• Aucun résultat trouvé

Consommation d’oxygène et exercice physique : Adaptations globales

CHAPITRE 1 : CADRE THEORIQUE

1.1 LA RESPIRATION

1.1.4 Les adaptations cardio-pulmonaires à l’exercice

1.1.4.1 Consommation d’oxygène et exercice physique : Adaptations globales

La consommation d’oxygène (V&O2) caractérise les besoins cellulaires en oxygène et fournit une information globale sur l’efficacité des appareils respiratoire, cardio-vasculaire et musculaire. Elle est calculée à partir du débit sanguin et de l’extraction de l’oxygène sanguin par les tissus selon l’équation de Fick :

2 2 O C O V Q ) v a ( = & &

où Q& représente le débit cardiaque et C(av)O2, la différence artério-veineuse en oxygène. En pratique, la V&O2 est déterminée au cours d’exercices d’intensité croissante, à partir du volume d’air expiré par unité de temps et de la composition en oxygène (O2) et en dioxyde de carbone (CO2) des gaz expirés. Le recueil des échanges gazeux peut se faire soit en circuit fermé (spiromètre de Tissot), soit en circuit ouvert (sac de Douglas, chambres de mélange, cycle à

cycle). Pour que les caractéristiques des exercices (intensité et durée) puissent être fixées, ils sont le plus souvent réalisés sur ergocycle ou tapis roulant, dans un laboratoire et sous surveillance médicale. La V&O2 est exprimée dans les conditions standard de température et de pression (STPD). Par convention, ces conditions correspondent à 0°c et à 760 mmHg, avec un gaz déshydraté sans vapeur d’eau. Ces conditions seront utilisées chaque fois qu’il faudra exprimer une quantité d’O2 consommée ou de CO2 produit, pour rendre compte d’une activité métabolique. La V&O2 peut être exprimée en valeur absolue (ml/min) ou bien être rapportée à la masse corporelle, à défaut de connaître la masse active correspondant aux muscles consommateurs de l’oxygène (ml/min/kg). Cette normalisation autorise les comparaisons entre des sujets lorsque leurs caractéristiques anthropométriques sont différentes.

Consommation maximale d’oxygène

Au cours d’un exercice d’intensité croissante, la consommation d’oxygène augmente proportionnellement à la puissance fournie jusqu’à atteindre, lorsque la chaîne de transport de l’oxygène est saturée, un plateau où elle devient maximale (V&O2max) et n’augmente plus, quelle que soit la puissance imposée (Fig. 13). Au plateau, la V&O2 est variable d’un sujet à un autre et donc chaque individu se caractérise par sa V&O2max et par la puissance nécessaire pour l’atteindre : la puissance maximale aérobie (PMA) qui se définit comme la quantité maximale d’énergie qui peut être produite par unité de temps à partir des processus oxydatifs. En course à pieds, il s’agit plus exactement d’une vitesse maximale aérobie (VMA). À partir de cette PMA ou VMA, l’exercice est ressenti comme pénible et, chez le sujet normal, ne peut être maintenue plus de six à huit minutes. Les exercices de puissance sous maximale peuvent être poursuivis d’autant plus longtemps qu’ils représentent un plus faible pourcentage de cette PMA (Flandrois et Lacour, 1977). L’intensité d’un effort est souvent exprimée en

pourcentage de la PMA ou en pourcentage de la V&O2max. La pente de la relation V&O2 -puissance d’exercice reflète l’efficience de la conversion de l’énergie chimique en travail mécanique au niveau du système musculosquelettique (∆V&O2/ ∆P). Ce rapport varie normalement de 8,5 à 11 ml.min-1.W-1 (Hansen et al., 1988 ; Wasserman et al., 1999), indépendamment du sexe, de l’âge ou de la taille de l’individu mais dépend de la capacité de transport (depuis l’air ambiant jusqu’à l’intérieur des cellules) et de l’utilisation de l’oxygène (capacité d’oxydation tissulaire).

Figure 13 : Evolution de la consommation d’oxygène en fonction de l’intensité d’exercice. La relation est linéaire jusqu’à une valeur limite correspondant à la consommation maximale d’oxygène (V&O2max), la puissance correspondante représente la puissance maximale aérobie (PMA). (D’après Flandrois et Lacour, 1977)

En condition standard de température et de pression, chez le jeune adulte sain, la V&O2 peut augmenter à partir d’une valeur de repos de 0,250 l/min en moyenne vers des valeurs de

2

O

V& jusqu’ à une valeur de 12 fois la valeur de repos, soit 3 l/min. Les valeurs de V&O2maxsont moins élevées chez les femmes mais la différence tend à disparaître lorsque l’on rapporte la

max 2

O

V& à la masse musculaire. La V&O2maxaugmente pendant la croissance, parallèlement à l’augmentation de la masse musculaire, pour atteindre une valeur stable vers 20 ans. Au delà de 30 ans, on assiste à une diminution de la V&O2max(≈10% tous les 10 ans) s’expliquant en

partie par la réduction d’activité qui s’installe avec l’âge. Pour un homme de 60 ans,

max 2

O

V& représente en moyenne 70% de la valeur observée chez le sujet jeune. Pour une tranche d’âge et un sexe donnés, le coefficient de variation de la V&O2maxentre les individus est très élevé. La raison en est que de nombreux facteurs, parmi lesquels l’entraînement physique, jouent un rôle important. En effet, il n’est pas surprenant d’observer chez les sportifs des valeurs de V&O2maximportantes : 4,1 l/min chez des triathlètes (Lepers et al., 1997) ; 4,5 à 5,5 l/min chez les rameurs du pôle France (Messonnier et al., 1998). Ces valeurs peuvent atteindre 6, voire 6,6 l/min pour un athlète de niveau international (Hagerman et al., 1978 ; Steinacker et al., 1993).

