leur niveau de généralité : situationnel, contextuel ou global. Il est attendu que les facteurs sociaux à un niveau hiérarchique donné influencent plus fortement la motivation au niveau correspondant.

Un facteur social situationnel est une variable présente à un moment précis dans le temps. Par exemple, recevoir des félicitations suite à un récital de piano

© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.

réussi, comme ce fut le cas pour Amélie, constitue un facteur situationnel. En accord avec la théorie de l’évaluation cognitive, les recherches antérieures révèlent que les facteurs situationnels ont une influence importante sur la motivation situationnelle. Plusieurs variables situationnelles ont été étudiées, notamment le feedback positif et négatif de performance (Vallerand, 1983 ; Vallerand et Reid, 1984, 1988), la façon de présenter un message (i.e., soit de façon à contrôler ou à soutenir l’autonomie de la personne qui reçoit le message ; Mageau et Vallerand, 2003 ; Pelletier et Vallerand, 1996), le succès et l’échec (Grouzet, Vallerand, Thill et Provencher, 2004 ; Vallerand, Gauvin et Halliwell, 1986a) et même la compétition (Vallerand, Gauvin et Halliwell, 1986b). Il est important de noter que l’effet d’un facteur situationnel donné sur la motivation situationnelle ne devrait pas perdurer sur une base temporelle, son impact étant limité au moment présent. Cela est particulièrement vrai lorsque le facteur n’est présenté qu’une seule fois (voir Loveland et Olley, 1979). Pour produire un effet à plus long terme, il est nécessaire de présenter le facteur situationnel de façon régulière et dans le même contexte. Il deviendra alors un facteur contextuel.

Les facteurs contextuels représentent des variables qui reviennent de façon récurrente dans un contexte de vie spécifique. Par exemple, le fait d’interagir de façon régulière avec une professeur de piano coercitive représente un facteur contextuel ayant une influence sur la motivation d’Amélie envers le piano. Toutefois, comme ce facteur était propre au contexte musical, il n’a pas eu d’impact sur la motivation d’Amélie envers d’autres domaines de sa vie, comme le sport ou les études. Les recherches antérieures ont étudié l’influence des facteurs contextuels sur la motivation dans une variété de domaines, tels que l’éducation (Deci, Vallerand, Pelletier et Ryan, 1991), le travail (Blais, Brière, Lachance, Riddle et Vallerand, 1993), les relations amoureuses (Blais et al., 1990) et le sport (Fortier, Vallerand, Brière et Provencher, 1995 ; Pelletier, Fortier, Vallerand et Brière, 2001).

Finalement, les facteurs globaux réfèrent aux variables qui sont présentes dans l’ensemble des différents aspects de la vie d’une personne. Les parents constituent un exemple de facteurs sociaux globaux. En effet, puisque les parents sont présents dans la majeure partie des contextes de vie de leurs enfants, on s’attend naturellement à ce qu’ils aient une influence sur le dévelop-pement de la personnalité et sur la motivation globale de ces derniers (Eccles et Wigfield, 2002). Les travaux d’Assor, Roth et Deci (2004) ont démontré que les enfants qui percevaient leurs parents comme leur procurant un amour conditionnel, où l’affection n’était donnée que si les enfants agissaient comme les parents le désiraient — ce qui constitue une forme très pernicieuse de contrôle parental — rapportaient un haut niveau de régulation introjectée dans plusieurs contextes de leur vie, tels que les sports et les études. Il semble donc que le comportement des parents dans l’étude de Assor et al. ait mis en opération un mode de fonctionnement généralisé à plusieurs sphères de la vie des jeunes — ce qui correspond au niveau global de la hiérarchie.

60 CONVERGENCES THÉORIQUES

2.3.2 Les déterminants internes

Le modèle hiérarchique apporte une contribution novatrice en soulignant une deuxième source pouvant influencer la motivation à un niveau donné, soit l’effet descendant (top-down) de la motivation au niveau supérieur sur la motivation du niveau directement inférieur de la hiérarchie. Ainsi, la motivation globale d’un individu est susceptible d’affecter ses motivations contextuelles et de la même façon, la motivation contextuelle d’un individu est susceptible d’affecter sa motivation au niveau inférieur (i.e., sa motivation situationnelle).

Selon le modèle hiérarchique, la motivation globale devrait avoir plus d’effet sur la motivation contextuelle que sur la motivation situationnelle puisque la première est située juste au-dessous dans la hiérarchie, alors que la seconde est située deux niveaux plus bas. De nombreuses études ont appuyé l’effet descendant. Par exemple, Blanchard, Mask, Vallerand, de la Sablonnière et Provencher (2007, Étude 1) ont mis en évidence que plus des athlètes détenaient une motivation contextuelle autodéterminée envers le sport (ici, le basket-ball), plus ils démontraient une motivation situationnelle autodéterminée lors du match de basket-ball subséquent. Les études de Lavigne, Vallerand et Miquelon (2007) et de Vallerand, Chantal, Guay et Brunel (2008, Étude 1) ont repro-duit ces résultats dans le domaine de l’exercice physique et de l’éducation, respectivement.

