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Le Conseil de développement : un espace politique délimité mais limité

B…pour quelles orientations stratégiques ?

Partie 3. le Conseil de développement et la démarche du « Grand rendez-vous » : Quelles évolutions pour la

B. Le Conseil de développement : un espace politique délimité mais limité

« Intégrés dans un réseau complexe d’arènes politiques structurées aux niveaux local, régional et national, [les Conseils de développement] tendent à offrir un lieu de discussion à prendre en compte, même s’il n’obéit pas véritablement au modèle délibératif souvent invoqué. » 93

Ainsi, Le Conseil de développement de la Métropole de Lyon, et l’ensemble des conseils de développement de manière plus générale seraient donc à considérer dans leur intrication dans des «arènes multiples». Se trouvant à l’échelle intercommunal, nous pouvons également pensé qu’ils peuvent être traversés par une certaine euphémisation du discours politique.

Nous l’avons d’ores et déjà souligné, les Conseils de développement peuvent apparaître comme des instruments de compensation d’un certain déficit de représentation ou encore comme des palliatifs innovants qui ont fait leur apparition sur la scène politique locale et sur le terrain des politiques publiques. Ce constat est d’autant plus prégnant à l’échelle de Lyon, puisque comme nous l’avons vu, la

Lefebvre R., Revel M., « La difficile mise en démocratie des communautés urbaines.

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Approche comparée de l'institutionnalisation des Conseils de développement des agglomérations de Lille et Nancy », AFSP, ST n°12, La démocratie locale en débats, Grenoble, 2009, 22 p.

participation citoyenne n’est que très peu portée politiquement et que le Conseil de développement constitue pour le pouvoir politique en place la seule et unique scène de débat public local.

C’est donc sous l’angle politique que nous souhaitons à présent aborder les Conseils de développement et plus précisément celui de la Métropole de Lyon. De par leur fonctionnement ; les Conseils de développement étant saisis par les élus de la Métropole pour émettre un avis sur un certains nombres de sujets, on peut donc dire qu’il s’agit de commande politique, et de par la diffusion et la publicité de ses travaux, nous pouvons donc affirmer dans un premier temps que le Conseil de développement « produit du politique ».

Cette affirmation est cependant à nuancer au vu des rapports encore relativement peu étroits qu’il entretien avec les élus métropolitains et par conséquent de sa faible capacité à peser sur les choix politiques, même si nous avons pu constater que le Conseil de développement du Grand Lyon s’est organisé dans le sens d’une amélioration de sa prise en considération dans le processus de décision.

un espace politique délimité et garanti par la commande politique

Une première manière d'aborder le Conseil de développement sous l'angle de sa fonction politique consiste à décrire rapidement les conditions dans lesquelles le politique a formulé une commande et de voir comment celle-ci est reçue et interprétée par les membres du Conseil.

De ce point de vue, quand il y a une commande politique, c’est que le Président de la Métropole et les élus « souhaitent délibérément que le Conseil de développement émette un avis sur un sujet précis » . 94

Même si le terme commande peut par ailleurs paraître un peu ferme, les membres du Conseil ne la perçoivent en aucun cas comme un rapport de fermeté de type commanditaire-prestataire. Au contraire la commande revêt d’une certaine souplesse et s’appuie surtout, grâce au travail opéré par le Conseil au fil des ans, sur une certaine convergence de vue et « l’assurance d’un référentiel partagé de normes et

Entretien avec Emanuelle Gueugneau, Responsable du Conseil de développement 2009 -

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de valeurs » . L’autre signe de souplesse réside dans la liberté d’interprétation de 95

cette commande, « même si après effectivement, c’est le président dans son interprétation qui insiste beaucoup sur le côté du travail opérationnel qui devait être fait » et la garantie d’une liberté d’exécution.

Il convient cependant d’approfondir légèrement cette liberté d’exécution car celle-ci nous amène à traiter du coeur de la dimension politique du Conseil. En effet, dans son activité traditionnelle, les anciens présidents en accord avec les membres ont mis un point d’’honneur à « ce qu’il n’y ait aucune ingérence des élus dans leur travail » . Mais cette mise à l’écart des élus ne doit pas nécessairement s’interpréter 96

comme une volonté de ne pas faire de politique au sein du Conseil. Il s’agit seulement de créer « un climat de confiance avec une liberté de parole et de ton » 97

Certes, cette éviction pose tout de même le double problème de « l’absence de contrôle politique » et par conséquent de la difficulté des politiques à parfois s’emparer des projets auxquels ils n’ont pas été associés. Cette mise à l’écart peu dans un premier temps expliquer la capacité limitée du Conseil à infléchir sur les choix publics.

