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Les conséquences de l’adoption de la preuve écrite : l’éviction du serment et de l’aveu

Dans le document La preuve en droit fiscal (Page 185-188)

PREMIERE PARTIE : RECHERCHE DU PARTICULARISME DE LA PREUVE EN DROIT FISCAL

Paragraphe 2 : La promptitude des parties à l’administration de la preuve en droit fiscal

B- Les conséquences de l’adoption de la preuve écrite : l’éviction du serment et de l’aveu

L’aveu est la déclaration par laquelle une personne reconnaît comme vrai un fait juridique (art 341 du CC), sa qualification de preuve dépend de son aspect volontaire et spontané488. Celui qui élabore un aveu doit avoir l’intention de reconnaître : « comme légalement avéré le fait auquel s’applique son aveu »489.

Sa force probante est reconnue à l’article 342 du CC et l’article 341 du CP. De ce fait, il est un moyen de preuve civile et pénale. En droit fiscal, le serment est un procédé exclu, bien qu’en droit commun l’aveu de la dette peut entraîner la reconnaissance de celle-ci, et par conséquent son exigibilité.

Le droit fiscal peut parfaitement s’inspirer de ce principe, d’autant que l’impôt est une obligation honorable selon Gaston JEZE490.

En réalité cette option est à exclure au vu de l’objectivité du droit fiscal. Celui-ci s’appuie sur des arguments matériels loin de toute subjectivité et l’aveu est en tout point une preuve qui émane d’un individu, et son admission en tant que moyen de preuve semble difficilement applicable surtout pour les personnes morales, car ceci impliquerait la responsabilité du gestionnaire et cela est d’autant plus difficile quand il s’agit d’une société par action qui est caractérisée par la complexité de son mode de direction.

En droit commun, l’une des conditions de l’acceptation de l’aveu comme moyen de preuve, est sa production sans aucune contrainte. Mais l’impôt est par définition un prélèvement contraignant,

488/ « Pour se prévaloir de l’aveu, il faut trois conditions : 1° précis, c’est-à-dire qu’il caractérise nettement la dissimulation ou l’insuffisance sur la nature desquelles aucun doute ne puisse substituer ; 2° formel, c’est-à-dire qu’il implique d’une manière certaine la reconnaissance expresse de la nature de la fraude ou l’inexactitude d’une attestation ; 3° et fait en connaissance de cause, c’est-à-dire que l’auteur de l’aveu se rende compte de toutes les conséquences juridiques pouvant en découler ». E. JAY, Les moyens de preuve et de recherche qui appartiennent à l’Administration de l’enregistrement pour l’exercice de son droit de contrôle, Thèse Université Paris, 1927, p. 120. 489/J. BERLAND, Essai d’une théorie générale des présomptions (envisagées comme moyen de preuve pour l’Administration de l’enregistrement), Thèse DIJON, 1901, p. 10.

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l’avouer serait contraire à l’idée qu’on se fasse du prélèvement, les prérogatives de l’Administration fiscale et la rigueur de la procédure d’imposition ne laissant aucune place à la spontanéité des contribuables.

Le silence d’un contribuable ne peut en aucun cas être assimilé à un aveu, en ce sens, une jurisprudence française dit : « Spécialement l’aveu n’est pas caractérisé par le silence que le vendeur a gardé, en dehors de toute injonction, dans un procès en justice de paix avec un agent d’affaires, en ne réfutant pas les déclarations de son adversaire prétendant qu’une vente de la même propriété dont il avait été chargé avait été conclue moyennant le prix de 28000 francs, que le prix de la vente litigieuse était plus élevé et, ainsi, supérieur à celui de 20000 francs porté dans l’acte »491.

Le serment est quant à lui un acte par lequel celui qui jure, prend Dieu à témoin de la vérité d’un fait (art 343-350 du CC) 492, il est aussi « un acte tout à la fois civil et religieux, par lequel celui qui jure prend Dieu à témoin de la vérité d’un fait ou de la sincérité d’une promesse et l’invoque comme vengeur du parjure »493.

