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1.2 Biologie des papillomavirus

1.2.1 Cycle réplicatif des papillomavirus

Le cycle viral est étroitement lié à la différentiation cellulaire des kératinocytes et dépend de l’efficacité des virus à maintenir leur génome dans les cellules infectées. Le cycle viral présenté à la figure 1.4 peut être divisé en plusieurs phases : l’attachement, l’entrée et le transport viral, la réplication de l’ADN et l’assemblage et relâche des virions.

1.2.1.1 Attachement, entrée et transport intracellulaire

La plupart des études sur l’étape d’initiation de l’amplification du génome viral sont basées sur le VPB1 (243-245). Lors du processus normal de différentiation cellulaire (en absence d’infection), les cellules basales ayant un potentiel prolifératif illimité sont les seules à se diviser. Une des cellules-filles continuera à se diviser tandis que l’autre migrera vers les couches suprabasales de l’épithélium et se commettra à la différentiation. Cette cellule perd son potentiel de division et acquiert de nombreux changements, autant morphologiques que biochimiques (246). À un stade terminal de leur changement, les kératinocytes entreprennent le processus d’apoptose et sont ultimement desquamées.

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Figure 1.4 Cycle réplicatif productif des papillomavirus. Le VPH infecte les

cellules de la couche basale via une microlésion de l’épithélium. L’infection y est alors établie et maintenue par la réplication stable de l’épisome viral. L’expression des gènes précoces E6 et E7 favorise l’état prolifératif des cellules infectées qui lors de la migration dans les couches suprabasales (épineuse et granuleuse) perturbe le processus de différentiation cellulaire. Le génome viral est alors amplifié en un grand nombre de copies. L’expression des gènes tardifs est également induite, ce qui permet la production des protéines de la capside et l’assemblage subséquent de virions. Les particules virales sont par la suite relâchées par la desquamation normale de l’épithélium (cornée). Selon Lehoux, D’Abramo et Archambault (2009) (157).

L’infection initiale des cellules basales surviendrait suite à l’entrée des particules virales via probablement des microlésions de l’épithélium. Le mécanisme exact de l’attachement et de l’entrée du virus est controversé, mais se ferait par l’intervention des récepteurs de sulfate d’héparine protéoglycanes et possiblement par des interactions avec les composantes de la matrice extracellulaire telle que la laminine 5 (247-249). La capside

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virale change de configuration et est transférée vers un récepteur différent qui serait l’alpha-6-intégrine (250, 251). Le virus est alors internalisé par endocytose de vésicules de clathrine (252-254) ou de cavéole (255, 256). Le démantèlement de la capside virale se produit à la surface de la cellule ou dans l’endosome précoce 6 heures après l’entrée du virus. La protéine L2 est alors clivée par la furine, une proprotéine convertase (251, 257). Le clivage de L2 est essentiel pour l’infectivité des PVs et induit l’échappement du complexe L2-génome du compartiment endosomal. Le génome viral est alors relocalisé dans le noyau cellulaire au niveau d’une structure appelée domaine nucléaire 10 (ND10) ou corps nucléaires de protéine de la leucémie promyélocytaire (PML) pour l’initiation de la transcription virale (258).

1.2.1.2 Phase de réplication de maintenance

Le VPH infecte initialement les cellules de la couche basale avec un potentiel de prolifération et donc de progression dans le cycle cellulaire (259). Le génome viral est par la suite rapidement amplifié afin de permettre l’établissement de l’ADN viral en plusieurs copies, entre 10-200 épisomes lors de la division cellulaire (260). Cette amplification initiale nécessiterait l’intervention des protéines virales E1 et E2. Le génome viral est ensuite maintenu en un nombre de copies constant (261, 262). Lors de la mitose, l’épisome viral est réparti également dans les deux cellules-filles par l’intermédiaire de la protéine virale E2 et la protéine cellulaire Brd4 (225, 263). L’épisome du VPB1 est attaché aux chromosomes mitotiques (264) tandis que le génome des VPHs de type 11, 16 et 18 est attaché aux les fuseaux mitotiques (265).

