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2.2 Groupe des déformations admissibles

2.2.1 Construction d’un groupe de déformations admissibles

Nous allons présenter la construction du groupe de difféomorphismes GV. Cette construc-

tion est désormais assez classique et nous n’en donnons qu’une présentation condensée. Citons les trois références que sont [78], [85] et [38] pour lesquelles cette construction est effectuée dans les cas où Ω est une variété Riemannienne compacte, dans le cas où Ω est un ouvert borné de Rd et dans le cas où Ω = Rd.

On s’intéresse ici au cas où Ω est un ouvert borné de Rd. Notre référence principale est

le livre de L.Younes [85]. On note C1

0(Ω, Rd), l’espace vectoriel constitué des champs de

vecteurs continûment différentiables sur Ω et tels que v et sa différentielle Dv s’annulent sur ∂Ω. C’est un espace de Banach quand on le munit de la norme

kvk1,∞ =kvk∞+kDvk∞.

La définition suivante concerne les espaces de champs de vecteurs admissibles. Ces espaces sont à la base de toute la construction du groupe GV.

Définition 2.18. (Espace de Hilbert admissible) Nous dirons qu’un espace de Hilbert (V,h· | ·iV), composé de champs de vecteurs v : Ω → Rd, est admissible, s’il s’injecte

continûment dans l’espace de Banach ÄC1

0(Ω, Rd),k k1,∞ ä

. Si c’est le cas, il existe une constante positive CV telle que :

kvk1,∞6CVkvkV ∀ v ∈ V. (2.2.2)

Fixons un espace de Hilbert admissible V . Pour faire apparaître la variable de temps, on considère l’espace L1

V(Ω) := L1([0, 1], V ). Cet espace contient les classes d’équivalence

de fonctions t → vt de [0, 1] dans V telles que :

kvkL1 V =

ˆ 1

0 kv

tkV dt <∞.

Si le contexte est clair, on écrira simplement L1

V. De la même manière, nous définissons

l’espace de Hilbert L2

V(Ω) dans lequel tout élément v vérifie :

kvk2 L2 V = ˆ 1 0 kv tk2V dt <∞.

L’inégalité de Cauchy-Schwarz implique que L2

V ⊂ L1V et kvkL1

V 6kvkL2V.

Considérons l’équation différentielle dy

dt = v(t, y), t∈ [0, 1], (2.2.3)

avec la condition y(s) = x, pour un certain s ∈ [0, 1]. Supposons que pour tout couple (s, x)∈ [0, 1] × Ω, il existe une unique solution de cette équation. On peut alors définir le

flot φv st, tel que : d dtφ v st(x) = v(t, φvst(x)), t∈ [0, 1], avec la condition φv

ss(x) = x. Considérons la famille d’applications {φvst, t∈ [0, 1]}. L’uni-

cité des solutions implique que pour tout t ∈ [0, 1], φv

st est une application inversible de

Ω dans Ω dont l’inverse est donné par φv

ts. C’est approximativement le procédé que nous

allons utiliser pour construire l’ensemble des déformations, à cela près que nous allons plutôt considérer une version intégrale de l’équation (2.2.3) :

y(t) = x + ˆ t

s

v(u, y(u)) du, t∈ [0, 1]. (2.2.4) Nous allons voir que les hypothèses faites sur les champs v sont suffisantes pour définir une solution de cette équation, et cela pour tout triplet (s, x, v). Pour faire un lien rapide avec la théorie de Cauchy-Lipschitz, remarquons qu’un élément v de L1

V est tel que v(t, ·)

est lipschitzien pour presque tout t ∈ [0, 1]. En outre, si Kt est la constante de lipschitz,

alors le fait que v ∈ L1

V avec V admissible implique que

ˆ 1

0

Kt dt < +∞.

Cette remarque, associée à un argument de type point fixe, permet d’obtenir l’existence et l’unicité de solutions globales pour l’équation intégrale (2.2.4). Ce résultat correspond au théorème suivant, dont une démonstration complète est donnée dans [85].

Théorème 2.19 (Théorème 8.7, [85]). Soit V un espace admissible. Pour tout v ∈ L1V, s ∈ [0, 1] et pour tout x ∈ Ω, il existe une unique application

t ∈ [0, 1] 7−→ φv

st(x)∈ Ω

vérifiant l’équation intégrale

φvst(x) = x +

ˆ t

s

v(u, φvsu(x)) du. (2.2.5)

De plus, pour tout triplet (s, t, v), l’application φv

st est un difféomorphisme de Ω d’inverse

φv

ts. La condition sera le plus souvent fixée au temps s = 0, dans ce cas on utilisera la

notation φv

t := φv0t.

