5.5 Estimation de la matrice de routage
5.5.2 Définition de la matrice de routage
, (5.26)
où les pointsge,
1etge,
2sont les centres de gravité des régions voisines reliées par l’arêtee, et le potentiel
est défini comme :
P(s) = max
r∈S
(pim(I
t)(r) )−pim(I
t)(s). (5.27)
Préalablement, la carte d’action minimale U
e1est calculée à l’aide de l’algorithme “Fast Marching”
(Cohen 2005). Cette carte d’action minimale admet un minimum uniqueg
e,1, et la convergence versg
e,1est assurée quel que soit le points∈ Sen suivant la direction opposée à∇U
e,1. Ainsi, pour déterminer
le chemin minimalC(ge,
1, ge,
2), il suffit d’effectuer une descente de gradient surU
e,1depuis le pointge,
2vers le pointg
e,1en résolvant l’équation différentielle :
∂C(ge,
1, ge,
2)(ℓ)
∂ℓ = −∇U
e,1(C(g
e,1, g
e,2)(ℓ)),
C(g
e,1, g
e,2)(0) = g
e,2.
(5.28)
Après convergence, il est possible d’extraire la courbeγ(g
e,1, g
e,2)qui coïncide avec le chemin minimal
entre les régions de centresg
e,1etg
e,2. Afin de ne prendre en compte que l’activité de trafic observée
entre les régions, nous définissons le coût de l’arêteecomme l’intégrale de l’intensité observée dans la
carte PIM le long du chemin minimal :
C(e) =
Z
γ(ge,1,ge,2)
(w
0+P(γ(g
e,1, g
e,2))(ℓ))dℓ, (5.29)
oùg
e,1etg
e,2sont les centres de gravité des deux régions reliées par l’arêtee. Finalement, un chemin
avec un faible coût correspond à une route fréquemment utilisée par les vésicules.
La différence entre distance euclidienne et distance géodésique est illustrée à l’aide de deux
exem-ples (figure5.13). Dans chaque cas, les distances sont calculées entre les deux régions voisines. Ici, la
région associée à l’appareil de Golgi n’a qu’une seule région voisine. Un coût constant est attribuée à la
frontière entre ces deux régions. Sur l’exemple (a), les deux chemins calculés sont très proches. En
re-vanche, sur l’exemple (b), le chemin minimal au sens géodésique est beaucoup plus long que la distance
euclidienne entre les deux régions.
À présent, nous reportons ces résultats dans la métrique du routage.
5.5.2 Définition de la matrice de routage
La définition de la matrice de routage dépend des chemins identifiés par l’utilisateur pour relier une
origine à une destination. Si on considère que toutes les vésicules traversent les mêmes régions pour
aller d’un endroit à un autre, la matrice de routage est binaire.
(a) (b)
FIGURE5.13: Comparaisons entre distance euclidienne et distance géodésique. La distance euclidienne est label-lisée en bleu tandis que la distance géodésique est en rouge. Les différentes régions apparaissent en niveaux de vert et la carte PIM est représentée en niveaux de gris.
paire OD n
◦arête
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
A→B 0 0 0 0 1 0 0 0 0 0
TABLE5.2: Ligne de la matrice de routage binaire correspondant à la paire ODA→Bcalculée sur le graphe de la figure5.14.
Routage unique
L’extraction du plus court chemin sur un graphe valué est un problème relativement bien connu en
théorie des graphes et généralement résolu par l’algorithme de Dijkstra (Dijkstra 1959). Au cours du
traitement, l’idée est de manipuler un sous-graphe, réduit au sommet origine à l’initialisation. À chaque
étape, toutes les arêtes reliant les sommets du sous-graphe aux sommets du graphe non présents dans
le sous-graphe sont considérées. Parmi celles-ci, l’arête qui présente la distance la plus petite entre le
sommet origine et le sommet non représenté dans le sous-graphe auquel elle est reliée est choisie. Ces
nouveaux sommet et arête sont alors inclus dans le sous-graphe. L’algorithme converge une fois que le
sommet destination est atteint. La ligne de la matrice de routage correspondant à la paire ODA → B
de la figure5.14nous informe que le chemin le plus court s’effectue via l’arête n
◦5, et nous le reportons
dans le tableau5.2.
L’extraction du plus court chemin est rapide et facile à mettre en oeuvre en pratique.
Malheureuse-ment, cette idée préconçue est trop simple pour caractériser un trafic vésiculaire. Les vésicules se
dépla-cent dans la cellule et ne respectent pas les compartiments empiriques définis. Il faut donc considérer un
routage multiple pour les paires OD.
