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5.2 L’apprentissage autorégulé des adultes

5.3.3 Définition de l’apprentissage autorégulé

Selon Cosnefroy (2011), les recherches sur l’apprentissage autorégulé proviennent majoritairement des pays anglo-saxons dont les États-Unis, mais également d’Europe avec l’Allemagne et les Pays-Bas. En France, ce concept est pratiquement inconnu dans la littérature française. Les recherches menées portent plus largement sur des apprentissages formels en cadre scolaires et plus rarement sur des adultes en formation (Ibid.).

Dans une perspective éducationnelle, le concept d’apprentissage autorégulé est apparu depuis une trentaine d’année pour caractériser l’élève que les systèmes scolaires devaient former (Berger et Büchel, 2013). Il s’agit là d’accompagner l’élève vers une autorégulation de son apprentissage plutôt qu’à une dépendance de l’enseignant (Ibid.).

Selon les auteurs, « […] Corno et Mandinach furent les premières à proposer le concept d’apprentissage autorégulé (self-regulated learning) en 1983 » (p. 18). Ces dernières avaient constaté le manque d’intégration des théories métacognitives s’intéressant aux stratégies d’apprentissage et aux théories motivationnelles d’inspiration cognitive (Ibid.).

Dans cette même perspective de théorie globale souhaitant articuler les modèles théoriques centrés sur l’apprentissage et les construits motivationnels, Zimmerman (1986) définit l’autorégulation des apprentissages comme la part active de l’apprenant aux niveaux métacognitifs, motivationnels et comportementaux dans ses propres processus d’apprentissage (Berger et Büchel, 2013).

Selon la définition de Schunk et Zimmerman (1994) l’autorégulation correspond aux : « […] self-generated thoughts, feelings, and actions which are systematically oriented toward attainment of their goals » (p. 9).

Pour Cosnefroy (2011), cette définition marque le rôle décisif de l’effort des individus centrés sur l’atteinte de buts qu’ils se fixent pour activer leurs conduites. Pour apprendre de façon autonome, cela nécessite l’association d’habiletés cognitives et métacognitives et de la motivation (Ibid.).

Dans une autre perspective, Boekaerts (1997) fait le lien avec les dynamiques instaurées dans des environnements d’apprentissage propices à promouvoir l’autorégulation de l’élève en milieu scolaire :

Un objectif fondamental de l’éducation formelle devrait être l’enseignement de compétences d’autorégulation aux élèves. Ces compétences sont considérées comme essentielles, non seulement afin de guider son propre apprentissage durant la scolarité formelle mais aussi pour s’auto-éduquer et mettre à jour ses connaissances après avoir quitté l’école. (p. 161).

Boekaerts (2002) élargit cette définition pour mettre en évidence que l’autorégulation se réfère à deux aspects complémentaires du fonctionnement de l’apprenant (Nader-Grosbois, 2007). Le premier aspect met en évidence

que l’autorégulation peut être entendue comme une aptitude où l’apprenant met en relation la demande environnementale et un objectif personnel (Ibid.). Le deuxième aspect envisage l’autorégulation comme le résultat d’un processus d’apprentissage (Ibid.). Pour l’auteure, l’autorégulation est intégrée à la métacognition qui renvoie « à la capacité d’un sujet de connaître et de contrôler son propre fonctionnement cognitif » (p. 17).

Comme nous pouvons le constater eu égard aux définitions de ces auteurs, l’apprentissage autorégulé considère l’apprenant en associant les aspects cognitifs, motivationnels et en intégrant la métacognition.

Pour Zimmerman et Schunk (2011) :

Self-regulated learning and performance refers to the processes whereby learners personally activate and sustain cognitions, affects, and behaviors that are systematically oriented toward the attainment of personal goals. (p. 1)

Cette définition large inclut de multiples construits analysés dans des courants distincts (Berger et Büchel, 2013).

Selon les auteurs et en s’appuyant sur Pintrich (2000) :

Les théories de l’apprentissage autorégulé qui se sont développés récemment conçoivent celui-ci comme un processus actif et constructif par lequel les apprenants établissent des buts pour leur apprentissage et essayent de guider, réguler et contrôler leurs cognitions, motivations et comportements, orientés et contraints par leurs buts et les caractéristiques de l’environnement. (p. 22)

Cette définition met l’accent sur la régulation des processus mis en œuvre par l’apprenant pour atteindre les buts qu’il se fixe dans une situation d’apprentissage donnée. Dans cette perspective, on se situe dans le cadre des théories sociocognitives qui ont une perspective globale de l’apprenant en y intégrant les facteurs motivationnels, émotionnels et leur régulation au sein d’un environnement situé (Berger et Büchel, 2013).