Bien qu’elle soit corrélée à l’entraînement physique, la V&O2 est également dépendante de facteurs génétiques s’exprimant sur les systèmes impliqués dans toute la chaîne de transport de l’oxygène. Cela commence par l’appareil respiratoire (CV – VEMS - diffusion de l’oxygène à travers la paroi alvéolo-capillaire) et de la capacité du sang à pouvoir transporter l’oxygène jusqu’aux muscles actifs (quantité d’hémoglobine, saturation du sang en oxygène, dissociation de l’oxyhémoglobine). La V&O2 va également être sous la dépendance de facteurs cardio-vasculaires (volume ventriculaire gauche, diamètre de l’anneau fibreux aortique, fréquence cardiaque, redistribution périphérique du débit sanguin) et tissulaires (capacité de diffusion de l’O2 des capillaires vers la cellule, capacité des cellules à pouvoir utiliser l’O2). Comme il s’agit de processus enchaînés en série, il est vraisemblable que le plus lent d’entre eux limite la disponibilité ou la capacité d’utilisation au niveau des tissus. Aussi, lorsque la

2

O

V& augmente avec la puissance de l’exercice, certain de ces facteurs vont approcher de leurs limites qui détermineront la valeur de V&O2max. Ces facteurs limitants seront étudiés en détail dans les paragraphes suivants.

Notion de dette d’oxygène

Si on considère un exercice d’intensité constante, du fait de l’inertie des systèmes de transport et d’utilisation de l’oxygène (appareils respiratoire et cardiovasculaire, voies métaboliques aérobies), on constate que la consommation d’oxygène n’augmente que progressivement pour atteindre, avec un certain retard, la valeur correspondant à la puissance de l’exercice. Cette phase d’augmentation progressive de la V&O2 (Fig. 14, surface A) correspond à un déficit en oxygène, couramment appelé dette d’oxygène (Hill et al., 1924) où la consommation d’ATP dans le muscle est supérieure à sa reconstitution par les processus aérobies. L’énergie nécessaire va alors provenir de l’utilisation de composés trouvés en plus ou moins grande quantité dans les cellules musculaires : les phosphagènes (ATP et créatine phosphate, PC), de l’oxygène immédiatement disponible dans le sang et le muscle (transporté respectivement par l’hémoglobine et la myoglobine) et le glycogène dégradé par voie anaérobie avec pour conséquence une formation d’acide lactique. À la fin de l’exercice, on observe une décroissance de la V&O2, d’abord rapide puis plus progressive (Fig. 14, surface B). L’excès de consommation d’oxygène par rapport à la consommation de repos correspond au paiement de la dette en oxygène.

Figure 14 : Evolution de la consommation d’oxygène en fonction du temps. Les surfaces A et B représentent respectivement le déficit en oxygène, montrant l’augmentation retardée des échanges gazeux pulmonaires par rapport à l’augmentation des dépenses énergétiques musculaires, et le paiement de la dette d’oxygène. (D’après Flandrois et Lacour, 1977)

Les quantités d’oxygène consommées en excès pendant la phase de récupération sont supérieures au déficit en oxygène calculé pendant l’exercice (Margaria et al., 1933). Selon Flandrois et Lacour (1977), l’excès de consommation d’O2 en phase de récupération peut s’expliquer par différents éléments. La reconstitution de l’ATP et créatine phosphate (PC) et la resaturation de l’hémoglobine et de la myoglobine consomment une quantité d’oxygène égale à celle déficitaire en début de l’exercice. La réoxydation du lactate nécessite une quantité d’énergie double de celle libérée pendant sa formation (Krebs, 1964). Selon McGilvery (1970), le catabolisme (oxydatif) par les muscles d’une mole d’acide lactique implique la consommation de 3 moles d’oxygène et la transformation d’une mole d’acide lactique en glycogène, nécessitant un apport en ATP (néoglucogénèse cycle des Cori), est de 0,5 mole d’oxygène. L’excès de consommation d’oxygène en phase de récupération s’exprime aussi par le maintien d’une valeur élevée de la ventilation pulmonaire (V& ), du e débit cardiaque ( Q&) et de la température centrale (Brooks et al., 1971), plusieurs minutes après la fin de l’exercice. Par ailleurs, il a été montré que cette consommation d’oxygène

variait en fonction de plusieurs facteurs notamment de la durée et de l’intensité d’exercice (Bahr et al., 1987 ; Gore et Withers, 1990 ; Bahr et al., 1992) ou bien encore du niveau d’aptitude du sujet (Short et Sedlock, 1997 ; Gmada et al., 2004).