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Cette recherche s'inscrit dans la tradition de la sociologie des œuvres et voit dans le contenu des films un matériau à part entière pour observer les processus de politisation des documentaires. Les analyses filmiques ont constitué un véritable pari épistémologique sur lequel il convient de revenir en introduction. Au lieu de proposer un historique et une mise en perspective des différentes traditions issues de cette sociologie des œuvres1, nous préférons revenir sur les problèmes rencontrés et

expliquer comment plusieurs travaux ont inspiré notre démarche. En synthétisant, les difficultés auxquelles l'enquête a dû faire face sont de deux ordres. Elles dépassent largement les seuls documentaires et concernent plus généralement tout travail désireux d'étudier en tant que telles des productions culturelles ou des œuvres2. La

première concerne l'articulation entre analyse externe et interne des documentaires, la seconde difficulté renvoie au fait que les images ne parlent pas d'elles-mêmes et la dernière repose sur la dimension nécessairement collective de la fabrique filmique. Avant d'évoquer à proprement parler les grands axes méthodologiques, la place accordée aux réalisateurs dans cette enquête mérite d'être explicitée.

- Centralité des documentaristes dans la fabrique filmique

Entre 2010 et 2014, nous avons mené 36 entretiens semi-directifs (Annexe 6) 1 Pour ce faire nous renvoyons notamment à l'ouvrage de PÉQUIGNOT B., La question des œuvres en

sociologie des arts et de la culture, Paris, France, L’Harmattan, 2007.

2 Ces questions sont par exemple présentes dans l'article de synthèse sur la possibilité d'une sociologie des œuvres. LÉVY C. et A. QUEMIN, « La sociologie des Œuvres sous conditions », L’Année sociologique, 1 décembre 2007, vol. 57, no 1, p. 207-236.

avec des réalisateurs et privilégié leurs perspectives. Cette option n'empêche aucunement, bien au contraire, d'observer la fabrique filmique et par là même la politisation et la dépolitisation des films en s'attachant à leur dimension collective. En effet, sont pris en compte aussi bien différents intermédiaires (monteurs, chef opérateurs, producteurs, financeurs, et directeurs d'unité documentaire en télévision), les intervenants filmés, que les publics investissant en significations les films. Dans une certaine mesure, des acteurs étatiques sont également présents en trame de fond, notamment à travers le CNC et ACSÉ qui financent les films.

Sans reconduire une vision auteuriste, selon laquelle un documentaire est le produit d'un « regard » singulier du réalisateur, de son « point de vue », choisir de privilégier cet acteur a semblé pertinent pour analyser les ressorts de la tension initialement évoquée. D'une part, il demeure présent dans chaque documentaire sélectionné. L'absence de producteur, de chef opérateur ou de monteur a été constatée (Annexe 7), mais les films se font toujours avec un ou plusieurs réalisateurs. Cela vaut pour les « petites » productions autofinancées comme dans les plus « grandes » dont le budget s'élève, pour un 52 ou 90 minutes, à plusieurs centaines de milliers d'euros. D'autre part, le réalisateur tient une place prépondérante dans la fabrique d'un film notamment en raison de la vision auteuriste qui circule dans l'espace documentaire. En France, sa centralité quant aux prises de décision est aussi assurée par un dispositif légal lui donnant en principe le final cut1. Comme le note S. Barreau-Broust dans son

étude sur la production documentaire à ARTE, le final Cut appartient bien aux réalisateurs, mais selon elle, dans les faits, la situation favoriserait, au moins à ARTE, les diffuseurs2. Cette enquête observe certes des productions télévisuelles, mais elle

regroupe aussi d'autres situations de production et modalités de diffusion. À ce titre, nous verrons que les marges de manœuvre dans le traitement de l'urbain stigmatisé fluctuent largement en fonction des réalisateurs et des collaborations nécessaires à la

