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Dans la continuité des soins

4.4 Intérêt et applications

4.4.3 Dans la continuité des soins

Par ailleurs la connaissance des effets des médicaments utilisés permettra au médecin généraliste, en fonction des antécédents et thérapeutiques habituelles du patient, d’éviter les contre-indications, de prévenir et /ou de dépister les éventuels effets indésirables et interactions médicamenteuses.

4.4.3 Dans la continuité des soins

Le dépistage en soins primaires n’a pas pour but de porter un diagnostic étiologique précis, mais de mettre en route des examens ou une consultation spécialisée à la moindre alerte [8]. A chaque âge de la vie correspondent certaines pathologies qu’il convient de connaître et de rechercher. Concernant les troubles visuels, les deux périodes sensibles se situent aux extrêmes de la vie.

4.4.3.1 Dépistage des troubles visuels du nourrisson, de l’enfant et de l’adolescent

4.4.3.1.1 Le nourrisson et le petit enfant

L’examen de tout nourrisson ou enfant doit intégrer un bilan visuel attentif à la recherche d’une amblyopie, d’un strabisme, d’anomalies de la réfraction, qui nécessitent une prise en charge précoce. En effet, compte tenue de la nécessité d’identifier une amblyopie quand elle est encore réversible, la connaissance des situations à risque d’apparition d’un trouble visuel et des signes d’appel d’une anomalie de la vision chez l’enfant est recommandée à tous les professionnels de santé de la petite enfance [9]. Les médecins généralistes devraient donc être formés à la recherche des amétropies, amblyopie et autres défauts de vision, et informés de la symptomatologie du rétinoblastome, du glaucome congénitale, de la cataracte congénitale et de la microphtalmie [10].

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En pratique trois groupes de population sont distingués :

Premier groupe : enfants ayant des signes d’appel d’un trouble visuel :

Avant 6 mois :

Une anomalie objective au niveau des paupières, des globes oculaires, des conjonctives, de la cornée, des pupilles ;

Un strabisme : tout strabisme constant avant 4 mois est pathologique, tout strabisme même intermittent après 4 mois est pathologique, tout strabisme divergent quelque soit l’âge est pathologique ;

Un nystagmus ; Un torticolis ;

Une anomalie du comportement évoquant un trouble visuel : manque d’intérêt aux stimuli visuels, absence de clignement à la lumière dès le premiers jours, absence du réflexe de fixation après 1 mois, absence du réflexe de clignement à la menace après 3 mois, du réflexe de poursuite oculaire après 4 mois, retard d’acquisition de la préhension des objets (normalement présente entre 4 et 5 mois), pauvreté de la mimique, absence de sourire, plafonnement ou errance du regard, signe oculo-digital (l’enfant se touche fréquemment les yeux).

Ces signes d’appel sont importants à connaitre car ils restent valables quel que soit l’âge de l’enfant et imposent un examen ophtalmologique rapide.

De 6 mois jusqu’à l’acquisition de la parole :

En plus des précédents, les signes d’appel sont : un enfant qui se cogne, tombe fréquemment, bute sur les trottoirs ou les marches d’escaliers, plisse des yeux ou fait des grimaces, ferme un œil au soleil, semble photophobe.

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Après l’acquisition de la parole :

En plus des signes précédents, les signes fonctionnels suivants peuvent être signalés par l’enfant : picotements et brûlures oculaires, gène visuelle en vision de loin ou en vision de près, diplopie, céphalées (évocatrices d’un trouble visuel quand elles surviennent en fin de journée ou après fixation prolongée).

Deuxième groupe : enfants présentant des pathologies ou antécédents (personnels ou familiaux) favorisant l’apparition d’un facteur amblyogène : Les facteurs amblyogènes sont représentés par l’ensemble des troubles visuels susceptibles d’entraîner une amblyopie, c'est-à-dire :

Les troubles de la réfraction (hypermétropie, astigmatisme, myopie) ; Le strabisme ;

Les atteintes organiques de l’œil (rétinopathie, rétinoblastome, cataracte, opacité cornéenne, nystagmus, glaucome congénital) ;

Les obstacles sur le trajet des rayons lumineux (ptosis, hémangiome, occlusion de l’œil).

