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CHAPITRE IV : Discussion 162 

4.1 La régulation de la stabilité de ERK3 162 

4.1.2  Les contextes cellulaires de la régulation de ERK3 173 

4.1.2.1 Le cycle cellulaire

Les étapes d’identification des régulateurs de ERK3 par criblage RNAi ont été réalisées dans des cellules en croissance exponentielle, car il s’agit d’un contexte où ERK3 est dégradée de manière constitutive (134). Toutefois, cette régulation est dynamique et peut être modulée dans certains contextes. Ainsi, dans le chapitre 2 nous montrons que USP20 stabilise ERK3 au cours de la différenciation myogénique de myoblastes murins C2C12, un contexte où la régulation de la stabilité de ERK3 est bien décrite (134).

Le cycle cellulaire est une autre situation physiologique où la stabilité de ERK3 est connue pour être régulée. Ainsi, on sait que ERK3 est stabilisée en mitose et dégradée en interphase (138). Dans cette étude, Pierre-Luc Tanguay a émis l’hypothèse que la phosphorylation de l’extension C-terminale de ERK3 inhiberait la liaison à une ubiquitine ligase ou induirait le recrutement d’une DUB. Il a été montré que USP20 est un régulateur de la kinase Plk1, un régulateur important de la mitose (436). USP20 est donc un candidat pour la régulation de ERK3 en mitose. Nous avons pu montrer que USP20, de manière similaire à ERK3, s’accumule en mitose dans des cellules HeLa (figure 6). De plus, la protéine présente un retard de migration sur gel, suggérant des événements de phosphorylation. En effet, il a été démontré que la protéine USP20 présente un retard sur gel dans des conditions de stress physiologique, causé par des phosphorylations corrélant avec une augmentation de son activité (558). Finalement, USP20 et ERK3 ont montré pouvoir être localisées au niveau du centrosome en mitose ((540) ; Pierre-Luc Tanguay et Sylvain Meloche, données non publiées). Il pourrait donc être intéressant de déterminer si l’augmentation d’expression de USP20 et/ou sa phosphorylation est responsable de la stabilisation de ERK3 en mitose.

Figure 6. L’expression protéique de USP20 est augmentée en mitose.

Des cellules HeLa ont été synchronisées en mitose par double blocage à la thymidine/nocodazole. (Décrit en réf. 22). L’expression de ERK3 et USP20 a été analysée. Expo : cellules en croissance exponentielle ; M : Mitose.

En revanche la protéine E6AP semble elle aussi atteindre un maximum d’expression en mitose dans des cellules HEK293 (559). Il doit donc exister un système qui fait en sorte que ERK3 n’est pas régulée négativement par E6AP en mitose pour qu’il soit possible d’en mesurer l’accumulation. Une localisation cellulaire différente semble à exclure, puisque les protéines peuvent toutes deux se retrouver au centrosome en mitose ((559) ; Pierre-Luc Tanguay et Sylvain Meloche, données non publiées). En revanche, la phosphorylation de ERK3 par CDK1 en mitose pourrait modifier sa configuration et inhiber l’interaction avec E6AP. Cette hypothèse reste néanmoins à tester.

4.1.2.2 L’hypoxie comme régulateur de la stabilité de ERK3 ?

Les réponses cellulaires à l’hypoxie font largement intervenir le système ubiquitine- protéasome. L’adaptation hypoxique la plus caractérisée est sans doute la stabilisation du facteur de transcription HIF1α (voir revue (560)). En conditions normoxiques HIF1α est hydroxylé par des prolyl hydroxylases et des asparaginyl hydroxylases, induisant le recrutement de l’ubiquitine ligase VHL, qui catalyse l’ubiquitination de HIF1α et conduit à sa dégradation. En conditions hypoxiques, la réaction d’hydroxylation ne peut se faire faute d’oxygène et HIF1α n’est plus dégradé, induisant l’expression d’un ensemble de gènes médiateurs des réponses à l’hypoxie. À ce modèle simplifié s’ajoutent de nombreux autres régulateurs de la stabilité de HIF1α, au nombre desquels USP20, qui incidemment est aussi un

substrat de VHL (437, 538). Ainsi, l’expression de USP20 participe à la stabilisation de HIF1α en conditions d’hypoxie. Toutefois il n’est pas déterminé si l’expression et/ou l’activité de USP20 sont régulées dans ces conditions.

De manière intéressante, nous avons montré dans le chapitre 2 que le traitement de cellules avec le chlorure de cobalt, un agent mimétique de l’hypoxie induit une stabilisation de ERK3 qui est dépendante de USP20. L’hypoxie peut aussi moduler l’activité biologie de E6AP. Dans des conditions de carence en oxygène, E6AP n’interagit plus avec son substrat p53 (561). De plus, nous avons identifié l’ubiquitine ligase VHL comme un régulateur potentiel de ERK3 dans nos expériences de criblage, réalisées en conditions normoxiques. Il serait donc envisageable que la régulation de ERK3 soit modulée par la teneur en oxygène du milieu. En accord avec cette idée, une étude récente publiée par le groupe de Alex von Kriegsheim, indique que ERK3 est hydroxylée sur sa proline 25 par la prolyl hydroxylase PHD3 (529). En revanche, contrairement à ce que suggèrent nos données, les auteurs de cette étude émettent l’hypothèse que l’hydroxylation de ERK3 stabilise la protéine. À l’inverse de ce que nous observons avec un agent mimétique de l’hypoxie, l’inhibition chimique de PHD3, avec deux inhibiteurs chimiques, le JNJ-42041935 et le dimethyloxaloylglycine (DMOG) (562, 563), induit une diminution de l’expression protéique de ERK3. À l’aide d’un crible d’interaction, les auteurs émettent l’hypothèse que l’hydroxylation de ERK3 sur sa proline 25 induit une inhibition de la liaison des ubiquitines ligases E6AP et HUWE1, ce qui selon eux expliquerait la stabilisation de ERK3. L’interprétation de ces résultats semble toutefois sujette à caution. Ainsi dans cette étude les auteurs étudient majoritairement l’expression et la stabilité d’une protéine ERK3 surexprimée portant un tag Flag en N-terminal. De plus la plupart des expériences sont réalisées dans un contexte où PHD3 est surexprimée. L’effet des inhibiteurs de PHD3 et de la surexpression de cette dernière semblent de plus inconsistant entre tous les résultats proposés. D’autre part, certains de nos résultats ne concordent pas avec l’hypothèse d’interaction proposée par les auteurs. Nous avons en effet investigué l’interaction entre ERK3 et HUWE1 par des essais de co-immunoprécipitation, dans le même modèle cellulaire que celui utilisé pour l’étude de PHD3, sans réussir à mettre en évidence de liaison entre les protéines. De plus, les shRNA dirigés contre HUWE1 dans notre crible n’induisent pas de modification de l’expression protéique de ERK3. Il convient bien évidement de noter

que nos résultats n’excluent en rien la possibilité d’une régulation de ERK3 par HUWE1. Néanmoins, cette dernière mériterait sans doute d’être plus amplement caractérisée.

Les approches expérimentales utilisées pour nos observations et celles du groupe de Alex von Kriegsheim semblent donc en contradiction. Cependant aucune n’a permis d’étudier directement l’effet de l’hypoxie sur l’expression de ERK3. Il serait donc intéressant d’étudier l’ubiquitination et la dégradation de ERK3 à l’aide d’une chambre hypoxique et de déterminer l’importance relative de USP20, E6AP et VHL dans ces régulations.

4.1.3 Conclusion - La régulation de la stabilité de ERK3 : un système