Il est important de noter que l’effet descendant de la motivation située à un niveau donné sur la motivation située au niveau inférieur est soumis à la règle de la spécificité (Vallerand, 1997). Ainsi, la motivation situationnelle envers une tâche spécifique (par exemple, faire un devoir de chimie un samedi soir) devrait être principalement influencée par la motivation contextuelle directe-ment reliée à cette activité (dans ce cas-ci, la motivation envers les études) et beaucoup moins par les autres motivations contextuelles non pertinentes (comme la motivation envers les relations interpersonnelles, par exemple). Des recherches récentes soutiennent cette hypothèse (voir, par exemple, Vallerand et al., 2008a ; Ntoumanis et Blaymires, 2003).

Le modèle hiérarchique postule que les contextes de vie représentent des structures cognitives (un peu comme des schémas) permettant de stocker en mémoire non seulement les motivations contextuelles, mais également des indices contextuels se rattachant aux conditions dans lesquelles les activités pertinentes à ce contexte sont habituellement effectuées. Il peut donc être postulé que l’activation d’un indice contextuel pourrait être suffisante pour rendre opératoire la motivation se rattachant à ce même contexte et, par conséquent, mettre en branle l’effet descendant sur la motivation situationnelle.

Il semble que de tels effets pourraient même se produire en dehors du champ de conscience (Bargh, 2005). Une étude de Ratelle, Baldwin et Vallerand (2005, Étude 1) soutient cette hypothèse. Ces chercheurs ont en effet démontré que le simple fait d’entendre un son en sourdine (et en dehors du champ de conscience) ayant été préalablement associé à plusieurs reprises à un message

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coercitif (« vous devez absolument passer au prochain dessin, comme vous êtes supposé le faire »), lors d’une participation à une première tâche, mène à une motivation situationnelle intrinsèque plus faible sur une seconde tâche similaire à la première. Ceci est conforme au modèle hiérarchique. En effet, ce dernier postule que le fait d’effectuer une nouvelle activité mène à la création d’un nouveau contexte d’activités dans lequel sont remisés les indices environnementaux et la motivation contextuelle se rattachant à l’activité, y compris les sons et messages entendus. Par la suite, lorsqu’une activité se rattachant à ce contexte de vie est rencontrée (la seconde activité), le simple fait d’entendre un son stocké en mémoire permet de déclencher la motivation contextuelle stockée en mémoire avec cet indice (le son) et l’effet descendant suit son cours. Ces résultats soutiennent non seulement l’effet descendant proposé par le modèle hiérarchique, mais démontrent également que cet effet peut s’appliquer à de nouvelles activités. Notons enfin que Guay et al. (2003, Étude 1) ont démontré, à l’aide de deux études longitudinales effectuées auprès de lycéens, que la motivation globale autodéterminée mesurée au temps 1 à l’aide de l’index d’autodétermination pouvait prédire la motivation contextuelle autodéterminée envers les études ou l’éducation (également mesurée à l’aide de l’index d’autodétermination) jusqu’à cinq ans plus tard. L’effet descendant semble donc se produire également du niveau global au niveau contextuel.

Le modèle hiérarchique propose un autre déterminant interne de la motiva-tion : l’effet ascendant (bottom-up). Il s’agit d’un effet récursif que la moti-vation située à un niveau donné peut avoir avec le temps sur la motimoti-vation située au niveau supérieur. La motivation situationnelle est donc susceptible d’affecter la motivation contextuelle, qui elle, est susceptible d’affecter la motivation globale. Ainsi, au bout de plusieurs pratiques et séances où Amélie s’est sentie motivée intrinsèquement à jouer du piano au niveau situationnel (grâce à son nouveau professeur), la jeune fille a commencé à développer une motivation intrinsèque contextuelle envers le piano. D’un point de vue théorique, considérer l’existence d’un tel effet récursif permet d’expliquer les changements motivationnels pouvant survenir avec le temps. Les études de Blanchard et al. (2007) et de Lavigne et al. (2008) démontrent bien que les individus qui vivent de la motivation autodéterminée de façon répétée au niveau situationnel sont susceptibles de développer une motivation plus auto-déterminée dans le contexte associé. Pareillement, le fait de vivre de façon répétée de la motivation autodéterminée dans différents contextes de vie peut en venir à produire des changements de personnalité au niveau global (voir Guay et al., 2003, Étude 1).

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