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1.5 Épuisement clonal des lymphocytes T CD8 +

1.5.3 Fonctions inhibitrices des récepteurs inhibiteurs impliqués dans l’épuisement clonal

1.5.3.2 CTLA-4

CTLA-4 et CD28 sont les membres les mieux caractérisés de la famille des co-récepteurs, la superfamille des immunoglobulines (Ig SF). Ces deux molécules, l’une immuno- régulatrice et l’autre immuno-stimulatrice, forment des homodimères et se lient aux mêmes ligands CD80 (ou B7-1) et CD86 (ou B7-2) exprimé par les CPA, toutefois avec différentes affinités [345-347]. Exprimé à la surface des lymphocytes T CD8+ activés, CTLA-4 entre en compétition avec CD28 en se liant avec une plus grande avidité aux CD80/CD86, accroît le seuil d’activation cellulaire et interfère avec la réponse immunitaire en cours. Il permet ainsi de limiter le développement de maladies auto- immunes. En effet, les souris Ctla-4−/− démontrent une lymphoprolifération accrue et meurent après 3 semaines suite à une infiltration massive des tissus par les cellules T et la destruction des organes [348, 349]. Deux mécanismes inhibiteurs distincts sont mis à contribution. Se liant au CD80 avec une affinité 10-20 fois supérieure à celle notée pour CD28, CTLA-4 exclut physiquement ce dernier de la synapse immunologique même lorsqu’il est exprimé à de plus faibles niveaux [312]. Contrairement à PD-1, CTLA-4 préserve l’activité de PI3K et de BcL-xL mais inhibe directement l’activation de AkT via la phosphatase PP2A (« serine/threonine protein phosphatase 2A»). De surcroit, CTLA-4 s’associe, via son motif YVKM présent au niveau du domaine cytoplasmique, SHP-2 et la PP2A, et entraîne la déphosphorylation du complexe TCR-CD3ζ, de LAT (« linker for

activation of T cells») et de ZAP70. Ceci a pour conséquence directe une inhibition de la

progression du cycle cellulaire et de la production de cytokines. CTLA-4 antagonise également la signalisation distale en aval du TCR en inhibant la phosphorylation d’ERK et JNK [350].

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1.5.3.3 BTLA

Le récepteur BTLA se distingue de CTLA-4 et PD-1 par son expression de façon constitutive par les cellules T naïves et de façon précoce par les cellules activées [351, 352]. Les souris déficientes en BTLA développent graduellement des anticorps dirigés contre les constituants du soi et démontrent une infiltration cellulaire accrue dans plusieurs organes [353]. Le rôle joué par BTLA dans l'induction de la tolérance périphérique se manifeste à travers un biais en faveur de l'expansion des cellules Treg au détriment des cellules effectrices [354]. Paradoxalement, lorsqu'exprimé par les CPA, l'interaction de BTLA avec son ligand, le HVEM (« Herpesvirus entry mediator ») présent à la surface des cellules T, délivre des signaux positifs d'une part permettant de promouvoir la survie des cellules T effectrices et mémoires, et, d'autre part nécessaires pour le développement de réponse protectrice chez la souris [355]. Ceci dit, selon qu'il sert de récepteur ou de ligand, BTLA bascule entre régulation négative ou positive dépendante du contexte. Chez les patients atteints de mélanome, les cellules T CD8+ NY- ESO-1 spécifiques, exprimant simultanément BTLA, PD-1, TIM-3, constituent la sous- population la plus engagée dans le processus d’épuisement clonal. Le blocage combiné de ces récepteurs permet l’inversion du dysfonctionnement et le rétablissement des fonctions effectrices et de la capacité proliférative des cellules T CD8+, suggérant un rôle joué par BTLA dans la régulation de l’épuisement clonal dans le microenvironnement tumoral [356]. Paradoxalement, Speiser et al. ont démontré, via une analyse du transcriptome réalisée sur des cellules CD8+ MART-1-specifiques de patients atteints de mélanome, que BTLA n’est pas inclus dans la signature génique caractérisant les cellules épuisées détectées chez les patients atteints de mélonome [299]. Ceci laisse suggérer que

59 BTLA, en plus d’être un marqueur d’épuisement clonal, pourrait indiquer un défaut de différenciation des cellules T activées.

