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II. Empêcher l’entrée du virus dans les hépatocytes : une nouvelle stratégie antivirale

II.2. Utilisation de la technologie de BRET pour le criblage d’une chimiothèque généraliste sur le

II.2.3. Criblage d’une chimiothèque généraliste sur le complexe CD81/CLDN-1

Afin de tester rapidement l’ensemble de cette chimiotèque, tout en minimisant les quantités de matériel biologique nécessaire, le criblage a été effectué au format 384 puits et les molécules ont été testées à une concentration de 10 μM sur des cellules CHO. A l’issue du criblage, ce test a mis en évidence deux types de composés : des modulateurs de la conformation du complexe, capables d’augmenter le signal de BRET, et des modulateurs de la conformation du complexe capable de diminuer le signal de BRET (Figure 14).

Figure 14 : Représentation schématique de l’effet sur le signal de BRET des composés inhibiteurs ou modulateurs du complexe CD81/CLDN-1

A la suite de ce criblage, les composés augmentant le signal de BRET au-delà de 190% ou le diminuant en dessous de 75% par rapport au signal de BRET basal ont été sélectionnés, soit au total 380 composés (Figure 15).

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Figure 15 : Résultat du criblage primaire par la technologie de BRET

L’activité de ces composés a ensuite été confirmée par des expériences de dose-réponse au moyen du même test et en utilisant une gamme de concentrations allant de 40 nM à 10 µM. 152 composés sont ainsi ressortis comme modulant de manière dose dépendante le signal de BRET et donc la conformation du complexe ciblé. Les composés toxiques pour les hépatocytes humains ont été éliminés et l’effet inhibiteur de l’entrée virale des 72 composés restants a été mesuré à partir d’un test permettant de suivre l’infection d’hépatocytes humains par le VHC et d’un autre permettant de suivre uniquement l’étape d’entrée du VHC dans les cellules.

II.3. Identification de modulateurs du complexe CD81/CLDN-1 et validation d’une famille d’inhibiteurs de l’entrée virale

II.3.1. Modèles d’études expérimentaux pour évaluer l’entrée du VHC dans les hépatocytes

Trois modèles d’étude ont été utilisés respectivement pour le suivi de l’inhibition de l’infection virale, le suivi de l’inhibition de l’entrée virale et l’évaluation de la spécificité des composés pour le VHC. En parallèle, la viabilité cellulaire des hépatocytes humains a été vérifiée (Figure 16).

Le premier modèle utilisé permet à la fois de déterminer l’inhibition de l’infection virale ainsi que l’éventuelle toxicité des composés. Ce modèle est basé sur la culture cellulaire permettant de produire efficacement des particules infectieuses du VHC (Figure 16A). Il repose sur la transfection d’une lignée d’hépatocytes humaines Huh-7 avec des ARN d’une souche isolée d’un patient atteint d’une hépatite fulminante. Ce système permet de produire des particules virales, appelées VHCcc, capables de réinfecter de nouvelles cellules Huh-7. Le génome viral des VHCcc est modifié pour exprimer la Firefly luciférase (FLuc) afin de suivre l’infection par luminescence après contamination des cellules Huh-7. Ces cellules expriment une autre luciférase, la Gaussia luciférase (GLuc), permettant de vérifier la viabilité cellulaire. Si le composé testé sur VHCcc conduit à une inhibition de l’infection virale sans diminuer la viabilité des cellules Huh-7, il est alors testé sur le second modèle cellulaire.

