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Chapitre 1 Introduction

1.3 Réaction du greffon contre l’hôte

1.3.2 Déroulement de la réaction en trois temps

Il y a cinquante ans, Billingham décrivait les trois conditions sine qua non du développement de la GvHD : l’utilisation d’un greffon immunocompétent, la disparité HLA entre les cellules du donneur et du receveur, ainsi que l’incapacité du receveur à produire une réponse immunitaire efficace (62). Si toutes ces conditions sont réunies, la GvHD se développe lorsque les lymphocytes T du donneur réagissent contre les protéines polymorphiques HLA présentes à la surface des cellules du receveur.

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Ces protéines sont encodées par le CMH et se divisent en deux classes : les protéines HLA-A, -B et –C (CMH de classe I) qui sont exprimées sur la totalité des cellules nucléées, et les protéines HLA-DP, - DQ et –DR (CMH de classe II) exprimées principalement sur les cellules présentatrices d’antigènes (antigen presenting cells : APC) (3). La prévalence de la GvHD est directement reliée au degré de disparité entre les protéines HLA du donneur et du receveur. C’est pourquoi il est primordial pour chaque patient de trouver un donneur présentant la meilleure compatibilité HLA possible. Lors de HSCT avec des cellules souches provenant de CB, il est possible d’utiliser des unités de CB présentant une disparité HLA sans pour autant que le patient doive affronter d’importantes conséquences, étant donné la plus grande permissivité de ces cellules (3). Malgré tout, même dans le cas d’une greffe HLA- identique, environ 40% des receveurs développeront une GvHD qui nécessitera un traitement aux stéroïdes à forte dose (3).

La GvHD est une réaction de mécanismes inflammatoires qui se déroule en trois étapes et qui est mue par les lymphocytes fonctionnels du donneur infusés chez un receveur qu’ils ne reconnaissent pas. Que ce soit en raison de la maladie initiale, des infections préalables ou du conditionnement pré-greffe, les tissus du receveur sont endommagés, particulièrement au niveau de la muqueuse intestinale. Ces lésions contribuent à l’activation des APC par la translocation systémique de stimuli inflammatoires, comme par exemple les LPS des produits bactériens et les patrons moléculaires associés aux pathogènes (pathogen-associated molecular patterns : PAMPs) (63), ce qui stimule la sécrétion de cytokines et chimiokines pro-inflammatoires (64, 65). Ces événements augmentent l’expression des molécules d’adhésion, des molécules co-stimulatrices et des antigènes du CMH sur les APC du receveur, facilitant ainsi leur activation et migration vers les organes cibles, ce qui améliore l’efficacité de la présentation des protéines HLA aux cellules immunitaires du greffon (65). Les DC de l’hôte peuvent également acquérir et présenter les antigènes de l’hôte aux lymphocytes T contenus dans le greffon, ce qui les active (66). Une fois activés, les lymphocytes T naïfs du greffon sécrètent des cytokines inflammatoires, prolifèrent et entament leur migration vers les organes cibles de la GvHD. Ces évènements déclenchent la GvHD et la maintiennent, notamment par la destruction des organes cibles de la GvHD (Figure 1.3.1, p.16) (3, 17, 64, 66-69).

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Figure 1.3.1 – Immunopathogenèse de la réponse alloréactive et approches développementales pour la séparation des effets GvHD et GvL. Le modèle intégré de la pathophysiologie des réponses immunitaires alloréactives qui dominent les effets GvHD et GvL impliquent trois phases inter-reliées. I) L’établissement d’un environnement pro-inflammatoire. II) L’activation et la prolifération des lymphocytes T du donneur. III) La migration des cellules immunitaires effectrices aux organes cibles et fonction cytolytique. Cette revue de littérature discute de stratégies émergeantes afin de réduire la GvHD aiguë, tout en préservant des effets GvT regroupés dans le contexte des trois phases. Celles-ci incluent de nouveaux moyens de modifier sélectivement l’environnement pro-inflammatoire, de moduler l’apprêtement et l’expansion des lymphocytes T du donneur et de manipuler la migration des cellules immunitaires effectrices vers les tissus cibles du receveur. HSCT, greffe de cellules souches hématopoïétiques; LPS, lipopolysaccharide; TNF-α, facteur de nécrose tumorale alpha; IFN-γ interféron gamma; IL, interleukine; SLO, organe lymphoïde secondaire; APC, cellules présentatrices d’antigènes; PAMP, motifs moléculaires associés aux pathogènes; DAMP, motifs moléculaires associés au danger; TLR, récepteurs de type Toll; NLR, récepteur de type NOD; MHC, complexe majeur d’histocompatibilité; mHag, antigène mineur d’histocompatibilité; NK, natural killer; GI, gastro-intestinal; Treg, lymphocyte T régulateur; Teff, lymphocyte T effecteur. Reprinted by permission from New ways to separate Graft-versus-Host Disease and Graft-versus-Tumour effects after allogeneic haematopoietic stem cell transplantation, Kotsiou and Davies, British Journal of Haematology, 160(2), copyright © 2013 Blackwell Publishing Ltd. (70). License number 3419010036905.

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On a déterminé que les lymphocytes T mémoires n’étaient pas aptes à l’induction de la GvHD, potentiellement à cause de leur incapacité de migrer vers les organes lymphoïdes, possiblement puisqu’ils n’ont pas les molécules d’adhésion nécessaires, ou encore à cause de leur répertoire de récepteur de cellule T (T cell receptor : TCR) très restreint, ou encore une combinaison de ces deux hypothèses (71).

Les dommages causés aux tissus par les lymphocytes T cytotoxiques du greffon initient le recrutement de cellules effectrices supplémentaires, comme les cellules NK et les neutrophiles. Les cellules nouvellement recrutées dans les tissus cibles de la GvHD contribuent à l’augmentation de l’insulte tissulaire et alimente ainsi une boucle d’amplification de la GvHD. L’amplification de l’exposition subséquente au LPS mène à la tempête de cytokines caractéristique de la GvHD et amplifie le dommage infligé aux cellules, contribuant à l’amplification de la réponse inflammatoire (64). Pour cette raison, la GvHD est très difficile à contrôler une fois qu’elle a débutée (17).

Bien que les lymphocytes T du greffon soient les cellules effectrices du développement de la GvHD, les APC qui présentent les antigènes du receveur aux lymphocytes T du donneur, initiant et maintenant la GvHD peuvent provenir du greffon comme du receveur (6). Les APC du receveur sont nécessaires et suffisantes à l’initiation de la GvHD, puisqu’elles peuvent présenter une grande quantité de peptides dérivés de l’hôte (67, 72). La GvHD est ensuite amplifiée grâce aux APC du donneur, présentes au sein du greffon, et qui présentent les peptides du receveur par la présentation croisée (73). Bien qu’il n’y ait pas de consensus à ce sujet, il semblerait, dans certains cas du moins, que les DC du donneur puissent également initier la GvHD (73, 74).

À la lumière de ces informations, on pourrait être tenté de cibler l’activité des DC du receveur pour réduire l’incidence de la GvHD (75). Cependant, les DC sont très robustes, ce qui rend cette solution très difficile à atteindre. À preuve, plus de 24 heures après l’irradiation sub-létale des souris, environ 30% des DC de la rate sont toujours présentes. Malgré un traitement de conditionnement pré-greffe myélo-ablatif, les DC persistent et permettent l’activation rapide des lymphocytes T suite à la HSCT, ce qui mène à la GvHD (75).

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