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CHAPITRE I. Organisation de l’assainissement urbain en Algérie

I.4. Contexte technique du secteur de l’assainissement en Algérie

L’Algérie fait face à des problèmes importants dans le domaine de l’assainissement dont les conséquences sur la santé de la population et sur l’environnement peuvent être sérieuses (maladies hydriques transmissibles comme la typhoïde, la dysenterie récurrente, fermeture des plages autour des grandes villes à la baignade, eaux impropres à l’arrosage de cultures,…etc.). Le gouvernement n’a cessé de renforcer le secteur de l’eau et s’est engagé dans un programme ambitieux de mise à niveau de l’assainissement. Si la restructuration opérée répond au développement futur du secteur de l’assainissement, les structures créées nécessitent un renforcement significatif qui s’avérera crucial dans la réussite du programme gouvernemental à travers le temps.

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I.4.1. Chronologie d’évolution du secteur

1) Période postindépendance (de 1962 jusqu’au début de 1980) : C’est une période

caractérisée par une croissance et expansion considérables, grâce à la montée des prix des hydrocarbures dont l’état algérien est le propriétaire depuis 1973. De ce fait, l’Etat a investi, a aménagé et a réalisé de grands projets.

Au lendemain de l'indépendance, le gouvernement algérien a reconduit les grandes lignes de la politique coloniale, caractérisée par de forts investissements en direction des centres urbains au détriment des villes moyennes et de l'intérieur du pays. Cette distinction spatiale dans la distribution des budgets se retrouve au sein même de ces grandes villes, avec des quartiers totalement dépourvus de réseaux d'eau potable et d'assainissement et d'autres assez bien desservis (Benzerra, 2016). Ainsi, de 1962 à 1970, la gestion des services d’eau et d’assainissement était assurée par les régies communales en majorité, par certains opérateurs intercommunaux et par quelques sociétés privées (Alger, Oran, Villes du Sud, …etc.) (Boukhari, 2018).

Avec la création en 1970 d'un secrétariat d'état à l'hydraulique, la politique nationale de l'eau apparaît, d'abord, à travers une refonte des structures de tutelles héritées de l'époque coloniale. Mais ce secteur n'a bénéficié que de faibles dotations financières malgré les objectifs ambitieux qui étaient inscrits dans le quadriennal (1970-1974). Ce plan a donné la priorité à la satisfaction des besoins en eau de l'agriculture. Le second plan quadriennal (1974-1977) a accordé la priorité à la satisfaction des besoins en eau et d'assainissement des villes et des industries naissantes (Benzerra, 2016).

2) Période de crise (de 1980 á 2000) : Cette période est caractérisée par deux facteurs majeurs á savoir : la baisse brutale des prix des hydrocarbures depuis le début des années quatre-vingts et la confrontation du pays au problème du terrorisme durant la décennie noir des années quatre-vingt-dix. Ces deux facteurs ont une répercussion directe dans le ralentissement et même l’arrêt des investissements en général ainsi que l’augmentation de la dette extérieure du pays.

La décennie (1980-1990) a connu la relance de la politique hydraulique, en donnant des compétences élargies au ministère et en accordant des crédits importants. Durant cette période, plusieurs services d'hydraulique ont été créés, comme : Le Contrôle Technique et des constructions Hydrauliques (CTH), l’Agence Nationale des Barrages (ANB), l’Agence Nationale de l'Eau Potable et de l'Assainissement (ANEPA) et l’Agence Nationale de l'Irrigation et de Drainage (ANID).

Boukhari (Boukhari, 2018) a souligné qu’en 1987, une nouvelle réorganisation du secteur a réduit le nombre d’entreprises régionales à 9 placées sous tutelle du Ministère de l’Hydraulique et a créé 26 entreprises de Wilaya sous tutelle du Ministère de l’Intérieur. En revanche le service d’assainissement restait à la charge des 950 régies communales d’assainissement. Toutefois la multiplicité des organismes de gestion, la diversité de leurs statuts et tutelles, et surtout leurs grandes différences de moyens et de capacités rendaient très difficiles le contrôle et la régulation du secteur (Boukhari, 2018).

