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2.2 Quelques probl´ ematiques des fermions lourds

2.2.3 Criticalit´ e quantique

Un autre sujet d’actualit´e sur les fermions lourds, par ailleurs reli´e aux pr´ec´edents, est l’existence dans les compos´es au c´erium ainsi que dans quelques compos´es `a l’uranium comme U2Pt2In, U2Pd2In et U3Ni3Sn4, d’un point critique quantique, que nous avons

d´ej`a mentionn´e dans le paragraphe pr´ec´edent. Originellement l’appellation point critique quantique (QCP) d´esigne une transition de phase du seconde ordre `a temp´erature nulle (c’est-`a-dire contrˆol´ee par un autre param`etre comme la pression, la substitution chi- mique ou le champ magn´etique). Dans le cas des fermions lourds, cette d´efinition s’est pr´ecis´ee et le lieu exact du point critique quantique est l`a o`u l’ordre magn´etique disparaˆıt (TN = 0 ou TCurie = 0) pour laisser place, dans une vision id´eale, `a un liquide de Fermi

2Notons par ailleurs que cette situation existait d´ej`a dans le compos´e ErNi

2B2C o`u le ferromagn´etisme

coexiste de mani`ere homog`ene avec la supraconductivit´e [59], et de fa¸con plus r´eduite, `a la limite de la transition de Curie dans ErRh4B4 et HoMo6S8. Notons ´egalement que la d´ecouverte de la supraconduc-

Fig. 2.2 – A gauche: Repr´esentation sch´ematique du diagramme T, P autour d’un point critique quantique.A droite: Diagramme de phase T, B de YRh2Si2 [62].

paramagn´etique.

Bien entendu l’existence d’une telle singularit´e `a temp´erature nulle a des incidences sur les propri´et´es du syst`eme `a temp´erature finie. En particulier, il existe un r´egime de fluctuations critiques, d´elimit´e par un cˆone dans un diagramme de phase T, P par exemple. Une illustration sch´ematique de ce diagramme est donn´e figure 2.2.

Dans cette zone de fluctuations critiques, les comportements liquide de Fermi sont fortement affect´es, jusqu’`a ˆetre inexistants `a toute temp´erature pour P = Pc3. Les gran-

deurs les plus sensibles `a ce r´egime de fluctuations sont la r´esistivit´e, qui au lieu d’ˆetre en T2 va pr´esenter une d´ependance en temp´erature du type T1+, et le coefficient de chaleur sp´ecifique γ = C/T qui, au lieu d’ˆetre constant `a basse temp´erature, va pr´esenter une divergence `a T = 0, souvent logarithmique, mais parfois avec des exposants plus forts en valeur absolue. Cette divergence de la chaleur sp´ecifique est connect´ee `a une divergence de la masse effective des quasi particules dans ces compos´es, celle-ci devenant infinie `a P = Pc. Bien entendu, d`es que l’on est `a suffisamment basse temp´erature pour P > Pc,

on retrouve les comportements d’un liquide de Fermi paramagn´etique.

Ce diagramme de phase se retrouve dans beaucoup de fermions lourds au c´erium, et en particulier ceux de la famille CenMmIn3n+2m [63]. De plus, pour ces compos´es, une

composante suppl´ementaire apparaˆıt, masquant les propri´et´es de l’´etat fondamental `a P = Pc : autour du point critique quantique se d´eveloppe dans le diagramme de phase

un dˆome supraconducteur, dont le centre se situe en g´en´eral tr`es pr`es de Pc. Quelques

fermions lourds sont r´ef´erenc´es dans les tableaux 2.2.

Le caract`ere syst´ematique, tout du moins pour une classe particuli`ere de compos´es, a bien entendu suscit´e beaucoup d’int´erˆet de la part de la communaut´e. En particulier, deux compos´es ont r´ecemment beaucoup attir´e l’attention : CeCoIn5 et YbRh2Si2.

Tab. 2.2 – Quelques fermions lourds et leur caract´eristiques au point critique quantique. A droite: donn´ees pour la famille des CenMmIn3n+2m. Notons que pour CeCoIn5 et pour

CeIrIn5, le point critique quantique est suppos´e ˆetre `a pression n´egative, de mˆeme que

pour CeRu2Si2 qui n’est pas dans ces tableaux.

En effet, ces deux compos´es pr´esentent l’avantage d’ˆetre tr`es proches du point critique quantique `a pression atmosph´erique. Exp´erimentalement, on peut donc tr`es facilement mesurer les propri´et´es de la phase de fluctuations critiques quantiques, et donc ais´ement explorer leur diagramme de phase. Dans le cas de YbRh2Si2, la position du point critique

quantique est donn´ee par la composition chimique du compos´e substitu´e au germanium YbRh2(Si1−xGex)2, dopage ´equivalent `a l’application d’une pression, et est d´ependante

du champ magn´etique. En effet, pour x = 0, il existe un point critique quantique mis en ´evidence par des mesures de r´esistivit´e `a Bc =0,66T, et celui-ci tombe `a champ nul pour

x = 0, 5. On peut voir ce comportement figure 2.2.

En ce qui concerne CeCoIn5, ce compos´e relativement jeune compar´e aux autres fer-

mions lourds n’a pas encore r´ev´el´e toutes ses surprises. Cependant, les ´etudes de r´esistivit´e sous pression montrent qu’il est tout pr`es de la pression critique, qui elle serait n´egative, aucune trace d’ordre magn´etique ne pouvant ˆetre trouv´ee `a pression ambiante [160].

Dans ce contexte, un grand effort exp´erimental a ´et´e fait ces derni`eres ann´ees pour amasser le plus de donn´ees autour de ces comportements, afin d’une part d’en d´egager l’universalit´e (si elle existe) et d’autre part pour aider `a trouver le meilleur mod`ele micro- scopique d´ecrivant ces fluctuations quantiques. Il existe en effet deux versions du mˆeme ph´enom`ene, la premi`ere supposant que le point critique quantique correspond `a une insta- bilit´e de la surface de Fermi du type onde de densit´e de spin [64][65], la seconde prenant pour base ce que nous avons d´ej`a mentionn´e plus tˆot, c’est-`a-dire le fait que les fermions lourds sont des syst`emes composites form´es par l’hybridation entre les moments locaux et les ´electrons de conduction [46]. Dans le premier cas, l’augmentation de la masse des quasiparticules serait le r´esultat de la transformation d’un ´electron en un ´electron auquel s’ajouterait des fluctuations de spin. Une revue r´ecente sur les diff´erences entre ces deux sc´enarios est donn´ee r´ef´erence [66].

Bien entendu, les trois th`emes abord´es sont tous, comme on l’a vu, intimement reli´es, et la compr´ehension par exemple de la supraconductivit´e ou de l’occurrence des divers ´etats fondamentaux dans les fermions lourds implique la compr´ehension de tout le diagramme de phase du compos´e et/ou de la classe de compos´es. Un certain nombre de compos´es n’ont ´et´e d´ecouverts que tr`es r´ecemment, en particulier la famille des CenMmIn3n+2m,

bien qu’un nombre consid´erable de donn´ees ait d´ej`a ´et´e accumul´e sur le sujet. Et plus que pour les compos´es `a l’uranium, les compos´es au c´erium pr´esentent des caract´eristiques communes qui en font des syst`emes id´eaux pour une compr´ehension — sait on jamais ? — universelle du comportement des fermions lourds.

Mesures de conductivit´e thermique

dans les phases normale et

supraconductrice d’un cuprate

La conductivit´e thermique comme

sonde exp´erimentale

3.1

Conductivit´e thermique de la phase supracon-