Pour les auteurs, les travaux de Bandura (1977, 1986, 1997, 2003, 2004, 2005) constituent une autre origine conceptuelle majeure de l’apprentissage autorégulé (Berger et Büchel, 2013). Cette théorie apporte une compréhension des traitements cognitifs, conatifs et affectifs dans les apprentissages en lien avec les caractéristiques du sujet social apprenant. Les travaux de Bandura (2003) portent sur la régulation des comportements, des

émotions et sur le sentiment d’efficacité personnelle. En désignant les croyances qu’un individu a dans ses propres capacités d’action, la théorie sociocognitive de Bandura (2003), pose le sentiment d’efficacité personnelle comme base de la motivation, de la persévérance et d’une grande partie des accomplissements humains. Le fonctionnement humain est décrit par Bandura (2003) comme la résultante d’une interaction entre l’individu, le comportement et l’environnement dans une forme de réciprocité dite triadique. Les travaux de Zimmerman (1986, 2008) rare auteur à s’être intéressé à des situations d’apprentissage informel chez des adultes, prolongent dans le cadre de l’apprentissage les travaux de Bandura (1977, 1986, 1997, 2003) sur la régulation (Cosnefroy, 2011; Berger et Büchel, 2013).

Dans cette perspective, pour Cosnefroy (2011), poser la question de la régulation des apprentissages, c’est se demander : quelles sont les conditions psychologiques de l’autonomie favorables à l’apprentissage ? Les aspects métacognitifs, motivationnels et émotionnels sont à étudier dans le contexte où s’effectue l’apprentissage. Par ailleurs, l’auteur insiste largement sur la régulation de la continuité de l’action en regard des buts visés. Dans cette perspective, l’auteur met en évidence le rôle implicite et nécessaire de l’effort et des raisons de l’effort dans l’autorégulation des apprentissages.

En effet, selon l’auteur :

L’apprentissage autorégulé est de nature à la fois proactive et réactive. Il nécessite de fixer des buts correctement calibrés dont la définition dépend à la fois de variables cognitives, métacognitives et motivationnelles. Une fois la tâche démarrée, la continuité de l’action et la poursuite de l’atteinte du but sont menacées par l’irruption d’autres activités attractives et la confrontation aux difficultés. […] Ceci est possible grâce à un répertoire de stratégies cognitives et métacognitives ainsi qu’à des stratégies de contrôle de l’effort et de la motivation […]. (p. 25-26)

Dans ce cadre, l’auteur définit l’apprentissage autorégulé comme un :

[…] apprentissage contrôlé de l’intérieur par l’apprenant, qui lui permet de trouver des ressources pour se mettre au travail et y rester en adaptant ses cognitions, ses affects et sa conduite afin de résister aux distractions et de prévenir comment surmonter les difficultés. (Cosnefroy, 2013, p. 95)

Les conditions de l’autorégulation sont multifactorielles et il existe un certain nombre de présupposés pour prendre le contrôle de son apprentissage (Ibid.). Les principaux modèles de référence scientifiques élaborés sur l’apprentissage autorégulé portent tous un regard spécifique. Cosnefroy (2011) cite : Winne qui privilégie une approche cognitive et métacognitive, Pintrich qui insiste sur le rôle de la motivation initiale, Boekaerts qui met en avant le rôle du soi et des émotions, Corno qui centre ses travaux sur la volition, tandis que Zimmerman s’appuie sur la théorie sociocognitive de Bandura, où « agentivité, sentiment d’efficacité personnelle, fixation de buts et autorécompense en sont les variables clés » (Ibid., p. 34).

À partir de la comparaison de ces modèles, Cosnefroy (2011) identifie quatre conditions qui fixent les conditions de l’apprentissage autorégulé chez un apprenant : une motivation initiale suffisante, la fixation de buts, des stratégies de contrôle de la motivation et de l’effort, l’autoévaluation comme dimension métacognitive.