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18 Ainsi, en 1992, il a été procédé à la modification du statut des établissements de l'eau (passage du statut d'entreprise publique EPE à celui d'Entreprise Publique à caractère Industriel et Commercial EPIC). Mais les réseaux d’assainissement sont rarement pris en charge par les établissements de l'eau et demeurent les prérogatives des collectivités locales (communes). Malgré les coûteux investissements consentis en trente années par l’Etat, la satisfaction des besoins en eau, l'évacuation des eaux urbaines et la protection de l'environnement n’étaient pas assurées de façon satisfaisante.

Benzerra (Benzerra, 2016) a indiqué que le Ministère algérien de l’Equipement et de l’Aménagement du Territoire (Chargé de l’Hydraulique) a commencé à élaborer, dès 1993, les bases de la nouvelle politique de l’eau, et a engagé une vaste campagne de sensibilisation et de concertation avec l’ensemble des partenaires (Agriculture, Industrie, Collectivités Locales, Universités, Associations d’usagers, Associations de protection de l’environnement, …etc.). Ceci a abouti, fin 1995, à la tenue d’Assises Nationales de l’Eau, au cours desquelles ont été adoptés les principes, évoqués plus haut, de la nouvelle politique de l’eau. L’idée d’un amendement au Code de l’Eau, promulgué en 1983, a été retenue, de même que celle de la création de structures régionales, chargées de promouvoir la gestion intégrée de l’eau à l’échelle des grands bassins hydrographiques. Dès Juin 1996, le Code de l’Eau est modifié, introduisant notamment la possibilité, pour les maîtres d’ouvrages de concéder leurs installations d’eau potable ou d’assainissement à des opérateurs privés. Fin Août 1996, cinq Agences de Bassins Hydrographiques et cinq Comités de Bassin sont créés, couvrant la totalité du territoire national.

3) Période de relance et de développement (depuis 2000) : Suite á la remontée des prix du pétrole et la stabilité de la situation sécuritaire, l'Algérie a connu un niveau élevé de croissance depuis 2000. C’est aujourd’hui un vaste chantier. On a construit et on construit encore partout et les sommes injectées sont colossales (plus 200 milliards de dollars en quelques années) et les dettes extérieures du pays sont pratiquement honorées. Quant à l'eau, avec la construction de barrages, les transferts d'une région à une autre et les usines de dessalement, elle ne constitue plus le problème dramatique d'il y a quelques années. Cependant, la dépendance du pays vis-à-vis des exportations d'hydrocarbures demeure. Les profondes restructurations dans le secteur de l'eau se sont poursuivies. En effet, le 21 avril 2001, le pouvoir public a procédé à la création de l'Office National de l'Assainissement (ONA) par le décret exécutif n°: 01-102. C'est un Etablissement Public à caractère Industriel et Commercial (EPIC) placé sous la tutelle du ministère de ressources en eau. Il se substitue à l’ensemble des établissements et organismes publics, nationaux, régionaux et locaux en charge du service public de l’assainissement, notamment : l'agence nationale de l'eau potable et de l'assainissement, les établissements publics nationaux à compétence régionale de gestion de l'assainissement, les régies et services communaux de gestion des réseaux d'assainissement et ses infrastructures annexes (Benzerra, 2016).

Dans le cadre du plan quinquennal 2010-2014, il est prévu la réalisation de 40 autres STEP dans les wilayas des Hauts-Plateaux et du Grand Sud qui seront d’un appoint

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important, puisqu’elles permettront d’améliorer nettement le taux de traitement qui avoisinera les 70% (ONA, 2015). Si 85 % de la population sont raccordés au réseau d’assainissement, en cette période, seulement 7 % étaient effectivement raccordés au réseau des 18 STEP en exploitation. Les quantités d’eau traitées sont malheureusement rejetées en mer ou ailleurs, faute d’utilisation par le secteur agricole ou autre. De plus, les anciennes STEP ont un rendement insuffisant et posent un certain nombre de problèmes parmi lesquels on peut citer :

- la variété des procédés d’exploitation qui complique la définition de la qualification des opérateurs au demeurant manquant parfois de formation,

- l’obsolescence ou la faible qualité des manuels d’exploitation,

- l’insuffisance des moyens financiers comme des moyens d’intervention.