1 C'est-à-dire qu'en cas de désaccord au montage, en dernière solution c'est l'avis du réalisateur qui l'emporte.

2 « En France, a contrario des États-Unis, l'auteur d'une œuvre de cinéma ou d'une œuvre audiovisuelle possède encore ce que l'on appelle le final cut, autrement dit il lui appartient en dernière instance de décider de la forme des images qu'il signe. Cela devrait placer les auteurs en position de force, puisque ce sont les derniers décisionnaires au moment des choix cruciaux réalisés au cours du montage. Cependant, la situation économique du marché du documentaire, favorable au petit écran, avantage la position éditoriale des diffuseurs. La question du '' formatage '' par ARTE devient alors récurrente, de même que celles de droits d'auteur dans le cadre d'une coproduction ». BARREAU-BROUSTE S., Arte et le documentaire.

sortie du film1. Enfin, si les réalisateurs sont plus particulièrement pris en compte dans

cette enquête, c'est qu'ils participent à la plupart, sinon à toutes les étapes de la fabrique d'un film. En raison de la place qu'ils occupent, par eux et sans nier la dimension collective, il est donc apparu pertinent de cibler cet acteur pour comprendre comment les films trouvaient ou non à être politisés.

- Articuler les analyses filmiques et l'usage de données « extérieures » au documentaire Les documentaires constituent un véritable un matériau d'enquête. Toutefois, ils sont envisagés davantage comme un objet de recherche que comme un outil. Nous reprenons ici une distinction évoquée par J.-P. Terrenoire dans un article programmatique sur la possibilité d'une sociologie des images. Ce dernier affirme qu'en « (…) s'appropriant les images, soit comme objets, soit comme outils, les sciences sociales se saisissent d'un produit socialement brûlant2 ». Selon lui, « l'usage de l'image

comme instrument de la recherche et l'approche scientifique de l'image comme objet social vont de pair3 ». S'il appelle à étudier les deux de front, il est malgré tout amené à

différencier chacun des domaines. Ainsi et au regard de l'énigme telle qu'elle a été construite, notre étude reconduit la séparation « images outil » et « images objet » pour privilégier cette dernière voie. L'enjeu est donc de comprendre comment des acteurs utilisent et saisissent un documentaire, le politisent et le dépolitisent. Il ne s'agit aucunement d'étudier les réalités (même fantasmées) de l'urbain et du « populaire » à travers les documentaires. Ainsi le contenu des films est avant tout compris comme la production des représentations de ceux qui les font. C'est une évidence qu'A. Mariette rappelle à juste titre : « (…) en documentaire comme en fiction, la mise en images et en sons renseigne moins sur les mobilisations elles-mêmes que sur les représentations qu’en ont les réalisateurs et leur équipe4 ». Nous verrons que les films sont également

construits à partir des représentations des intervenants filmés et de ceux qui, en les voyant, en les diffusant les chargent en significations5. Une telle approche dépasse 1 Voir chapitre 3.

2 TERRENOIRE J.-P., « Images et sciences sociales : l’objet et l’outil », Revue française de sociologie, 1985, vol. 26, no 3, p. 524.

3 BOURDIEU P., « Mais qui a créé les créateurs ? », Questions de sociologie, Nouv. éd., Paris, Éd. de Minuit, coll. « Reprise », 2002, p. 207-221., art. cit., p. 512.

4 MARIETTE A., « Pour une analyse des films de leur production à leur réception », art. cit., p. 93.

5 Dernier point évoqué dans la thèse d'A. Mariette. MARIETTE A., Le « cinéma social » aux frontières de

l'analyse des films de fiction ou documentaires. Elle se retrouve chez J.-C. Passeron et C. Grignon sur les rapports qu'entretiennent les savants aux « classes populaires », rapports qui façonneraient le contenu même des œuvres. Selon eux : « L’idée que Zola se fait du peuple est avant tout une idée littéraire ; s’il est vrai qu’il a côtoyé le menu peuple pendant ses années de bohème pauvre, il est étranger par son origine, par ses études, par ses aspirations, aux milieux populaires qu’il se propose de décrire, et qu’il n’a ni le temps ni le goût de connaître de l’intérieur1 ». C'est ainsi que nous éviterons de

parler des films documentaires comme étant le « reflet d'une époque2 ».

