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Le pronostic se définit comme la prédiction de la progression d’une maladie après sa

déclaration (Fletcher & Fletcher 1996). De nombreux paramètres peuvent être étudiés comme

par exemple des mesures biologiques (taux de lymphocytes CD4 chez les sujets ayant une

sérologie VIH positive par ex.), des évènements cliniques (le décès, les complications, la

rémission, la récurrence, etc.) ou des mesures liées à la qualité de vie ou à l’état fonctionnel

(fonctions cognitives, incapacité, souffrance, etc.) (Ohno-Machado 2001; Shlipak &

Stehman-Breen 2005). La prédiction peut être étudiée dans les conditions habituelles de progression de

la maladie, ces conditions ne signifiant cependant pas absence de prise en charge

thérapeutique, puisque les patients étudiés sont le plus souvent pris en charge dans le circuit

de soins (Ohno-Machado 2001). Cette prédiction peut également se faire dans le cadre des

essais thérapeutiques randomisés avec l’évaluation d’un nouveau traitement. Ces études

reposent enfin le plus souvent sur des cohortes de cas (prospectives ou rétrospectives), c’est à

dire sur des populations de patients ayant une maladie particulière et suivies dans le temps.

Elles peuvent reposer également sur des études transversales, comme les séries de cas ou sur

des études cas-témoin lorsque l’évènement étudié est rare.

Comme nous l’avons indiqué en introduction, les facteurs de risque de démence ne

sont pas nécessairement les mêmes qui déterminent le pronostic une fois la maladie déclarée.

Par exemple, une pression artérielle basse diminue les chances d’avoir un infarctus du

myocarde, mais elle est de mauvais pronostic chez un sujet ayant un infarctus du myocarde à

la phase aiguë (Fletcher & Fletcher 1996; Hemingway 2006).

Il peut donc être important de connaître ces facteurs pronostiques afin de prédire

l’issue d’une maladie pour un patient donné, de mieux informer les cliniciens et les patients

sur la progression d’une maladie, de permettre aux chercheurs de mieux comprendre les

mécanismes de progression d’une maladie, de permettre de définir des strates de malades en

vue de planifier des essais thérapeutiques, d’aider à déterminer le traitement et la posologie à

appliquer à un malade donné pour permettre une action curative (Armitage & Gehan 1974;

Hermanek 1999; Ohno-Machado 2001).

Les études pronostiques, réalisées sur des sujets malades pris en charge en structure de

soins, peuvent être réalisées à partir de données recueillies de différentes façons :

– Le recueil prospectif sur des nouveaux malades (cohortes de cas) entrant à

l’hôpital à partir d’une date fixée pour le début de l’étude constitue la méthodologie la

plus fiable et minimise le nombre de données manquantes (Hermanek 1999).

– L’utilisation des données d’une cohorte prospective de population générale est

également possible quand le nombre de nouveaux malades est important et que leur

suivi se prolonge pendant une durée suffisante pour permettre l’étude des facteurs

pronostiques (Shlipak & Stehman-Breen 2005).

Ainsi, par exemple, la cohorte de Framingham aux Etats-Unis a étudié l’impact de

facteurs cardiovasculaires chez des sujets ayant un diabète ou une maladie métabolique

(Ingelsson et coll. 2007).

– Les registres de morbidité, définis par un recueil permanent et exhaustif de tous

les cas d’une maladie donnée à partir d’une date donnée sur une zone géographique

définie, permettent l’étude des facteurs pronostiques quand le suivi des sujets malades

est organisé et que le recueil des facteurs pronostiques est réalisé.

L’avantage majeur des registres tient à la généralisation possible des résultats car le

recueil est exhaustif (Shlipak & Stehman-Breen 2005). Un certain nombre de recueils de

données de patients malades est appelé improprement ‘registre’ par leurs investigateurs, alors

qu’ils correspondent plutôt à des séries ou des cohortes de cas. En effet, l’appellation registre

ne devrait pas être utilisée car la plupart de ces recueils ne sont pas exhaustifs (Bosacki et

coll. 2005; Cazalets et coll. 2003). Le nombre limité de registres s’explique en partie par la

lourdeur logistique de leur mise en place, la nécessité d’avoir des critères diagnostiques

consensuels et de pouvoir repérer facilement et exhaustivement les sujets malades.

– L’utilisation des données issues d’un essai clinique à des fins de recherche

épidémiologique est possible.

Certains essais cliniques mis en place pour évaluer l’effet d’un traitement peuvent être

utilisés pour étudier d’autres facteurs associés à la progression de cette maladie. Par exemple,

les données recueillies dans des essais cliniques dans le domaine des maladies rénales ont été

utilisés par la suite pour répondre à des questions de recherche observationnelle sur la

progression des maladies (Shlipak & Stehman-Breen 2005). Les avantages de l’utilisation de

données d’essais cliniques sont qu’elles ont été collectées de manière rigoureuse et que les

évènements ou « outcomes » sont généralement bien renseignés. La limitation principale de

l’utilisation de ces données est sa difficile généralisation à l’ensemble des malades, car la

(Shlipak & Stehman-Breen 2005). Par exemple, les personnes âgées, les enfants ou les

femmes enceintes vont être dans la majorité des cas exclues des essais cliniques.

Ces différentes méthodologies (cohorte de cas, registres, essais cliniques…) sont

cependant coûteuses et mobilisatrices de temps mais ont l’avantage d’avoir été créées à des

fins de recherche (Shlipak & Stehman-Breen 2005).

– Le recueil rétrospectif à partir de dossiers cliniques archivés constitue une autre

possibilité qui nécessite un retour au dossier « papier » du malade.

L’avantage de ce type de recueil est la rapidité d’obtention des données par rapport au

recueil prospectif, cependant, les données manquantes seront plus importantes. Les données

manquantes peuvent être dues à un non report sur le dossier de résultats d’examens par oubli

ou parce qu’ils étaient négatifs. Un biais de classement pourra alors se produire. Il peut être

alors nécessaire de demander des renseignements complémentaires aux médecins traitants

pour certaines variables pronostiques. Si les données manquantes sont trop nombreuses, on

peut être amené à abandonner l’étude de la variable ; dans le cas où elles sont moins

nombreuses, pour éviter de « perdre » ces observations lors de l’analyse statistique, on peut

leur affecter un code spécial, créant une nouvelle modalité pour la variable étudiée. Un

problème d’objectivité lors du codage du questionnaire ne peut par ailleurs être exclu. En

effet, l’enquêteur qui remplit les questionnaires peut se laisser influencer et interpréter des

renseignements incomplets lorsqu’il connaît l’évolution d’un malade, provoquant l’apparition

d’un biais de classement. Par exemple, s’il hésite sur l’existence d’une métastase, il peut avoir

tendance à noter ce signe présent si le sujet est décédé quelques semaines plus tard et absent si

le sujet est encore en vie.

– Enfin, l’utilisation des informations médicales ou médico-administratives

informatisées représente une possibilité séduisante pour réaliser des études

pronostiques à condition de disposer de données de suivi et de disposer de la variable

pronostique que l’on veut étudier.

2. Les facteurs pronostiques du MCI et des démences