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Contraintes sur la formation de la matière cométaire ?

initialement disponible. Ces surabondances indiquent donc que soit la comète a pour l’instant été sous-échantillonnée et qu’en moyennant sur un nombre plus important de grains les abondances de Zn, Cu et Ga se rapprocheraient des abondances chon-dritiques, soit que ces surabondances sont réelles et que d’autres objets doivent à l’inverse présenter des déplétions en ces trois éléments. De telles déplétions sont en effet observées dans les météorites de type CM2 et CV3 (Flynn, 1996), la tendance des enrichissements observée dans les IDPs étant justement le symétrique des déplé-tions observées dans les CM2 et les CV3 par rapport aux abondances des CI. Une telle observation pourrait signer un phénomène de condensation incomplète dans les régions internes de la nébuleuse solaire avec un transport rapide vers l’extérieur et mériterait une étude plus approfondie, incorporant dans les séquences de condensa-tion l’étude du comportement de ces éléments plus rares et pour l’instant non pris en compte dans les modèles.

3.3 Contraintes sur la formation de la matière

comé-taire ?

La nébuleuse solaire était initialement un nuage formé de gaz et de poussières. L’effondrement de ce nuage a eu pour conséquence de chauffer ses régions les plus internes au point que les poussières s’y trouvant ont été vaporisées. Le nuage s’est ensuite refroidi et les minéraux ont commencé à se condenser à partir de la phase gazeuse. Ce processus conduit à un fractionnement des éléments les uns par rapport aux autres, en fonction du minéral qu’ils vont pouvoir former. Si un processus sé-pare les minéraux de la phase gazeuse avant que la condensation soit complète, cela conduit à un fractionnement élémentaire qui peut avoir été préservé dans les météo-rites chondritiques. Les enrichissements en éléments modérément volatils (Cu, Zn, Ga) par rapport aux CI mesurés dans les échantillons Stardust sont également obser-vés dans les IDPs chondritiques et suggèrent que ces objets pourraient échantillonner une région de la nébuleuse solaire enrichie en éléments volatils et qu’ils se seraient formés tardivement à partir d’un gaz enrichi en ces éléments, suite à la condensation des grains ayant pu former les corps parents des météorites de type CM et CV par exemple.

Si dans les enveloppes des étoiles évoluées, des minéraux haute température peuvent se former près de l’étoile, là où la température et la densité sont élevées (Gail et Sedlmayr, 1987), il n’en est pas de même pour les minéraux basse température. En effet, ces derniers ne se condensent a priori pas car le profil de densité diminue très rapidement lorsqu’on s’éloigne de l’étoile et lorsque le milieu est suffisamment froid, la densité est alors trop faible pour que des minéraux puissent se former, par réactions successives avec le gaz environnant trop dilué. Ainsi, le soufre qui pourrait former la troïlite (FeS) à des températures inférieures à 700 K n’a à ce jour jamais été observé sous forme réfractaire dans les enveloppes circumstellaires (Gail, com-munication personnelle). Il est donc peu probable que le soufre qui est injecté dans le MIS par les étoiles en fin de vie soit présent sous forme condensée dans les grains

de poussière. La déplétion en soufre des grains de la comète Wild 2 pourrait donc avoir pour origine l’absence de soufre dans les grains du MIS, dans l’hypothèse où l’ensemble des grains ne se volatilise pas en entrant dans la nébuleuse pour se recon-denser ensuite. Le soufre, qui est absent de la partie solide du MIS diffus, est présent dans la phase gazeuse et ce soufre volatil contenu dans le gaz va pouvoir former des molécules volatiles qui éventuellement se retrouveront dans les glaces cométaires. La composition de la phase volatile des comètes peut être étudiée via des observations astronomiques de la coma dans le domaine UV, IR et millimétrique, lors du passage de la comète à son périhélie. Différentes comètes ont ainsi été observées comme Hal-ley, Hale-Bopp ou Hyakutake (Crovisier et al., 1997; Bockelée-Morvan et al., 2000; Biver et al., 1999). Ces observations révèlent effectivement la présence de molécules soufrées telles que H2S, OCS, SO2 et CS2 et un rapport S/O=0,02 dans Hale-Bopp (Bockelée-Morvan et al., 2000) égal au rapport solaire. Les comètes se sont formées dans les régions extérieures et froides du disque protosolaire et leur composition ne reflète pas une phase de condensation dans ces régions. La composition de la matière volatile des comètes résulte d’une chimie en phase gazeuse du même type que la chimie du MIS dense, ce qui explique la présence de nombreuse molécules soufrées. Une partie de la matière réfractaire pourrait avoir pour origine les régions internes de la nébuleuse, des grains de types chondritiques étant diffusés vers les régions exté-rieures du disque. L’autre partie de la matière réfractaire pourrait provenir du MIS, où les grains sont appauvris en soufre, ce qui expliquerait le manque de soufre dans les grains de Wild 2.