Les situations favorisant l’apparition d’un facteur amblyogène à considérer sont les suivantes :

o Des antécédents familiaux de trouble de la réfraction (port de lunette avant l’âge de 15 ans, en remontant à la génération des grands-parents [11]).

o La prématurité, surtout en cas d’âge gestationnel inférieur à 32 semaines révolues ;

o Le petit poids de naissance, inférieur à 2500 grammes ; o L’infirmité motrice cérébrale, les troubles neuromoteurs ; o Les anomalies chromosomiques, en particulier la trisomie 21 ;

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o Les craniosténoses et les malformations de la face ; o Les embryofoetopathies ;

o Une exposition in utero à la cocaïne et/ou à l’alcool et/ou tabac.

Pour l’enfant de ces deux premiers groupes, le recours au spécialiste est nécessaire afin de réaliser un examen ophtalmologique comprenant une étude de la réfraction après cycloplégie.

Troisième groupe : enfants sans signes d’appel et ne présentant pas de risque personnel ou familial d’apparition d’un facteur amblyogène :

Compte tenu d'une part de la prévalence dans la population générale des enfants de moins de 6 ans de l'amblyopie et des facteurs amblyogènes, d'autre part de la gravité des anomalies organiques, il est proposé de pratiquer systématiquement un bilan visuel aux âges suivants :

- à la naissance.

- entre 9 et 15 mois (âge préverbal). - entre 2 ans et 4 ans (âge verbal).

L'examen à la naissance est réalisé par le pédiatre en maternité.

Le bilan visuel à l'âge préverbal (9 à 15 mois) :

Le médecin généraliste peut facilement réaliser un premier dépistage à la recherche d ' u n déséquilibre oculomoteur apparent (strabisme ou nystagmus) ou d'une anomalie organique (cataracte, rétinoblastome, opacité cornéenne...) à l'aide d'une simple source lumineuse (« Lampe-stylo », ophtalmoscope) [10]. Le bilan comporte :

• un interrogatoire des parents afin de préciser l'existence éventuelle de situations cliniques à risque et de signes d'appel ;

• un examen externe de l'œil : - examen des paupières,

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- vérification de la symétrie des globes oculaires.

- examen de la sclérotique, de la conjonctive, de la cornée, de l'iris, des pupilles (permettant l'étude de la lueur pupillaire : rouge - orangé, identique pour les deux yeux).

• une recherche des premiers réflexes visuels :

- dès la naissance, réflexe d'attraction du regard à la lumière douce, réflexe photomoteur, réflexe de fermeture des paupières à l'éblouissement.

- à 1 mois, réflexe de fixation,

- à 3 mois, réflexe de clignement à la menace, réflexe de maintien du parallélisme des axes visuels,

- à 4 mois, réflexe de poursuite, réflexe de convergence ;

• une recherche d'une défense à l'occlusion : si l'enfant refuse l'occlusion d'un œil et accepte l'occlusion de l'autre, il est suspect d'amblyopie sur l'œil caché ;

• un dépistage du strabisme à l'aide :

- du test des reflets cornéens (test d' Hirschberg) : l'examinateur tient une lumière devant les deux yeux de l'enfant. Si l'enfant ne louche pas lorsqu'il fixe, les reflets cornéens de cette lumière sont positionnés de façon symétrique dans les deux yeux par rapport aux pupilles. Si le reflet cornéen d'un œil est dévié, il existe probablement un strabisme.

- du test de l'écran (Cover test) unilatéral puis alterné « de près » : la main de l'examinateur est placée devant un œil puis l'autre pendant que l'on demande à l'enfant de fixer un point lumineux situé à 40 centimètres. Chez l'enfant non strabique, il n'y a pas de mouvements de l'œil libre à la mise en place de l'écran sur l'autre œil.

Le test de l'écran alterné consiste à couvrir alternativement un œil puis l'autre afin qu'ils ne soient jamais découverts simultanément. Tout mouvement d'un

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œil à la mise en place de l'écran sur l'autre œil ou à la levée de l'écran est pathologique.