D
C
1
2
3
4
5
6
7
8
9 10
A
B
FIGURE5.14: Graphe simple. Sur ce graphe, les sommets sont caractérisés par des lettres tandis que les arêtes sont labellisées par des chiffres.
Probabilisation de la matrice de routage et topologie du graphe
Il semble aisé d’imaginer que toutes les vésicules n’empruntent pas le même chemin pour
attein-dre une même destination. La matrice de routage doit donc prenattein-dre en compte ce fait en considérant
plusieurs chemins possibles pour une paire OD. Une solution est d’associer des probabilités aux
dif-férents chemins. Pour cela, la première étape consiste à extraire tous les chemins possibles joignant une
origine à une destination. Nous adoptons une approche en profondeur ; il s’agit de parcourir de manière
exhaustive le graphe depuis le sommet origineϑ
Overs le sommet destination ϑ
Dafin d’extraire tous
les chemins. Plus précisément, on commence par choisir un sommet voisin deϑ
Odans le graphe. Si ce
sommet n’est pasϑ
D, on choisit un nouveau sommet voisin. Cette étape est reproduite jusqu’à ce que le
sommetϑ
Dsoit atteint. Un premier chemin depuisϑ
Ojusqu’àϑ
Dest obtenu et mis en mémoire. Dans
une seconde étape, le sommet précédentϑD sur le chemin traité est à nouveau considéré. S’il existe un
nouveau sommet voisin différent deϑ
D, alors l’algorithme de recherche précédent est repris. Dans le
cas contraire, le sommet qui précède est examiné à son tour. Ces étapes sont effectuées jusqu’à ce que
tout le graphe soit parcouru. L’approche en profondeur est alors achevée, et tous les chemins possibles
pour relier l’origine ϑ
Oà la destination ϑ
Ddans le graphe sont identifiés. À chacun de ces chemins
est associé un coût égal à la somme des coûts des arêtes du chemin. Pour définir la matrice de routage
probabilisée, il suffit de poser :
P(Γ) ∝ exp
−C(Γ)
K
0, (5.30)
oùC(Γ)∈Rindique le coût du cheminΓetK
0∈Rest une constante. En pratique,K
0est différente
pour chaque paire OD et elle est choisie comme le chemin de coût minimal pour la paire OD considérée.
On privilégie ainsi les chemins les plus courts. Dans cette modélisation, plus le coût d’un chemin est
élevé, plus la probabilité est faible. Les probabilités associées aux chemins permettent de définir les
éléments de la matrice de routage probabilisée. Soit{Γ
ji,e, i∈ {1, . . . , N
ej}}l’ensemble desN
ejchemins
utilisant l’arête e pour la paire ODj, et soit P(Γ
ji,e) la probabilité associée au chemin Γ
ji,e. Chaque
paire OD n
◦arête
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
A→B P
ACDBP
total0
P
ADBP
total0
P
ABP
total0 0
P
ADB+P
ACDBP
totalP
ACDBP
total0
TABLE5.3: Rangée de la matrice de routage non binaire correspondant à la paire ODA→Bcalculée sur le graphe de la figure5.14.
élémenta
jede la matrice de routage non binaireAest alors défini conmme suit :
a
je=
P
Nej i=1P
Γ
ji,eP
r ˜ e=1P
Ne˜j i=1P
Γ
ji,˜e. (5.31)
Pour illustrer cette définition, on s’intéresse à la paire ODA→ B de la figure5.14. Trois chemins
sont possibles pour atteindre le sommetBdepuis le sommet origineA:
• A→Bauquel on associe la probabilitéP
AB,
• A→D→Bauquel on associe la probabilitéP
ADB,
• A→C→D→B auquel on associe la probabilitéP
ACDB.
La ligne de la matrice de routage correspondant à la paire ODA → Best reportée dans le tableau5.3,
oùP
total=P
AB+P
ADB+P
ACDB.
À présent, la matrice de routage prend en compte plusieurs chemins possibles, pondérés suivant une
distance euclidienne ou géodésique. Dans un cas, seule la topologie du graphe est prise en compte. Dans
l’autre cas, seul le chemin emprunté fréquemment par les vésicules est utilisé. Par ailleurs, les comptages
de vésicules au niveau des frontières sont également accessibles, voire pertinents pour caractériser les
chemins en question.
Probabilisation de la matrice de routage en fonction des échanges de vésicules aux frontières
Les échangesy
arêtemoyens de vésicules entre régions caractérisent le trafic au niveau des frontières.