Quels liens peuvent être opérés entre le contenu du film et des données ou des discours « extérieurs » au contenu du documentaire ? La question, largement travaillée par la sociologie des œuvres, renvoie à la division entre analyse interne et externe d'une production culturelle ou d'une œuvre d'art. Elle s'est naturellement posée à l'occasion de l'étude des mécanismes de politisation et dépolitisation des documentaires sélectionnés. Tout le pari est d'articuler ensemble ces deux types d'analyses. Les propos de J.-C. Passeron sur l'étude des œuvres d'art invitent à opérer cette mise en relation : « La sociologie de l’art, convient-on, n’existe que si elle sait s’obliger à mettre en relations les structures de l’œuvre et les fonctions internes de ses éléments avec les structures du monde social où sa création, sa circulation et sa réception signifient quelque chose ou exercent quelque fonction. C’est donc dire à la fois, contre le sociologisme externaliste, que l’analyse des effets ou des contextes sociaux de l’art appelle l’analyse structurale interne des œuvres et plus précisément des œuvres singulières puisqu’elle ne peut sans risque d’autoannulation être conduite comme analyse passe-partout d’une pratique symbolique anonymisée ; et, contre le formalisme internaliste forcené que l’analyse interne de la '' littérarité '' ou de l’iconicité picturale doit trouver dans la structure du texte ou de l’icône les raisons suffisantes et les interrogations pertinentes qui la contraignent et la guident dans l’analyse externe du fonctionnement des œuvres comme fonctionnement culturel3 ». La 1 GRIGNON C. et J.-C. PASSERON, Le savant et le populaire : misérabilisme et populisme en sociologie et en

littérature, Paris, Gallimard Le Seuil, coll. « Hautes études », 1989, p. 217.

2 Tel qu'en parle Y. Darré : « Dans ces travaux, le cinéma est vu comme exprimant la vision du monde d’une partie plus ou moins importante de la société, voire de la société tout entière. L’analyse des œuvres, dans cette optique, permettrait de mieux comprendre les sociétés qui les ont produites. ». Pour une critique, se référer aux lignes qui suivent cette citation. DARRÉ Y., « Esquisse d’une sociologie du cinéma », art. cit., p. 35-36.

3 PASSERON J.-C., « Le chassé-croisé des œuvres et de la sociologie », R. MOULIN (dir.), Sociologie de l’art, L’Harmattan., Paris, 1999, p. 455-456.

volonté de dépasser la division entre analyse interne et externe est également partagée par P. Bourdieu1. Cette recherche repose sur une méthode proposant d'articuler, sans

les confondre, des analyses filmiques avec l'étude de sources « extérieures » au film lui- même (récits et biographie de documentaristes, théories du documentaire, données plus générales sur les conditions de réalisation de documentaires en France et dossiers de financement).

Les positionnements à l'égard des populations et des espaces stigmatisés tenus dans les films sont différenciés d'autres éléments discursifs avancés par ailleurs par les réalisateurs en dehors, dans des d'arènes publiques elles-mêmes diverses2. Les

analyses filmiques s'attachent à décrire les paroles, les textes, autant d'éléments qui sont de l'ordre du discours oral ou écrit. Elles prennent aussi en charge des éléments formels liés aux images et à leur agencement tels que le cadre, le montage, la sélection de « personnages » ou de lieux, la manière de les mettre en scène. Les deux dimensions se répondent et fonctionnent de concert dans les films. Dans une démarche soucieuse d'observer des variations dans la façon de se présenter comme réalisateur et de politiser ou non son film, nous distinguons le contenu des films avec ce qui se fait et se dit « en dehors »3. En l'occurrence, nous souhaitons savoir si les logiques

professionnelles sont les mêmes dans le rendu final et « hors film », donc si les modalités de politisation demeurent identiques pour les réalisateurs.

