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Chapitre I Recension des écrits

1.3 L'émotion au sein des expériences de JR : outil d'évaluation et indicateur des effets

1.3.3 Auprès des contrevenants

Du côté du contrevenant, les potentiels effets réparateurs apparaissent non plus en termes « thérapeutique », mais plutôt en termes de « réhabilitation, traitement ». De plus, des perspectives « victimologiques » et « rétributives », sont omniprésentes au sein des études.

La perspective « réhabilitative » semble être de prime abord la plus dominante au sein des recherches. En effet, les études comportent majoritairement un vocabulaire de type « réhabilitatif » et comprennent des termes tels que « redressement cognitif », « redressement émotionnel », « développement des habilités émotionnelles », « développement de la culpabilité, de la honte, de l’empathie », « de la sphère morale et éthique » de l’individu (Presser et Lowenkamp, 1999 ; Harris, Walgrave, Braithwaite, 2004 ; Jackson, 2009 ; Doak, 2011). En ce sens Gehm, (1998) définit par exemple la JR comme étant une justice basée sur les principes de réintégration du contrevenant, rejoignant une perspective réhabilitative. Si ces outils/indicateurs/moyens émotionnels pour évaluer les potentiels effets réparateurs des

expériences, semblent être de prime abord de type réhabilitatif, ils paraissent majoritairement dominés par des considérations « victimaires » et « rétributives ».

En effet, la majorité des études, portant sur les émotions du côté du contrevenant, semblent s’intéresser principalement aux expériences de JR en matière de réduction de la récidive et en matière d’effets/de risques de revictimisation chez les victimes (Sherman, 2003 ; Rossner, 2008), même si de manière générale les auteurs affirment, comme vu précédemment, que les effets semblent être autant réparateurs pour la victime que pour le contrevenant. De telles perspectives semblent alors créer une asymétrie de considération, eu égard aux effets réparateurs, vis-à-vis des victimes et des contrevenants.

Du côté du contrevenant, la majorité des études s’intéressent aux indicateurs émotionnels de la honte, de la honte réintégrative ou exclusive, des remords, de la culpabilité et de l’empathie (Braithwaite, 1989 ; Harris, Walgrave, Braithwaite, 2004 ; Rossner, 2008 ; Jackson, 2009), et sont majoritairement mues par des perspectives punitives/rétributives et/ou victimaires. Par exemple, de nombreuses recherches essayent de déterminer si le développement de certaines émotions (honte, et/ou culpabilité, et/ou empathie) ou si un changement émotionnel (du déni au remord, et/ou du déni à la culpabilité, et/ou du déni à l’empathie) peut avoir un impact en matière de réduction du crime et des méfaits (Braithwaite 1989 ; Braithwaite, 2002, Rossner, 2008). Dans ces cas, la perspective réhabilitative/ réintégrative est avant tout dominée par une finalité rétributive, soit la réduction de la récidive. D’autres études vont plutôt porter leur attention sur les effets et impacts potentiels d’un tel développement ou changement émotionnel à l’égard des victimes (Presser et Lowenkamp, 1999 ; Doak, 2011). Dans ces cas, la perspective réhabilitative/réintégrative est avant tout appréhendée par une finalité victimologique/thérapeutique.

De manière synthétique, il semble donc majoritairement ressortir des études deux perspectives d’approche à l’égard du contrevenant.

Les émotions sont tout d’abord étudiées et utilisées tels des moyens de redressement cognitif/émotionnel, par exemple avec le développement de la culpabilité, de la honte, des remords. Il s’agit en ce sens d’outils à caractère réhabilitatif utilisés essentiellement afin de développer la sphère éthique et morale du contrevenant, de susciter leur considération /respect de la loi et de réduire les risques de récidive (Braithwaite 1989 ; Braithwaite, 2002, Rossner, 2008). Majoritairement, il semble donc que ces outils à caractères thérapeutiques

sont mus par des objectifs de réduction des risques de récidive, et servent une finalité rétributive. Ainsi, les émotions étudiées chez le contrevenant sont donc à la fois envisagées sous l’angle des moyens/outils réhabilitatifs et des effets possibles des expériences de JR, et sont orientées par une optique rétributive. Une telle perspective étant non réparatrice, elle ne sera pas abordée en détail.

Également, de nombreuses études abordent les émotions chez le contrevenant tel des moyens de redressement cognitif/émotionnel, comme avec le développement de la culpabilité/empathie/des remords/regrets, mais seulement en fonction des impacts, des effets que ces émotions peuvent avoir sur les victimes (Presser et Lowenkamp, 1999 ; Doak, 2011). Ainsi, si de prime abord les études paraissent orientées par une perspective réhabilitative, où le développement des aptitudes et habilités du contrevenant apparaît comme le principal objectif, elles semblent finalement plus centrées sur les considérations des victimes en terme de limitation des risques de revictimisation et d’augmentation du potentiel thérapeutique/ cathartique. Les études portant sur le pardon semblent être un bon exemple en la matière (Presser et Lowenkamp, 1999 ; Doak, 2011). Comme précisé précédemment, le pardon joue un rôle d’importance en matière émotionnelle, et occupe une place non négligeable au sein des études. Il est abordé du côté du contrevenant, avec notamment la question du rôle de la sincérité et des regrets/remords de la part de ce dernier, mais principalement en fonction de ses effets sur les victimes, en matière de diminution du risque de revictimisation et du TSPT notamment (Gehm, 1998). Ainsi, les émotions étudiées chez le contrevenant, en plus d’être les moyens/outils réhabilitatifs, apparaissent aussi comme les effets possibles des expériences de JR, régies par des perspectives victimologiques et thérapeutiques.

Majoritairement, les études investissent la place et le rôle des émotions au sein des expériences de JR, tant vis-à-vis de la victime que du contrevenant, ainsi qu’au sein de la relation victime-contrevenant. Il convient de faire état d’études innovantes qui se sont intéressées, à la place et au rôle des émotions de manière plus interactionniste en JR.