Admis en droit civil comme moyen de preuve légale, sa force probante a relativement décliné ; en effet, il consiste plus à conforter la justesse de l’accusation qu’à établir la réalité des faits.

En droit fiscal, il reste rarement utilisé car on ne saurait trop le dire, le contentieux fiscal repose sur une notion objective de preuve, et toute subjectivité est à écarter ; seuls les documents comptables ou tout autre justificatif comptent pour la détermination de l’impôt. Cet argument ne saura à lui seul exclure complètement l’usage du serment dans le contentieux fiscal, deux articles peuvent aller à l’encontre de ce principe :

1 - L’article 57 du CE, dans lequel l’héritier prête serment lors de l’inventaire établi pour la perception des droits de mutation par décès.

2 - En l’absence d’un texte fiscal, interdisant l’usage du serment comme moyen de preuve, l’article 38 ter D peut être interprété comme une incitation à l’utilisation de ce

dernier : «L'inexactitude des déclarations ou attestations de dettes peut être établie par tous les modes de preuve admis en matière d'enregistrement ». Plusieurs articles viennent consolider cette

491/ Revue de l’enregistrement n° 8152 de 1925,: E. JAY, op. cit, p. 122. 492/Voir aussi l’article 240 du CP.

493/AUBRY et RAU, Cours de droit civil français ,VIII, Imprimerie et librairie générale de jurisprudence, Paris, 1897-1922 , § 752.

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hypothèse : c’est notamment le cas de l’article 38 quater G du CPF, 113 §2 et 353-12 du CE494. De là, on constate une réelle brèche juridique qui consent à l’emploi modéré du serment comme moyen de preuve (ou même l’aveu)495.

En conclusion, on retiendra que le législateur fiscal a favorisé l’usage de l’écrit. Le droit fiscal se doit d’être prévoyant, une caractéristique abordée par M. BERTHE qui commente ce concept et écrit : « L’époque du paiement, le mode de paiement, la somme à payer doivent être déterminés avec soin et d’une manière intelligible pour le contribuable et pour tout le monde. Lorsqu’il en est autrement, toute personne sujette à l’impôt se trouve plus ou moins soumise au pouvoir du collecteur qui peut aggraver la charge du contribuable pour lequel il est mal disposé ou extorquer par la crainte de cette aggravation »496.

Section 2 : Par les tiers : L’ Amirecurrie

La preuve nécessite la justification des prétentions et le rétablissement de la vérité, ainsi la qualification d’un acte ou d’un fait consiste à le rattacher à une catégorie juridique. Ceci favorise l’optimisation de l’exactitude des allégations des parties.

La différence principale entre preuve scientifique et judiciaire reste la volonté d’emporter la conviction du juge497. Ce dernier joue un rôle non négligeable dans le procès inquisitoire puisque son intervention est requise pour la recherche de la preuve.

Cette action s’appuie essentiellement sur une liberté reconnue qui lui permet d’user de tous les moyens afin d’arriver ou du moins se rapprocher le plus possible de la vérité. Pour ce faire, le

494/ L’article 112 du TCA qui dit : « Les infractions aux dispositions relatives à la taxe sur la valeur ajoutée peuvent être établies par tous les modes de preuve de droit commun ou constatées au moyen de procès-verbaux », voir également l’article 149 du TCA.

495/ Relevons ici que le législateur fiscal tunisien exclut explicitement l’usage du serment comme mode de preuve en contentieux fiscal. A cet effet, l’article 64 du code des droits et procédures fiscaux dit : « les moyens de preuve prévus par les numéros 3 et 5 de l’article 427 du code des obligations et des contrats ne peuvent être admis par le tribunal pour prouver les allégations des parties relatives à l’affaire».

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496/La grande Encyclopédie, volume 20,V° Impôt, p.606. 497/J-L. BERGEL, Théorie générale du droit, op. cit, p. 313.

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recours à des tiers est plus que nécessaire, ils permettent une collecte massive des éléments de la preuve. L’Administration de cette dernière se voit donc enrichie par la participation volontaire ou non des tiers.

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