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Vers une délimitation de l’état homéostatique à grande échelle

C. Le parallélisme des surfaces du volume arborescent

3. Vers une délimitation de l’état homéostatique à grande échelle

La détection des unités de canopée par une analyse des images aériennes permettrait de différencier sur une grande superficie l’état homéostatique des différentes pièces de la mosaïque forestière. Les UCH définissent les portions de la forêt en cours d’organisation homéostatique tandis que les UCB marquent les portions en cours de construction. Malheureusement, sans une superposition exacte entre les mesures télémétriques et la photographie aérienne (cf. §. IV.A.3), il est impossible d’ajuster avec précision la couleur du pixel à la hauteur de la canopée. Cependant, les fréquences des unités de canopée, calculées sur la parcelle 5B-10B, peuvent être considérées comme un échantillon représentatif de la distribution des hauteurs dans la forêt primaire de la Piste de Saint Elie (cf. §. III.A.1.b). Les 2761 points de mesures télémétriques se répartissent, sur les cartes isométriques, entre 4264,3 m² de superficie planaire appartenant aux UCB et 5375,7 m² aux UCH (cf. Tableau 7). Après un lissage7 de l’image en vue d’éliminer les pixels isolés, cette répartition est appliquée à l’histogramme de fréquence des couleurs de l’image. Le point limite entre les unités de canopée est déterminé par le niveau de gris 40 (parmi les 256 disponibles) qui sépare un ensemble clair représentant 53,76 % des pixels et un ensemble sombre comportant 46,24 % des pixels de l’image. L’image originale en 256 niveaux de gris est convertie en noir et blanc autour du seuil 40, c’est-à-dire que les pixels dont la couleur est comprise entre 0 et 40 deviennent noirs, les autres seront blancs (Figure 46).

7 Un filtre est utilisé en vue d’éliminer le bruit de l’image (pixels isolés). Le filtre affecte à chaque pixel une valeur moyenne qui tient compte de l’entourage immédiat. Un pixel noir isolé dans un ensemble blanc sera transformé en gris clair tandis qu’un pixel noir inclus dans un ensemble noir conservera sa couleur initiale et inversement. Ce filtre permet d’éliminer les petites variations qui interviennent à l’intérieur des couronnes.

0 20000 40000 60000 80000 100000 120000 140000 0 85 170 255 Niveau de gris N o m b re de pix el 40

53,76 % des pixels de l'image 46,24 %

Figure 46 : Conversion des 256 niveaux de gris en une image binaire noir et blanc.

La couleur noire couvre 46,24 % de l’ensemble des pixels et représente les UCB et la couleur blanche représente le complémentaire, soit 53,76 % des pixels qui délimitent les UCH.

Statistiquement, cette image binaire (0=noir et 1=blanc) représente une ségrégation des points de l’image appartenant aux UCB (pixels noirs ≤ 30,27 m) et ceux qui forment les groupes émergents des UCH (pixels blancs > 30,27 m) conformément à la distribution des hauteurs sur la parcelle 5B-10B. La fréquence des unités de canopée s’analyse alors par celle des pixels noirs et blancs et l’état homéostatique ou l’intégrité forestière se quantifie par la proportion des pixels blancs sur une superficie donnée de l’image. Ainsi, l’intégrité forestière de la parcelle "biodiversité" s’interprète, hectare par hectare, par un indice qui évolue entre 0 et 100 % selon que la portion de la forêt se trouve intégralement en phase de construction ou en phase d’organisation (Tableau 9)

Tableau 9 : Quantification de l’état homéostatique sur la photographie aérienne de la parcelle biodiversité

Avant d’appliquer cette méthode d’analyse, il convient de vérifier statistiquement la concordance entre les deux échantillons à partir d’une superposition précise et contemporaine des mesures télémétriques et des photographies aériennes. Dans les meilleures conditions, cette superposition conserverait une erreur due à l’éclairage latéral. En effet, à hauteur égale, les pixels à l'ouest d'une couronne sont plus sombres que ceux à l'est. Il existe donc nécessairement un décalage des reliefs. Le redressement des couleurs peut corriger l’écart de la superposition mais la comparaison statistique sur des grandes superficies ne devrait pas subir l’influence de ces quelques pixels exagérément ombrés. A partir de cette méthode il serait possible d’envisager une expertise de l’intégrité forestière à grande échelle en quantifiant la dispersion des phases de construction et d’organisation. Pour cela, un protocole simple peut d’ores et déjà être proposé. Pour analyser la structure sur plusieurs centaines d’hectares, il faut acquérir préalablement un échantillon statistique des hauteurs de la canopée à l’aide du télémètre sur une parcelle dont la superficie minimale devra être précisée. L’échantillon est ensuite utilisé pour étalonner la photographie aérienne et discriminer les unités de canopée. Finalement, l’analyse de l’état homéostatique d’une très grande surface de forêt se réduit à la connaissance de sa canopée et surtout de ses ondulations autour de la hauteur moyenne. L’indice d’ondulation qui d’un coté sépare la forêt primaire de la forêt secondaire devient un indice représentatif de l’intégrité forestière au sens large.

Code de l'hectare 5B 6B 7B 8B 9B 10B

Image convertie en Noir/Blanc

% UCH ou proportion des phases d'organisation

Cette analyse qualitative renforce l’analyse quantitative effectuée au chapitre précédent. L’état homéostatique se traduit dans la structure par une superposition des ensembles arborescents et une alternance horizontale entre les secteurs creusés d’une cavité et ceux plutôt horizontaux. L’organisation forestière fait donc intervenir sur ces deux axes, une alternance entre des volumes vides (cavité et espace inter-strate) et des volumes pleins (espace inter-cavité et les strates occupées). La création souvent brutale des cavités sous les groupes émergents induit une dynamique de leur comblement. Les arbres situés en périphérie ou ceux qui proviennent de la régénération vont occuper ce volume vide. Ils forment la surface arborescente inférieure puis progressent dans le volume arborescent pour rejoindre leur hauteur de référence. Une cavité sera comblée par plusieurs individus appartenant à plusieurs espèces différentes. Une fois encore, le nombre d’ensemble arborescent qui participeront à ce comblement détermina la structure finale de la cavité. Le jeu des espèces impliquées définit le potentiel de comblement mais chaque individu doit faire face à sa dynamique de progression dans le volume arborescent. Les couronnes à progression rapide rencontrent les couronnes à progression lente.

La partie suivante se propose de définir la relation qui lie les plantes et l’espace à la fois dans le plan horizontal en évaluant la forme et la symétrie des couronnes et dans le plan vertical en suivant la progression de quelques espèces. Comment les espèces passent elles de la surface topographique inférieure à celle de la canopée ? Que se passe-t-il lorsque deux couronnes se percutent durant leur progression ?

Les couronnes progressent dans le volume arborescent pour rejoindre leur hauteur de référence. Cette phase de migration définit la dynamique du volume arborescent et, si tous les arbres atteignent cette hauteur sans contraintes, ils établissent l’état homéostatique le plus complexe, c’est-à-dire la superposition des trois ensembles arborescents.