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4.2 Décalage vers le rouge : signature d’un mécanisme de génération complexe

4.2.3 Considération du mouvement intramoléculaire

Interprétation théorique Comme nous venons de le voir, l’investigation d’une résonance n’a pas été concluante. Même s’il est évident qu’il existe de nombreux niveaux excités, il ne semblerait pas qu’il y ait la présence d’un niveau peuplé très efficacement par absorption multiphotonique à une longueur d’onde proche de 800 nm. Les résultats considérant l’in- troduction d’un «chirp» nous ont amené à la supposition d’un processus de dissociation

moléculaire durant le processus de génération. Pour une valeur précise de la distance inter- nucléaire [7–9], la probabilité d’ionisation serait fortement augmentée et donc ainsi le signal harmonique également. Afin d’étudier le rôle de la dissociation lors de la génération d’har- moniques d’ordres élevés, X. B. Bian [10] a résolu l’équation de Schrödinger dépendante du temps 4.5 dans le cas d’une molécule diatomique H+2. Un champ électrique de longueur d’onde 800 nm, de durée d’impulsion 20 fs et d’intensité 2 × 1014 W.cm−2 est appliqué.

i∂Ψ ∂t =       − 1 2µe 2 ∂z2 − − 1 2µN 2 ∂R2 + 1 R − 1 s (z + R 2) 2+ a − s 1 (z − R 2) 2+ a + κzE(t)       Ψ (4.5)

Figure 4.12 – Évolution temporelle de la distance inter-atomique entre les deux atomes d’hydrogène pendant le processus de génération d’harmoniques à partir de l’ion H+2.

Les calculs menés par le Dr Bian n’ont pas montré une sensible augmentation du si- gnal harmonique, ceci étant peut être du au fait que la modélisation est le cas particulier d’une molécule H+2. En effet, si l’on considère la distance inter-atomique de la molécule en fonction du temps représentée figure 4.12, on observe que la distance maximale est environ

3.5 ua. Or, il est reporté dans [9] que l’effet « enhanced ionization » nécessite des distances inter-atomiques de l’ordre de 10 ua. Cela expliquerai donc que pour le cas particulier de la molécule de H+2 et d’une impulsion de 20 fs, nous n’observons pas d’augmentation du signal harmonique.

Cependant, ce modèle a montré un résultat en accord avec une précédente expérience4.2. En effet, la dissociation de la molécule pendant le processus de génération des harmoniques d’ordres élevés induit clairement un décalage vers le rouge des harmoniques générées. La figure4.13 représente le signal obtenu numériquement à partir de la résolution de l’équation 4.5 avec les paramètres laser décrits plus haut. On observe effectivement un décalage vers le rouge des harmoniques.

Figure 4.13 – Signal harmonique calculé numériquement par la résolution de l’équation de Schrödinger dépendante du temps incluant l’effet de dissociation moléculaire de H+2.

Ce résultat encourageant devra être néanmoins approfondi par, par exemple, la prise en compte d’une masse des atomes de la molécule plus importante. Ce travail est en cours de discussion avec le Dr. Bian au moment de la rédaction de ce mémoire et devrait donc être

publié prochainement.

Proposition d’expérience Dans le but de corroborer ou d’infirmer l’hypothèse ci-dessus, nous voudrions proposer la réalisation d’une expérience permettant d’avoir accès à la dyna- mique temporelle femtoseconde du signal harmonique au cours du train d’impulsion. Pour résumer, le but est de pouvoir résoudre temporellement le spectre généré à différents moments de l’impulsion infrarouge.

Au moment de l’écriture de ce manuscrit, les expériences n’ont pas été réalisées. Cela prend donc la forme d’une proposition d’expérience. Cependant, celle-ci devrait avoir été réalisée au moment de la soutenance. Voici donc la proposition d’expérience que nous sou- haitons faire.