L’intensité du trafic observé sur une arête est un bon indicateur de la contribution au trafic global, voire
de son implication dans le routage des paires OD. On fait aussi remarquer que le trafic observé sur un
chemin ne peut être supérieur au trafic observé sur chacune des arêtes de ce chemin. En particulier, si
les échanges sont nuls sur l’une des arêtes d’un chemin, alors il ne peut y avoir de trafic sur ce chemin.
Le trafic observé sur les différents chemins possibles pour joindre une origine à une destination est donc
intimement liés aux échanges de vésicules mesurés sur les arêtes. Nous illustrons ce constat sur la figure
5.15. Soit un trafic observé sur une cellule (contrainte par un micro-patron de forme circulaire) pour
laquelle les échangesy
arêtemoyennés au cours du temps sont calculés. Les 6 régions sont repésentées
par des couleurs différentes et sont identifiées par des lettres. Nous nous intéressons à la paireA → C
et cinq chemins sont possibles :
• A→B →C,
• A→B →D→C,
• A→B →E →C,
• A→B →F →D→C,
• A→B →F →E →C.
Seuls les échangesy
arêtesignificatifs sont retenus sur la figure5.15et labellisés par des flèches noires.
Comme l’essentiel du trafic est issu de l’appareil de Golgi en direction de la périphérie, les échanges
de vésicules sont importants de la régionBvers les régionsC, D, EetF. Ils sont plus faibles entre les
régions périphériques. La probabilité d’emprunter le cheminA→B→Cest donc la plus élevée. Ainsi
les échanges les plus faibles mesurés le long d’un chemin permettent de calculer une borne inférieure
pour le trafic potentiel sur ce chemin. Cette information est utile pour fixer les probabilités attribuées à
chaque chemin. Dans notre exemple, il n’y a pas d’échanges de vésicules entre les régionsFetE, donc
le trafic est nul sur le cheminA→ B → F → E → C. Le nombre minimal de vésicules empruntant
le cheminA → B → F → D → Cdépend des échanges entreDetC, et est égal à0,2vésicule par
image. De manière analogue, le nombre minimal de vésicules utilisant le cheminA → B → E → C
est de 0,1 vésicule par image, le cheminA → B → D → C, 0,2 vésicule par image et le chemin
A → B → C,0,8vésicule par image. Il suit que les probabilités pour qu’une vésicule emprunte l’un
des 5 chemins sont :
P
ABC= 0,8
0,8 + 0,2 + 0,1 + 0,2 =
0,8
1,3,
P
ABDC= 0,2
1,3,
P
ABEC= 0,1
1,3,
P
ABF DC= 0,2
1,3,
P
ABF EC= 0.
(5.32)
Une fois établies les probabilités associées à chaque chemin, la matrice de routage est caractérisée
de la même manière que dans la section précédente. Soit {Γ
ji}, i ∈ {1, . . . , N
j} l’ensemble desN
jchemins possibles pour une paire ODj. Pour un chemin donnéΓ
ji, soit{e
Γji,1
, . . . , e
Γji,Nij
}l’ensemble
des arêtes constituant le cheminΓ
jioù N
ijest le cardinal de cet ensemble. La probabilité associée au
cheminΓ
jiest égale à :
P(Γ
ji) =
inf
ky
arêtee
Γj i,kP
i′inf
ky
arêtee
Γj i′,k, (5.33)
oùy
arêtee
Γj i,kdésigne les échanges moyens temporels mesurés sur l’arêtee
Γ j ik
. Soit{Γ
ji,e, i∈ {1, . . . , N
ej}}
l’ensemble des chemins utilisant l’arêteepour la paire ODj, et soitP(Γ
ji,e)la probabilité associée au
cheminΓ
ji,e. Chaque élémenta
jede la matrice de routage non binaireAest alors défini conmme suit :
a
je=
P
Nej i=1P(Γ
ji,e)
P
r ˜ e=1P
Nej˜ i=1P(Γ
ji,e˜)
. (5.34)
Depuis le début de ce chapitre, nous avons décrit une manière de partitionner le domaine de l’image,
d’estimer le nombre de vésicules se déplaçant d’une région à une autre, et nous avons proposé plusieurs
solutions pour définir la matrice de routage. Tous les éléments nécessaires à l’estimation des paires OD
par tomographie de réseaux sont désormais identifiés.
FIGURE5.15: Échangesyarêteobservés au cours d’une séquence de vidéo-microscopie pour une cellule contrainte par unmicro-patronde forme circulaire. Les six régions sont représentées par une couleur différente et sont iden-tifiées par des lettres. Les échanges entre régions sont symbolisés par des flèches. L’intensité des échanges est mentionnée également.