• Aucun résultat trouvé

L E CONTROLE DE LA CONSTITUTIONNALITE EXTERNE DE LA LO

CHAPITRE SECOND LE RENFORCEMENT DU CONTRÔLE DE LA PRÉPARATION DES

SECTION 2. L’ÉMERGENCE D’UN CONTRÔLE DU TRAVAIL GOUVERNEMENTAL PAR LE CONSEIL

B. L’ INFLUENCE DE L ’ ETUDE D ’ IMPACT SUR LE CONTROLE DE CONSTITUTIONNALITE DES LOIS

1. L E CONTROLE DE LA CONSTITUTIONNALITE EXTERNE DE LA LO

Dans le cadre de son contrôle de constitutionnalité externe, le Conseil constitutionnel examine si la loi « a été adoptée dans le respect des règles de valeur constitutionnelle relatives

à la procédure législative »607. En réalité, ce contrôle de la procédure législative consiste avant

tout en une appréciation du respect des règles de procédure parlementaire inscrites dans la Constitution, ou à laquelle des textes renvoient expressément608. En contrôlant le respect de

l’obligation d’étude d’impact, le Conseil constitutionnel a cependant mécaniquement étendu la portée de son contrôle au stade gouvernemental de la procédure législative.

Au-delà de ce contrôle « en-soi » de l’étude d’impact au titre de la procédure d’adoption de la loi, le document est également susceptible de faciliter l’appréciation du respect d’autres règles procédurales.

606 Cons. const., n° 86-218 DC, 18 novembre 1986, Loi relative à la délimitation des circonscriptions pour l'élection

des députés, Rec. p. 167 ou encore Cons. const., n° 2010-602 DC, 18 février 2010, Loi ratifiant l’ordonnance n° 2009-935 du 29 juillet 2009 portant répartition des sièges et délimitation des circonscriptions pour l'élection des députés, Rec. p. 64.

607 Cons. const., n° 75-57 DC, 23 juillet 1975, Loi supprimant la patente et instituant une taxe professionnelle, Rec.

p. 24.

Son examen peut éclairer, d’abord, l’examen du respect par le Gouvernement de ses obligations de consultation609 lors de la préparation du projet de loi. L’évaluation préalable, en

effet, est tenue de rendre compte des avis qu’il a sollicités avant la saisine du Conseil d’État610.

L’étude d’impact est ensuite en mesure de fournir au Conseil constitutionnel des indications de nature à faciliter son contrôle du respect de règles de procédure encadrant l’activité gouvernementale au stade de l’examen du projet de loi au Parlement. Il en va ainsi, par exemple, du contrôle du respect de l’article 34 alinéa 20 de la Constitution, qui prohibe l’introduction de dispositions sans effet financier direct dans les lois de financement de la Sécurité sociale. L’étude d’impact, en rendant compte des incidences financières attendues du texte, pourrait rendre plus aisée la détection de ces « cavaliers sociaux ». La saisine des sénateurs sur la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2014 est à cet égard révélatrice, en ce qu’elle s’est appuyée sur l’étude d’impact pour démontrer qu’une disposition de ce texte constituait un tel cavalier611. Ce moyen a cependant été écarté par le Conseil constitutionnel612.

La question se pose également de la capacité de l’étude d’impact à approfondir le contrôle du respect de l’exigence de sincérité et de clarté des débats, dégagée de façon prétorienne par le Conseil constitutionnel613. À l’appui de plusieurs saisines, les parlementaires ont en effet

argué du fait que l’incomplétude de l’étude d’impact avait altéré le jugement du législateur, qui s’était « prononcé sur la foi d’éléments tronqués »614. Si le Conseil constitutionnel n’a pour

l’heure jamais accueilli de tels moyens615, il faut convenir que l’établissement d’un lien de

causalité entre l’insuffisance d’une étude d’impact et la violation de l’exigence de sincérité et de clarté des débats ne serait pas irrationnel. Le Conseil pourrait estimer, en effet, que la

609 Le Conseil constitutionnel contrôle en effet le respect des obligations de consultation d’organismes extra-

parlementaires prévues par la Constitution. Il en en va ainsi, par exemple, de la consultation du Conseil économique, social et environnemental. V. Cons. const., n° 2005-512 DC, 21 avril 2005, Loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école, Rec. p. 12.

610 Loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l’application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution,

JORF n° 0089 du 16 avril 2009, p. 6528 et s.

611 « La lecture de l’évaluation des impacts de la mesure nous indique clairement que cette mesure ne peut avoir

d’effet direct sur les dépenses de l’assurance maladie ». Saisine par 60 sénateurs, Cons. const., n° 2013-682 DC,

19 décembre 2013, Loi de financement de la sécurité sociale pour 2014, JORF du 24 décembre 2013, p. 21069.

612 Cons. const., n° 2013-682 DC du 19 décembre 2013, Loi de financement de la sécurité sociale pour 2014, JORF

du 24 décembre 2013, p. 21069, cons. 66.

613 Cons. const., n° 2005-526 DC, 13 octobre 2005, Résolution modifiant le règlement de l'Assemblée nationale,

Rec. p. 144, cons. 5.

614 Réplique par 60 députés, Cons. const., n° 2013-669 DC, 17 mai 2013, Loi ouvrant le mariage aux couples de

personnes de même sexe, JORF du 18 mai 2013, p. 8281.

615 Ibidem ; Cons. const., n° 2013-667 DC, 16 mai 2013, Loi relative à l’élection des conseillers départementaux,

des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral, JORF du 18 mai 2013, p. 8258 ; Cons. const., n° 2015-715 DC, 05 août 2015, Loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, JORF n° 0181 du 7 août 2015, p. 13616.

distribution d’une étude d’impact contenant des informations incomplètes ou erronées a affecté la sincérité et la clarté des débats au sein des hémicycles. De façon comparable, en matière de loi de finances, il pourrait considérer que le non-respect de l’obligation d’évaluation préalable prévue aux articles 51 et 53 de la LOLF616 remet en cause le principe de sincérité budgétaire.

Dans leur saisine sur la loi de finances rectificative pour 2011, les députés avaient ainsi déploré l’absence d’évaluation de deux articles de ce texte, qui caractérisait selon eux une méconnaissance de ce principe617. Les juges de la rue de Montpensier ont cependant écarté ce

moyen sur le fond618.

L’étude d’impact constitue donc un vecteur d’approfondissement du contrôle de la conformité des initiatives du Gouvernement aux règles de procédure, lors de la préparation du texte ou lors de sa discussion dans les chambres. Il en va de même pour l’appréciation de la conformité de ces initiatives aux règles et principes de fond inscrits dans le bloc de constitutionnalité.

2. UN ENRICHISSEMENT DU CONTROLE DE LA CONSTITUTIONNALITE INTERNE

Outline

Documents relatifs