Si l’ensemble de la poussière initialement présente dans le nuage moléculaire qui a formé notre Système Solaire a été vaporisé dans la nébuleuse, la déplétion en soufre mesurée dans la fraction réfractaire de la comète Wild 2 ne peut plus avoir de lien avec les observations faites dans le MIS. Le soufre est sous-abondant dans les échantillons Stardust mais n’y est pas absent. Des sulfures de fer et de nickel ont été identifiés (Zolensky et al., 2006) et plusieurs traces ont une particule finale dominée par de la troïlite ou de la pentlandite ((FeNi)9S8). Dans les régions chaudes de la nébuleuse solaire, le fer métallique peut réagir avec H2S présent dans la phase gazeuse pour former FeS. Le soufre se trouve ainsi sous forme de condensat à haute température dans les régions internes alors qu’il est piégé dans les glaces (H2S en particulier) dans les régions externes plus froides. Des processus de transport expliquent alors que des minéraux formés dans les régions internes soient présents dans la matière réfractaire des comètes. La déplétion observée dans la phase réfractaire de Wild 2 montre que le processus de condensation du soufre en FeS aurait été stoppé avant que la totalité du soufre ait pu se condenser. La fraction de soufre manquante nous renseignerait ainsi sur la température à laquelle une partie des grains de Wild 2 se sont formés et peut-être aussi sur les phénomènes de transport rapide de ces grains vers l’extérieur de la nébuleuse solaire.

Quatrième partie

Composition moléculaire de

81P/Wild 2 et d’IDPs

L’information sur la composition moléculaire des échantillons analysés en labo-ratoire est obtenue par microspectroscopie IR. Je présente tout d’abord dans cette partie les analyses IR des deux grains de Wild 2 effectuées dans le cadre des PETs (Preliminary Examination Team) "Organics" et "Spectroscopy" dirigés par S. Sand-ford (NASA-Ames Research Center) et L. Keller (NASA Johnson Space Center) respectivement, durant la phase qui a suivi le retour des échantillons de la mission Stardust sur Terre, de Janvier à Juillet 2006.

Je présenterai dans un deuxième temps les analyses de grains de poussière inter-planétaire (IDPs) qui nous ont été fournis par le Johnson Space Center Cosmic Dust Laboratory de la NASA. Les spectres IR en absorption ont été obtenus après pré-paration des échantillons à l’aide d’une cellule à compression à fenêtres en diamant, technique présentée chapitre 3, partie II.

Enfin, un troisième chapitre sera plus particulièrement consacré à la caractérisa-tion de la matière organique des grains cométaires de Wild 2, telle qu’elle peut être déduite des analyses effectuées dans le cadre de ce travail.

Chapitre 1

Spectres IR des grains de la

comète Wild 2

Sommaire 1.1 Echantillons . . . 123 1.2 Problèmes rencontrés . . . 124 1.3 Contribution de l’aérogel . . . 126 1.4 Résultats . . . 129 1.5 Conclusion . . . 131

1.1 Echantillons

La mission Stardust a rapporté sur Terre des grains de la comète Wild 2, piégés dans de l’aérogel. Les impacts des grains dans le collecteur ont formé des cavités allongées (Figure 1.1) au bout desquelles se trouvent les particules finales. Au cours de son ralentissement, la particule incidente se brise en une multitude de petits grains qui se déposent sur les parois de la cavité formée dans l’aérogel. Des parti-cules individuelles ont été extraites de ces traces. En particulier de la trace 35 de la cellule 2054 du collecteur (Figure 1.1), de nombreux grains ont pu être extraits pour analyse. L’équipe de l’IAS a ainsi reçu deux de ces grains : C2054,0,35,21,0 et C2054,0,35,26,0 (35,21 et 35,26 dans la suite). Ces deux particules ont été pressées sur une feuille en or par une équipe de la NASA en charge de la préparation des échantillons, un support permettant de combiner les analyses en microspectro-scopie IR (en mode réflexion), microspectromicrospectro-scopie Raman, FESEM (Field Emission Scanning Electron Microscopy), EDX (Energy Dispersive X-ray) et à la nano-SIMS (Secondary Ion Mass Spectrometry). Les images des deux grains obtenues par FE-SEM sont présentées Figure 1.2.

Figure 1.1 – Image optique de la trace 35 extraite de la cellule C2054. La flèche indique la région où ont été prélevées les particules 35,21 et 35,26. c NASA.

Figure 1.2 – Images FESEM des particules 35,21 et 35,26 pressées sur une feuille d’or. c LSPES/IAS.