• Aucun résultat trouvé

Chapitre II – Les antigènes érythrocytaires du chat

8. Importance clinique des antigènes érythrocytaires et de leurs allo-anticorps

8.2. Réactions transfusionnelles hémolytiques

8.2.4. Conséquences des antigènes érythrocytaires indépendants du système AB

Plusieurs études se sont intéressées aux potentielles conséquences cliniques des antigènes érythrocytaires indépendants du système AB et de leurs allo-anticorps naturels ou acquis.

L’allo-immunisation correspond au développement d’anticorps suite à une première exposition à un antigène érythrocytaire étranger à l’individu. Comme expliqué dans le paragraphe précédent, suite à une allo-immunisation, un individu est à risque de développer une réaction transfusionnelle lors de tout contact ultérieur avec le même antigène. Une allo-immunisation contre des antigènes érythrocytaires extérieurs au système AB a été observée chez 25 % des chats (sur une population de 20 chats) environ 5 jours après une première transfusion.48 Dans une deuxième étude, 27 % des 55 chats précédemment

transfusés présentaient des incompatibilités en dehors du système AB, sans qu’il soit déterminé s’ils présentaient des incompatibilités avant leur première transfusion. De plus, environ 16 % des chats développaient des incompatibilités après leur première transfusion, alors qu’ils étaient initialement compatibles avec tous les donneurs testés.19

Concernant l’efficacité de la transfusion, les données trouvées dans la littérature sont contradictoires. Une étude rétrospective a montré une plus grande augmentation de l’hématocrite par volume de pRBC transfusé chez les chats pour lesquels la compatibilité donneur-receveur avait été vérifiée (n = 43, 1.02 ± 0.51 %/mL/kg), comparativement aux chats transfusés sans test de compatibilité (n = 190, 0.74 ± 0.65 %/mL/kg).101 Une autre étude présentait des résultats similaires, mais avec un nombre de transfusions

avec cross-match préalable trop faible pour atteindre une puissance statistique (103 transfusions avec cross-match sur 450 événements transfusionnels).17 Au contraire, une étude prospective évaluant les

changements dans l’hématocrite par volume de pRBC transfusé à trois temps différents (1 heure, 12 heures et 24 heures post transfusion) n’a pas détecté de différence significative entre des chats transfusés avec cross-matchs (n= 24), et des chats transfusés sans cross-match (n = 24).18 Une étude rétrospective

d’association entre l’administration de pRBC cross-matchés et l’augmentation de l’hématocrite dans les 24 heures suivant la transfusion.19

Concernant les risques de réactions transfusionnelles, les études s’accordent presque toutes à conclure qu’une transfusion de sang typé dans le système AB et cross-matché n’est pas associée statistiquement à un risque moins important de réactions hémolytiques transfusionnelles aiguës cliniquement détectables, qu’une transfusion de sang uniquement typé.17-19 Une seule étude a rapporté un nombre de réactions

transfusionnelles fébriles plus élevé chez les chats transfusés sans cross-match préalable. Cette différence est difficile à expliquer car les réactions fébriles sont normalement associées aux globules blancs et à l’accumulation de cytokines durant le stockage et non à des interactions anticorps-antigène érythrocytaire.19 Ces études ne se sont pas intéressées au suivi plus de 24 heures après la transfusion et à

l’existence de possibles réactions hémolytiques retardées.

Concernant la survie, peu de données sont disponibles et les résultats sont conflictuels. Ainsi, aucune différence dans la survie à 30 jours et 60 jours post-transfusion n’a été rapportée entre des chats avec cross-matchs compatibles et des chats sans cross-matchs.19 Au contraire, une augmentation du risque de

mortalité a été rapportée chez les chats naïfs de transfusion et non cross-matchés (odds ratio de 3.57, intervalle de confiance [0.81-16.13]) dans une deuxième étude rétrospective.17

Les différentes études présentées ci-dessus avaient pour objectif principal d’évaluer la nécessité de réaliser un cross-match pré-transfusion et de décrire la fréquence des incompatibilités en dehors du système AB. Elles ont donc de nombreuses limites concernant l’impact clinique des antigènes érythrocytaires extérieurs au système AB. D’une part, la majorité des études est de nature rétrospective et associée avec des conditions sous-jacente différentes (anémie hémolytique, dialyse, etc.) qui peuvent influencer le succès de la transfusion et la survie. Elles sont également associées à un manque de standardisation dans la surveillance des receveurs qui peut influencer la détection des réactions transfusionnelles. D’autre part, la limite la plus importante est la comparaison de chats transfusés avec des cross-matchs compatibles à des chats transfusés sans cross-match. Il n’est ainsi pas possible de conclure que les antigènes érythrocytaires et leurs anticorps n’ont pas d’importance clinique car les chats avec des tests compatibles sont comparés à des chats dont le statut de compatibilité est inconnu. Considérant que la prévalence d’incompatibilité est faible à modérée (de 0 à 29 %) et que les chats sont majoritairement incompatibles contre un seul donneur dans ces différentes études, il est tout à fait envisageable que la majorité des chats dans les groupes sans cross-match ne présentaient pas

AB serait de comparer des transfusions de sang avec cross-match compatible à des transfusions de sang avec cross-match incompatible.

Une étude prospective a comparé les événements transfusionnels entre des chats avec cross-match compatible et des chats avec cross-match incompatible. Dans cette étude, des chats naïfs de transfusion étaient transfusés sans connaissance des résultats des cross-matchs réalisés sur tube au laboratoire et sur tube de gel au chevet du patient (RapidVet-H, DMS). Il n’y avait pas de différence dans l’augmentation de l’hématocrite par volume de sang transfusé à 12 heures post-transfusion en fonction des résultats du cross-match. La détection des incompatibilités par le kit commercial, mais non par la méthode de laboratoire, semblait associée au développement de réactions hémolytiques transfusionnelles.208 Une

autre étude a rapporté l’administration d’unités de pRBC incompatibles avec le cross-match majeur (incompatibilité 1+ par la méthode de laboratoire en tube) chez cinq chats sans observation de réactions hémolytiques aiguës.19

Considérant les données contradictoires sur l’importance clinique des anticorps naturels ou acquis associés aux antigènes érythrocytaires extérieurs au système AB, les limites évoquées précédemment concernant les résultats des différentes études disponibles dans la littérature, et la description de réactions hémolytiques aiguës potentiellement mortelles associées à l’antigène Mik, un test de compatibilité est actuellement recommandé, par précaution, chez le chat avant toute transfusion.

Cette revue de littérature s’est concentrée sur deux aspects différents de la médecine transfusionnelle chez le chat. Le premier chapitre s’est intéressé aux étapes de la collecte et du stockage des produits sanguins félins. Il introduit ainsi notre première étude prospective, menée au CHUV de l’Université de Montréal entre 2017 et 2018, comparant un système de collecte fermé fabriqué spécifiquement pour les chats à un système de collecte ouvert classique composé de seringues. Le deuxième chapitre s’est quant à lui concentré sur les antigènes érythrocytaires et leurs allo-anticorps, et introduit notre deuxième étude prospective, menée entre 2017 et 2019, décrivant la découverte de cinq nouveaux antigènes érythrocytaires chez le chat.

Chapitre III – Comparison of a closed system and an open