Ce second modèle permet de mesurer l’inhibition de l’entrée virale (Figure 16B). Il est basé sur l’utilisation de particules rétrovirales pseudotypées avec les glycoprotéines d’enveloppe E1 et E2

52 spécifiques du VHC. Par conséquent, ces pseudo-particules, appelées VHCpp, expriment les glycoprotéines E1 et E2 à leurs surfaces. Elles sont obtenues par transfection de cellules humaines HEK-293T au moyen de trois vecteurs : le premier code pour les glycoprotéines E1 et E2, le deuxième exprime les protéines de la matrice, capside, nucléocapside, protéase, transcriptase inverse et intégrase du rétrovirus de la leucémie murine (différentes de celles du VHC, MVL) et le troisième exprime la FLuc. Les VHCpp sont sécrétées dans le surnageant de cultures cellulaires et sont utilisées pour infecter des hépatocytes humains Huh-7. L’infectiosité des VHCpp est déterminée par quantification de l’expression de la FLuc. Ce modèle ne permet d’étudier que l’étape d’entrée puisque ces particules ne possèdent pas le génome du VHC et ne sont donc pas capables de se répliquer une fois à l’intérieur des hépatocytes.

Enfin de manière à montrer la spécificité des composés pour le VHC, des pseudo-particules exprimant à leurs surfaces des protéines d’enveloppe du virus RD114 (différentes de celles du VHC) ont été utilisées. Ces pseudo-particules ont été construites selon le même schéma que celui décrit précédemment mais en utilisant un vecteur exprimant des glycoprotéines différentes de celles du VHC (Figure 16C).

Figure 16 : Modèles d'études expérimentaux pour évaluer l’entrée du VHC dans les hépatocytes

A. Modèle VHCcc permettant d’étudier l’inhibition de l’infection virale et de la viabilité des hépatocytes. Les particules virales possèdent les glycoprotéines d’enveloppe et le génome du VHC

B. Modèle VHCpp permettant d’étudier l’inhibition de l’entrée virale. Les pseudo-particules virales possèdent les glycoprotéines d’enveloppe du VHC et le génome du rétrovirus de la leucémie murine (MVL)

C. Modèle RD114pp permettant d’étudier la spécificité des composés pour le VHC. Les pseudo-particules virales possèdent les glycoprotéines d’enveloppe du virus RD114 et le génome du rétrovirus MVL

Ces trois modèles expérimentaux ont été utilisés pour identifier des composés capables d’inhiber l’entrée virale.

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II.3.2. Identification d’une famille de modulateurs du complexe CD81/CLDN-1 capables d’inhiber l’entrée du VHC dans les hépatocytes

Les 72 composés sélectionnés à partir du criblage BRET ont été testés sur ces trois systèmes cellulaires à une concentration de 10 µM. 24 produits ont montré une inhibition de l’infection des hépatocytes par les VHCcc et VHCpp de plus de 50% sans inhiber l’infection par le virus RD114. L’activité de ces 24 composés a ensuite été confirmée par des expériences de dose réponse en utilisant une gamme de concentrations allant de 40 nM à 10 µM. Une inhibition dose dépendante de l’infection virale par les VHCcc et VHCpp a ainsi pu être observée.

Ceci a permis d’identifier une famille chimique de quatre modulateurs du complexe CD81/CLDN-1 capables d’inhiber l’entrée virale avec des IC50 de l’ordre du micromolaire (Tableau 3). Cpd Structure IC50 VHCcc (µM) IC50 VHCpp (µM) Cpd Structure IC50 VHCcc (µM) IC50 VHCpp (µM) 1 N N NH O S N N F 1.0 1.1 2 N NH O S N N O 0.6 1.1 3 N NH O S N N F 1.0 0.9 4 N NH O S N N O 3.2 7.6

Tableau 3 : Structures et activités biologiques des 4 composés de la famille identifiée et sélectionnée

Ces 4 composés possèdent tous un noyau thiéno[2,3-c]pyrazole substitué en position 1 par un méthyle, en position 3 par un phényle et en positon 5 par une fonction amide. L’atome d’azote de cette fonction amide est lié à une amine protonable par une chaîne carbonée constituée de trois chainons méthyléniques. Plusieurs stratégies ont été envisagées pour modifier les différentes régions de cette entité moléculaire afin de pouvoir établir des relations structure-activité.

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