Toute anomalie de ce bilan visuel impose un examen ophtalmologique comprenant un examen de la réfraction après cycloplégie.

L 'examen ophtalmologique doit être réalisé dans les jours qui suivent en cas de baisse de transparence cornéenne ou d'une cornée agrandie (mégalocornée) ou de toute autre anomalie de la cornée, en cas de leucocorie ou d'anomalie de la lueur pupillaire, en cas de nystagmus d'apparition récente.

Le bilan visuel à l'âge verbal (2 à 4 ans) comporte :

• un examen externe de l'œil, identique aux précédents ; • une recherche du réflexe photomoteur ;

• un dépistage du strabisme, identique à l'âge préverbal : selon l'HAS (haute autorité sanitaire française), il est convenu de se limiter à un test de près dans le cadre d ' u n dépistage en pédiatrie courante [11];

• une mesure de l'acuité visuelle de près et de loin par des échelles d'images :

En effet, actuellement, les amblyopies fonctionnelles sont majoritairement détectées entre 3 et 5 ans lors de l'examen réalisé en maternelle. Or dès 30 mois, l’enfant est en mesure de répondre verbalement aux tests de reconnaissance d'images. Il est donc recommandé que l'acuité visuelle soit évaluée dès l'âge de 30 mois, c'est-à-dire en première année de maternelle [10].

En cas d’impossibilité de réaliser une mesure de l'acuité visuelle à 3 ans (échecs répétés), un examen par un ophtalmologiste est proposé, comprenant un examen de la réfraction sous cycloplégie,

• une estimation de la vision stéréoscopique par le test de Lang I ou II.

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soit possible dès l'âge de 6 mois, un échec au test ne permet pas de tirer de conclusion sur l'état de la vision stéréoscopique. L'HAS considère donc que pour un dépistage en médecine générale ou en pédiatrie, la réalisation de ce test est superflue à l'âge préverbal [11].

Enfin, vers l'âge de 6 ans, peut être envisagé un bilan visuel associant :

• un dépistage du strabisme, identique à l'âge préverbal, en ajoutant le test de l'écran de loin ;

• une estimation de la vision stéréoscopique ;

• une mesure de l'acuité visuelle de près et de loin : à cet âge des optotypes de lettres peuvent être proposés ;

• une étude de la vision des couleurs par le test d'Ishihara.

Au total, la connaissance des situations à risque, des signes d'appel, des tests de dépistage d'une anomalie de la vision est nécessaire à tout médecin généraliste. Avec un peu de pratique, le dépistage visuel est rapidement effectué et peut être répété à chaque consultation, tout au long de la croissance de l'enfant.

4.4.3.1.2 Le grand enfant et l'adolescent

Le dépistage de l'amblyopie doit avoir été réalisé dans la petite enfance.

Chez l'enfant de 7 à 18 ans, il importe donc essentiellement de rechercher les troubles de la réfraction non amblyogènes et les dyschromatopsies [12].

Le trouble de la réfraction le plus fréquent est la myopie, devant l'hypermétropie et l'astigmatisme.

Le dépistage est couramment réalisé à l’aide d'échelles optométriques de type Monoyer ou de ses dérivées en cas d'illettrisme. Il doit être répété tous les 2 à 3 ans, plus souvent s'il existe des antécédents familiaux de myopie.

En cas de prescription de verres correcteurs, l'observance doit être vérifiée. Le dépistage des dyschromatopsies s'effectue par l'album d'Ishihara. Si la recherche d'une anomalie de la vision des couleurs n ' a pas été faite précédemment, l'HAS propose la réalisation d'un test unique.

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4.4.3.2 Dépistage des troubles visuels du sujet âgé

A l'âge adulte, les pathologies oculaires sont largement dominées par les troubles de la réfraction que sont les amétropies et la presbytie, événement physiologique inéluctable. Le symptôme prédominant est une baisse d'acuité visuelle progressive qui, comme nous l'avons vu précédemment, nécessite

dans tous les cas un recours au spécialiste.

Au delà de 50 ans, il convient de dépister essentiellement trois pathologies : le glaucome, la dégénérescence maculaire liée à l'âge et la cataracte.