1.5.3.4 2B4

Le récepteur 2B4 peut induire à la fois des voies de signalisation stimulatrices ou inhibitrices. En effet, la phosphorylation de son domaine ITSM permet son interaction avec la protéine adaptatrice SAP (« Slam-associated protein »). Pourvu d'un domaine SH2, cette dernière va promouvoir indirectement l'activation des cellules T en bloquant l'activité de SHP-1 et SHP-2. Chlewicki et al. ont démontré que la fonction inhibitrice de 2B4 était la conséquence directe de son niveau d'expression et de la disponibilité des molécules adaptatrices EAT-2A et EAT-2B (« Ewing's sarcoma-associated transcript 2

»), deux autres protéines de la famille SAP [355]. Leur liaison aux domaines ITSM de

2B4 est à l'origine du recrutement de SHP1 et SHIP1 au niveau de la synapse immunologique et inhibe par ailleurs la fonction des lymphocytes T [357, 358].

1.5.3.5 TIM-3

Tim-3 a été initialement identifié comme un marqueur des cellules T CD4+ auxiliaires et T CD8+ cytotoxiques [359]. Jusqu’ici, on n’en connait que très peu sur les molécules intracellulaires qui interagissent avec, ou modulent, la fonction de TIM-3. Des études récentes ont rapporté que l’interaction avec la galectine-9 induisait une phosphorylation du domaine cytoplasmique de TIM-3, l’accumulation de la forme inactive de LcK et un défaut de production d’IL-2 et d’IFN-γ. Il semblerait que Bat3 (« B–associated transcript

60 dépendante [360]. Une faible expression de Bat3 a été par ailleurs dans les cellules T CD4+ Tim-3+ épuisées provenant de patients infectés par le VIH positifs [361].

1.5.3.6 LAG-3

LAG-3 se lie aux molécules du CMH de classe II, tout comme CD4, toutefois avec une plus grande affinité [362]. Il est exprimé par les lymphocytes T CD4+ et CD8+ activés, les cellules Treg et quelques sous-populations de cellules B, NK et dendritiques plasmacytoïdes. Suite à une stimulation via le TCR, LAG-3 est rapidement transloqué à la surface cellulaire, où son expression se trouve être régulée par l’action combinée de deux métalloprotéases qui vont assurer son clivage et permettre l’activation des cellules T [363]. Tout comme les souris TIM-3-/-, les souris déficientes en LAG-3 ne manifestent pas de susceptibilité accrue à l’autoimmunité spontanée, ce qui suggère un rôle plus subtil dans la régulation de la réponse immunitaire comparativement à CTLA-4 et PD-1. LAG- 3 affecte la progression du cycle cellulaire et ne semble pas influencer la survie cellulaire ou du moins très peu [364]. Il semblerait que, subséquemment à une signalisation via le TCR, un résidu lysine (K468) présent dans un motif conservé du domaine intracellulaire de LAG-3 soit directement impliqué dans ses fonctions inhibitrices [365].

1.5.3.7 TIGIT

Le récepteur TIGIT est le plus récent membre de l’IgSF [366, 367]. Aussi bien chez la souris que chez l'homme, il est exprimé par les lymphocytes T activés et mémoires, les cellules Treg, les cellules NK et les cellules NKT [366]. Il interagit avec deux ligands, soit le PVR (« Poliovirus receptor ») et le PVRL2 (« Poliovirus receptor-related 2 »)

61 [368]. TIGIT ne semble pas être directement lié à la sensibilité des souris à l'autoimunité. Toutefois, son absence est à l'origine de l'exacerbation de ce phénotype [369]. Plusieurs études récentes attribuent un rôle de régulateur négatif à TIGIT. Les mécanismes

impliqués dans la modulation de la réponse T peuvent être directs ou indirects. La signalisation en aval de TIGIT abroge la prolifération des cellules T, la production de

cytokines effectrices et accroît la production d'IL-10 [370]. En effet, chez l'homme, la

liaison de TIGIT à PVR induit la phosphorylation du domaine intracellulaire ITT (« Immunoglobulin tail tyrosine ») ce qui est à l'origine du recrutement de la phosphatase

SHIP1 et l'inhibition des voies PI3K, MAPK et NF-κB [320, 371]. Les mécanismes indirects, quant à eux, sont dépendants de CD226, molécule co-stimulatrice cruciale pour