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2. Le mécanisme du NMD

2.3. L’assemblage du complexe de surveillance

2.3.7. La déphosphorylation de hUPF1 et la dégradation de l’ARNm

La déphosphorylation de hUPF1 nécessite la présence des facteurs hSMG5, hSMG7 et hSMG6, qui recrutent la protéine phosphatase 2A (PP2A) sur hUPF1 phosphorylée (Chiu et al. 2003; Ohnishi et al. 2003). Tout comme l’étape de phosphorylation, la déphosphorylation de hUPF1 est cruciale dans le mécanisme du NMD. En effet, l’inhibition de l’interaction de hSMG5 avec hUPF1, soit par des mutants de hSMG5, soit par la molécule inhibitrice NMDI1, résulte dans l’accumulation de hUPF1 phosphorylée et entraîne une inhibition du NMD (Ohnishi et al. 2003; Durand et al. 2007).

hSMG5 et hSMG7 forment un hétérodimère stable qui coimmunoprécipite avec la PP2A et hUPF1 phosphorylée (Ohnishi et al. 2003). hSMG7 pourrait être le lien entre le complexe de surveillance et la machinerie de dégradation des ARNm. D’une part, lorsqu’elle est surexprimée, hSMG7 est capable de cibler hUPF1 aux P-bodies (Unterholzner and Izaurralde 2004). D’autre part, la fixation artificielle de hSMG7 sur un ARNm entraîne rapidement sa dégradation et ceci indifféremment de la présence d’un codon stop en amont du site de fixation. De manière intéressante, cette dégradation nécessite la présence des protéines DCP2 et XRN1 (Unterholzner and Izaurralde 2004). Des expériences de fixation artificielle en utilisant hSMG7 entière ou seulement ses domaines N- ou C-ter, ont permis de conclure que hSMG7 aurait deux domaines fonctionnels : un domaine N-ter pour l’interaction avec hSMG5 et hUPF1 phosphorylée et un domaine C-ter pour l’interaction avec les composants de la machinerie de dégradation (Unterholzner and Izaurralde 2004). De cette façon, hSMG7 peut coupler les changements dans le statut de phosphorylation de hUPF1 à la dégradation des transcrits contenant un PTC.

La dégradation des ARN soumis au NMD utilise les mêmes enzymes qui interviennent dans la dégradation des ARNm normaux (présentées dans le paragraphe 1.2), mais par des voies spécialisées afin d’assurer une élimination plus rapide des transcrits aberrants. Ainsi chez la levure, les ARNm soumis au NMD peuvent être dégradés par decapping suivi de la dégradation 5’→3’, et ce sans passer par l’étape de déadénylation qui est pré-requise pour un ARNm normal (Muhlrad and Parker 1994). Alternativement, ils peuvent être dégradés par déadénylation accélérée suivie de la dégradation 3’→5’ en impliquant l’exosome (Mitchell and Tollervey 2003). Chez les mammifères, plusieurs études montrent que la dégradation des ARNm soumis au NMD peut se faire aussi dans les deux sens : (i) les trois protéines UPF co-

immunoprécipitent avec DCP2, les exonucléases 5’→3’ RAT1 (aussi appelée XRN2) et XRN1, mais aussi avec les exonucléases 3’→5’ PM/Scl100, RRP4, RRP41 et PARN (Lykke-Andersen 2002; Lejeune et al. 2003) ; (ii) la déplétion par ARNi de DCP2, de PM/Scl100 et de PARN abolit le NMD (Lejeune et al. 2003) ; (iii) DCP2 et XRN1 sont nécessaires pour la dégradation induite par la fixation artificielle de hSMG7 (Unterholzner and Izaurralde 2004) (iv) les ARNm portant un PTC subissent une déadénylation accélérée suivie du decapping (Chen and Shyu 2003; Yamashita et al. 2005a) ; (v) enfin, ils peuvent aussi subir un decapping indépendant de la déadénylation puisqu’il est possible de détecter des ARNm non-sens sans coiffe mais toujours partiellement adénylés (Couttet and Grange 2004).

hSMG6 co-immunoprécipite aussi avec PP2A et hUPF1 phosphorylée mais semble agir de façon plus indépendante de l’hétérodimère hSMG5-SMG7 (Chiu et al. 2003; Ohnishi et al. 2003). Elle serait recrutée au complexe de surveillance par l’intermédiaire de son domaine N- terminal, grâce à la présence de deux motifs de liaison à l’EJC appelés EBM (EJC binding motifs) découverts récemment (Kashima et al. 2010). Des mutations sur ces motifs empêchent l’interaction de hSMG6 avec l'EJC et inhibent le NMD. De façon intéressante, ces motifs ont été aussi identifiés dans les protéines hUPF3 et hUPF3X (Buchwald et al. 2010). D’ailleurs, Kashima et collaborateurs ont établi que hUPF3X et hSMG6 sont en compétition pour le même endroit de fixation à l’EJC, mais l’affinité pour hUPF3X est plus élevée ce qui empêche l’accès de hSMG6 à l’ARNm (Kashima et al. 2010). Ils ont ainsi émis l’hypothèse que sur une fraction des ARNm portant un PTC, l’assemblage du complexe de surveillance et la phosphorylation de hUPF1 induiraient un remodelage de la mRNP qui entrainerait la dissociation de hUPF3X de l’EJC et permettrait à hSMG6 d’interagir avec l’EJC. Du fait de son activité endonucléase, hSMG6 couperait l’ARNm porteur de la mutation non-sens (Kashima et al. 2010).

Ainsi, il existerait deux voies possibles pour la dégradation des ARNm après la phosphorylation de hUPF1 (Figure 13) : dans la première, hUPF1 serait fixée par hSMG5- hSMG7 ce qui conduirait au recrutement des enzymes de déadénylation, de decapping et enfin aux exonucléases ; et dans la deuxième voie, hUPF1 serait fixée par hSMG6 ce qui induirait un clivage endonucléolytique à proximité du PTC et la dégradation subséquente des deux fragments par des exonucléases. Chez la drosophile, la dégradation dépend exclusivement du clivage par SMG6, vraisemblablement en raison de l’absence d’un homologue de SMG7 (Gatfield and Izaurralde 2004). Cependant, chez les mammifères la contribution individuelle de chacune de ces voies de dégradation reste inconnue et il n’est pas exclu qu’elles interviennent de façon concomitante.

Figure 13. Modèle des voies de dégradation des ARNm soumis au NMD.

Gauche : hUPF1 phosphorylée peut être fixée par l’hétérodimère hSMG5-hSMG7, ce qui conduit au recrutement des enzymes de déadénylation, de decapping et enfin les exonucléases pour dégrader l’ARNm. Droite : hUPF1 phosphorylée est fixée par hSMG6 qui réalise un clivage endonucléolytique à proximité du PTC, ensuite les deux fragments résultants sont dégradés par les voies exonucléolytiques.