4.4.3.2.1 Le glaucome [13] [14]

Le glaucome est une maladie fréquente qui concerne environ 1% de la population à partir de 50 ans et dont la prévalence augmente avec l'âge pour atteindre environ 5% après 60 ans. Il se caractérise par une destruction progressive du nerf optique, potentiellement cécitante avec altération progressive du champ visuel.

Il existe de nombreux types de glaucomes parmi lesquels le glaucome primitif à angle ouvert (GPAO), de loin le plus fréquent. La survenue d ' u n glaucome est favorisée par l'existence de plusieurs facteurs de risque, mais l'hypertonie oculaire (pression intraoculaire supérieure à 21 mm Hg) demeure le principal facteur causal de la maladie.

D'autres facteurs de risque sont identifiés : l'âge supérieur à 50 ans, l'hérédité (antécédents familiaux d'hypertonie oculaire ou de glaucome), la myopie, la corticothérapie, l'ethnie (plus grande fréquence chez les sujets mélanodermes), l'hypertension artérielle, le diabète, les dyslipidémies.

Le dépistage du glaucome s’effectue par l'ophtalmologiste et s'appuie sur la mesure de la pression intraoculaire associée à l'examen de la papille optique au fond d'œil.

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Ce dépistage doit être précoce du fait de la perte potentielle des fibres visuelles,

du risque de malvoyance, du risque de crise de glaucome aigu, de l'existence de traitements efficaces. Il doit être proposé à toutes les personnes de plus de 45 ans. ou à toutes celles qui ont un antécédent familial de glaucome, même jeunes et sans aucun trouble visuel.

La recherche des facteurs de risque est essentielle pour permettre au médecin généraliste de proposer, au moment opportun dans la vie de ses patients, la réalisation de ce dépistage.

4.4.3.2.2 La dégénérescence maculaire liée à l'âge (DMLA) [15] [16]

La DMLA est la première cause de malvoyance après 55 ans dans les pays industrialisés. Sa prévalence est estimée entre 1 et 2% entre 50 et 60 ans, puis augmente progressivement avec l’âge. C'est une maladie dégénérative rétinienne chronique, évolutive et invalidante, qui débute après 50 ans. Vieillissement, tabagisme et antécédents de DMLA dans la fratrie sont les seuls facteurs de risque clairement identifiés. D'autres facteurs semblent être en cause : l'hypertension artérielle, les antécédents coronariens, la couleur claire de l'iris, l'exposition importante à la lumière.

Les manifestations cliniques sont très variées : baisse d'acuité visuelle, métamorphopsies, sensation de perte du contraste, phosphènes, scotome central. Elles inquiètent peu les patients qui considèrent à tort qu'elles sont liées à une cataracte sous-jacente ou au vieillissement, et sont par ailleurs souvent compensées par l'œil sain controlatéral au début de la maladie.

Le médecin généraliste a un rôle primordial à jouer dans le dépistage précoce de cette affection qui nécessite une mise en route rapide du traitement. Il doit informer les patients à risque de la gravité potentielle des signes visuels apparemment bénins et les inviter à une autoévaluation régulière à domicile, par fermeture alternative des yeux, permettant de détecter rapidement une anomalie de la vision monoculaire.

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Au cabinet, l'élément clé du dépistage précoce de la DMLA est le test d'Amsler. facilement-réalisable lors d'une consultation.

En cas de suspicion clinique, le patient doit être rapidement orienté vers l'ophtalmologiste qui seul confirmera le diagnostic et pourra traiter le patient.

4.4.3.2.3 La cataracte

La cataracte est une pathologie dont les étiologies sont nombreuses. Nous n'envisagerons que la cataracte sénile, de loin la plus fréquente.

Elle survient habituellement chez les sujets de plus de 65 ans, est en général bilatérale mais volontiers asymétrique.

Le signe essentiel est une baisse d'acuité visuelle lentement progressive, sur plusieurs mois ou années, nécessitant un recours au spécialiste qui confirmera

le diagnostic par un examen du segment antérieur retrouvant l'opacification cristallinienne.

Le traitement actuel est uniquement chirurgical après un bilan ophtalmologique complet visant à apprécier le pronostic visuel postopératoire.

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