Selon qu'ils sont ou non issus de l'analyse des films, les résultats de recherche restent donc traités séparément. Pour comprendre ce qui se donne à voir dans les documentaires, nous proposerons systématiquement des données explicatives qui éclairent le contenu des films. Leurs logiques de fabrication diffèrent de celles qui président hors des films à leur présentation. Il convient donc de prendre en compte les différents contextes d'activité pour comprendre la fabrique filmique et les prises de 1 « Faire par exemple l’analyse socio-logique d’un discours en se tenant à l’œuvre même, c’est s’interdire le mouvement qui conduit dans un va-et-vient incessant, des traits thématiques ou stylistiques de l’œuvre où se trahit la position sociale du producteur (ses intérêts, ses phantasmes sociaux, etc.) aux caractéristiques de la position sociale du producteur où s’annoncent ses « partis » stylistiques, et inversement. Bref, c’est à condition de dépasser l’opposition entre l’analyse (linguistique ou autre) interne et l’analyse externe que l’on peut comprendre complètement les propriétés les plus proprement « internes » de l’œuvre. » BOURDIEU P., « Mais qui a créé les créateurs ? », Questions de sociologie, Nouv. éd., Paris, Éd. de Minuit, coll. « Reprise », 2002, p. 207-221.

2 Tels que par exemple la promotion du film dans les médias, les débats en salle ou les entretiens que j'ai pu réaliser.

3 Dans cette enquête, il s'agit principalement des réalisateurs, des relations qu'ils entretiennent avec des collaborateurs inscrits dans l'espace documentaire et les diverses modalités d'investissement des films par des publics (politisés).

position tenues en dehors. Il est apparu nécessaire de faire dialoguer ces dimensions par différents éclairages. Sans prétendre les énoncer tous, ces éclairages sont par exemple d'ordre économique et tiennent compte des contraintes qui président à la réalisation d'un film. Ils renvoient aux mécanismes de division du travail qui le rendent possible pour observer l'importance des collaborations. Il peut s'agir des trajectoires sociales de réalisateurs ou de leur position occupée dans l'espace documentaire, de leurs relations avec d'autres champs ou espaces sociaux (militant, politique, journalistique et artistique). Nous verrons également comment des mises en scène du stigmate font écho aux discours sur la « bonne » manière de faire des films et de se penser comme documentariste. Les films sont également des enjeux entre les réalisateurs et constituent des modèles ou des contre-modèles. Notre enquête tient compte de la manière dont les réalisateurs perçoivent le travail des autres et définissent leur pratique pour ou contre, même si nous n'abordons pas les dialogues qu'ils établissent entre eux dans « l'espace public » (je pense par exemple aux forums, discussions et débats lors d'évènements consacrés à leur documentaire ou à l'ensemble de leur filmographie). En résumé, l'enjeu reste toujours de resituer les choix de réalisation dans un ensemble de dynamiques plus globales, qui dépassent les 42 films étudiés.

- Des images qui parlent d'elles-mêmes ?

Au cœur de l'analyse filmique se pose la question de l'interprétation de données audiovisuelles pour repérer différents positionnements à l'égard de populations et d'espaces perçus comme stigmatisés. En l'occurrence, toute la difficulté était de repérer des prises de position politisées ou dépolitisées dans des éléments iconiques, sonores et textuels.

Une première complication rencontrée renvoie au statut des images dans ces réalisations documentaires. À titre d’exemple, les prises de position qui apparaissent les plus incertaines à repérer viennent de films ou de séquences marqués dans lesquels il n'existe aucune mention orale ou écrite (voix off, carton, voire paroles de personnes interviewées). Sur ce point, les observations de B. Lahire à propos des photographies mobilisées dans les travaux de sciences humaines constituent une source de réflexion

féconde pour penser l’analyse filmique. En effet, B. Lahire souligne qu’il serait nécessaire de commenter les photos en décrivant leur « contexte » et les « conditions de prise de vue », car les « images ne nous disent rien et, lorsqu’elles semblent '' parler d’elles-mêmes '', il faut tout particulièrement nous en méfier, car le risque est grand alors de projeter nos petites mythologies sociales personnelles ou collectives1 ». Dans

le domaine de l’esthétique, on retrouve cette idée chez la philosophe M.-J. Mondzain quand elle affirme à propos des images : « Je constate tout simplement qu’elles ne disent rien, excepté ce qu’on leur fait dire. Par quelle dérisoire obstination voulez-vous que le silence des images fasse la preuve de leur loquacité ? 2».