Le génome viral serait répliqué de manière similaire à l’ADN de la cellule-hôte soit approximativement une fois pendant la phase S de cycle cellulaire (266, 267). Toutefois, plusieurs groupes ont suggéré que l’ADN viral est répliqué plutôt de manière aléatoire i.e. que seulement quelques génomes viraux sont répliqués une ou plusieurs fois durant la phase (264, 268). Ces deux modes ne sont pas contradictoires puisqu’il a été montré que le génome du VPH16 est répliqué de ces deux manières selon le type de cellule utilisé (266).

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1.2.1.3 Phase de réplication amplificatrice ou réplication végétative

La réplication végétative a lieu dans les couches suprabasales de l’épithélium où les cellules sont en processus de différentiation terminale (269). Les cellules non-infectées sortent normalement du cycle cellulaire lorsqu’elles quittent la couche basale et ne permettent plus la réplication de l’ADN. Puisque l’amplification du génome viral nécessite des conditions cellulaires permettant la prolifération cellulaire et donc la réplication de l’ADN, le virus doit nécessairement empêcher l’induction des signaux d’arrêt du cycle cellulaire et d’apoptose, entre autres. Ceci est orchestré par les oncoprotéines E6 et E7 dont les fonctions (voir section 1.2.4 de cette thèse) stimulent la progression du cycle cellulaire et favorisent donc par extension la réplication de l’ADN. Ainsi, les cellules infectées demeurent actives et progressent vers la phase S lors de la migration vers les couches suprabasales de l’épithélium (270, 271). À ce moment, le promoteur viral tardif est activé, ce qui induit une expression accrue des gènes nécessaires à l’amplification génomique tels que E1, E2, E4 et E5 (272-274). L’expression de la protéine E4 dans les couches supérieures de l’épithélium corrèle avec l’amplification végétative du génome viral (275, 276). Le génome viral est amplifié en des centaines ou milliers de copies par cellule par le mode de réplication du type cercle roulant (277).

1.2.1.4 Assemblage et relâche des virions

Finalement, lors de la synthèse des virions, les protéines de la capside L1 et L2 sont produites. L’utilisation de technologies permettant la production de particules virales synthétiques telles que les particules de type virus ou VLP, les pseudovirions et les quasivirions (voir la revue de (278)) a amélioré la compréhension de cette étape du cycle viral. La protéine L1 est capable de s’auto-assembler en capsomère en absence de L2 (279). Par contre, L2 est nécessaire à l’empaquetage du génome viral ainsi qu’à l’infectivité des virions (280-282). La protéine L2 est la première à être exprimée et à être relocalisée dans les noyaux des kératinocytes différenciés. Alors que L2 se localise directement dans les PML, L1 se trouve dispersé dans le noyau. L1 s’assemble préalablement en capsomères ou pentamères dans le cytoplasme selon le modèle du bras invasif. Brièvement, ce modèle consiste en la formation de ponts disulfures entre pentamères. L’extrémité en C-terminal ou

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bras d’un pentamère s’étend jusqu’à la protéine adjacente. Ainsi, chaque pentamère reçoit 5 bras et en donne 5 aux pentamères voisins (282-284).

Les capsomères de L1 sont par la suite relocalisés dans les PML où L2 y est intégré (285). Une copie du génome viral est condensée par des histones cellulaires et incorporée dans la capside virale. Finalement, les cellules de la couche cornée s’allongent et s’aplatissent et leur noyau se dissout. La protéine E1^E4 interagirait avec les kératines de cette couche pour faciliter la relâche des virions (286, 287). Les nouvelles particules virales vraisemblablement non-cytolytiques sont relâchées par la desquamation des cellules (288). Finalement, il est important de mentionner que dans une majorité des CC, l’ADN des VPHs-HR est intégré dans le génome de l’hôte, ce qui a pour conséquence l’avortement du cycle viral productif où la synthèse des virions n’est pas complétée (67, 70, 289).