Premièrement, le but principal est de pouvoir résoudre temporellement le signal harmo- nique issu à différents moments de l’impulsion de génération. Étant donné le temps caracté- ristique du phénomène que nous voulons observer, environ 100 femtosecondes, un schéma de type pompe-sonde sera difficile a mettre en œuvre, car la durée des impulsions du système laser est de 40 à 50 femtosecondes. La résolution temporelle sera donc mauvaise. Afin de résoudre ce problème, nous proposons d’utiliser le processus de génération des harmoniques lui-même comme sonde du processus, en effet sa dynamique intrinsèque attoseconde per- met d’avoir une résolution temporelle suffisante. Pour cela, un schéma d’excitation par une impulsion dont le front d’onde est en rotation temporelle au point focal de la lentille de focalisation est proposé.

En effet, ce principe [11–13] est généralement utilisé pour la génération d’impulsions attosecondes isolées dans le cas de la génération d’harmoniques d’ordres élevés par miroir plasma [14,15]. Cependant, Christopher Heyl a montré la possibilité d’utiliser cette technique dans le cas de la génération à partir d’un gaz [16]. Dans notre cas, le but n’est pas de générer une impulsion attoseconde isolée, mais plutôt de réaliser la spectroscopie résolue en temps du processus de génération. Une figure représentant l’image obtenue en champ

lointain lors de la génération grâce à une telle impulsion est représenté figure 4.15. Elle a été obtenue numériquement par le calcul tout d’abord du dipole microscopique sur une tranche de milieu (pas d’effets d’accord de phase) grâce à un modèle de type « Strong Field Approximation ». Puis, le champ électrique en champ lointain est obtenu par le calcul de l’intégrale de diffraction du champ proche. Dans ce calcul, la génération des harmoniques se fait à partir d’une orbitale 1s sans inclusion du mouvement inter-atomique. Une fois la modélisation du dipole microscopique incluant le mouvement des atomes de la molécule réalisé, il pourra être inclus dans le calcul décrit ici.

Figure 4.14 – Figure illustrant le principe de rotation du front d’onde induit grâce à l’in- troduction d’un prisme sur le trajet du faisceau.

Le but de ce schéma de génération (illustré figure 4.14) est d’utiliser le fait que le fais- ceau harmonique est généré perpendiculairement au front d’onde de l’impulsion génératrice. Habituellement, le front est constant par rapport au temps et donc, toutes les impulsions attosecondes générées à chaque demi-cycle ont la même direction de propagation. On com- prend alors qu’en faisant varier temporellement la direction du front d’onde dans la zone de génération, nous pourrons séparer spatialement les différentes impulsions attosecondes. En résumé, chaque impulsion attoseconde aura un vecteur d’onde dont la direction dépendra du moment de la génération. Nous avons ici un moyen de résoudre temporellement le processus de génération au cours de l’impulsion femtoseconde.

Figure 4.15 – Champ lointain obtenu dans le cas de la génération d’harmoniques d’ordres élevés avec une impulsion à front d’onde rotationnel. Les autres paramètres de l’impulsion sont une longueur d’onde centrale de 800 nm, une durée de 50 fs, une intensité de 3 · 1014

pulsion de durée croissante. L’augmentation de la durée d’impulsion se faisant en introduisant un «chirp» dans le compresseur en sortie du boitier laser par exemple. Les spectrogrammes obtenus, avec en abscisse la longueur d’onde et en ordonnée le temps, permettront poten- tiellement d’identifier une augmentation du signal harmonique pour une durée spécifique de l’impulsion. De plus, comme nous l’avions dit plus tôt, la dissociation moléculaire induit un décalage vers le rouge des harmoniques [17]. Nous pourrions ainsi remonter à la dynamique d’explosion des molécules carbonées à l’intérieur du plasma en accédant à la phase spectrale à l’échelle femtoseconde.

Ensuite, étant donné le fait que l’augmentation du signal avait été observée dans le cas d’une double impulsion. Nous proposons également de se placer de nouveau dans le cas d’une double impulsion. Il est assez fastidieux et peu stable de travailler dans la configuration d’un interféromètre de type Michelson. Cette solution reste cependant envisageable, mais l’ajout de très petits délais tels que 100 femtosecondes requiert des translations précises et stables. Il semble plus simple de doubler le faisceau et d’exploiter la différence de vitesse de groupe dans un milieu dispersif tel que le verre. Ensuite, un montage équivalent à celui mentionné plus haut permettrait d’imposer une orientation des vecteurs d’ondes des deux impulsions différentes.