Une seconde difficulté, largement perçue en sociologie de la réception3, renvoie

aux conditions de la réception qui modifient l'interprétation et desquelles l'analyste ne peut s'extraire. Dans cette perspective, l’interprétation d’un film par un spectateur (analyste ou non) dépend du contenu des réalisations, mais reste aussi circonstanciée au moment de sa projection, au regard des présupposés et des dispositions du spectateur. Les observations de J.-C. Passeron permettent de resituer l’acte interprétatif dans sa dimension sociale à partir de facteurs qui ne sont pas d’ordre iconique. Le sociologue rappelle alors que : « Toute image n’épuise pas sa signification dans la figuration, i. e. dans la ressemblante perspective avec l’objet représenté : sans parler du fait qu’elle est souvent accompagnée, en toutes sortes de messages, d’énoncés oraux ou écrits qui font intervenir d’autres codes et qui encadrent ou décident son sens, il est impossible de réduire ce sens à l ‘analogie visuelle (à « l’iconicité ») puisqu’une image inclut toujours à des degrés variables selon les types d’image, des relations et des éléments conventionnels qui subordonnent chez le spectateur la compréhension complète de « ce qu’elle veut dire » à la connaissance des conventions multiples et variables, bref à une culture iconique. L’image la plus plate ou semble-t-il la plus « lisible » ne livre son sens que dans le discours et les actes du sujet ou du groupe qui l’objective en le disant ou en faisant quelque chose : du fait de multivocité énonciative et de son indétermination assertorique, l’image la plus iconique (la moins codée) est un message dont le signifié n’est jamais constitué qu’au travers de 1 LAHIRE B., « Risquer l’interprétation », Enquête. Archives de la revue Enquête, 1 novembre 1996, no 3, p.

13. (mis en ligne 2013)

2 MONDZAIN M.-J., L’image naturelle, Paris, le Nouveau Commerce, coll. « Le Nouveau commerce. Les Suppléments », 1995, p. 4.

3 Voir notamment pour la télévision LE GRIGNOU B., Du côté du public : Usages et réceptions de la télévision, Paris, Economica, coll. « Etudes politiques », 2003. Et pour le cinéma voir notamment ETHIS E., Sociologie

l’interprétation, nécessairement linguistique ou comportementale, formulée ou agie par des spectateurs, en fonction des « circonstances » du spectacle, parmi lesquelles l’image sociale de l’offre d’images n’est pas la moins décisive1 ».

L’analyse des films passe inévitablement par une interprétation « contrôlée » afin d’éviter les errements d’une étude limitée aux seules projections de l’observateur2.

Loin d'être spécifique à l'analyse filmique, ce problème est aussi celui de toute activité interprétative en sciences sociales. Maîtriser l'interprétation a tout d'abord supposé dans cette enquête de prendre en compte des éléments textuels et sonores. Les paroles des intervenants filmés contiennent des prises de position et sont analysées à la fois en regard du contexte du tournage et au prisme des opérations de sélection et de mise en scène dont elles font l'objet. Il en est de même pour les cartons, voix off, voice over et titres qui constituent des sources d'information importantes notamment parce qu'elles sont l'occasion pour le réalisateur et son équipe de prendre position, pour le moins de mettre en mots dans les films des visions du monde social, des « principes de visions et de divisions3 » pour reprendre l'expression de P. Bourdieu. Toutefois, une

interprétation sur ces seules bases serait quelque peu lacunaire, car ces éléments restent inégalement présents en fonction des films. À côté, le recours aux entretiens menés auprès des réalisateurs a permis de maîtriser l'interprétation. Lors de nos rencontres, j'ai essayé, et le plus souvent réussi à visionner les films ou pour le moins,