L’analyse de la dépendance entre la solution φv

t(x), la variable t et les paramètres x et

v, est effectuée par l’intermédiaire du lemme de Gronwall (que l’on trouvera sous la forme du Théorème C.8 dans [85]). Nous énonçons ce lemme (l’une de ses versions intégrales) et donnons les résultats de contrôle qui en découlent.

Lemme 2.20. (Gronwall) Soient y et ψ deux fonctions mesurables définies sur [0, 1] et à valeurs dans R+. Supposons que y soit bornée et qu’il existe une fonction positive intégrable

c telle que, pour tout t∈ [0, 1], l’inégalité suivante soit vérifiée : y(t) 6 c(t) +

ˆ t

0

ψ(r)y(r) dr. Alors, pour tout t∈ [0, 1],

y(t) 6 c(t) + ˆ t 0 c(r)ψ(r) exp Lj r 0 ψ(s) ds å dr. Si c est une fonction constante, on a

y(t)≤ c exp ˆ t 0 ψ(r) dr ! .

Lemme 2.21 (Contrôle de la solution). On considère un espace admissible V , deux champs u, v ∈ L1

V, deux points x, y ∈ Rd et deux temps s < t∈ [0, 1].

i) Le contrôle par rapport au temps est donné par l’inégalité |φv

t(x)− φvs(x)| 6

ˆ t

s kv

rk∞dr. (2.2.6)

ii) Le contrôle en espace correspond à

|φvt(x)− φvt(y)| 6 |x − y| exp ˆ t 0 kv rk1,∞dr ! . (2.2.7)

iii) Enfin, pour le contrôle par rapport au champ, on introduit la notation c(t, x) = ˆ t 0 u(r, φur(x))− v(r, φu r(x)) dr . on a alors |φu t(x)− φvt(x)| 6 c(t, x) + ˆ t 0 c(r, x)kvrk1,∞exp Lj r 0 kv sk1,∞ds å dr. (2.2.8) et aussi kφu t − φvtk∞ 6exp ˆ t 0 kv rk1,∞dr !ˆ t 0 ku r− vrk∞dr. (2.2.9)

Preuve. La première inégalité est une conséquence directe de la forme de la solution. Pour le contrôle en espace 2.2.7, on remarque que

|φvt(x)− φvt(y)| ≤ |x − y| + ˆ t 0 |v(r, φ v r(x))− v(r, φvr(y))| dr, ≤ |x − y| + ˆ t 0 kv rk1,∞|φvr(x)− φvr(y)| dr.

On obtient l’inégalité en utilisant le lemme de Gronwall. Pour le contrôle par rapport au champ, on remarque que

|φu

t(x)− φvt(x)| ≤ c(t, x) +

ˆ t

0 kv

rk1,∞|φur(x)− φvr(x)| dr.

La première partie du lemme de Gronwall nous donne donc l’inégalité (2.2.8). Pour obtenir l’inégalité (2.2.9), on commence par remarquer que

c(r, x) ˆ t

0 ku

s− vsk∞ds, ∀ r ∈ [0, t].

En partant de (2.2.8) et en utilisant cette dernière inégalité, on obtient

|φu t(x)− φvt(x)| ≤ 1 + ˆ t 0 kvrk1,∞exp Lj r 0 kvsk1,∞ds å dr ! ˆ t 0 kus− vsk∞ds ! . Pour conclure, on remarque que

1 + ˆ t 0 kv rk1,∞exp Lj r 0 kv sk1,∞ds å dr = exp ˆ t 0 kv sk1,∞ds ! .

Ce lemme de contrôle est un outil essentiel pour la démonstration de résultats plus avancés. Par exemple, c’est le résultat de contrôle en espace 2.2.7 qui permet de montrer que φst(·) est un homéomorphisme lipschitzien avant de montrer qu’il s’agit en fait d’un

difféomorphisme de Ω. L’application différentielle de ce difféomorphisme vérifie d’ailleurs une équation qu’il sera utile de retenir.

Proposition 2.22 (Proposition 8.8, [85]). Pour tout s, t, v et x ∈ Ω, la différentielle de φvts au point x est notée Dxφvst. Si h∈ Rd, l’application t −→ Dxφvsth est l’unique solution

de l’équation intégrale ci-dessous Dxφvsth = h + ˆ t s Dφv su(x)vu◦ Dxφ v suh du.

De plus, le lemme de Gronwall, appliqué à cette équation, nous donne l’inégalité kDφvstk∞≤ exp ˆ t s kDv uk∞du ! .

Il est désormais possible d’introduire l’ensemble GV constitué des déformations admis-

sibles

Définition 2.23. Soit V un espace de Hilbert admissible. On note GV =

φv1, v ∈ L1V (Ω)©,

l’ensemble des difféomorphismes obtenus en intégrant les éléments de L1 V (Ω).

La section suivante est consacrée à la présentation des propriétés importantes de cet ensemble.