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Les  corrélations  observées  avec  les  données  2003  et  2005

Chapitre  3   -­‐  La  bioluminescence

3.3   Interprétations  de  l’origine  de  la  bioluminescence

3.3.1   Les  corrélations  observées  avec  les  données  2003  et  2005

Les études de corrélation que j’ai menées pendant mon postdoctorat ont également donné lieu à une note interne ANTARES [229]. Nous rappelons ici les principales conclusions.

3.3.1.1 La corrélation vitesse du courant-bursts de bioluminescence

Une des premières corrélations observées a concerné les relations entre la bioluminescence et les mesures de courant. Une illustration des variations de la vitesse du courant est montrée sur la Figure 3.10. Cette série temporelle met en évidence une fréquence caractéristique qui correspond aux oscillations inertielles (force de Coriolis), c’est-à-dire aux mouvements ondulatoires de la circulation océanique suite à la rotation de la Terre. La période de ce phénomène ne dépend que de la latitude, selon la relation :

) sin( 2 λ Terre T T = (3.2)

qui vaut T=17.6 heures à la latitude d’ANTARES (λ~43°).

La burstfraction révèle aussi ce genre d’oscillations, comme illustré sur la Figure 3.11. Cette observation suggère une forte corrélation avec le courant, qui est confirmée par le profil donné Figure 3.12. La corrélation n’est pas exclusivement linéaire, en particulier vers les faibles valeurs de courant (< 4 cm/s), ce qui s’apparenterait à un effet de seuil. Néanmoins, les coefficients de corrélation linéaire sont de l’ordre de 0.82 pour l’ensemble des données MILOM en 2005 (3 mois), soit une corrélation de près de 67%.

Cette corrélation avait déjà été observée [222] lors des évaluations de sites, et traduit l’excitation mécanique des organismes bioluminescents due à leur interaction avec le détecteur. Cette interaction peut avoir deux origines, provenant soit de l’impact des macro-organismes sur le détecteur en amont du courant, soit des turbulences créées derrière la ligne en aval du courant. 0 0.02 0.04 0.06 0.08 0.1 0.12 18/09/2005 20/09/2005 22/09/2005 24/09/2005 26/09/2005 28/09/2005 30/09/2005 02/10/2005 Date Vitesse du courant (m/s) Figure 3.10

0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 18/09/2005 20/09/2005 22/09/2005 24/09/2005 26/09/2005 28/09/2005 30/09/2005 02/10/2005 Date Burst fraction Figure 3.11

Fraction de bursts bioluminescents mesurée avec la MILOM sur une période de 15 jours en 2005.

Figure 3.12

Corrélation entre la fraction en temps de bursts bioluminescents et la vitesse du courant, pour l’ensemble des données acquises avec la ligne MILOM en 2005.

Pour quantifier la population marine bioluminescente sur le site ANTARES, j’ai participé à des campagnes en mer organisées en 2004 (janvier et mai) avec une équipe écossaise du laboratoire Oceanlab à Aberdeen. Le principe de mesure est de filmer le long de la colonne d’eau la bioluminescence stimulée par une grille d’une maille de l’ordre du centimètre [232]. La caméra et la grille sont montées sur un cadre en aluminium lesté, comme illustré sur la Figure 3.13, qui effectue une descente de la surface au fond à vitesse constante. La caméra de haute sensibilité ISIT (Intensified Silicon Intensifier Target), orientée vers le bas, enregistre les impacts des organismes bioluminescents pour en déduire leur profil de densité. Les campagnes en mer ont permis de réaliser les profils sur le site ANTARES, sur un site intermédiaire à 7 km au sud d’ANTARES et enfin sur un site éloigné de 70 km toujours au sud d’ANTARES.

Les conclusions de cette étude [233] confirment le fait bien connu que la densité des sources bioluminescences décroit avec la profondeur, mais montrent aussi que les variations entre les trois sites sont plus petites que les variations saisonnières. Finalement une densité moyenne de 0.62 individus.m-3 a été mesurée sur la zone ANTARES, entre 1500 et 2500 mètres de profondeur, ce qui correspondrait, avec certaines hypothèses (vitesse=5 cm/s), à un nombre de flashs attendus de l’ordre de 17 par heure par module optique. Ce nombre reste cependant bien en deçà de ce qui est observé sur ANTARES, ce qui peut s’expliquer par les limites d’une telle méthode. En effet, d’une part les mailles de la grille laissent filtrer les plus petits organismes de taille millimétrique, et d’autre part, le lander ISIT n’est sensible qu’à l’émission lumineuse émise lors de l’impact des organismes marins sur la grille, en amont du

3.3 Interprétations de l’origine de la bioluminescence 63 courant, et non à celle due aux turbulences, en aval du courant. Or cette dernière contribution avait déjà été révélée [210] par l’expérience DUMAND, télescope à neutrinos au large de l’ile d’Hawaii.

Figure 3.13

Photo et schéma du lander ISIT de l’équipe d’Oceanlab, qui inclut des largueurs acoustiques, l’unité de contrôle, un courantomètre, les lests et la caméra ISIT.

3.3.1.2 La corrélation température-baseline

Une deuxième corrélation très marquée a été découverte avec les données 2003 de la PSL, mais, de manière surprenante, n’a plus jamais observée depuis lors de façon aussi évidente. Bien que la ligne instrumentale MIL n’ait jamais fonctionné en 2003, la ligne prototype PSL comportait une sonde CTD dédiée à la mesure de la conductivité (C), de la température (T) et de la pression (D) de l’eau. Un échantillon des données de la température in situ est représenté sur la Figure 3.14 pour une période de 10 jours de données, en comparaison avec les données de la baseline telle que calculée en $3.2.2.

Figure 3.14

Température in situ de l’eau de mer (haut) et baseline des taux de comptage des PM (bas) pendant 10 jours en 2003 (données PSL).

La corrélation entre ces deux variables saute aux yeux, et est corroborée par un coefficient de corrélation linéaire égal à 0.87, soit une corrélation de 75% [229]. Il est cependant fort peu probable qu’une relation directe de causalité relie ces deux observables, car une élévation de température de quelques centièmes de degré ne peut expliquer une augmentation de l’activité bactérienne comme observée, et réciproquement. Une hypothèse serait alors que ces deux manifestations soient corrélées à au moins un troisième phénomène.