D’autre part, les réseaux d’assainissement, souvent vétustes et mal connus, sont rarement au niveau de performance requis et les quantifications du rejet des eaux usées sont déterminées par les services locaux sans que les données communiquées puissent être validées.

Actuellement, l'ONA dispose d’un laboratoire central d'analyse à Alger, d’un Centre de Formation aux Métiers de l’Assainissement et d’une cellule de management de l’environnement. Elle prend en charge la gestion de 1141 communes sur les 1541 existantes, soit 74,04 % du réseau national, correspondant à un linéaire de 52 881 km. Le reste du réseau est géré soit par les régies communales en attendant le transfert de ces dernières à l'ONA, soit par les sociétés par actions créées dans le cadre de la gestion déléguée du service public de l'eau et de l'assainissement (ONA, 2019).

I.4.2. Performances actuelles et réalisations clés du secteur

Dans son dernier rapport, le Comité Interministriel, chargé du suivi de la mise en œuvre des Objectifs du Dévelopement Durable (PNUD, 2019), a indiqué que l’Algérie a engagé depuis les deux dernières décennies, un programme de développement de l’assainissement important sur l’ensemble du territoire national, visant l’amélioration du taux d’accès à l’assainissement et la protection des écosystèmes liés à l’eau et de l’environnement. Elle a dans cette optique :

 réalisé, une importante avancée en matière d’infrastructures de bases : en 2019 le parc des stations d’épuration est passé de 45 stations en 2000, à 177 en 2016 pour atteindre 199 stations en exploitation en 2019. Il reste actuellement l’achèvement d’un programme en cour de 66 stations, devant permettre à l’Algérie d’atteindre à l’horizon 2022 une capacité épuratoire de plus de 1 milliards de m3. Ces stations qui ont pour objectifs de prendre en charge les rejets d’eaux usées pour la protection des citoyens contre les risques des maladies à transmission hydrique, permettent également de supprimer graduellement les rejets en mer et la protection des écosystèmes contre toutes formes de pollution.

 nettement amélioré les indicateurs nationaux en matière d’accès à l’assainissement : alors qu’en 1970, seulement 35% de la population totale algérienne, estimée à 14.7 millions d’habitants, étaient raccordés à un réseau public d’assainissement, ce taux a

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20 atteint 91% en 2019, avec un taux d’accès à l’assainissement de 95% en comptabilisant l’assainissement autonome et individuel pour une population totale qui s’élève à 40 millions d’habitants.

 mis en place une stratégie nationale de lutte et de prévention contre les risques d’inondation, ayant identifié près de 700 sites, et se traduit par des actions déjà engagées en matière d’aménagements dans les bassins versants, de mise en place d’un système de prévision et d’alerte, d’un Plan de Prévision des Risques d’inondation, de curage des Oueds dont ceux traversant des agglomérations urbaines, en plus de leur entretien. Le tableau I-1 ci-dessous résume les exploits du pays en matière d’infrastructure d’assainissement urbain.

Tableau I-1 : Indicateurs sur le service d’assainissement en Algérie (PNUD, 2019)

Evolution 1962 1999 2009 2012 2016

Nombre de station 1 45 68 70 177

Capacité des stations (hm3/an) 3 90 665 700 860

Taux de raccordement (%) 20 72 86 87 90

En résumé, les réalisations clés du secteur de l’assainissement sont : - 199 STEP en exploitation.

- 66 STEP en cours de réalisation. - 52 000 km de réseau d’assainissement. - 860 million de m3 de capacité d’épuration.