Il s’est donc mis en place une sorte d’alliance entre les élus et l’institution, détenteur de la légitimité politique par la commande, et le Conseil et sa présidence qui se porte donc garant d’un espace de travail où pourront s’exprimé la diversité des expressions et d’acteurs représentés par les membres.

Cette garantie est donc le fruit de longues négociation de cet espace politique délimité par une commande souple voir d’une « auto-commande » mais également par les compétences de la présidence en matière de réseau et de ressource.

Entretien avec Emanuelle Gueugneau, Responsable du Conseil de développement 2009 -

95 Novembre 2015 Ibid. 96 Ibid. 97

Le Conseil de développement revêt également de la dimension politique par la publicité de ses travaux, mais avons déjà constaté précédemment, qu’en raison d’un manque de moyen et d’une certaine frilosité des membres aux nouvelles méthodes de communication, que les productions du Conseil de développement dépassent rarement les frontières de l’institution. On reste donc dans un entre-soi qui privilégie les relations internes au Conseil et avec les élus qu’avec le reste du territoire.

Pour les deux raisons rapidement évoquées, la publicité des travaux du Conseil ,même si celle-ci reste faible, et sa liberté à exécuter une commande donnée par le politique, nous pouvons considérer que le Conseil de développement est un réel espace politique. Cependant les liens sont encore faibles avec les élus et le manque de moyens dont il dispose entament sa capacité à peser concrètement sur la décision publique.

… qui peinent tout de même encore à peser sur la décision politique :

Le pilotage du Conseil de développement par le biais d’organisation de temps de rencontre avec les différents élus et Vice-Présidents de la Métropole, et plus globalement de l’institution du Grand Lyon qui prévoit des temps de partage d’informations sur les projets du Conseil, notamment lors de passages à la commission permanente . 98

Malgré cela « les membres évoquent un manque de retour de la part des élus sur le travail du Conseil » , notamment sur les propositions formulées dans les 99

contributions. Il y a en effet très peu de matériaux disponibles (note, rapport…) permettant qualifier ce que pense les élus et l’institution de ces propositions. Malgré des retours réguliers encourageant, évoquant la qualité du travail des membres,

La Commission permanente est constituée en plus du président et des vices-président de

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23 conseillés membres spécialisés dans plusieurs thématiques comme le logement social, l’éducation ou encore la politique de la ville. Le Conseil peut donc demander un passage en commission permanent afin de partager l’avancé de son travail et ses préoccupations. Il est à noter que ces temps sont très rares, les ordres du jour de cette commission étant très chargés.

Entretien avec Emanuelle Gueugneau, Responsable du Conseil de développement 2009 -

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nous ne sommes pas en mesure de pouvoir analyser les discours observés sur le travail fournis.

Ce manque de liens avec les élus ressenti par les membres est par ailleurs renforcé par une méconnaissance des rouages de l’institution du Grand Lyon. Par conséquent les liens entre Conseil et institution se concentrent uniquement sur les personnes du Président et du Vice-Président du Conseil. Comme nous l’avons précédemment mentionné, le fait que le personnel politique ait été « mis à distance » des travaux du Conseil, renforce la difficulté à transcrire les propositions formulées en politique publique.

Pour terminer, il est également important de mentionner la faiblesse des moyens octroyés au Conseil de développement qui ne lui permet pas de grandes marges de manoeuvre dans la conduite de ses projets, notamment dans le potentiel d’interaction avec les acteurs du territoire ou bien à l’échelle nationale dans les interactions possibles avec d’autres Conseils de développement par exemple.

Nous avons souhaité abordé ici le Conseil de développement dans sa dimension politique. De part la commande politique claire formulée par l’institution, tout en laissant une marge d’interprétation et d’exécution et dans une moindre mesure la publicité de ses débats et et de ses production, donnent indéniablement au Conseil une certaine fonction politique. D’autre part, si nous avons pu voir que la dimension politique était bien délimitée, elle est aussi limitée par un manque de moyens et par des liens, du fait de la volonté de délimiter un espace de travail autonome, encore trop faibles avec l’institution reposant uniquement sur l’exécutif du Conseil, entrainant ainsi des difficultés à transcrire les propositions du Conseil en politiques publiques.

Nous allons à présent aborder la question de la représentation du Conseil de développement. En effet, il est important de se demander quels voix représente cette instance dans son fonctionnement traditionnel avant de nous penchez dans un dernier temps sur le nouveau rôle de croisement et de mise en valeur des initatives du territoire que s’est donné l’instance qui met en lumière une volonté d’ouverture et de porter une parole qui ne vient plus seulement des membres qui composent l’instance mais de l’ensemble des acteurs du territoire. 


C. Le Conseil de développement : un second complexe, celui de la